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L‘échelle des temps géologiques est un système de classement chronologique utilisé en géologie, paléontologie et climatologie. La datation des événements géologiques est essentielle pour comprendre l’histoire de la Terre, une histoire qui s’étend sur des milliards d’années. Comment les géologues déterminent-ils l’âge des roches et des fossiles ? Quelles méthodes de datation utilisent-ils pour établir une chronologie précise des événements géologiques ? Quelles sont les avantages et les limites des deux principales méthodes de datation : la datation relative et la datation absolue ? Grâce à ces différentes méthodes de datation, les scientifiques ont pu construire l’échelle des temps géologiques, divisée en éons, ères et périodes en fonction des bouleversements géologiques, climatiques ou des crises écologiques. En examinant des principes tels que la superposition des strates géologiques, la continuité sédimentaire, et la radiochronologie basée sur les isotopes radioactifs, cet article met en lumière les techniques utilisées pour déchiffrer l’histoire complexe de notre planète. Les défis et les limites de ces méthodes seront également discutés, ainsi que le rôle de la Commission internationale de la stratigraphie dans la nomenclature des divisions géologiques.
Le temps, une question d’échelle
Nous avons pour habitude de mesurer le temps en heures, en mois, en années. Cependant, cette échelle est bien trop petite pour rendre compte de l’histoire de la Terre qui a commencé il y a 4,5 milliards d’années (Ga). Ainsi, en 1913, le géologue britannique Arthur Holmes publie le premier calendrier de notre planète : l’échelle des temps géologiques.
Malheureusement, en géologie on ne peut pas se servir d’un simple calendrier pour dater une période. L’analyse des fossiles et des roches sont au cœur de cette datation. Les paysages qui nous entourent sont les témoins et les garants de l’évolution de la Terre. Il est possible d’attribuer certaines couches de roches à des époques précises qui témoignent de l’évolution de notre planète. En effet, les géologues sont capables d’attribuer certaines couches de roches à des époques précises où régnaient des conditions environnementales différentes. Pour cela, les scientifiques utilisent deux grands types de datation : la datation relative et la datation absolue.
La datation relative
La datation relative est une méthode permettant de déterminer l’ordre chronologique d’événements géologiques ou biologiques les uns par rapport aux autres. Cette méthode est basée sur un ensemble de principes physiques dont les quatre principaux sont : le principe de superposition, le principe de continuité, le principe de recoupement et le principe d’identité paléontologique.
Principe de superposition et de continuité
Le principe de superposition indique que la strate la plus profonde est la plus ancienne tandis que la strate supérieure est la plus récente. Ce principe repose sur l’idée que les couches sédimentaires se déposent horizontalement au fil du temps. Au fur et à mesure que les sédiments s’accumulent, les couches inférieures sont de plus en plus anciennes.
Les conditions de sédimentation sont généralement uniformes sur une large zone géographique. Ainsi, une couche sédimentaire donnée a le même âge sur toute son étendue : c’est le principedecontinuité.
Schématisation du principe de superposition et de continuité. Inspiré de Marshak, S. (2010) Terre, portrait d’une planète. Crédit photo : Elise Heinen
Principe de recoupement et inclusion
Un sitegéologique n’est pas forcément un empilement parfait de différentes strates de roches. Il arrive régulièrement que des événements géologiques, tels que les intrusionsmagmatiques, les failles, les plissements et l’érosion, modifient le paysage. Ainsi, tout événement géologique qui en recoupe un autre est plus jeune : c’est le principe de recoupement. De même, tout événement géologique qui en inclut un autre est plus jeune : c’est le principe d’inclusion.
Schématisation du principe de recoupement et d’inclusion. Ici, les couches A, B, C et D se sont déposées au fil du temps puis la faille les a recoupées. La couche E s’est ensuite déposée incluant des roches plus anciennes (inclusions). Inspiré de Marshak, S. (2010) Terre, portrait d’une planète. Crédit schéma : Elise Heinen
Principe d’identité paléontologique
Enfin, le principe d’identité paléontologique se base sur l’idée que les fossiles sont des indicateurs fiables. Ce principe suggère que deux couches sédimentaires éloignées mais contenant les mêmes fossiles sont considérées comme ayant le même âge. En effet, des couches sédimentaires contenant les mêmes fossiles ont probablement été déposées pendant la même période géologique mais se retrouvent aujourd’hui à des emplacements différents.
Schématisation du principe d’identité paléontologique. Inspiré de Marshak, S. (2010) Terre, portrait d’une planète. Crédit schéma : Elise Heinen
Limites de la datation relative
La datation relative est un outil indispensable pour comprendre l’histoire de notre planète et de la vie qu’elle a hébergée au fil du temps. Cependant, les principes qui la régissent peuvent être parfois difficiles à appliquer sur le terrain, notamment dans des régions où les couches sédimentaires ont été fortement déformées ou érodées. De plus, la datation relative ne permet pas de déterminer précisément l’âge d’un événement en années. Pour ce faire, il est nécessaire d’utiliser des méthodes de datation absolue.
L’échelle des temps géologiques est essentielle pour comprendre l’évolution de la Terre, en fournissant une base pour dater les événements passés et anticiper les changements futurs.
La datation absolue
La méthode la plus répandue de datation absolue est la radiochronologie (ou datation radiométrique). Cette méthode repose sur la mesure du taux de désintégration de certains éléments chimiques présents dans l’échantillon.
Principe de la datation radiométrique
Tous les éléments chimiques ne sont pas stables dans le temps. Certains isotopes (comprenez différentes versions d’un même élément chimique n’ayant pas le même nombre de neutrons) sont radioactifs. Cela signifie qu’ils se désintègrent spontanément en un autre élément au fil du temps.
Le taux de désintégration radioactive est constant pour chaque isotope radioactif. Cela signifie qu’une quantité donnée d’un isotope radioactif se désintègre toujours à un rythme constant, peu importe les conditions environnantes.
La durée de vie d’un isotope radioactif est imprévisible, mais les physiciens peuvent déterminer le temps nécessaire pour que la moitié d’un échantillon d’isotopes radioactifs se désintègre, ce qu’on appelle la demi-vie. Pour dater un échantillon, les scientifiques mesurent le rapport entre l’isotoperadioactif dit père (élément à l’origine) et son produit de désintégration, l’isotope dit fils. En comparant ce rapport à la demi-vie de l’isotope radioactif, ils peuvent calculer l’âge de l’échantillon.
Schéma représentant le concept de demi-vie. La courbe orange représente l’évolution du nombre d’isotopes pères dans le milieu et la courbe marron celle des isotopes fils. Les ratios des isotopes sont représentés par les diagrammes en secteurs. Au fil du temps, le nombre d’isotopes radioactifs père diminue tandis que le nombre d’isotopes radioactifs fils augmente. Inspiré de Marshak, S. (2010) Terre, portrait d’une planète. crédit schéma : Elise Heinen
Utilisation de la datation radiométrique
Il existe plusieurs méthodes de datation radiométrique basées sur différents isotopes radioactifs. Chacune permet de dater avec précision certains éléments. Les méthodes les plus connues restent celles présentées dans le tableau ci-dessous.
Tableau regroupant différents couples d’éléments, leur demi-vie ainsi que leur domaine d’utilisation. D’après Boesch, Q., (2023) Paléontologie, Reconstituer le scénario de l’évolution du vivant. *Ces isotopes font partie de la chaîne de désintégration de l’Uranium-238. Cela signifie que le Thorium-230 est produit par désintégration radioactive et que l’isotope fils Radium-226 est lui-même radioactif. Crédit schéma : Elise Heinen
A titre d’exemple, en mesurant le ratio entre le rubidium 87 et le strontium 87 dans une roche, les géologues peuvent estimer le temps écoulé depuis sa formation. Le rubidium 87 se désintègre en strontium 87 avec une période de demi-vie de 48,8 milliards d’années.
Construction de l’échelle des temps géologiques
A l’aide de ces deux méthodes de datation, les scientifiques ont pu construire une échelle des temps géologiques en étudiant et en corrélant une succession de strates aux caractéristiques communes dans le monde entier. Il est à noter que les différentes dates qui définissent les temps géologiques peuvent évoluer en fonction des nouvelles découvertes scientifiques.
Cette échelle est découpée en plusieurs niveaux : différentes périodes sont regroupées en ères, elles-mêmes regroupées en éons. Ce découpage se base sur les grands bouleversements environnementaux que la planète a connus.
Généralement, les bornes de ces différents niveaux sont attribuées à des crises géologiques (ex : formation de continents), climatiques (ex : période glaciaire) ou écologiques avec des explosions de la biodiversité ou au contraire des extinctions de masse. C’est le cas notamment de la fin de la période Crétacée marquée par l’extinction des dinosaures.
Échelle simplifiée des temps géologiques. Ga : milliards d’années. Ma : millions d’années. D’après Boesch, Q., (2023) Paléontologie, Reconstituer le scénario de l’évolution du vivant. Crédit schéma : Elise Heinen
Enfin, la Commission internationale de la stratigraphie (ICS) est responsable de la nomenclature des différentes divisions géologiques. Elle instaure des règles pour la proposition et l’adoption de nouveaux noms. Pour cela, l’ICS tient compte de divers facteurs tels que l’antériorité historique, la clarté et la signification géologique. Parfois, c’est même l’emplacement d’un gisement de roche emblématique d’une période qui donnera son nom à celle-ci. C’est le cas notamment de l’époque du Jurassique qui tire son nom de l’affleurement du massif du Jura en France.
RETENEZ
L’échelle des temps géologiques est un système de classification chronologique utilisé dans de nombreuses disciplines scientifiques pour dater les événements marquants de l’histoire de la Terre.
La datation relative détermine l’ordre des événements géologiques par comparaison, en utilisation des principes tels que la superposition et la continuité des strates.
La datation absolue utilise des techniques radiométriques pour estimer l’âge exact des roches et des fossiles, en mesurant la désintégration d’isotopes radioactifs.
La corrélation de différentes strates géologiques de composition similaire à travers le monde permet de construire une chronologie des temps géologiques, divisée en éons, ères et périodes.
Les limites entre les différentes subdivisions de l’échelle des temps géologiques témoignent des événements géologiques, climatiques et écologiques majeurs survenus au cours de l’histoire de notre planète.
Situé dans l’État de l’Arizona, Antelope Canyon est l’un des sites naturels les plus photographiés au monde. Ses parois ondulantes, délicatement sculptées par l’érosion, attirent chaque année des milliers de visiteurs venus des quatre coins du globe. Au-delà de cette singulière beauté naturelle, on peut entrevoir la fascinante histoire géologique de la formation d’Antelope Canyon et découvrir l’importance de ce lieu dans la culture Navajo. Partons sans plus tarder sur les terres ancestrales du peuple Diné pour un voyage dans la machine à remonter le temps.
La formation géologique d’Antelope Canyon
Le grès Navajo, l’origine d’Antelope Canyon
La formation d’Antelope Canyon commence à la période Jurassique, il y a environ 190 millions d’années. La région est alors un vaste désert de dunes issues de dépôts de sable, de limon et de gravier. On pourrait le comparer au Sahara actuel.
Au fil des millénaires, tous ces dépôts ont été enfouis pour former de nombreuses strates de sédiments. La pression sur les grains de sable a augmenté et ces derniers se sont rapprochés de plus en plus les uns des autres. C’est ce que l’on appelle la compaction.
Des minéraux transportés par l’eau se sont ensuite déposés entre les fins débris, remplissant les espaces poreux et collant les fragments ensemble. Le sable meuble s’est alors transformé en une roche solide. C’est la cimentation.
À travers les âges, ces dunes se sont compactées et cimentées en couches entrecroisées pour former une roche sédimentaire détritique : le grès rouge Navajo. Cette structure tendre et uniforme, particulièrement sensible à l’érosion, a joué un rôle primordial dans le modelage d’Antelope Canyon.
Antelope Canyon est constitué d’une roche sédimentaire : le grès rouge. Crédit photo : Piaxabay
Le Plateau du Colorado, une spécificité régionale
Antelope Canyon est situé sur le Plateau du Colorado, une vaste région géologiquement active. Cette spécificité régionale joue un rôle essentiel dans la formation du canyon. Le soulèvement tectonique du plateau qui a eu lieu il y a 30 millions d’années a accentué la pente des cours d’eau et leur pouvoir érosif. En effet, cette surrection est un facteur déterminant dans l’accélération des processus d’érosion et dans l’apparition rapide des caractéristiques géologiques uniques d’Antelope Canyon.
L’érosion, la sculptrice de talent d’Antelope Canyon
L’élément clé de la formation d’Antelope Canyon est l’eau. Les crues soudaines et violentes (flash floods), fréquentes en période de mousson dans cette région aride, jouent un rôle décisif. Lors des pluies torrentielles, l’eau s’engouffre dans les fissures du grès, transportant avec elle du sable et des débris. Ce processus naturel de sablage érode les parois du canyon, comme le ferait du papier de verre, créant peu à peu les formes sinueuses et les contours lisses qui caractérisent le site. Si les inondations n’emportaient pas périodiquement le sable, le canyon aurait disparu depuis longtemps.
Mais si l’eau est l’artiste principale, le vent joue aussi un rôle important dans la création de cette œuvre d’art géologique. Les processus éoliens participent au modelage du canyon en transportant le sable et les sédiments lâches. Cette action contribue à lisser et à polir délicatement les surfaces rocheuses.
Le slot, la caractéristique d’Antelope Canyon
Antelope Canyon est un type de canyon en fente (slot). Les slotcanyons se caractérisent par des couloirs étroits et profonds. Ils se forment dans des régions avec un soubassement rocheux constitué de grès ou de calcaire et qui subissent des événements de crues périodiques à haute intensité. L’étroitesse des canyons en fente est due à la petite largeur des fissures par lesquelles l’eau s’infiltre. Avec le lent travail de l’érosion, ces fentes naturelles se creusent et s’élargissent peu à peu.
Antelope Canyon serpente le désert sur 8 km de long, ne faisant par endroits que quelques centimètres de large et atteignant parfois une profondeur allant jusqu’à 37 mètres. L’eau qui l’inonde lors des crues se jette dans le lac Powell à proximité.
Le canyon est composé de deux parties. La section supérieure, assez large, est nommée Upper Antelope Canyon ou Tsé bighánílíní, « l’endroit où l’eau traverse la roche » en langue navajo. La partie inférieure, plus longue et plus étroite, est connue sous le nom de Lower Antelope Canyon ou Hazdistazí, « arches de roches en spirale ».
Antelope Canyon, le spectacle des couleurs et de la lumière
L’oxydation du fer présent dans le grès Navajo donne aux parois du canyon cette surprenante palette de couleurs. Les teintes varient du rose pâle au rouge carmin en passant par l’orange vif jusqu’à des tons rouille.
L’aspect étroit et sinueux d’Antelope Canyon offre les conditions idéales pour apercevoir des effets de lumière surnaturels. Lorsque le soleil est à son zénith, ses rayons pénètrent dans les ouvertures du canyon. D’étonnants faisceaux de lumière viennent alors éclairer les parois de manière inégale, accentuant les spirales de grès sculptées par l’érosion.
Au coeur du désert de l’Arizona, Antelope Canyon réunit de magnifiques chambres sculptées par des crues rapides et l’action du vent.
Antelope Canyon
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Antelope Canyon est constitué d'une roche sédimentaire : le grès rouge. Crédit photo : Pixabay
Grès rouge Navajo délicatement sculpté par l'érosion. Crédit photo : Clemens Teichmann, Pixabay
Antelope Canyon a été modelé par l'eau et le vent. Crédit photo : Hans, Pixabay
Antelope canyon est un slot canyon ou canyon en fente. Crédit photo : Falkenpost, Pixabay
Antelope Canyon et les Hommes
Un lieu sacré pour les Navajos
Au-delà d’être une merveille naturelle, Antelope Canyon tient une place importante dans la culture Navajo. Le peuple Diné le considère comme un lieu sacré. Selon lui, le canyon n’aurait pas été sculpté par l’érosion, mais par des êtres spirituels. Tsé bighánílíní, telle une église, est le point de rencontre entre le monde des Esprits et le monde des Hommes.
La découverte d’Antelope Canyon
Bien que le peuple Navajo occupe ces terres depuis 600 à 1 000 ans, le canyon n’a été découvert que plus tardivement. Une légende raconte qu’il a servi de refuge, en 1864, à un groupe d’Indiens fuyant la déportation lors de la Longue Marche des Navajos. Une autre version parle d’une jeune bergère navajo qui a découvert le canyon en 1931 en gardant ses moutons.
En 1997, Antelope Canyon est officiellement reconnu comme un parc tribal protégé au sein de la Nation Navajo, soulignant ainsi son importance culturelle et spirituelle.
Les enjeux de la préservation d’Antelope Canyon
La popularité croissante d’Antelope Canyon pose de nombreux défis en matière de préservation. Il est essentiel de trouver un équilibre entre l’accès public et la sauvegarde du site.
Les visites touristiques sont toutes guidées et opérées par des Indiens navajos. Une limite quotidienne du nombre de visiteurs a été mise en place afin de préserver l’écosystème fragile du canyon. Des pratiques de tourisme durable et une gestion attentive sont nécessaires pour protéger dans la durée cette richesse naturelle.
Dans le même temps, le processus de formation d’Antelope Canyon reste toujours actif. Les changements climatiques, l’intensité des précipitations et la fréquence des crues continuent de façonner le canyon et de modeler sa physionomie par petites touches.
Même si l’on trouve de nombreux slot canyons dans le Sud-Ouest américain, Antelope Canyon reste le plus remarquable et le plus connu. Ses couleurs quasi-surnaturelles et ses formes improbables sont le témoignage de la puissance incroyable des éléments.
RETENEZ
La formation d’Antelope Canyon a débuté il y a environ 190 millions d’années.
Le soulèvement tectonique du plateau du Colorado a accentué la pente des cours d’eau et leur pouvoir érosif.
L’eau et le vent, transportant le sable et les débris, ont tous deux participé au modelage caractéristique du canyon.
Le processus de formation d’Antelope Canyon est toujours actif et les différents évènements météorologiques continuent de le façonner.
Depuis 1997, Antelope Canyon est reconnu comme un parc tribal protégé au sein de la Nation Navajo.
Les invasions biologiques représentent un défi pour la biodiversité, mais également pour l’économie mondiale et la santé. Lorsqu’une espèce végétale ou animale, transportée par les activités humaines, quitte son habitat naturel pour s’établir ailleurs, les conséquences peuvent s’avérer désastreuses. Certaines exotiques peuvent proliférer de manière incontrôlée dans leur nouveau milieu. Elles perturbent les écosystèmes, engendrent des pertes agricoles, des dégâts sur les infrastructures ou des problèmes sanitaires. Alors que les échanges mondiaux et les changements climatiques accélèrent ce phénomène, comprendre les mécanismes d’invasion et les moyens de les gérer est plus crucial que jamais. Découvrez comment ces colonisateurs bouleversent notre quotidien et les stratégies déployées pour tenter d’y faire face.
Qu’est-ce qu’une espèce invasive ?
Une espèce invasive, également appelée espèce exotique envahissante (EEE), est un animal ou un végétal introduit, de manière volontaire ou accidentelle, en dehors de son aire de répartition naturelle. Elle va proliférer dans le milieu d’accueil, sans aucune intervention humaine, jusqu’à représenter une menace pour l’écosystème local, perturber l’agriculture ou le fonctionnement d’infrastructures, mais aussi porter atteinte à la santé publique.
Heureusement, toutes les exotiques ne sont pas des invasives ! Schématiquement, les scientifiques estiment que sur 1 000 organismes quittant leur zone d’origine, 100 arrivent sur un nouveau territoire. Parmi eux, 10 s’adaptent aux conditions de vie, tandis qu’un seul devient envahissant.
Le transport d’espèces par l’Homme : une histoire vieille comme le monde
Le transport d’espèces à travers le monde fait partie de l’histoire de l’Humanité. Dès le Néolithique, les Hommes ont volontairement transféré des végétaux et des animaux au gré de leurs déplacements. Pourquoi ? La plupart du temps, pour subvenir à leurs besoins alimentaires grâce à la culture ou à la domestication. Aujourd’hui, nombre d’entre elles appartiennent à notre quotidien, sans que nous ayons conscience de leur provenance lointaine. Qui sait encore que le blé noir vient de Mandchourie, que le lin est originaire du Proche-Orient et que la pintade est une espèce d’Afrique tropicale ?
À partir du XVIIIe siècle, avec l’apogée des jardins d’agrément, certains végétaux ont été déplacés pour l’ornementation. En outre, les jardins d’acclimatation se sont popularisés en Europe à la fin du XIXe siècle. Ainsi, l’ailante est arrivé en France sous forme de graines en 1751, puis a été largement utilisé comme plante décorative. La grande berce, en provenance d’Abkhazie, a été semée et multipliée par un botaniste dans le canton de Vaud, avant de se répandre rapidement en Europe !
De même, des transports involontaires ont accompagné les migrations humaines. Ce processus a connu une remarquable accélération au XXe siècle avec le développement des échanges économiques mondiaux. Les organismes vivants voyagent alors d’un continent à l’autre avec les navires, les animaux, les denrées alimentaires, la laine, le bois, etc.
Par quels mécanismes une espèce introduite devient-elle invasive ?
Le phénomène d’invasion biologique compte trois étapes :
phase 1, l’introduction volontaire ou fortuite dans le milieu ;
phase 2, l’acclimatation, pendant laquelle elle s’adapte à ses nouvelles conditions de vie et parvient à se reproduire ;
phase 3, la prolifération. À ce stade, l’organisme se multiplie rapidement aux dépens des autres.
Le LIFE CROAA, un programme européen pour préserver les amphibiens autochtones. Crédit vidéo : Société Herpétologique de France sur YouTube.
Divers facteurs permettent un développement expansif. Certaines espèces vont bénéficier de l’absence de prédateurs dans leur écosystème de destination. À l’inverse des espèces locales, également appelées « indigènes », dont l’abondance est inscrite dans un équilibre proie/prédateur, ces exogènes ne sont pas régulées. Elles peuvent, par ailleurs, présenter une toxicité pour leurs concurrentes. Parfois, elles vont venir combler une niche écologique laissée vide à la suite d’une perturbation du biotope d’origine humaine (défrichement, assèchement d’une zone humide…) ou naturelle (incendie, inondation, tempête). Parallèlement, les changements climatiques accentuent le processus. Le phénomène d’invasions des algues sargasses aux Antilles en est un excellent exemple.
Exotiques et invasives : quelques chiffres
Le nombre d’espèces exotiques envahissantes en Europe a augmenté d’au moins 76 % au cours des 45 dernières années. Plus de 12 000 organismes exogènes sont présents dans l’Union européenne, 10 à 15 % étant considérés comme invasifs. Parmi eux, 30 d’origine animale et 36 végétaux préoccupants ont été interdits à l’importation par un règlement du parlement européen.
La France détient le record européen d’espèces introduites ! Saviez-vous, par exemple, que plus d’un tiers des poissons vivants dans nos zones humides sont des exotiques ? L’outre-mer est particulièrement touchée. On y inventorie plus de plantes exogènes que d’indigènes ! Ce sont plus de 2 000 espèces qui sont arrivées à La Réunion et 1 800 en Polynésie française. Plus de 400 d’entre elles sont envahissantes… À l’échelle de l’Hexagone, 1 044 végétaux et 881 espèces animales étrangères, dont environ 190 invasives, ont été recensés par l’Inventaire national du patrimoine naturel (INPN). Et ces chiffres, pourtant récents, sont probablement déjà sous-estimés.
Depuis 1982, un département français est concerné tous les dix ans en moyenne par l’installation de 12 nouvelles espèces envahissantes, selon un indicateur développé par l’Observatoire national de la biodiversité (ONB) !
Les invasions biologiques, qui déséquilibrent en profondeur les écosystèmes, impactent lourdement notre santé, l’économie mondiale et la biodiversité.
Les conséquences des invasions biologiques sur la biodiversité
D’un point de vue écologique, les invasives impactent les espèces indigènes et, plus globalement, le fonctionnement des écosystèmes. Leur prolifération, en transformant les habitats, déséquilibre en profondeur les interactions entre les organismes qui les composent. Au niveau mondial, les EEE sont responsables de 40 % des extinctions enregistrées au cours des 400 dernières années. Le phénomène est encore plus marqué en milieu insulaire. En outre-mer, par exemple, elles sont impliquées dans 53 % des disparitions recensées sur les territoires.
Parmi les conséquences bien documentées, on peut citer :
l’évolution des chaînes de prédation ;
l’instauration d’une nouvelle concurrence ;
la transmission d’agents pathogènes ;
l’extinction des espèces indigènes au profit des exotiques ;
des modifications génétiques par le biais de l’hybridation.
Prenons quelques exemples pour illustrer ces impacts.
Des prédateurs redoutables
Le frelon asiatique a été introduit accidentellement dans le Lot-et-Garonne, en 2004. Cet insecte induit une forte pression de prédation sur les abeilles domestiques dont il se nourrit, allant jusqu’à décimer des ruches entières.
Le frelon asiatique, arrivé en France en 2004, est aujourd’hui présent sur l’ensemble du territoire. Crédit photo : Gilles San Martin via Wikimedia Commons.
En Mer Noire, les anchois voient leurs effectifs chuter drastiquement. En cause, Mnemiopsis leidyi, une méduse originaire des États-Unis qui consomme d’importantes quantités d’œufs et de larves de poissons.
Des exogènes accompagnés d’agents pathogènes
Dans les années 1960, des aquaculteurs allemands importent l’anguille japonaise. Porteurs d’un ver, l’anguillicola, qu’ils tolèrent par ailleurs très bien dans la mesure où ils ont évolué avec, ces poissons l’ont transmis à l’espèce européenne. Or, cette dernière a été très affectée. Pour quelle raison ? Tout simplement parce qu’elle n’avait jamais été en contact avec ce parasite auparavant. Elle n’a donc pas mis en place de stratégie pour se défendre ou cohabiter avec ! Aujourd’hui, l’anguille européenne est en danger de disparition.
Ce phénomène a aussi été décrit chez l’écrevisse à pieds blancs. L’introduction dans son milieu de sa cousine de Louisiane, porteuse saine d’un champignon auquel a été sensible l’espèce indigène, a décimé ses populations. On peut également citer le cas de l’écureuil roux désormais gravement menacé en Grande-Bretagne. En cause, un virus hébergé par l’écureuil gris naturalisé sur l’île.
L’écureuil gris menace la conservation de l’écureuil roux en Grande-Bretagne. Crédit photo : BirdPhotos.com via Wikimedia Commons
Une concurrence forte
Originaire d’Afrique du Sud, l’arrivée de la griffe de sorcière en Europe ne date pas d’hier ! C’est, en effet, en 1680, qu’elle a été introduite au jardin botanique de Leyden en Hollande. Appréciée pour ses qualités ornementales, elle a été largement implantée par des particuliers. Or, cette espèce s’est très bien acclimatée en dehors des espaces entretenus. Elle affectionne les zones côtières où sa présence est désormais très problématique. Son important pouvoir de recouvrement entraîne la disparition des habitats originels.
La griffe de sorcière envahit les littoraux au détriment des espèces autochtones. Crédit photo : Christian Ferrer via Wikimedia Commons.
Impossible de ne pas connaître la renouée du Japon ! Bords de routes, berges de rivières, friches… on peut en observer de vastes peuplements partout en France. Introduite dans les années 1800, elle s’est naturalisée au XIXe siècle pour devenir invasive au XXe siècle. Elle est une concurrente redoutable pour la flore locale. D’une part, la densité de son feuillage est telle qu’elle prive de lumière les espèces à proximité. D’autre part, elle est capable de sécréter des substances toxiques pour les autres végétaux ! Difficile pour les plantes indigènes de lutter…
La renouée du Japon forme de vastes peuplements qui inhibent la croissance de toutes les autres espèces. Crédit photo : Tom Heutte via Wikimedia Commons.
Des hybridations qui desservent les espèces
L’hybridation peut s’avérer bénéfique en apportant, au sein d’une population, une diversité génétique qui va favoriser la résistance ou l’adaptation. Cependant, ce processus n’est pas souhaitable pour les peuplements d’espèces rares. Prenons le cas de deux espèces de canards : l’érismature à tête blanche et l’érismature rousse, échappée d’un élevage en Grande-Bretagne. Le comportement plus agressif des mâles de l’espèce exogène avantage son accès à la reproduction. Associé à une descendance fertile des hybrides, cette capacité accrue à se reproduire induit un fort risque de dilution des gènes et la disparition de l’érismature à tête blanche en Europe.
L’érismature rousse, échappé d’élevage, à l’origine de la disparition de l’érismature à tête blanche par hybridation génétique. Crédit photo : Alan D. Wilson via Wikimedia Commons.
Le coût économique des invasions biologiques
Le coût des invasions biologiques pèse sur l’économie planétaire. La perte financière induite par les EEE est estimée à 5 % de la production mondiale. 69 milliards d’euros par an ont été investis pour lutter contre les insectes invasifs. En France et dans ses territoires d’outre-mer, entre 1993 et 2018, la gestion des espèces exotiques envahissantes a nécessité 395 millions d’euros par an !
Au cours d’une étude publiée en 2023, des chercheurs du CNRS et de l’Université Paris-Saclay ont évalué qu’en 40 ans, le coût des invasions biologiques est équivalent à celui généré par les tempêtes ou les inondations. Il augmente, par ailleurs, plus vite que celui lié aux catastrophes naturelles.
Mais comment des espèces animales ou végétales peuvent-elles entraîner des dépenses aussi exorbitantes ? Tout simplement en affectant directement les rendements agricoles ou en détériorant les infrastructures. Les exemples sont nombreux :
L’ambroisie à feuilles d’armoise envahit les champs de céréales, limitant la production et dégradant la qualité de la récolte à laquelle elle se mélange.
La bactérie Xylella fastidiosa, importée avec des plants contaminés et propagée par les insectes piqueurs-suceurs, impacte lourdement la culture de l’olive.
La moule zébrée se fixe sur tous les types de supports en grande densité. Elle bouche les prises d’eau et les exutoires et peut même bloquer les circuits de refroidissement des bateaux ou des centrales nucléaires.
Ragondin et rat musqué, en provenance d’Amérique et exploités pour leur fourrure, prolifèrent dans les zones humides européennes. Leurs terriers, creusés dans les digues, remettent en question la solidité de ces ouvrages.
Les élodées américaines, plantes aquatiques qui se développent en formations denses, empêchent l’eau de s’écouler. Elles peuvent obstruer un barrage, colmater des pompes et rendre la navigation impossible.
La moule zébrée occasionne d’importants dégâts sur les infrastructures et les bateaux. Crédit photo : National Park Service via Wikimedia Commons.
Les enjeux sanitaires liés aux espèces exotiques envahissantes
Outre les impacts sur la biodiversité et leur coût, les invasions biologiques engendrent également des problèmes de santé publique. Parmi les nombreux organismes entraînant des conséquences sanitaires :
Le tamia de Sibérie, petit rongeur terrestre autrefois commercialisé comme animal de compagnie, prolifère aujourd’hui en Île-de-France. Cette espèce est suspectée de jouer un rôle de réservoir dans la diffusion de la bactérie qui cause la maladie de Lyme.
Le moustique tigre, originaire d’Asie du Sud-Est, est désormais présent dans plus de 100 pays. Il véhicule le chikungunya, la dengue et le Zika.
Avec le pollen de l’ambroisie à feuilles d’armoise, réactions allergiques, conjonctivite, asthme et urticaire touchent plus de 10 % de la population ! Selon l’ARS, le coût sanitaire de cette plante en Auvergne-Rhône-Alpes est estimé à 26,4 millions d’euros par an entre 2017 et 2020.
La stratégie de lutte contre les espèces invasives : un défi colossal !
L’impact de ces espèces sur le plan économique est colossal. En Europe, chaque année, ce sont 12,5 milliards d’euros qui sont dépensés pour réparer les dommages causés. Cependant, d’après les chercheurs du CNRS qui ont travaillé sur le coût des invasions biologiques, les investissements dédiés à la prévention et à la gestion sont actuellement dix fois moins élevés que les pertes financières engendrées.
Dès 2014, l’Europe a pris des mesures en rédigeant une réglementation sur les espèces invasives. Une liste évolutive a été dressée, afin d’assurer prévention, gestion de l’introduction et propagation de ces indésirables.
Toutes ces dispositions visent en priorité à accroître la réactivité face à ces arrivées sur un territoire. Ceci afin d’éviter de nouvelles implantations et, le cas échéant, de mettre en place des réponses rapides pour les éliminer avant qu’elles ne deviennent hors de contrôle. L’expérience montre, en effet, qu’une intervention précoce et collective reste le moyen le plus sûr, tout en étant le moins onéreux. La prise en compte tardive de la problématique des invasions biologiques a permis à de nombreuses exotiques de s’établir. Pour certaines, il est désormais trop tard pour espérer une action de lutte efficace. Tout au plus pouvons-nous limiter leur expansion.
Lorsque l’organisme est déjà installé, des mesures de gestion drastiques s’imposent. Ces interventions demeurent très encadrées sur les plans scientifique et réglementaire. Mais, cette phase s’avère délicate en matière de perception, notamment pour les espèces animales. En effet, le tir ou le piégeage avec euthanasie, méthodes les plus employées, peuvent choquer. Malheureusement, le recours à des pratiques létales est souvent la seule issue. L’accueil des individus retirés du milieu naturel dans des centres de récupération, réalisé depuis plus de 30 ans pour la tortue de Floride, montre ses limites. Ces centres sont aujourd’hui saturés et ne peuvent gérer le flux constant sans que les conditions dans ces structures se dégradent, d’autant plus que ces animaux peuvent vivre une cinquantaine d’années.
Nous sommes tous concernés par le phénomène des invasions biologiques. À la fois responsables de la propagation de ces espèces et victimes de leurs conséquences, tant sur le plan économique que sanitaire. La lutte contre les EEE est un réel défi pluridisciplinaire et un enjeu majeur pour la biodiversité à l’heure où débute la 6e grande extinction massive sur Terre. Chacun de nous peut agir en choisissant des essences végétales locales pour son jardin ou en veillant à ne pas introduire d’animaux exogènes dans le milieu naturel.
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Les espèces exotiques envahissantes (EEE) représentent un danger pour la biodiversité.
Les invasions biologiques ont d’importantes conséquences économiques et sanitaires.
Le bouleversement des écosystèmes, d’origine naturelle ou humaine, accentue la prolifération des espèces invasives.
La lutte contre les espèces exotiques envahissantes est un enjeu majeur au niveau mondial.
Le changement climatique exerce une influence significative sur la dynamique du littoral en modifiant profondément sa physionomie et ses écosystèmes. Les reliefs côtiers sont des milieux naturels façonnés par les courants marins et le vent. Les phénomènes météorologiques extrêmes et l’activité humaine érodent les plages, les dunes et les falaises. Progressivement, les zones côtières, leurs habitats naturels et leurs infrastructures humaines sont menacés. Mais de quoi parle-t-on lorsque l’on évoque le littoral ? Que représente-t-il géographiquement ? Quels moyens sont mis en place pour le protéger de l’érosion et de la montée du niveau des océans ? État des lieux de la dynamique du littoral face aux effets du changement climatique.
Qu’est-ce qu’un littoral ?
Le littoral est généralement défini comme la zone côtière séparant la mer de la terre. En réalité, la définition de ce terme est plus complexe qu’il n’y paraît. La dynamique du littoral dépend de trois paramètres :
Géologique qui concerne l’évolution du relief côtier sur le long terme ;
Physique pour l’interaction entre les vagues et les côtes ;
Biologique pour la manière dont les êtres humains et les organismes coexistent et transforment les côtes.
Une zone à forte mobilité
Il faut néanmoins préciser que le littoral est un environnement extrêmement mobile par essence, car il est constamment soumis aux forces de la nature. En effet, le littoral subit le phénomène naturel d’érosion, notamment lors des tempêtes hivernales. À l’inverse, lors des périodes plus calmes, elles sont alors dans une phase de reconstruction.
Il existe trois types principaux de littoraux, à savoir :
Les estuaires et les deltas sont des zones transitoires entre le domaine marin et fluvial. Selon les types, ils peuvent être des côtes d’érosion ou d’accumulation.
Les plages de sable et les dunes font partie des côtes d’accumulation.
Les côtes rocheuses et à falaises ou les grottes marines correspondent aux côtes d’érosion.
Les types de littoraux présentent donc des morphologies bien distinctes. Par conséquent, leur processus d’évolution varient également.
Graphique des différentes types de côtes en France. Crédit schéma : Cerema
Les côtes d’accumulation : les plages
Les côtes d’accumulation ou sableuses sont dominées par des processus de dépôt de sédiments d’origine continentale apportés par les fleuves et rivières. Les courants marins remanient le sable qui vient sans cesse remodeler la physionomie des plages. Dans un second temps, le vent intervient dans l’édification de formes littorales telles que les dunes. L’énergie des vagues est également une source d’érosion sur les côtes d’accumulation.
Ce qui définit la forme d’une plage, c’est avant tout, sa position par rapport au trait de côte. Par exemple, si une plage se situe dans une zone à l’abri de l’assaut des vagues, le sable aura tendance à s’accumuler progressivement. De plus, la nature et la taille du sédiment sont utilisées pour caractériser le type de plage. Tandis que les sédiments fins forment une plage sableuse, quant à eux, les sédiments grossiers forment des grèves.
Les dunes de Keremma à Tréflez dans le Finistère. Crédit photo : Wikimédia Commons
Les côtes d’érosion: les falaises
Les côtes d’érosion ou rocheuses se caractérisent par une faible quantité de sédiments déposés, car elle est rapidement transportée vers le large. Il existe plusieurs types de côtes rocheuses, comme celles composées de craie, de granite, d’argile ou encore de schiste. Leur résistance face à l’érosion dépend donc du type de roche. Contrairement aux plages, qui peuvent parfois avancer, les falaises ne font que reculer. Leur érosion est liée à une combinaison de deux facteurs :
Les processus continentaux et subaériens, comme les alternances de gel et de dégel ou les infiltrations qui s’insinuent dans les anfractuosités préexistantes de la roche. Cette érosion continentale déstabilise les côtes rocheuses et entraîne, par conséquent, des mouvements de terrains.
Le vent ainsi que l’ensemble des courants marins interviennent dans un second temps. Une fois que les falaises ont été fragilisées par les processus continentaux et subaériens, les vagues et la houle viennent fragiliser les falaises, ce qui contribue à leur recul.
Schéma des différents stades d’érosion des falaises. Les vagues creusent et créent une grotte marine. Une arche se forme. L’arche s’effondre. Crédit photo : Adobe Stock
Comment délimiter le littoral ?
Le trait de côte
Le trait de côte définit la limite entre la mer et le continent. Néanmoins, il n’y a pas de consensus sur la frontière exacte, car cela dépend du type de littoral (falaise, plage, etc.). Par exemple, il peut être la limite entre le pied d’une dune et la plage ou entre le sommet d’une falaise et la mer. L’objectif n’est pas d’opter pour une définition homogène, mais plutôt de mesurer l’évolution du trait de côte de façon pérenne dans le temps. En effet, le trait de côte n’est pas fixe et évolue au fil du temps selon les conditions géomorphologiques et climatiques locales.
Les dispositifs pour cartographier
Différentes techniques existent pour cartographier les littoraux et suivre le trait de côte et les impacts sur son évolution. Le plus souvent, l’objectif est de dresser une carte en trois dimensions d’une zone prédéfinie pour étudier les évolutions morphologiques. Les différents dispositifs incluent :
Litto 3D® est une collaboration entre le Service hydrographique et océanographique de la Marine (SHOM) et l’Institut Géographique National (IGN) qui a pour but d’établir une Référentiel Géographique du Littoral (RGL) pour toute la façade maritime française et d’outre-mer. Il permet également de délimiter les eaux territoriales et la zone économique exclusive de la France ;
Les données satellitaires, notamment celles du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES) et des satellites SPOT et Pléiades ;
L’imagerie aérienne par drone ou par scanners aéroportés ;
Les scanners laser terrestre ou les bornes GPS ;
Les lasers bathymétriques, qui peuvent pénétrer dans l’eau pour fournir des données plus détaillées.
La cartographie du littoral n’a pas pour unique but de créer des cartes géographiques, car elle vise aussi à enregistrer des données précises. Des organismes scientifiques comme le CNRS, le BRGM, le CNES et le SHOM cherchent à caractériser les mécanismes et l’évolution du trait de côte notamment dans le cadre du réchauffement climatique. L’objectif est de comprendre la dynamique du littoral et de limiter l’érosion en tenant compte de sa mobilité naturelle et de ses capacités d’adaptation.
Comment protéger le littoral ?
En France, depuis les années 1970, plusieurs types d’ouvrages ont été érigés pour pallier l’érosion. Ces dispositifs présentent pour intérêt de fixer le trait de côte. Néanmoins, beaucoup d’entre eux ne font que retarder le problème.
Les ouvrages aux effets limités
Divers ouvrages ont été construits pour freiner le recul du littoral, tels que :
Les digues, des ouvrages parallèles au littoral qui offrent une protection directe lors d’événements climatiques importants comme les tempêtes.
Les épis, généralement construits en série et perpendiculaires au littoral, ont pour objectif de contrôler l’érosion côtière en stabilisant les plages.
Les enrochements, tels que les brise-lames situés en mer, ont pour objectif de casser le déferlement des vagues afin que le sable se dépose derrière eux.
La digue du Curnic à Guissény dans le Finistère, un exemple d’ouvrage humain qui aggrave l’érosion du littoral. Crédit photo : Wikimédia Commons.
Cependant, ces procédés sont lourds et massifs. Lorsque la dynamique du littoral est fixée par des ouvrages en dur tels que les enrochements, les digues ou les épis, cela provoque une érosion massive à un autre endroit du trait de côte. La dérive littorale emporte avec elle plus de sédiments d’un côté de l’ouvrage qu’elle n’en ramène, ce qui génère de l’érosion.
De plus, ces ouvrages sont coûteux et ont un besoin d’entretien accru. De plus, ils ne s’adaptent pas aux évolutions des aléas climatiques et ils ont été installés au détriment des écosystèmescôtiers.
Le littoral est un espace naturellement mobile, en recul sous l’effet de l’érosion côtière, de la pression humaine et du changement climatique.
Les solutions plus pérennes
Il existe néanmoins plusieurs solutions pour lutter contre l’érosion du littoral sur le long terme, à savoir :
L’ensablement, qui consiste à rajouter du sable pour rétablir un équilibre perturbé.
Le reboisement ou la plantation de végétation, qui permettent de fixer le sable et de réduire sa mobilité lors des périodes de vent. Ces zones naturelles amortissent la houle et freinent la migration des dunes vers l’intérieur des terres.
L’atténuateur de houle est un géotextile qui stabilise le sable en cassant les vagues au large plutôt que sur la plage.
Le système de drainage de plage permet à l’eau de s’infiltrer lorsque les vagues montent, de sorte que le sable se dépose. L’eau est ensuite évacuée dans la mer.
La pose de ganivelles, sortes de pieux en bois installés sur les plages qui permettent de freiner l’action du vent.
La forêt des Landes, un exemple de reboisement pour fixer les dunes. Crédit photo : Wikimédia Commons
L’objectif de ces solutions est de gérer progressivement la dynamique du littoral plutôt que d’essayer de la contrôler de manière définitive. Cependant, tous les littoraux ne sont pas en érosion. En effet, certaines plages accumulent du sable et gagnent parfois du terrain.
En quoi le dérèglement climatique affecte la dynamique littorale français ?
Le réchauffement climatique accentue la fonte des glaces et provoque une élévation du niveau de la mer. De plus, l’océan se réchauffe et se dilate, c’est-à-dire qu’il gagne en volume, ce qui impact également les reliefs côtiers. La généralisation des submersions marines et l’intensification des tempêtes et des cyclones favorisent et amplifient l’érosion du littoral.
L’état actuel du littoral en France
Le littoral de France métropolitaine, sur ses trois façades maritimes (la manche, la mer du Nord, l’océan Atlantique et la mer méditerranée), est constitué de :
44 % de côtes rocheuses ;
39 % de côtes d’accumulation ;
17 % de côtes artificialisées.
Sur les 39 % de côte d’accumulation, les côtes sableuses évoluent le plus, car 37 % d’entre elles sont en recul, ce qui équivaut à un linéaire d’environ 700 km.
Entre 1960 et 2010, environ 30 km² de trait de côte ont disparu en France. Cette surface équivaut à environ 4 200 terrains de football. Le trait de côte mesuré entre 2005 et 2014 a une longueur totale de 6 215 km, tandis que celui observé entre 1924 et 1958 atteignait 6 515 km.
Tous les départements français sont concernés par le recul du trait de côte. La cartographie de l’indicateur national de l’érosion côtière, consultable dans son visualiseur dynamique en ligne, révèle que près de 20 % des côtes françaises (hors Guyane) sont en recul. En France, selon les estimations, 50 000 logements seraient menacés d’ici 2050. Cependant, il existe quelques territoires où la côte progresse, comme au sud de la baie de Somme.
Cartographie de l’indicateur national de l’érosion côtière avec les secteurs en recul et avec avancée. Crédit photo : Cerema et Ministère de la transition écologique et solidaire. Réalisation : François Hédou, 2018.
Vers une prise en compte des institutions
Les différents rapports du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) soulignent l’urgence de la situation. Entre 1901 et 2018, le niveau de la mer a augmenté en moyenne de 20 cm, ce qui a pour conséquence directe l’accélération de la dégradation des littoraux.
La vitesse d’élévation du niveau de la mer est actuellement très préoccupante. D’après les dernières données du GIEC de 2023, elle n’a cessé d’augmenter depuis le début du XXème siècle
1,3 mm/an entre 1901 et 1971 ;
1,9 mm/an entre 1971 et 2006 ;
3,7 mm/an entre 2006 et 2018 ;
En 2050, l’élévation probable du niveau moyen de la mer est comprise entre 0,15 m et 0,23 m et 0,20-0,29 m pour le scénario le plus pessimiste.
Néanmoins, les élus, en concertation avec les scientifiques et la population, abordent le problème du recul des littoraux et des risques associés avec davantage de sérieux. C’est pourquoi, la loi Climat et résilience de 2021 propose des outils pour aider les collectivités à aménager le littoral face aux risques côtiers.
En résumé, le littoral est un milieu naturel et anthropisé qui évolue constamment. Aujourd’hui la dynamique du littoral est perturbée par l’activité de l’homme et les effets du changement climatique. Des avancées majeures sont réalisées pour rétablir l’équilibre naturel des reliefs côtiers et relever les défis actuels de gestion du littoral. Une prise de conscience collective est nécessaire afin de créer un avenir profitable à tous.
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Le dynamique de littoral est un phénomène naturel, mais elle est perturbée par le changement climatique. La montée des mers accélère l’érosion côtière.
Les ouvrages visant à pallier l’érosion du littoral peuvent être bénéfiques mais également désavantageuses.
Le trait de côte est une représentation schématique utilisée pour calculer la délimitation entre la mer et le continent au fil du temps.
Le littoral français est en recul depuis les années 60.
Les élus et les parties civiles, en lien avec les organismes scientifiques, ont pris en compte l’ampleur des risques côtiers.
Sous la jolie dénomination de lave en coussins ou pillow lava se cache une forme géologique unique, née de la rencontre entre la lave et l’eau. Quels processus géologiques sont à l’origine de ces laves si particulières ? Bien qu’une lave en coussins se forment sur le plancher océanique, comment est-il possible de les observer ? Pourquoi retrouve-t-on des laves en coussins aux sommets des montagnes ? Comment l’étude des pillow lava contribuent-elles à retracer l’histoire géologique d’une région ?
La formation d’une lave en coussins
Une lave en coussin, ou pillow lava, est une roche constituée de lobes arrondis et serrés dont elle tire son nom. Cette morphologie particulière se forme lorsqu’une lave très fluide est émise sous l’eau au contact de laquelle elle va refroidir. Les laves en coussins sont les formes géologiques considérées comme les plus abondantes sur Terre, notamment parce qu’elles constituent les planchers océaniques. Leur morphologie caractéristique peut être confondue avec celles des laves cordées ou pāhoehoe mais il s’agit bien là de deux types de lave distincts.
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Lobe de lave éclaté par lequel un autre lobe s'est formé (Galápagos). Crédit photo : NOAA Okeanos Explorer Program, Galapagos Rift Expedition 2011
Schéma d'une formation de lave en coussins. Crédit photo : illustration showing the formation of pillow basalts under water. The formation of pillow basalts during subaqueous eruptions. Graphic by Robert J. Lillie. Modified from “Earth: Portrait of a Planet", by S. Marshak, 2001, W. W. Norton & Comp., New York.
Laves en coussins dans le Pacifique. Crédit photo : UW/NSF-OOI/CSSF, ROPOS Dive R1630 ; V13
Les pillow-lava se forment lorsque la lave s’épanche sous l’eau. Si des laves en coussins peuvent se former lorsque des coulées de laves sub-aériennes pénètrent dans la mer ou lors d’éruptions sous-glaciaires, la très grande majorité est issue d’éruptions sous-marines. La lave en fusion est émise à une température comprise entre 1 000°C et 1 200°C. Lorsqu’elle rentre au contact de l’eau de mer, dont la température est de 2°C à 10°C (selon les régions et la profondeur), la lave subit un phénomène de trempe c’est-à-dire un refroidissement brutal. La surface des coussins se vitrifie alors mais reste souple. Sous l’effet de la pression de la lave qui continue d’être émise, les lobes de laves croissent à l’image d’un ballon de baudruche qui se gonfle. Les coussins individuels cessent de croître lorsque leur surface forme une croûte qui devient suffisamment épaisse pour empêcher le gonflement. Si la lave continue d’affluer, la croûte du coussin peut se rompre et entraîner la formation d’un nouveau coussin. En refroidissant, la surface de ces coussins sera alors marquée par des rainures et des stries parallèles. Ces dernières sont liées au passage de la lave à travers les parois durcies d’un précédent coussin.
Des pillow lava dans le Pacifique. Crédit vidéo : Video courtesy of the NOAA Office of Ocean Exploration and Research, 2016 Deepwater Exploration of the Marianas.
Sur des pentes douces ou lorsque les taux d’éruption sont très faibles, les coussins forment un amoncellement de lobes de laves successifs, appelé séquence. Lors d’éruptions prolongées, ces empilements peuvent former de véritables murs dont les coussins situés à la base sont plus gros que ceux situés du sommet. A l’inverse, sur des pentes d’épanchement plus fortes, les coussins prennent la forme de tubes dans lesquels la lave chaude est drainée.
Toutefois, les coulées de lave en coussins ne s’étendent pas sur de grandes distances à partir de leur cheminée d’origine. Les grands champs de lave en coussins sont alors issus de plusieurs points d’émission, appelés monts sous-marins. Ces volcans actifs immergés sont situés au niveau des dorsales océaniques, des points chauds (dont Hawaï est un exemple émergé) ou des zones de subduction. C’est d’ailleurs dans une de ces zones qu’une équipe de chercheurs internationaux a réussi l’exploit d’observer une éruption sous-marine en 2009. Dans le Bassin de Lau, situé à la limite entre les plaques tectoniques australienne et pacifique, l’éruption du mont sous-marins West Mata a été filmée à près de 1200 m de profondeur. Une occasion exceptionnelle d’assister à la formation de ces laves. Mais nul besoin de plonger si profond pour observer des laves en coussins.
Les laves en coussins, produits de l’activité sous-marine actuelle et vestiges d’océans aujourd’hui disparus.
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Coussin en formation lors d'une éruption sous-marine observée à 1200 m de profondeur dans l'Océan Pacifique, au large des Iles Tonga. Crédit photo : NSF and NOAA., Public domain, via Wikimedia Commons
Champ de laves en coussins situé au mont sous-marins Mozart (Mozart Seamount) dans l'océan Pacifique. Crédit photo : NOAA Office of Ocean Exploration and Research, Deep-Sea Symphony: Exploring the Musicians Seamounts, Public domain, via Wikimedia Commons
Des pillow lava aux sommets des montagnes : les ophiolites
Des laves en coussins peuvent être observées sur les continents, au sein de complexes ophiolitiques. Une ophiolite est un fragment de lithosphère océanique d’un ancien océan. La convergence de deux plaques tectoniques peut entraîner la fermeture d’un océan et la collision de deux continents. Durant cette convergence, des lambeaux de lithosphère océanique peuvent être charriés sur la croûte continentale. Ces lambeaux sont alors incorporés aux orogènes (chaîne de montagne) issus de la collision continentale.
L’ophiolite emblématique et la plus étudiée au monde est l’ophiolite de Semail qui s’étend sur 50 000 km² au nord de l’Oman et à l’est des Emirats arabes unis. Parfaitement préservée, cette ophiolite permet l’observation de murs de laves en coussin comme les fameux pillow-lavas de la région du Wadi al-Jizi.
Laves en coussins du Wadi Jizi visibles dans le massif ophiolitique de Semail en Oman. Crédit photo : Georoamer, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
En France hexagonale, l’ophiolite du Chenaillet (Alpes) est également très connue. Les laves en coussins qui y sont visibles sont les témoins de la présence dans cette zone d’un ancien petit océan, il y a entre 165 et 120 Ma : la Téthys alpine. Il y a 90 Ma, cet océan s’est refermé lorsque la plaque européenne s’est enfoncée sous la plaque adriatique (subduction). Après la fermeture totale de la Téthys alpine (il y a environ 30 Ma), les masses continentales sont entrées en collision, charriant un fragment de plancher océanique et donnant naissance à l’orogène alpin. C’est pourquoi les laves en coussins formées au fond de l’océan se retrouvent aujourd’hui exposées à 2650 m d’altitude dans le massif du Queyras.
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Coussin de lave basaltique situé au mont Chenaillet. Crédit photo : Saphon A., CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons
Coussin de lave basaltique situé au mont Chenaillet. Crédit photo : Saphon A., CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons
Même si l’observation de la formation des laves en coussins reste un défi relevé par quelques sous-marins, l’étude de ces laves contribue à la compréhension de l’évolution géodynamique de notre planète.
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Les laves en coussins sont issues d’éruptions sous-marines.
Le plancher océanique est constitué de laves en coussins.
Des pillow lava sont observables sur les continents, au sommet des montagnes.
Resing J, Rubin K, Embley R, Lupton J, Baker E, Dziak B, et al. Active submarine eruption of boninite in the northeastern Lau Basin. Nature Geoscience. 9 oct 2011;4:799‑806.
Moore JG. Mechanism of Formation of Pillow Lava: Pillow lava, produced as fluid lava cools underwater, is the most abundant volcanic rock on earth, but only recently have divers observed it forming. American Scientist [En ligne]. 1975 [cité le 29 avr 2024];63(3):269‑77. Disponible: https://www.jstor.org/stable/27845462
Situées en plein cœur de l’Afrique, les chutes Victoria s’érigent parmi les plus grandes cascades du monde. Elles sont larges de 1 708 mètres et plongent à plus de 100 mètres de profondeur. Inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1989, elles forment une frontière naturelle entre la Zambie et le Zimbabwe et sont le berceau d’une biodiversité florissante. Zoom sur ce lieu singulier, qui ne cesse d’émerveiller tous ceux qui ont la chance de l’observer.
Géologie et découverte des chutes Victoria
Formation géologique du plus grand rideau d’eau du monde
Les chutes Victoria sont le résultat d’un long processus issu de la rencontre entre le fleuve Zambèze et plateau basaltique Batoka. Il y a 150 millions d’années, cette région faisait l’objet d’une forte activité volcanique. Des couches de lave se sont ainsi superposées et ont laissé place au basalte. Le refroidissement de cette roche, associé à la tectonique des plaques, a provoqué la formation de failles qui se sont remplies de grès plus tendre.
C’est là qu’intervient le Zambèze : il s’agit du quatrième plus grand fleuve d’Afrique. Il prend sa source en Zambie, à environ 1 500 mètres d’altitude, et parcourt plus de 2 700 kilomètres avant de finir sa course dans l’océan Indien au Mozambique. Lors de son passage sur le plateau, son eau chargée en sédiments a progressivement érodé la roche en exploitant les brèches de grès préexistantes. Elles se sont alors transformées en une série de gorges étroites, façonnant le paysage que l’on connaît aujourd’hui. Il faut cependant noter qu’elles n’ont pas toujours occupé le même emplacement : elles ne cessent de reculer. Par le passé, il y a eu huit autres chutes en amont qui se sont asséchées avant que de nouvelles ne voient le jour. On peut d’ailleurs observer que la cataracte du Diable, à l’extrémité ouest côté Zimbabwe, est en train de s’enfoncer : les scientifiques estiment qu’une prochaine fera son apparition dans environ 10 000 ans. Ceci s’explique par la puissance érosive du torrent et de son débit qui peut atteindre les 500 millions de litres par minute lors de la saison des pluies.
Les principales cataractes situées le long des 1,7 km de large des chutes Victoria sont les suivantes :
Devil’s Cataract, la « cataracte du Diable » ;
Main Falls, les « chutes principales » ;
Horse Shoe Falls, les « chutes du fer à cheval » ;
Rainbow Falls, les « chutes de l’arc-en-ciel » ;
Eastern Cataract, la « cataracte de l’est ».
L’une des particularités de cet endroit est l’embrun généré par les rapides. Ce brouillard haut de 400 mètres est visible jusqu’à 50 kilomètres à la ronde. Il produit une pluie fine qui s’abat en continu sur cette zone.
Les chutes Victoria s’élancent depuis une longue faille présente dans un plateau volcanique. Crédit photo : Jürgen Bierlein via Pixabay
Arrivée du premier explorateur européen
Mosi-oa-Tunya, ou autrement dit, « fumée qui gronde » : voilà l’appellation donnée à ces chutes par le peuple Lozi avant la venue de l’explorateur écossais David Livingstone en 1855. Alors qu’il avait entamé un périple au cœur de l’Afrique, c’est en remontant le cours du Zambèze qu’il a fait la découverte de ces cascades au bruit assourdissant qui leur a valu ce nom. Il les a rebaptisées en l’honneur de la reine Victoria, qui était à la tête du Royaume-Uni.
« Seuls les anges dans leur vol ont dû contempler des visions aussi magnifiques que celles-ci. » David Livingstone, le premier explorateur européen qui a découvert les Chutes Victoria
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Les Chutes Victoria, parmi les plus larges du monde, vues du ciel. Elles forment une frontière naturelle entre la Zambie et le Zimbabwe. Crédit photo : Adobe Stock
Les chutes Victoria atteignent une hauteur de 108 mètres. Crédit photo : Datingjungle via Unsplash
Avec son débit de 9 000 m3, les chutes Victoria sont parmi les puissantes du monde. Crédit photo : Datingjungle via Unsplash
Les chutes Victoria s'élancent depuis une longue faille présente dans un plateau volcanique. Crédit photo : Jürgen Bierlein via Pixabay
La brume des chutes Victoria est visible à 50 km à la ronde. Crédit photo : Jürgen Bierlein from Pixabay
Description et préservation d’un écosystème unique
Un sanctuaire de vie
L’humidité instaurée par ce nuage d’eau est à l’origine d’un climat tropical propice au développement de la biodiversité. On ne dénombre pas moins de 400 variétés d’arbres (ébénier, figuier, acajou, etc.) et autres végétaux. Certains sont rares et endémiques à cette contrée, telle que la fougère Cheilantes farinosa. Des forêts, établies sur les îlots en amont des falaises, servent de lieu de reproduction à quatre espèces menacées d’oiseaux migrateurs. Parmi elles figurent le faucon taita et l’aigle noir. Par conséquent, les chutes ont été classées Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux (ZICO) par BirdLife International.
Cette flore luxuriante est un point de ravitaillement important pour les mammifères, tels que les mythiques Big Five. Éléphants, buffles, lions, léopards et rhinocéros noirs viennent s’y réfugier. La présence d’eau permanente leur est vitale et la nourriture y abonde, aussi bien pour les herbivores que les carnivores.
Les chutes Victoria : un repaire pour les espèces
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Le rollier à longs brins est une espèce emblématique de la forêt qui borde les chutes. Crédit photo : Wikimédia Commons
Les hippopotames s'épanouissent dans le fleuve Zambèze. Crédit photo : Nicole Collin Delavaud via Pixabay
Des mesures de protection nécessaires
La sauvegarde de ce site est indispensable, tant pour les écosystèmes qu’il renferme que pour la population locale. C’est pourquoi l’UNESCO l’a inscrit à son patrimoine mondial en 1989, en raison de ses caractéristiques géologiques et géomorphologiques exceptionnelles.
Des réserves ont été établies des deux côtés de la frontière : le parc national de Mosi-oa-Tunya en Zambie, et le parc national des chutes Victoria au Zimbabwe. En effet, plusieurs menaces pèsent sur elles :
La sécheresse. En 2019, les chutes ont connu un épisode sans précédent : elles ont été réduites à un filet d’eau. Bien que la diminution du débit soit courante en dehors de la saison des pluies, elle n’avait pas été aussi marquée depuis plus d’un siècle. S’il est encore trop tôt pour attribuer cet événement au réchauffement climatique, celui-ci est un facteur aggravant qui risque de rendre ces phénomènes hydrologiques plus fréquents et plus intenses à l’avenir.
Le tourisme. Cette destination est l’une des plus visitées du continent africain. Il s’agit d’une véritable source de revenus pour les villes à proximité. Elles ont fait l’objet d’une urbanisation incontrôlée, aboutissant à un accroissement significatif de la fréquentation et de la pollution.
Les activités illégales. D’une part, le braconnage appauvrit la biodiversité en décimant la faune. De plus, la déforestation prive les animaux de leur habitat. Cela les rend vulnérables et réduit les ressources dont ils ont besoin pour survivre. Le déboisement affecte également le cycle de l’eau, modifiant les précipitations et le débit du Zambèze, éléments essentiels au maintien des chutes.
La construction d’infrastructures. Le projet de barrage de Batoka Gorge sur le fleuve Zambèze est un exemple controversé. Cette centrale hydroélectrique qui verra bientôt le jour pourrait perturber, elle aussi, le flux du cours d’eau et les écosystèmes.
La brume des chutes Victoria est visible à 50 km à la ronde. Crédit photo : Jürgen Bierlein from Pixabay
Les chutes Victoria, du fait de leur beauté et leur richesse écologique, sont l’une des chutes d’eau les plus remarquables de la planète. Elles sont le produit de millions d’années d’évolutions géologique et hydrologique, et abritent une vie sauvage notable. Cependant, elles sont confrontées à des dangers croissants, d’où l’importance de protéger cet héritage naturel précieux pour les générations futures.
RETENEZ
Les chutes Victoria sont caractérisées par la plus large nappe d’eau plongeante au monde.
Elles sont le fruit de l’érosion de la roche par le fleuve Zambèze.
Leur brume a donné naissance à une végétation variée qui est le repaire de nombreuses espèces animales.
Elles sont fragilisées par l’activité humaine, ce qui nécessite de déployer des moyens de conservation.
UNESCO Centre du patrimoine mondial [En ligne]. mondial UC du patrimoine. Mosi-oa-Tunya / Chutes Victoria; [cité le 19 mars 2024]. Disponible: https://whc.unesco.org/fr/list/509/
Séparée du Chili par la majestueuse cordillère des Andes, la Patagonie argentine abrite un front craquelé de glace pas comme les autres : le glacier Perito Moreno. Au cœur du parc national Los Glaciares, considérable réservoir d’eau douce, il fait partie des rares glaciers à ne pas reculer devant les coups du réchauffement climatique. Au contraire, il avance ! En route pour la province de Santa Cruz, aux portes de la Terre de Feu !
Le Perito Moreno : glacier argentin qui se régénère
Topographie du front glaciaire
Los Glaciares est la 3èmeréserve d’eau douce de la planète. Au sud-ouest du continent latino-américain, le site protégé a une superficie de près de 600 000 ha, dont la moitié est constituée de glaciers. Ils sont 47 au total et prennent tous naissance dans le Campo de Hielo Patagónico (champ de glace sud de Patagonie). Aux confins de l’Argentine et du Chili, cette immense calotte glaciaire de 17 000 km² est ponctuée par de nombreux lacs. Les plus notables sont le Lago Viedma et le Lago Argentino ou lac Argentin, tous deux situés en Argentine.
Le champ de glace sud de Patagonie sur la cordillère des Andes. Des deux vastes étendues d’eau au centre de l’image, le lac Argentin est le plus à gauche. Crédit photo : centre spatial Johnson de la NASA via Wikimedia Commons.
Comme le glacier Upsala, le glacier Spegazzini et le glacier Onelli, le Perito Moreno alimente les eaux céruléennes du lac Argentin, dont l’émissaire est le Río Santa Cruz (littéralement : rivière de la sainte croix). Tout au long de l’année, on peut voir des icebergs ayant traversé le continent via le cours d’eau, se jeter dans l’Atlantique depuis le port de Punta Quila sur la côte est argentine. Une épopée fraîche de 385 km, sur le fleuve le plus méridional du monde.
Sur la péninsule de Magellan, le mirador Perito Moreno fait face au glacier du même nom. Crédit photo : Rafael Arroyo via Pexels.
Le Perito Moreno est l’un des quelque 215 000 glaciers sur Terre, ancré à cheval sur deux États d’Amérique latine. Son flanc ouest culmine à 2100 m d’altitude dans la cordillère des Andes, au Chili. Puis il court dans un couloir en pente, entre deux montagnes du Mésozoïque, jusqu’à l’aplomb du lac glaciaire situé en Argentine.
Ce glacier patagonien de 250 km² s’élance sur 30 km de long et trône face à la péninsule de Magellan. Son front glaciaire est observable depuis un belvédère facile d’accès en voiture (lemirador Perito Moreno). Il peut atteindre une hauteur de 60 m au-dessus du lac Argentin, et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg ! La partie immergée repose par 150 m de fond, dans une eau atteignant 8°C en moyenne.
Contexte géologique
L’histoire géologique du parc national Los Glaciares remonte à la période du Crétacé, il y a près de 140 millions d’années. La cordillère des Andes s’est soulevée suite à une série d’éruptions volcaniques d’envergure. La région demeure à la lisière des plaques tectoniques « nazca » et « sud-américaine ». On dénombre environ 140 volcans au Chili et près de 80 en Argentine, dont le volcan sous-glaciaire Viedma. Le glacier Perito Moreno quant à lui est bien plus jeune, puisqu’il date du Petit Âge Glaciaire marqué par de longs hivers froids, de 1303 à 1850.
La formation du glacier s’est produite par l’accumulation de neige, qui, une fois tassée sous son propre poids, a expulsé l’air qu’elle contenait. Elle s’est alors soudée en une masse compacte avant de se transformer en glace. Plus cette dernière est dense, moins la lumière blanche peut passer et seuls les rayons de longueur d’onde courte s’y infiltrent. C’est ainsi que le célèbre glacier argentin prend des nuances bleues, uniques en ce lieu.
Le glacier Perito Moreno prend naissance dans les Andes chiliennes. Puis, il glisse le long d’une pente et termine sa course en Argentine, au-dessus du lac Argentin. Crédit photo : Makelelecba via Wikimedia Commons.
Anecdote historique
Le Perito Moreno doit son nom au naturaliste et explorateur Portègne, Francisco Moreno, qui explora la région du Río Negro et découvrit le lac Argentin en 1877. Dans la langue quechua parlée par les Gauchos de la pampa, « perito » signifie « expert ». Bien qu’ayant été capturé et condamné à mort par les Indiens Tehuelches en 1880, l’expert Moreno parvint à s’échapper la veille de son exécution et œuvra pour le droit à l’éducation des autochtones dans la région. Puis, jusqu’en 1896, il participa activement à la délimitation de la frontière avec le Chili et aux intérêts argentins.
Francisco Moreno mourut en 1919 sans jamais avoir vu le glacier qui porte son nom. Cette ironie du sort s’explique par la forme et les dimensions du lac Argentin, ainsi que par le relief qui l’entoure. Il est orienté d’est en ouest avec une longueur de près de 100 km et une largeur d’environ 15 km. Avec une superficie de 1 560 km² et 687 km de berges, il s’agit du plus grand et du plus austral des lacs de Patagonie argentine.
De plus, le lac Argentin se divise en deux bras à l’ouest. Le « Bras Nord », lui-même divisé en plusieurs bras. Puis le « Bras Sud », qui se sépare en deux avec le canal de Los Témpanos (canal des icebergs) et le Brazo Rico. Le glacier Perito Moreno se situe au confluent de ces deux derniers, caché derrière une péninsule grossièrement circulaire de 389 km², et de 1 602 m d’altitude (péninsule de Magellan).
Quand bien même situé sur une embarcation au milieu du lac, il serait impossible d’apercevoir le glacier. Il faudrait emprunter le canal de Los Témpanos et contourner la péninsule pour l’avoir en champ de vision.
Il est impossible d’apercevoir le glacier Perito Moreno depuis la cuvette principale du lac Argentin. Capture d’écran Google Maps.
Un glacier en mouvement constant
Aux portes de la Terre de Feu, à seulement 560 km d’Ushuaïa, le glacier qui surprend toujours la communauté scientifique se situe presque au bout du monde. Le territoire andin est frappé par un climat extrême, aux températures rudes et aux vents violents, ce qui participe à la régénération du Perito Moreno.
En effet, la partie culminante du glacier, dans les Andes chiliennes australes, reçoit d’importantes chutes de neige toute l’année. Cette neige s’accumule et se transforme en glace à 2 100 m d’altitude. Puis elle suit une surface déclive jusqu’à la partie basse du glacier (front glaciaire), à seulement 187 m d’altitude, au niveau du lac Argentin.
Le glacier Perito Moreno se forme à 2100 m d’altitude. Il glisse dans un couloir jusqu’au lac Argentin, à 187 m d’altitude. Crédit photo : Claudia Blauensteiner via Wikimedia Commons.
Contrairement aux autres glaciers dont la partie basse flotte sur l’eau, le front glaciaire du Perito Moreno est immergé. Lorsque la glace qui s’est formée au Chili arrive finalement devant le lac Argentin, elle se détache du glacier pour devenir un iceberg. C’est ce que les glaciologues appellent le vêlage.
Puis la glace se forme de nouveau en altitude, glisse le long de la pente et termine sa course dans le lac. C’est un cercle vertueux. Le Perito Moreno est une exception qui progresse à raison de 2 m par jour, soit de plus de 700 m par an.
« Il est en balance. Cela signifie que la glace qui se crée dans la montagne est la même que celle qui se perd à l’avant du glacier. La glace avance continuellement à cause de la gravité, elle est poussée » expliquait Eduardo Schule, guide dans la région argentine de Santa Cruz, aux journalistes d’Euronews en décembre 2019.
Situé à la frontière entre le Chili et l’Argentine, le glacier Perito Moreno déroute les scientifiques. Il est l’un des rares à ne pas reculer… Crédit vidéo : Euronews
Dans l’enceinte du site figurant au patrimoine mondial de l’Unesco, le Perito Moreno offre un spectacle hors du commun. Par intermittence allant d’une année à une décennie, sa langue glaciaire avance jusqu’à buter contre la péninsule de Magellan sur la rive opposée. Il se transforme alors en barrage naturel, coupant le lac Argentin en deux : le canal de Los Témpanos reliant la paroi de glace à la cuvette principale du lac, et le Brazo Rico isolé au sud. Le niveau de l’eau dans ce dernier monte alors considérablement et exerce une forte pression sur le glacier. Il finit par se rompre en divers endroits, libérant dans le lac d’immenses blocs de glace par vêlage.
Le glacier Perito Moreno avance par gravité, vêle dans le lac Argentin, puis se reforme en altitude. C’est une danse circulaire vertueuse, un mouvement permanent qui n’a de cesse de dérouter les scientifiques, dans un contexte de réchauffement climatique.
Le glacier Perito Moreno vient buter contre la péninsule de Magellan et se transforme en barrage naturel. Crédit photo : Marianocecowski via Wikimedia Commons.
Les glaciers de Patagonie : un patrimoine naturel à préserver
Faune et flore de la région glaciaire
La région australe des Andes n’abrite pas que des glaciers. Endémique ou exogène, la faune s’observe autour d’une flore étagée.
À l’est de la région glaciaire, se trouve une steppe semi-aride composée de savanes et de brousses tempérées. Cette plaine rocailleuse abrite aussi des arbustes épineux tels que le calafate (berbéris à feuilles de buis). La steppe patagonienne est une écorégion terrestre définie par le Fonds mondial pour la nature (WWF). Elle appartient au biome des prairies et terres arbustives de montagne, et à l’écozone néotropicale.
À l’ouest, en se rapprochant de la cordillère, le bosque andino patagónico (forêt andine) s’élève depuis une aire de basse altitude jusqu’aux neiges éternelles. Le domaine montagnard présente des feuillus comme le chêne pellín et le lenga (hêtre du sud).
La steppe patagonienne
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Le lenga, hêtre de la Terre de Feu, ou encore hêtre blanc, peuple les forêts andines australes. Il peut mesurer jusqu’à 30 m et pousse jusqu’à 1000 m d’altitude. Crédit photo : Claudio Élias via Wikimedia Commons.
Forêt de feuillus typique de la pointe sud-américaine. Crédit photo : Butterfly voyages via Wikimedia Commons.
L’araucaria est un conifère originaire de la cordillère des Andes. Le plus grand individu recensé se trouve au Chili, il mesure 50 m de hauteur. Crédit photo : MonicaSP54 via Wikimedia Commons.
Arbuste épineux natif du sud de l’Argentine, le calafate est le symbole de la Patagonie. Comestibles, ses fruits servent à la confection de confitures, de tisanes et de liqueurs. Crédit photo : Banfield via Wikimedia Commons.
Originaire du Chili et d’Argentine, le fuchsia de Magellan a été introduit en Europe et sur l’île de La Réunion au XIXe siècle. Ses baies sont comestibles. Crédit photo : McKay Savage via Wikimedia Commons.
Outre le bétail domestiqué dans la pampa, les Andes patagoniennes hébergent une certaine variété d’espèces animales.
La truite arc-en-ciel a été introduite dans le lac Argentin en 1904. C’est le poisson le plus répandu dans les eaux douces de la région.
Le puma, le chat sauvage et le huiña (chat des champs endémique) font partie des félidés populaires autour de la chaîne montagneuse.
Le condor des Andes, le caracara (faucon endémique à gorge blanche), la buse aguia (rapace gris bleuté aux serres jaunes), et la chevêchette australe (petite chouette sud-américaine), sont visibles dans le ciel de Patagonie.
Le guanaco (lama sauvage) est un camélidé des clairières forestières.
Le pudú du sud est un cervidé endémique des forêts chiliennes et d’Argentine.
Le huemul est un cerf endémique peu farouche, en voie de disparition.
Le sanglier, le lièvre, le lapin, le vison et le castor ont été introduits par l’homme dans la région.
La faune patagonienne
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Le condor des Andes. Crédit photo : Natalia Reyes Escobar via Wikimedia Commons.
La chevêchette des Andes vit au nord de l’écozone néotropique. Soit brune, soit rousse, elle mesure entre 15 et 19 cm de longueur. Crédit photo : Andreï Goulivanov via Wikimedia Commons.
Contrairement à son proche parent le lama, le guanaco n’a pas été domestiqué. Crédit photo : Fernando Venegas Traba via Flickr.
Cervidé endémique du sud andin vivant au sein de la cordillère, le huemul est classé "en danger d’extinction" par l’UICN. Crédit photo : Natalia Reyes Escobar via Wikimedia Commons.
Le pudú est le plus petit cervidé du monde. Les taches blanches des jeunes individus disparaissent lorsqu’ils grandissent. De petites cornes apparaissent sur la tête des mâles. Crédit photo : Paula Francisca Parra Romero via Flickr.
Impact des transformations du glacier sur l’environnement local
Le rôle des glaciers dans le système climatique global est de réguler la température de la Terre en réfléchissant la lumière du soleil dans l’espace (effet albédo). En étudiant leurs mouvements, les scientifiques peuvent déterminer leur réactivité face aux changements climatiques.
La superficie du Perito Moreno subit des variations et son comportement changeant a un impact sur le niveau et la température du lac Argentin. Cela affecte l’écosystème environnant, avec des retombées manifestes sur la faune et la flore locale, ainsi que sur les populations qui dépendent des ressources naturelles de la région. De surcroît, l’ensemble des glaces qui alimentent le lac, et les autres systèmes glaciaires du parc national diminuent plus rapidement qu’ailleurs. La province de Santa Cruz fait partie des régions du monde les moins touchées par le réchauffement climatique, mais elle n’échappe pas à ses conséquences. Et bien que le glacier Perito Moreno soit exceptionnellement stable, ce n’est pas le cas de ses semblables dans les Andes méridionales. De 1947 à 1996, il a globalement avancé de 4,1 km. Depuis, il n’a pas reculé. Cependant, sur la même période, le nord de la Patagonie a perdu 270 km² de glace.
Le front glaciaire du Perito Moreno reflète sa couleur bleu céruléen dans les eaux laiteuses du lac Argentin. Crédit photo : Carina Avalos via Wikimedia Commons.
Le Río Santa Cruz prend source dans le lac Argentin, qui récolte lui-même les eaux du Perito Moreno. La grande quantité d’eau libérée dans ce fleuve pourrait être de courte durée. En effet, à mesure que les glaciers diminuent, cette source d’eau douce finira par s’épuiser.
Selon une étude publiée en 2019 dans la revue Nature Science, les glaciers andins sont parmi ceux qui diminuent le plus rapidement et qui contribuent le plus à l’élévation du niveau de la mer.
L’humain mis en cause
La quasi-totalité des glaciers du monde recule : c’est ce qu’ont permis de mesurer les dernières technologies par satellite. De nombreuses études permettent d’affirmer que la fonte des glaces va se poursuivre sur plusieurs décennies, voire plusieurs siècles.
Le 1er volet du 6ème rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) confirme avec exactitude, le 09 août 2021, l’origine anthropique du réchauffement climatique à partir de 1990. La période pendant laquelle la masse des glaciers a le plus diminué, court de 2010 à 2019. Elle est 3 fois inférieure à leur masse moyenne entre 1980 et 1989.
Selon l’Union internationale pour la conservation de la Nature (UICN), un tiers des sites du Patrimoine mondial perdront leurs glaciers d’ici à 2050, quels que soient les efforts engagés. Selon la même source, d’ici à 2100, c’est 50 % de ces sites qui verront disparaître leurs glaciers, si les émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine se poursuivent au rythme actuel.
Le glacier Perito Moreno fait face à la péninsule de Magellan, sur l’autre rive du lac Argentin. Crédit photo : Kristina Gain, Pexels
Le Perito Moreno est une curiosité de la Nature : une exception glaciaire qui avance. Son caractère fascinant attire chaque année plus de curieux. Mais dans un contexte de réchauffement climatique global, n’est-il pas utopique de croire qu’il restera invincible face à la hausse des températures ?
RETENEZ
Le parc national Los Glaciares est l’une des plus importante source d’eau douce de la planète.
Sa structure géologique et son environnement, font du Perito Moreno un glacier stable qui avance.
Le Perito Moreno est une exception : l’ensemble des glaciers recule sur Terre.
Rounce DR, Hock R, Maussion F, Hugonnet R, Kochtitzky W, Huss M, et al. Global glacier change in the 21st century: Every increase in temperature matters. Science [En ligne]. 6 janv 2023 [cité le 17 mars 2024];379(6627):78‑83. Disponible: https://www.science.org/doi/10.1126/science.abo1324
UNESCO Centre du patrimoine mondial [En ligne]. mondial UC du patrimoine. Parc national de Los Glaciares; [cité le 17 mars 2024]. Disponible: https://whc.unesco.org/fr/list/145/
Avant de plonger dans l’univers fascinant des cratères d’impact, il convient d’observer le phénomène qui les engendre : les météorites. Ces matières cosmiques, souvent des astéroïdes ou des comètes, traversent l’espace pour finalement entrer en collision avec notre planète. Les scientifiques en identifient des milliers chaque année. Seulement une faible quantité atteint la Terre. Voici une sélection de dix cratères emblématiques dans le monde, témoignages éternels de l’interaction entre la Terre et le cosmos.
Dôme de Vredefort : le plus grand connu sur Terre
Le dôme de Vredefort demeure le plus grand répertorié sur Terre. Son diamètre est estimé entre 170 et 300 km. La météorite à l’origine de sa formation a percuté la planète il y a 2 milliards d’années en Afrique du Sud près de Johannesburg. L’impact a laissé une cicatrice colossale de 40 km de profondeur et 100 km de largeur (dimensions du dôme central). À l’époque, la collision a généré une chaleur intense et des ondes de choc qui ont entraîné la fusion du substrat rocheux et la formation d’une structure en dôme unique. Aujourd’hui, le cratère emblématique de Vredefort est inscrit au Patrimoine Mondial de l’Unesco. Il attire les nombreux curieux, et offre un paysage singulier qui témoigne de la puissance des forces cosmiques. Le cratère est également considéré comme un site géologique majeur, car il expose des roches du manteau terrestre mises à nues par la force de l’impact de la météorite. Habituellement, ce phénomène est invisible à la surface.
Image satellite du cratère Vredefort. Crédit photo : Nasa Earth Observatory
Sudbury : un bassin géologique unique
Camouflé au Canada, le cratère Sudbury est vieux de 1,849 milliard d’années. Il est difficilement reconnaissable depuis le ciel puisqu’il n’a plus la forme circulaire typique des cratères de météorites. Au cours du temps, il a subi des transformations géologiques (tectoniques et volcaniques) et a fini par former un bassin qui s’étend aujourd’hui sur plus de 60 km de long. Avec un diamètre d’au moins 130 km, équivalant à la distance entre Paris et Reims, cet impact a modelé l’histoire géologique du Canada. Le choc a provoqué la vaporisation d’une partie du substrat rocheux, qui a généré des dépôts de sulfures métalliques. C’est ainsi que des gisements de nickel, de cuivre et de palladium ont été créés. Ces découvertes ont conduit à l’essor de l’industrie minière dans la région. Aujourd’hui, cet héritage reste qualifié de complexe et parfois néfaste pour le paysage canadien (pollution de la région avec du dioxyde de soufre et des métaux libérés lors des processus de fusion). Au fil des décennies, des efforts ont été déployés pour restaurer la santé des terres et de l’eau du bassin. Le cratère de Sudbury est également un site d’intérêt scientifique, car il contient des traces de vie microbienne qui remontent à 1,8 milliard d’années, parmi les plus anciennes connues sur terre.
Image satellite du cratère Sudbury au Canada. Crédit photo : Nasa Earth Observatory
Acraman : un cratère australien emblématique
Situé dans le sud de l’Australie, le cratère d’Acraman mesure près de 90 km de diamètre, selon les estimations, soit la distance entre Paris et Chartres. La collision entre la météorite et la Terre date de 580 millions d’années. Initialement accompagné de tsunamis dévastateurs, le cratère est désormais un site d’étude géologique. L’érosion endurée au fil des ères a altéré sa forme originelle. Aujourd’hui, nous visualisons une structure déformée des roches sous-jacentes occupée par plusieurs lacs. Cette transformation naturelle intrigue les scientifiques depuis les années 1970. Ils pensent que cet impact a été si fort qu’il aurait engendré de profondes transformations environnementales. Il aurait peut-être même affecté la vie sur la planète, en provoquant un grand changement dans les types de plantes et d’animaux qui évoluaient à l’époque. Des études autour de cet événement continuent d’être menées pour comprendre comment cet impact a pu affecter la vie sur Terre. Les scientifiques cherchent des traces de l’impact en Australie et dans d’autres parties du monde.
Vue satellite du cratère Acraman en Australie. Crédit photo : Nasa Earth Observatory
Meteor Crater : une fenêtre sur un impact récent
Formé il y a près de 50 000 ans, le cratère emblématique connu sous le nom de Barringer Crater est probablement le plus récent sur Terre. L’impact d’un objet céleste d’environ 45 km de diamètre et la surface de la Terre s’est produit aux USA, en Arizona, à l’est de Flagstaff. Avec un diamètre d’environ 1,2 km, l’impact a laissé un cratère remarquablement préservé, autrefois occupé par un lac. Ce site mythique a été un terrain d’entraînement pour les astronautes de la NASA. Au cours des années 1960, le cratère servait de base d’exercices dans le cadre du programme Apollo, qui visait à envoyer des hommes sur la Lune. Il les aidait à se familiariser avec les conditions lunaires, en particulier la géologie, la topographie et la navigation. Meteor Crater reste emblématique et attise la curiosité de bon nombre de passionnés de météorites ou de touristes. De multiples activités ont vu le jour au cœur du site, comme les différents points de vue pour des clichés uniques ou encore des la Lune pour comprendre comment s’est formé le site.
Meteor Crater aux Etats-Unis est l’un des cratères les plus jeunes sur Terre. Crédit photo : Adobe Stock
Chicxulub : le crépuscule des dinosaures
Le cratère le plus emblématique pour son rôle présumé dans l’extinction des dinosaures. La collision a eu lieu il y a près de 66 millions d’années. Chicxulub est partiellement enfoui sous le golfe du Mexique et la péninsule du Yucatán. Avec un diamètre de 150 km, cet impact massif a profondément influencé l’histoire de la vie sur Terre. Les études récentes révèlent que le choc a libéré une quantité phénoménale d’énergie. D’importants incendies de forêt se sont déclenchés à l’échelle mondiale et ont entraîné des changements climatiques majeurs. Le cratère de Chicxulub est considéré comme l’un des événements les plus importants de l’histoire géologique de la Terre, car il marque la fin du Crétacé et le début du Paléogène. Ce fut une période de transition majeure dans l’évolution des espèces.
Vue satellite du cratère du Chicxulub dans la golfe du Mexique. Crédit photo : Tim Peake – Agence spatiale européenne
“Incapable de trouver le sommeil, il regardait les étoiles et les météorites qui, à chaque instant, surgissaient et disparaissaient dans l’obscurité, déchirant le ciel sombre. Fred Uhlman”
Manicouagan : l’œil de Québec ou l’anneau de feu
Le cratère de Manicouagan, situé au Canada dans la province du Québec, reste l’un des plus anciens et des plus beaux connus sur Terre. Formé il y a environ 215 millions d’années, il a un diamètre d’environ 90 km et se distingue par sa forme circulaire. Dans les années 1960, le cratère est devenu un réservoir artificiel dans le but de produire de l’hydroélectricité. Surnommé parfois « l’œil de Québec » ou « l’anneau de feu », il est visible depuis l’espace. Le cratère de Manicouagan est également un site d’intérêt scientifique, car il contient des roches météoritiques rares, comme la maskelynite, un minerai vitreux formé à haute pression lors de l’impact de la météorite.
Image satellite du cratère Manicouagan au Canada. Crédit photo : Nasa Earth Observatory
Popigaï : un regard dans les profondeurs de l’histoire terrestre
Niché en Sibérie, le cratère de Popigaï compte parmi les plus grands connus sur Terre avec un diamètre de 100 km. L’impact avec un astéroïde a eu lieu il y a près de 35 millions d’années. Popigai attise la curiosité des scientifiques qui ont récemment découvert des diamantsd’impact exceptionnellement préservés dans le cratère. Leur composition due à la transformation du graphite sous l’effet de la pression et de la température leur permet d’être parmi les plus purs au monde. Leur valeur est estimée à des milliards de dollars.
Image relief du cratère Popigaï en Sibérie. Crédit photo : Nasa Earth Observatory
Astroblème d’Aorounga : les marques d’un astéroïde au cœur du Tchad
C’est au Tchad, il y a environ 345 millions d’années que l’astroblème d’Aorounga s’est formé. Ce cratère de formation complexe est situé vers le nord du Tchad mesure 12 km de diamètre. Les caractéristiques géologiques du cratère suscitent l’intérêt de nombreux scientifiques. Avec l’étude de l’astroblème, ils cherchent à comprendre les conséquences de telles collisions sur la vie et l’évolution de la planète. Aorounga fait partie d’une famille de trois cratères emboîtés dont deux sont enfouis sous les dépôts de sable du désert. Cela suggère que l’astéroïde s’est fragmenté en plusieurs météorites avant de percuter le globe terrestre. Autre particularité de l’astroblème d’Aorounga : les Yardangs. Ces crêtes rocheuses formées par un vent unidirectionnel traversent la structure en formant des lignes visibles depuis l’espace.
Image satellite du cratère Aorounga au Tchad. Crédit photo : Nasa Earth Observatory
Astroblème de Rochechouart : un impact qui a façonné l’Hexagone
C’est en France, situé à la limite de deux départements, entre la Charente et la Haute-Vienne que s’observe le résultat d’un impact vieux de près de 214 millions d’années. Aplani par des millions d’années d’érosion, il demeure invisible dans le paysage actuel. Nommé astroblème de Rochechouart-Chassenon, le cratère mesurerait 23 km de diamètre. Les témoins de l’impact d’un astéroïde dans cette région sont corroborés par la présence de brèches d’impact, des roches broyées et fondues. Elles se sont formées lors de l’impact sur le socle limousin. Ces roches terrestres modifiées, dites impactites, ont été exploitées en carrière pour servir à la construction de certains bâtiments de la région. Aujourd’hui, l’astroblème de Rochechouart demeure un site d’intérêt culturel, car il abrite un musée dédié à la géologie et à l’astronomie, ainsi que le parc naturel de Millevaches en Limousin.
La France a été frappée par géocroiseur il y a 214 millions d’années au niveau de l’actuel plateau de Millevaches en Limousin. Crédit photo : Adobe Stock
Chesapeake : le cratère enfoui de la baie de Chesapeake
Sur la côte est des États-Unis, la Baie de Chesapeake abrite un cratère formé il y a environ 35 millions d’années. Il mesure près de 85 km de diamètre. La collision entre la Terre et la météorite a eu des répercussions notables sur la géologie de la région. Les scientifiques ont pu récolter des indices de l’impact dans les sédiments marins. Les informations récoltées restent cruciales pour comprendre les changementsenvironnementaux survenus après le choc. L’impact à l’origine de la formation du cratère de Chesapeake a créé une faille dans la croûte terrestre, ce qui a exercé une influence sur la qualité de l’eau potable dans la région. La faille a permis à l’eau salée de s’infiltrer dans les aquifères souterrains, rendant l’eau non potable.
Image de la zone d’impact du cratère Chesapeake aux États-Unis. Crédit photo : USGS
Chacun de ces cratères d’impacts de météorites offre une fenêtre sur le passé, et nous rappelle la fragilité de la Terre face aux forces cosmiques qui ont sculpté notre monde.
RETENEZ
Il existe des milliers de cratères d’impacts météorites sur la planète. La plupart ont été érodés et ne sont plus visibles dans le paysage.
Selon la NASA, environ 200 météorites de plus de 10 grammes tombent sur Terre.
Certains sont responsables de dérèglements climatiques et de bouleversements environnementaux importants.
UNESCO Centre du patrimoine mondial [En ligne]. mondial UC du patrimoine. Dôme de Vredefort; [cité le 6 mars 2024]. Disponible: https://whc.unesco.org/fr/list/1162/
1.
Williams GE, Gostin VA. Acraman – Bunyeroo impact event (Ediacaran), South Australia, and environmental consequences: twenty-five years on. Australian Journal of Earth Sciences [En ligne]. 1 sept 2005 [cité le 6 mars 2024];52(4‑5):607‑20. Disponible: https://doi.org/10.1080/08120090500181036
1.
Jr JW, Powars D, Gohn GS. Studies of the Chesapeake Bay impact structure - Introduction and discussion. US Geological Survey Professional Paper. 1 janv 2006;A2‑23.
Meteor Crater | Barringer Space Museum [En ligne]. Meteor Crater | Barringer Space Museum | Winslow, AZ; [cité le 6 mars 2024]. Disponible: https://meteorcrater.com/
Au cœur de l’outback, l’arrière-pays semi-aride australien, à plus de 400 km (et 5h de route) de la ville la plus proche d’Alice Spring, se dresse fièrement UluruAyers Rock. Situé au centre de l’Australie, dans le Territoire du Nord, il fait partie du parc national d’Uluru-Kata Tjuta, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1987. Ses origines controversées, sur lesquelles planent les légendes du peuple aborigène en font un lieu mystique, animé par une biodiversité étonnamment riche et souligné par les lumières flamboyantes du soleil couchant.
Uluru Ayers Rock, deux noms, une double identité
Bien avant que les européens ne débarquent en Australie, le rocher aujourd’hui le plus connu de l’outback s’appelait Uluru. Il a été nommé ainsi par le peuple aborigène Pitjantjatjaras (prononcer “pigeon-jarrah”) établi dans la région et attiré par le site pour les nombreux points d’eau que forment ses anfractuosités. Il n’existe pas d’équivalence connue en langue européenne pour traduire ce mot.
En 1873, William Christie Gosse, explorateur australien d’origine britannique, est le premier non-aborigène à découvrir et gravir le rocher d’Uluru. Il le baptise Ayers Rock en l’honneur d’Henry Ayers alors premier ministre et secrétaire en chef de l’Australie-Méridionale. Le nom de Ayers Rock sera largement utilisé, notamment dans la communauté blanche, jusqu’en 1993. A cette date, le site est renommé Ayers Rock/Uluru, devenant la première entité du Territoire du Nord à recevoir un double nom.
En 2002, ce double nom est inversé sous la requête de l’Association régionale de tourisme d’Alice Spring. Le nom officiel du rocher est aujourd’hui Uluru Ayers Rock. Les deux termes peuvent être utilisés pour évoquer le rocher, bien que dans le parc national, le terme originel d’Uluru soit toujours employé.
Uluru au coucher du soleil. Crédit photo : Weyf, CC0, via Wikimedia Commons.
Uluru, petit rocher aux grandes origines
Morphologie du rocher le plus célèbre d’Australie
Le rocher d’Uluru Ayers Rock est en forme de losange. Au Sud-Ouest, il arbore des crêtes biseautées, des grottes béantes situées à 35-60 m au-dessus du niveau de la plaine et est entaillé de trois vallées. Le sommet du rocher forme un plateau piqué de nombreuses dépressions. Pendant et après les fortes pluies, les cours d’eau s’écoulent du plateau, provoquant des chutes d’eau, notamment sur la face nord-est caractérisée par des falaises abruptes.
Uluru : le roche sacré
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Image satellite d’Uluru sur laquelle les stries orientées NO-SE sont visibles à la surface du rocher. Crédit image : Google Earth.
Vue aérienne d'Uluru. Crédit photo : Corey Leopold, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons.
Bassins rocheux au sommet d'Uluru. A l'arrière plan le Bassin d'Amadeus et l'inselberg de Kata Tjuta. Crédit photo : Jburger234, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons.
Au sommet d'Uluru, de nombreuses dépressions entaillent le plateau rocheux. Crédit photo : Ed Dunens, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons.
Les falaises abruptes du côté nord-est sont marquées par l'action des cascades qui se forment lors de la saison des pluies. Crédit photo : Phil Whitehouse from London, United Kingdom, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons.
De ses 877 m d’altitude, Uluru Ayers Rock domine les plaines environnantes d’environ 350 m de hauteur. C’est ce qu’on appelle un inselberg. Ce terme d’origine allemande, contraction de Insel, île, et Berg, montagne, définit un relief résiduel isolé dominant une plaine ou un plateau. Un inselberg est l’équivalent terrestre d’un iceberg. Le parc national d’Uluru-Kata Tjuta, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1987, valorise et protège les deux inselbergs d’Uluru et de Kata Tjuta (aussi connu sous le nom de Monts Olga). Au sein du parc, comme dans tout l’outback australien, ce qui frappe le visiteur est sans nul doute cette couleur rouille digne de paysages martiens et qui trouve son origine dans la roche.
Carte du parc national d’Uluru-Kata Tjuta classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Crédit image : Angélie Portal (Crédit photo : 2023 Google Earth Image Landsat / Copernicus).
De quoi est constitué le rocher d’Uluru Ayers Rock ?
La roche qui constitue Uluru Ayers Rock est de l’arkose : il s’agit d’un grès issu d’une roche sédimentaire détritique terrigène. Les sédiments sableux qui ont durci pour former cette arkose trouvent leur origine dans l’érosion des anciennes montagnes environnantes qui étaient composées, en grande partie, de granite. L’arkose est une roche à grains grossiers, riche en feldspath. Dans certaines anfractuosités du rocher d’Uluru ou à l’intérieur de ses grottes, la roche est naturellement de couleur gris-vert. Mais la plupart des surfaces exposées aux intempéries portent une patine d’oxyde de fer qui confère au rocher sa couleur rouille si caractéristique.
Détail de la surface de l’arkose constituant le rocher d’Uluru. Crédit photo : Peter Jones, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons.
La surface d’Uluru est marquée par de très nombreuses stries orientées Nord-Ouest Sud-Est. Ces stries sont en réalité des bancs de grès plus ou moins altérés. Bien qu’ils se soient mis en place à l’horizontale, ces bancs présentent aujourd’hui un pendage quasiment vertical. Ces particularités morphologiques sont le résultat de processus de mise en place et d’évolution géologique complexes.
Les bancs verticaux de grès plus ou moins altérés donnent à la surface cet aspect strié. Crédit photo : Phil Whitehouse from London, United Kingdom, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons.
Une origine géologique encore débattue
L’origine géologique des inselbergs d’Uluru et Kata Tjuta illustre parfaitement la dichotomie qui peut exister au sein d’une communauté scientifique. Depuis les années 1980, le scientifique C.R. Twidale et ses collaborateurs proposent une origine géologique superficielle suivie d’une évolution tectonique profonde. Mais en 2010, le chercheur K. Patrick propose une hypothèse alternative et évoque une succession d’événements météorologiques cataclysmiques et extrêmes pour expliquer la formation du rocher. Bien que ces deux modèles co-existent, celui de Twidale est retenu par le gouvernement australien chargé de la gestion du parc national.
La partie émergée d’une longue histoire géologique : l’hypothèse de Twidale
Uluru se dresse au milieu du bassin d’Amadeus, un bassin sédimentaire vieux de 900 millions d’années. A cette période, une grande partie de l’Australie intérieure s’est enfoncée sous le niveau de la mer. Ce phénomène de subsidence a donné naissance à une immense dépression (le bassin d’Amadeus) dans laquelle les sédiments se seraient déposés, couches après couches, pendant près de 600 millions d’années.
Il y a environ 550 millions d’années, des chaînes de montagnes se sont formées, lors d’un événement que les géologues appellent l’orogenèse des chaînes de Petermann. Durant cette période, les sédiments les plus anciens du bassin d’Amadeus auraient été plissés et déformés. De plus, à cette époque, aucune végétation ne protégeait les reliefs. Ils étaient alors soumis à une altération et une érosion très intenses. Ainsi, d’énormes quantités de sédiments auraient été emportées par les pluies. Ils auraient formé des cônes alluviaux au pied de chaînes de montagnes. C’est à cette période que les sables arkosiques à l’origine des roches d’Uluru se seraient mis en place, sur un épaisseur de 2500 m.
Autour de 500 millions d’années, une mer peu profonde a envahi la région. Des sédiments marins se seraient alors déposés au-dessus des cônes alluviaux existants. Et sous l’effet de la compaction et de la cimentation dû au poids des nouveaux sédiments déposés, les sables arkosiques d’Uluru se seraient transformés en arkose.
Entre 400 et 300 millions d’années, lors de l’orogenèse d’Alice Springs, les roches de la région auraient subi de nouveaux phénomènes de plissement et de fracturation. Puis, toute la région s’est soulevée au-dessus du niveau de la mer qui se serait alors retirée. Les couches horizontales de l’arkose d’Uluru auraient été pliées puis redressées à 80°-85°, vers leur position actuelle. Depuis cette période, seule l’érosion affecte les formations géologiques de la région.
Uluru serait donc la pointe visible de formations rocheuses qui s’étendent loin sous le sol, jusqu’à 6 km. Mais cette hypothèse admise depuis les années 1980 a été remise en question en 2010.
La formation géologique d’Uluru. Crédit image : Angélie Portal, modifiée d’après Department of Climate Change, Energy, the Environment and Water.
Les vestiges d’une inondation cataclysmique : l’alternative de Patrick
Il y a environ 500 Ma, un véritable déluge se serait abattu sur la bassin d’Amadeus, créant une inondation cataclysmique. Des masses considérables de matériaux auraient alors été arrachées aux reliefs environnants et déposées dans le fond du bassin. Ces dépôts auraient ensuite subi les effets d’une activité tectonique intense. Sous l’action de phénomènes de plissement, d’étirement et de remodelage, les dépôts initialement horizontaux auraient alors acquis leur orientation et leur pendage actuels.
Après une longue période, la décrue aurait commencé entraînant la remobilisation des dépôts du bassin d’Amadeus. Une partie de ces dépôts auraient été lessivée vers la mer, l’autre partie aurait été redéposée. Les sables arkosiques à l’origine des grès d’Uluru seraient des résidus de dépôts ayant résisté à la décrue.
Enfin, il y environ 20 Ma, les pluies abondantes auraient entraîné la formation d’un immense lac au sein du bassin d’Amadeus. La profondeur de ce lac aurait atteint 180 m mais son niveau aurait varié au cours du temps. L’action des vagues serait à l’origine de la morphologie particulière du rocher d’Uluru.
Une morphologie façonnée par l’érosion
La morphologie du rocher d’Uluru est très particulière. D’une part, la surface du rocher se débite par endroit en plaques de roche. Ce curieux phénomène proviendrait de fissures parallèles à la surface qui se créeraient sous l’effet des gradients de température très contrastés entre le jour et la nuit, et d’une saison à l’autre.
D’autre part, Uluru est également marqué par la présence de nombreuses grottes. Ces anfractuosités proviennent probablement d’une combinaison entre une érosion mécanique (action du sable et du vent, en particulier dans la partie basse du rocher, infiltration et ruissellement de l’eau de pluie) et des phénomènes physico-chimiques (décomposition de la roche sous l’effet de l’humidité notamment). Ces grottes ont des formes très particulières en forme de sourire ou encore de vagues. Ces dernières ont d’ailleurs rendu le site d’Uluru très célèbre, les visiteurs se photographiant tel des surfeurs glissant sur des vagues de roches rouges. Mais avant d’accueillir les touristes, ces nombreuses grottes ont longtemps abrité les Aborigènes vivant dans la région. Aujourd’hui encore ces grottes portent les traces de cette occupation humaine à même leurs parois.
Uluru et ses grottes
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Sous l'effet de l'érosion, la surface d’Uluru se débite en grandes plaques de roche. Crédit photo : Phil Whitehouse from London, United Kingdom, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons.
Grottes en formation sur les pentes d’Uluru. Crédit photo : Kyle Taylor from London, 84 Countries, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons.
L'intérieur de certaines grottes en forme de vague sont accessibles aux visiteurs qui peuvent alors se prendre pour des surfers ! Crédit photo : rheins, CC BY 3.0, via Wikimedia Commons.
Grotte en forme de sourire caractéristique des anfractuosités visibles à Uluru. Crédit photo : June Lennie, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons.
Uluru Ayers Rock : un lieu sacré à protéger
Uluru, façonné au « Temps du rêve »
Les peuples aborigènes d’Australie considèrent que Uluru a été créé au Temps du Rêve. Cette époque, appelée le Tjukurpa en langue Pitjantjatjaras, le peuple aborigène Anangu du centre de l’Australie, incarne l’époque où les ancêtres des Premiers Hommes façonnèrent la Terre telle que nous la connaissons. Ce site représente une véritable relique vivante, revêtant une sacralité profonde, où les esprits ancestraux perdurent selon la croyance anangu. Chaque individu anangu est lié à ces lieux, témoignant ainsi du patrimoine culturel et spirituel de ce site. Le Temps du Rêve, encadrant la mythologie, l’histoire et les lois traditionnelles, est également présent dans les traces gravées sur Uluru, telles que les entailles symboliques du combat légendaire entre Kuniya (la femelle python des rochers) et Liru (un serpent venimeux), marquant la fin du Temps du Rêve et le début de l’âge des Hommes.
Un lieu de transmission du peuple Anangu
De nombreuses peintures rupestres sont visibles dans les grottes d’Uluru. Elles sont les témoins de la transmission des connaissances des Aborigènes Anangu. Pendant des dizaines de milliers d’années, le site a été le cœur de l’éducation des Anangus. Les parois des grottes ont été utilisées comme de véritables tableaux noirs d’écoles sur lesquels les professeurs ont illustré des leçons sur la culture et l’histoire de ce peuple. La superposition des couches de peintures dans certaines grottes témoigne du passage successif des générations. Particulièrement fragiles, ces peintures font l’objet d’une attention particulière et représentent un défi en termes de préservation face aux éléments naturels et aux visiteurs.
Peintures aborigènes visibles dans les caves d’Uluru. Crédit photo : Kim Dingwall, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons.
Un tourisme issu du colonialisme, adapté aux traditions ancestrales
Uluru est à la fois le cœur symbolique et géographique de l’Australie. La culture aborigène australienne est l’une des plus anciennes au monde et remonte à au moins 80 000 ans. Plusieurs études ont démontré que les Aborigènes géraient et cultivaient leurs terres d’une manière sophistiquée. Pourtant, au moment de la colonisation, les britanniques ne reconnaissent pas la culture aborigène comme une culture avancée. Lorsqu’en 1873, William Gosse découvre Uluru, il le (re-)baptise Ayers Rock. Cette anglicisation marque la colonisation du rocher, au détriment de l’histoire et des connaissances culturelles profondes du peuple Anangu. La déconnexion qui se fait alors entre ces deux cultures a longtemps persisté et alimente encore les débats autour de la gestion touristique actuelle du site.
Dans les années 1930, le tourisme se développe sur le site d’Uluru. A cette même période, la politique d’assimilation mise en place par les colons dépossède le peuple Anangu de ses biens et les éloignent dans des réserves (à l’image, plus connue, de la politique indienne d’assimilation pratiquée aux Etats-Unis). Dans les années 1950, la création du Parc National d’Ayers Rock promeut le tourisme vers Uluru et entraîne la construction des infrastructures nécessaires à l’acheminement et l’accueil des touristes dans ce lieu reculé d’Australie (routes, motel et piste d’atterrissage).
Mais dans les années 1970, un mouvement appelé “Land Rights” (traduction littérale : droits de propriété) émerge. Il marque le retour du peuple Anangu sur leurs terres ancestrales dont ils revendiquent la souveraineté. Ces revendications aboutissent à la rétrocession du site au peuple Anangu en 1985. Mais la gestion du Parc National reste partagée entre les Aborigènes et le Commonwealth. La double reconnaissance par l’UNESCO du parc national d’Uluru-Kata Tjuta comme bien naturel en 1987, puis comme bien culturel en 1994 souligne le dualisme qui existe autour de ce site.
Le point sensible de la co-gestion du site d’Uluru est celui de l’ascension du rocher. Au-delà de l’atteinte culturelle que cette ascension pouvait porter au peuple Anangu, elle constituait également un défi en termes de sécurité (plus de 30 personnes sont décédées en faisant l’ascension, principalement de crise cardiaque) et de protection de l’environnement (dégradation et pollution). Ces dernières années, le site d’Uluru a accueilli environ 250 000 visiteurs par an. Mais depuis 1999, la proportion de visiteurs gravissant le rocher est passée de 70% à seulement 20%. La raison vient de la façon avec laquelle les membres du peuple Anangu ont co-géré le site jusqu’en 2019. A une interdiction formelle d’accès au sommet, ils ont préféré une approche plus pédagogique basée sur la diffusion du respect que leur culture ancestrale vouait à Uluru. Progressivement, les touristes ont pris conscience de ce que représente ce rocher dans la culture aborigène, choisissant de ne plus en effectuer l’ascension. La diminution de la fréquentation au sommet d’Uluru et le développement d’expériences touristiques alternatives autour du site ont abouti à la fermeture du chemin d’accès en octobre 2019.
Spectaculairement érigé au milieu de l’outback australien, le rocher rouge d’Uluru est un lieu de compromis, où culture ancestrale, biodiversité et tourisme coexistent aujourd’hui en parfaite harmonie.
Panneau d’interdiction de l’ascension d’Uluru en vigueur depuis 2019. Crédit photo : modifiée d’après Querent, CC BY 4.0, via Wikimedia Commons.
Une biodiversité qui a su s’adapter aux conditions extrêmes
Les cinq saisons d’Uluru
La partie du sud du Territoire du Nord australien où se situe Uluru est caractérisée par un climat semi-aride. La plus grande partie de l’année est caractérisée par une saison sèche durant laquelle la température moyenne maximale atteint les 38,4°C. La saison humide quant à elle concentre des précipitations qui restent faibles (environ 270 mm/an, trois fois moins que la moyenne en France hexagonale). Les températures moyennes minimales sont de 4,4°C.
Les Aborigènes qui peuplent cette région divisent l’année en cinq saisons intimement liées à la météo :
Piriyakutu (d’août à septembre) : à cette période arrive le piriya, un vent chaud et régulier qui souffle du nord et de l’ouest. Les animaux entrent en période de reproduction et les plantes fleurissent puis se parent de fruits et de graines ;
Mai wiyaringkupai/kuli (autour de décembre) : c’est la période la plus chaude de l’année. La nourriture se fait rare. De gros orages éclatent, apportant très peu de pluies mais les nombreux éclairs qui touchent le sol sont parfois à l’origine d’incendies ;
Itjanu/inuntji (de janvier à mars), la saison des pluies. La végétation s’épanouit à nouveau. Les orages alimentent les trous d’eau et les cascades jaillissent d’Uluru ;
Wanitjunkupai (de mars à mai) : les températures baissent et le ciel se couvre de nuages bas qui n’apportent pas de précipitations. Les reptiles commencent leur hibernation ;
Wari (de mai à juillet), les mois les plus froids. L’air sec et les gelées matinales assèchent la végétation.
Des espèces végétales et animales stupéfiantes
Malgré son caractère désertique, le parc national d’Uluru-Kata Tjuta présente une biodiversité étonnante. La faune et la flore y ont développé des adaptations uniques pour prospérer dans ce milieu hostile qu’est l’outback australien. Cette diversité revêt une grande importance pour les Aborigènes, les animaux ayant une grande signification culturelle tandis que les plantes fournissent nourriture, médicaments et outils traditionnels.
La région d’Uluru abrite plus de 400 espèces végétales, allant des eucalyptus aux prairies de spinifex. Des spécimens intrigants comme le bloodwood, dont la sève rouge évoque le sang, ou encore le mulga, dont les graines offrent une pâte semblable au beurre de cacahuètes une fois grillées et broyées, sont répandus. Le bois de mulga sert également à fabriquer les fameux boomerangs.
Cette végétation diversifiée soutient une faune variée, surtout des oiseaux, avec environ 180 espèces. Leurs chants et couleurs animent ce paysage aride. Les Aborigènes les nomment d’ailleurs selon leurs chants et les classent en fonction de leur habitat (zone rocheuse, spinifex, forêts ouvertes, bois de mulga, dunes de sable et plaines, et enfin les ruisseaux). Le parc abrite ainsi de nombreuses espèces communes, comme le diamant mandarin, mais également des espèces rares comme la magnifique perruche splendide. Nomades et migrateurs, ces oiseaux sont présents dans le parc au rythme des pluies et sont plus facilement observables le matin.
Le parc national est également très riche en reptiles et amphibiens. Il s’agit même de l’unique zone semi-aride de cette taille abritant une telle biodiversité en Australie. Parmi les soixante espèces de lézards, se trouve le deuxième plus grand au monde, le varan gilleni qui peut atteindre 2,5 m de long ainsi que le très stupéfiant diable cornu. Treize espèces de serpents sont également identifiées dans le parc ; attention seules deux ne sont pas venimeuses. Quatre espèces de grenouilles peuplent également le site. Ces amphibiens ont su s’adapter au climat semi-aride. Elles vivent profondément enfouies dans le sable. Lorsque que les pluies abondantes s’infiltrent jusqu’à elles, les grenouilles comprennent que les points d’eau sont pleins et émergent en grand nombre !
Les mammifères sont moins nombreux dans cette région, où l’observation des kangourous est possible, mais où prédominent les petits marsupiaux et les souris. Les dingos, canidés autochtones, y sont actifs principalement la nuit. Plus de la moitié des espèces de mammifères autochtones ont disparu dans cette zone du Territoire du Nord en quelques décennies. Le parc mène des programmes de réintroduction pour certaines espèces comme le Mala (wallaby-lièvreroux), ainsi que des initiatives de gestion pour protéger les espèces vulnérables, incluant des études annuelles et des brûlages pour créer des habitats adéquats.
Ayers Rock et sa biodiversité
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Le bloodwood est connu pour sa sève rouge qui s'écoule de l'arbre, lui donnant son nom qui signifie "bois sanglant". Crédit photo : John Tann from Sydney, Australia, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons.
Perruche splendide. Crédit photo : JJ Harrison, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons.
Lézard diable cornu. Crédit photo : Stu's Images, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons.
Les mottes de spinifex tapissent le sol au pied du rocher d'Uluru. Crédit photo : Nrafanan4, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
Pinsons diamant mandarin. Crédit photo : Jim Bendon from Karratha, Australia, CC BY-SA 2.0, via Wikimedia Commons.
Le brûlis : une gestion traditionnelle des écosystèmes
Les Aborigènes ont de tout temps recouru au brûlis qui consiste à incendier, de manière maîtrisée, des parcelles de petites tailles. Si l’utilisation du feu peut paraître incongru dans la gestion des écosystèmes, le brûlis offre des avantages dans ces régions semi-arides : il favorise la régénération et la croissance de la végétation. En chassant le gibier prédateur, il garantit également une nourriture abondante aux Aborigènes.
C’est aussi et surtout un outil efficace de lutte contre les grands incendies. En brûlant la charge de combustible disponible, surtout à la fin de la saison sèche, le brûlis limite les risques de formations de mégafeux comme ceux qui ont ravagé l’Australie en 2019-2020. Cette pratique a été négligée par les gestionnaires européens du parc à partir des années 1930. Dans les années 1940, des pluies abondantes ont conduit à une forte croissance de la végétation dans le parc. Puis, dès 1950, alimentés par 20 ans de végétation, de nombreux incendies se sont succédés, jusqu’en 1976, où deux incendies ont brûlé 75% du futur parc national. Les gestionnaires du site ont alors pris conscience de la nécessité de recourir à la pratique du brûlis qu’ils pratiquent maintenant avec les propriétaires traditionnels.
Le parc national d’Uluru-Kata Tjuta est donc un site aux origines géologiques et historiques profondément enracinées dans le temps, à la dualité culturelle marquée et à la biodiversité insoupçonnée mais fragile. Aujourd’hui, les Aborigènes et les autorités australiennes gèrent ce parc national de manière unique et remarquable, dans le respect de la nature et des coutumes ancestrales.
RETENEZ
Le site d’Uluru Ayers Rock a été dénommé quatre fois depuis sa découverte par les colons britanniques.
Uluru tire sa couleur rouge de l’oxydation du fer contenu dans l’arkose qui le compose et sa forme particulière liée à l’érosion.
L’origine géologique très complexe du site fait encore l’objet de débat au sein de la communauté scientifique.
Ce lieu sacré pour les Aborigènes est labellisé deux fois par l’Unesco : comme bien culturel d’une part et comme bien naturel d’autre part.
La cogestion du parc national est un exemple de coopération au service de la culture et de l’environnement.
Everingham P, Peters A, Higgins-Desbiolles F. The (im)possibilities of doing tourism otherwise: The case of settler colonial Australia and the closure of the climb at Uluru. Annals of Tourism Research [En ligne]. 1 mai 2021 [cité le 14 févr 2024];88:103178. Disponible: https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160738321000402
Twidale CR. Uluru (Ayers Rock) and Kata Tjuta (The Olgas): Inselbergs of Central Australia. Dans: Migon P, rédacteur. Geomorphological Landscapes of the World [En ligne]. Dordrecht : Springer Netherlands; 2010 [cité le 14 févr 2024]. p. 321‑32. Disponible: https://doi.org/10.1007/978-90-481-3055-9_33
La Terre. L’être humain foule son sol depuis des milliers d’années. Est-elle pour autant connue dans son entièreté ? Elle reste, encore aujourd’hui, l’objet de nombreuses expérimentations et de foisonnantes recherches. Qu’en est-il, par exemple, de cette question : quel est le poids de la Terre ? Surtout, comment les scientifiques ont-ils fait pour l’estimer ? Qui a réussi à calculer sa masse et comment s’y est-il pris ? Notre planète est-elle plus lourde de nos jours ? Partons à la découverte de l’estimation de la masse de la Terre, sans laisser de place à la demi-mesure.
Poids de la Terre : une première estimation faite au XVIIIe siècle
En 1798, plusieurs scientifiques du monde entier se sont interrogés sur un sujet qui fit alors débat : la densité moyenne de la Terre. Parmi eux se trouvait Henry Cavendish, physicien britannique qui a conduit de nombreuses recherches dans les différentes sciences physiques de son époque.
C’est au cours des expériences qu’il mena pour évaluer la densité de la Terre, que Henry Cavendish parvint à déterminer la masse de celle-ci. Mais avant d’établir ce constat, il lui fallut calculer différentes valeurs, dont une absolument essentielle : la constante universelle de la gravitation, nommée G.
Cette constante apparut pour la première fois en 1687, dans la loi d’Isaac Newton sur la gravitation universelle, mais Cavendish fut le premier à la mesurer. Au cours de ses recherches, il conçut en effet un dispositif appelé « balance de torsion » pour mesurer la force gravitationnelle entre deux corps.
Une balance de torsion inspirée du modèle de Henry Cavendish. Crédit photo : GOKLuLe 盧樂, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons
Cet objet, composé de deux boules de plomb suspendues aux extrémités opposées d’une barre horizontale, créait ainsi une balance. Deux boules plus petites furent placées près des plus grandes, générant ainsi une attraction gravitationnelle entre elles. En mesurant le très faible mouvement de la balance dû à cette attraction, Cavendish put calculer la force de gravité entre les boules. Il en déduisit une valeur : la valeur de la constante gravitationnelle, qui, pour l’époque, fut obtenue avec une grande précision.
Une fois cette valeur acquise, il fut nécessaire, pour calculer la masse de la Terre, d’en connaître deux autres, à savoir g, c’est-à-dire l’accélération de la pesanteur et R, le rayon de la Terre.
Concernant la première valeur, il s’agit de l’accélération que subit un objet lorsqu’il est soumis à la force d’attraction de la Terre, par exemple lorsqu’on le lâche et qu’il chute. Cette valeur (g) a été découverte au XVIIe siècle grâce aux mesures effectuées sur un pendule. Elle a été établie à 9,81m/s2.
Enfin, le rayon de la Terre quant à lui, était connu depuis Ératosthène (IIIe siècle avant J-C.) : sa valeur est approximativement de 6 400 km.
Ayant connaissance de ces différentes mesures, Henry Cavendish parvint finalement à établir la masse de la Terre, comme suit : MT = gRT2 / G.
Une masse conséquente, qui évolue relativement peu
Mais alors, combien pèse la Terre ?
Le résultat obtenu par Henry Cavendish en 1798 fut le suivant : 5,980 x 1024 kilogrammes. Autrement dit, pas loin de 6 000 milliards de milliards de tonnes, ou encore 6 septillions de kg, soit 6 suivi de 24 zéros.
Un nombre peu évocateur : à quoi peut-il être comparé ?
Prenons un exemple. En considérant la masse totale de la Terre, imaginons que nous devions en prélever 1 000 tonnes chaque seconde : il faudrait alors 190 milliards d’années pour épuiser l’entièreté de cette masse colossale.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, Henry Cavendish n’était pas loin de la vérité. Et ce, malgré les défaillances possibles des moyens de mesure de son époque.
Aujourd’hui, des institutions telles que la NASA ont perfectionné ces techniques. Elles utilisent des technologies spatiales avancées pour affiner nos connaissances sur le poids de la Terre. Par exemple, le satellite GRACE (pour Gravity Recovery And Climate Experiment), qui mesure les variations de la gravité terrestre de manière très précise, a permis d’estimer la masse de la planète bleue à environ 5,972 x 1024 kg.
Une autre technique de pesée a été testée entre 2011 et 2012. Elle consistait à utiliser un satellite nommé IceCube, un détecteur de neutrinos. Les neutrinos sont des particules élémentaires, qui proviennent de la fusion nucléaire des étoiles et qui n’ont quasiment aucune masse. Ils sont donc particulièrement difficiles à repérer et à mesurer. Ces particules sont tellement petites qu’elles peuvent traverser des atomes. En traversant un objet compact tel que la Terre, ces neutrinos peuvent créer une collision et modifier sensiblement la masse de la planète. IceCube a donc calculé combien de neutrinos sont arrivés sur Terre en un laps de temps donné. Grâce à l’analyse faite par le satellite IceCube, les scientifiques ont pu évaluer la masse de la Terre. Ils l’estiment à 6,0 x 1024 kg, la même donnée estimée quelques siècles auparavant par Henry Cavendish. Ces mêmes techniques ont d’ailleurs pu établir que le noyau de la Terre pesait à lui seul presque la moitié du poids total de notre planète, 45 % pour être précis.
Grâce aux satellites, les scientifiques ont pu évaluer précisément la masse de la Terre. Ils l’estiment à 6,0 x 1024 kg, une donnée quasiment identique à celle estimée quelques siècles auparavant par Henry Cavendish.
Les satellites d’observation de la Terre sont aujourd’hui en mesure d’estimer la masse de la Terre. Crédit photo : NASA / Unsplash
La Terre : perte ou prise de masse ?
Les scientifiques ont également pu remarquer que la masse de la Terre évolue. De façon minime certes, mais force est de constater qu’elle ne garde pas le même poids au fil de son histoire. De fait, la Terre grossit-elle au fil du temps, ou bien s’amincit-elle ? Intuitivement, il serait aisé de penser qu’elle prend du poids, compte tenu notamment de l’accroissement de la technosphère (l’ensemble des constructions humaines).
Mais qu’en est-il vraiment ?
En premier lieu, il y a, effectivement, un gain de masse.
Écartons cependant une idée reçue : les constructions humaines, l’augmentation de la population ne font pas augmenter la masse de la Terre, contrairement à ce que l’on pourrait penser : les humains comme la technosphère sont issus d’une matière déjà existante sur Terre.
Alors, d’où vient cette augmentation de la masse et est-elle conséquente ?
En raison des milliers de débris interplanétaires et météorites qui frappent chaque année la Terre, cette dernière acquiert près de 40 000 tonnes de « poussières » venues de l’espace, auxquelles s’ajoutent les quelques 160 tonnes que procure la thermodynamique (les mouvements de chaleur, amplifiés par le réchauffement climatique, en raison desquels la planète emmagasine plus d’énergie qu’elle n’en restitue).
En second lieu, il y a également une perte de poids, à laquelle les scientifiques y voient deux causes.
D’une part, l’activité du noyau terrestre, qui consomme de l’énergie, participe à la fuite dans l’espace de 16 tonnes chaque année. D’autre part, les atomes d’hydrogène et d’hélium, particulièrement légers, ne peuvent être contenus sur Terre. Chaque année, près de 97 000 tonnes de ces atomes (précisément 95 000 d’hydrogène et 1 600 d’hélium) s’échappent dans le cosmos.
Par conséquent, la planète bleue s’amincit avec le temps. Elle perd en effet plus de poids qu’elle n’en gagne : un déficit d’environ 55 000 tonnes par an, ce qui reste infime comparé à sa masse globale.
Henry Cavendish, sans pouvoir être véritablement certain du résultat, est parvenu, il y a de cela plus de deux siècles, à estimer la masse de la Terre. Les techniques avancées de notre époque lui ont donné raison. Notre Terre fait son poids : pas loin de 6 x 1024 kg, soit 6 suivi de 24 zéros ! Une masse qui ne reste pas statique, mais qui semble évoluer vers un déficit, au fil de son histoire. Cela dit, l’être humain n’a pas de quoi s’inquiéter : avec une perte aussi minime, son habitat ne risque pas de disparaître… en tout cas, pas de ce fait là.
RETENEZ
C’est en 1798 qu’Henry Cavendish a estimé pour la première fois la masse de la Terre.
La Terre pèse 6,0 x 1024 kg ou 6 000 milliards de milliards de tonnes.
Les satellites ont pu confirmer la masse de la Terre.
La masse de la Terre diminue au fil de son histoire.