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    Survol des Canyons les Plus Majestueux du Monde

    Témoins de l’action de l’eau sur la roche, les canyons, également appelés gorges, dévoilent des paysages spectaculaires. Ils sont le résultat de longues périodes d’érosion, qui s’étendent parfois sur des millions d’années. À l’origine de leur formation, des cours d’eau coulaient lentement sur de vastes plaines ou plateaux. À la suite de mouvements tectoniques, les cours d’eau se sont peu à peu encaissés à travers la roche, accélérant la vitesse et le débit de l’eau. Les gorges les plus importantes ont été creusées dans des terres soumises à un climat aride ou semi-aride, grâce à l’action du vent et de fortes précipitations. Les traces de ce long travail s’inscrivent dans le paysage, sous la forme de parois vertigineuses et d’incroyables sculptures naturelles, pour former ces merveilles géologiques. Embarquons pour un tour des 10 plus beaux canyons du monde.

    Bryce Canyon : le plateau déchiqueté

    Le parc national de Bryce Canyon aux Etats-Unis.
    Le parc national de Bryce Canyon aux Etats-Unis est protégé depuis 1928. Crédit photo : Greg Meland, Adobe Stock

    Formant d’impressionnantes roches coniques rougeâtres, Bryce Canyon, aux États-Unis, offre un panorama unique aux visiteurs. D’une superficie de 145 km2, le parc national de Bryce Canyon est renommé pour ses étonnantes formations géologiques composées de cheminées de fées, d’arches et murailles rocheuses, âgées de dizaines de millions d’années.

    Ce site naturel est situé au sud de l’Utah, dans une zone élevée et semi-aride. Il présente un ensemble d’amphithéâtres naturels, formés par le lent travail de l’érosion.

    59 espèces de mammifères cohabitent dans le parc naturel, dont le puma et le coyote. Parmi la centaine d’espèces d’oiseaux présents, on peut observer le condor de Californie et le faucon pèlerin.

    Blyde River Canyon : le canyon des trois reines

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    Blyde River Canyon est le 3ème plus grand canyon du monde. Crédit photo : Unsplash

    Situé en Afrique du Sud, Blyde River Canyon est le 3ème plus grand canyon au monde. Il est entouré par une réserve naturelle du même nom. Ces parois escarpées recouvertes de lichen en font l’un des canyons les plus verdoyants au monde.

    Dans cette immensité, on peut admirer les « Three rondavels », ces trois pitons rocheux qui culminent à 600 mètres au-dessus du précipice. Une rondavelle est une petite case traditionnelle d’Afrique australe, au toit rond couvert de chaume. La légende raconte que ces trois rondavelles portent les noms des trois épouses d’un chef guerrier du XIXe siècle, célèbre pour s’être opposé aux envahisseurs swazis lors d’une bataille mémorable.

    Canyon d’Itaimbezinho : le plus grand canyon d’Amérique du Sud

    Vue sur le canyon verdoyant d’Itaimbezinho au Brésil.
    Le Canyon d’Itaimbezinho situé au Brésil est le plus grand canyon d’Amérique du Sud. Crédit photo : Adobe Stock

    Le Canyon d’Itaimbezinho se trouve dans l’état du Rio Grande do Sul, au Brésil, dans le parc national d’Aparados da Serra. C’est l’un des sites naturels les plus méconnus du pays et pourtant l’un des plus imposants.

    Il impressionne par la beauté de ses parois abruptes qui peuvent atteindre jusqu’à 720 m de hauteur. Ces parois rocheuses, taillées dans des roches volcaniques, sont couvertes par une végétation basse et des pins blancs endémiques.

    Avec ses 5 800 km de long, Itaimbezinho est le plus grand canyon d’Amérique du Sud. Le nom du canyon vient de la langue locale tupi-guarani : « Ita » signifie roche et « A’ibe » signifie pointu.

    Gorges de l’Indus : la vallée aux neiges éternelles

    Vue sur le fleuve Indus dans l'Himalaya.
    Les gorges de l’Indus traversent l’Himalaya. Crédit photo : Adobe Stock

    Son nom évoque des sommets enneigés, des villages perdus dans d’immenses vallées arides et des temples bouddhistes perchés sur des pics venteux. L’Indus naît dans le haut Himalaya, dans la bordure occidentale du Tibet. Il se dessine entre les montagnes du Ladakh, tout au nord de l’Inde.

    Des canyons vertigineux ont été creusés par ce fleuve long de 2 900 kilomètres et gonflés par la fonte des neiges et des glaciers de l’Himalaya. Il parcourt les paysages minéraux et lunaires du Ladakh, en traversant des vallées verdoyantes en été, désertiques en hiver.

    Les Gorges de L’Indus attirent des trekkeurs du monde entier venus parcourir l’Himalaya.

    Gorges du Verdon : le canyon couleur émeraude

    Vue sur la rivière couleur vert émeraude du Verdon en France.
    Les gorges du Verdon en France sont les plus profondes d’Europe. Crédit photo : Adobe Stock

    Ce sont des gorges étroites et profondes, au fond duquel serpente le Verdon, mondialement connu pour sa couleur vert émeraude. Les gorges du Verdon se sont formées à la fin de l’époque du Miocène, il y a environ 5 millions d’années.

    La rivière qui lui doit son nom prend sa source dans le massif alpin des Trois Évêchés, et se jette 166 km plus loin dans la Durance. Le Verdon est l’architecte de cette entaille profonde de 250 m à 750 m, aux parois vertigineuses, creusées dans un plateau calcaire. Ses dimensions extraordinaires en font le plus grand canyon d’Europe.

    Le plus long canyon du monde est enfoui sous la glace du Groenland. Avec ses 750 km de long il est 2 fois plus long que le Grand Canyon. Il atteint 800 mètres de profondeur.

    Antelope Canyon : quand l’eau devient artiste

    Les vagues rougeoyantes typiques d'Antelope Canyon en Arizona.
    Antelope Canyon dans l’Arizona est un slot canyon, un canyon étroit formé par des crues éclairs. Crédit photo : Adobe Stock

    Les Navajos, peuplé autochtone d’Amérique du Nord, l’ont surnommé le « Tsé bighánílíní dóó Hazdistazí », qui signifie « le lieu où l’eau coule à travers les rochers ». L’Antelope Canyon, en Arizona, offre à ces nombreux visiteurs le spectacle de ses courbes sinueuses aux couleurs ocre.

    Au fil de millions d’années, une épaisse couche de sable s’est transformée lentement en grès rouge. La force de l’eau et du vent ont peu à peu dessiné différentes stries pour produire ces formations géologiques atypiques.

    L’Antelope Canyon est composé de deux canyons : l’Upper Antelope Canyon, long de 400 m, et le Lower Antelope Canyon, plus long, plus étroit et reparti en plusieurs niveaux.

    L’Antelope Canyon a la particularité d’être un Slot Canyon. Il s’agit d’un canyon étroit, formé par des crues subites. L’Utah et l’Arizona renferment la plus grande concentration de slot canyons au monde.

    Barrancas del Cobre : la rencontre des sept canyons

    Panorama sur Copper Canyon au Mexique depuis un promontoire rocheux.
    Los Barrancas del Cobre ou Copper Canyon au Mexique est 4 fois plus profond que le Grand Canyon. Crédit photo : Adobe Stock

    La Sierra Tarahumara, au Mexique, abrite l’un des canyons les plus impressionnant du continent américain. Les Barrancas del Cobre, également appelé Copper Canyon, sont en réalité un ensemble de sept canyons, connus pour être quatre fois plus grand et deux fois plus profond que le célèbre Grand Canyon.

    Il y a plus de 20 millions d’années, un événement tectonique a donné naissance à ce prodigieux réseau de canyons qui s’étend à perte de vue, sur 60 000 km². Six cours d’eau sillonnent la partie occidentale de la Sierra Tarahumara avant de se jeter dans le Golfe de Californie.

    Les Raramuris, une communauté indigène, vivent dans ces montagnes de manière traditionnelle depuis la conquête espagnole au 17ème siècle.

    Sîq de Petra : le trésor de l’Orient

    Vue sur canyon rougeoyant du Sîq de Pétra en Jordanie.
    Le canyon du Sîq de Pétra est réputé pour sa ville antique de Pétra en Jordanie. Crédit photo : Adobe Stock

    Caché dans les montagnes jordaniennes, le canyon du Sîq de Pétra est long de 1 200 m. Étroit et sinueux, il mène à l’entrée de la ville antique de Pétra.

    C’est le cours d’eau Wadi Mousa qui a creusé le canyon dans les grès du Paléozoïque, une ère géologique qui s’étend de −541 à −252,2 millions d’années.

    Tout le long du défilé, on observe les courbes sinueuses formées par la sédimentation et l’accumulation de grains de sable durant des millions d’années. Le caractère unique des roches sédimentaires de Pétra est dû à l’incroyable variation de couleurs, avec des nuances allant du jaune ocre au rouge brique. On peut observer ces couleurs exceptionnelles sur les plafonds des nombreuses tombes présentes dans le canyon.

    Berceau de culture et de spiritualité, le site de Pétra est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.

    Colca Canyon : le grenier des Incas

    Panorama sur le canyon de Colca au Pérou et ses cultures en terrasses.
    Le canyon de Colca au Pérou est réputé pour ses cultures en terrasses. Crédit photo : Adobe Stock

    Situé au cœur des Andes, le Canyon de Colca est situé à 180 km au nord de la ville d’Arequipa, dans la partie sud du Pérou. Certains villages du canyon ne sont toujours pas reliés par le réseau routier.

    En langue queshua, « colca » signifie « grenier », un nom très certainement attribué en raison des 8 000 hectares de cultures en terrasses perchées à flanc de montagne. Depuis l’époque des Incas, on y cultive des pommes de terre, du maïs, du quinoa et du blé.

    Le Colca Canyon est l’un des plus profonds au monde avec une profondeur de près de 3 270 m. Montagnards et randonneurs se rencontrent au bord de la rivière Colca en contrebas.

    On y croise des troupeaux d’alpagas, célèbres pour leur laine et domestiqués par l’homme il y a plus de 5000 ans, des flamants roses des Andes et des lamas. Il n’est pas rare d’observer des condors survolant ces paysages cultivés.

    Canyon Fjadrargljufur : un tout jeune canyon

    Vue ensoleillée sur le canyon Fjadrargljufur en Islande.
    Le canyon Fjadrargljufur en Islande a été créé par l’érosion des glaciers. Crédit photo : Adobe Stock

    Au sud-est de l’Islande, s’étend un canyon bordé d’herbes vertes et de roches saillantes.
    Son nom vient de « gljúfur » qui signifie canyon en islandais et de la rivière « Fjaðrá », qui prend sa source quelques dizaines de kilomètres plus haut.

    Il y a seulement 9 000 ans que débute la formation du canyon Fjaðrárgljúfur. D’immenses glaciers qui recouvraient l’île se retirent peu à peu pour former des moraines. Un lac, puis un cours d’eau, se dessinent lentement grâce à l’écoulement des rivières glaciaires, pour sculpter Fjaðrárgljúfur.

    Le dénouement est la formation d’un canyon long de 1300 mètres qui affiche fièrement d’impressionnants pics, arrêtes et autres crevasses.


    RETENEZ


    • Les canyons sont le résultat de mouvements tectoniques et de l’érosion qui œuvrent pendant des millions d’années.
    • Le Canyon d’Itaimbezinho est le plus grand d’Amérique du Sud.
    • L’Utah et l’Arizona comptent la plus grande concentration de slot canyons au monde.
    • Les gorges du Verdon forment le canyon le plus grand d’Europe.

    1.
    Découverte d’un canyon géant sous les glaces du Groenland. Le Monde.fr [En ligne]. 30 août 2013 [cité le 19 avr 2022]; Disponible: https://www.lemonde.fr/europe/article/2013/08/30/decouverte-d-un-canyon-geant-sous-les-glaces-du-groenland_3468708_3214.html
    1.
    Gorge (géographie). Dans: Wikipédia [En ligne]. 2022 [cité le 19 avr 2022]. Disponible: https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Gorge_(g%C3%A9ographie)&oldid=190540985
    1.
    Nature Reserve [En ligne]. Blyde River Canyon - Motlatse Canyon Provincial Nature Reserve; [cité le 19 avr 2022]. Disponible: https://www.nature-reserve.co.za/blyde-river-canyon-natural-preserve.html

    Qu’est-ce qu’un Fjord ? Plongée dans les Eaux Mêlées d’une Ancienne Vallée Glaciaire

    Le mot fjord évoque pour beaucoup la Scandinavie, des glaces millénaires et des étendues d’eau calme entourées de montagnes. Mais qu’est-ce qu’un fjord exactement ? Dans quelles parties du monde peut-on trouver des fjords ? Comment se sont-ils formés et de quand date leur apparition ? Pour mieux comprendre ce qui distingue le fjord d’un autre bras de mer, partons à la découverte de ses étonnantes caractéristiques.

    Qu’est-ce qu’un fjord ?

    L’empreinte d’un ancien glacier disparu

    Pour commencer, il convient de définir ce qu’est un fjord d’un point de vue géologique. La formation d’un fjord résulte des deux phénomènes suivants :

    • une vallée est creusée au cours d’une période glaciaire par la pression d’un glacier qui s’étend depuis le sommet de la montagne jusqu’à atteindre la mer ;
    • l’eau de la mer envahit cette vallée à mesure que le glacier fond et se rétracte progressivement vers le sommet de la montagne.

    On observe alors un bras de mer plus ou moins ramifié, qui peut être constitué de plusieurs bassins. L’eau peut s’avancer dans les terres sur plusieurs dizaines de kilomètres, entre des roches très escarpées qui portent les traces de l’abrasion par l’ancien glacier.

    Schéma illustrant la formation d'un fjord.
    Les différentes étapes de formation d’un fjord. a) Vallée glaciaire b) Vallée en auge (profil en U) après la fonte du glacier c) Sédimentation fluvio-glaciaire d) Montée du niveau marin et immersion de la vallée. Crédit photo : Slide Player

    Les origines scandinaves du nom « fjord »

    L’appellation « fjord » est reprise dans la plupart des langues du monde, dans lesquelles elle ne semble pas avoir trouvé d’équivalent. Ce mot est un emprunt à la langue norvégienne : en effet, la grande majorité des fjords de la planète se concentrent sur la côte occidentale de la Norvège.

    Le nom « fjord » est difficilement traduisible dans la mesure où il définit précisément cette formation géologique particulière. Il vient à l’origine du vieux norrois, l’ancienne langue médiévale de la Scandinavie, et signifiait alors à la fois « la traversée » et « l’estuaire ». Un fjord est en effet un estuaire selon la terminologie océanographique, c’est-à-dire une masse d’eau semi-fermée dans laquelle l’eau de mer se mélange à de l’eau douce.

    Vue du deuxième plus grand fjord du monde, le Sognefjord en Norvège.
    Le Sognefjord en Norvège est le deuxième plus grand fjord du monde. Crédit photo : Pixabay

    Dans quelles parties du monde peut-on trouver des fjords ?

    La répartition des fjords dans le monde

    La grande majorité des fjords se situent dans l’hémisphère Nord, cependant on en trouve certains sous les basses latitudes.

    Les concentrations de fjords les plus importantes se situent aujourd’hui dans les régions suivantes :

    • côte ouest de l’Europe : îles Féroé, Islande, Écosse, Norvège, Groenland, péninsule de Kola en Russie ;
    • côte ouest de la Nouvelle-Zélande ;
    • côte nord-ouest de l’Amérique du Nord : États-Unis, Alaska, Canada, Québec ;
    • côte sud-ouest de l’Amérique du Sud : Chili, Argentine.
    Icebergs dans le fjord de Sermilik au Groenland.
    Le fjord de Sermilik au Groenland et ses icebergs. Crédit photo : Pixabay

    Les principaux fjords de l’hémisphère Nord

    Le plus grand fjord du monde est le Scoresby Sund au Groenland. Il a une longueur de 300 km, une profondeur maximale de 1600 m et une largeur maximale de 50 km. On trouve également au Groenland le fjord glacé d’Ilulissat, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco en 2004 pour son exceptionnelle concentration d’icebergs.

    Le pays qui compte le plus de fjords au monde est la Norvège, avec plus de 1000 fjords répertoriés. Le deuxième plus grand fjord du monde, le Sognefjord, se trouve sur la côte ouest du pays, avec une longueur de 204 km et une profondeur maximale de 1308 m.

    Le Québec abrite l’un des seuls fjords intracontinentaux du monde : le fjord du Saguenay. Alors que la grande majorité des fjords débouchent sur l’océan, le fjord du Saguenay débouche sur l’estuaire du fleuve Saint-Laurent, à l’intérieur du pays.

    Les principaux fjords de l’hémisphère Sud

    Le fjord le plus profond du monde se situe en Antarctique, sur la Terre Victoria : c’est le Skelton Inlet, qui atteint une profondeur maximale de 1933 m.

    La Nouvelle-Zélande présente deux fjords remarquables sur l’île du Sud : le Milford Sound et le Doubtful Sound, qui s’avancent sur une quinzaine de kilomètres au milieu des très escarpées Alpes néo-zélandaises.

    La Patagonie chilienne compte de très nombreux fjords sur ses 2000 km de côte bordant l’océan Pacifique. Le fjord des Montagnes, notamment, s’étend sur 66 km entre la cordillère Sarmiento à l’ouest et la cordillère Riesto à l’est.

    Pour comprendre comment des fjords ont pu se former dans des zones tempérées comme la Nouvelle-Zélande ou le Chili, il faut considérer l’étendue des calottes glaciaires au cours de la dernière glaciation.

    Vue du fjord de Milford Sound en Nouvelle-Zélande.
    Le fjord de Milford Sound en Nouvelle-Zélande. Crédit photo : Pixabay

    Comment les fjords se sont-ils formés ?

    Un long travail de sculpture au cours de l’ère glaciaire

    Les paysages de montagnes que nous connaissons aujourd’hui ont été sculptés par le lent déplacement des glaciers au cours du Pléistocène. Le Pléistocène est la première époque du Quaternaire, qui a commencé il y a 2,6 millions d’années. Il s’est achevé avec la dernière glaciation, qui a débuté il y a 115 000 ans et s’est achevée il y environ 11 700 ans.

    La période la plus froide de la dernière glaciation a eu lieu il y a environ 20 000 ans : c’est ce que l’on appelle le dernier maximum glaciaire. Les glaciers s’étendaient alors sur les terres et fusionnaient jusqu’à former parfois de vastes étendues de glace, appelés inlandsis.

    Au moment du dernier maximum glaciaire, la calotte glaciaire recouvrait environ 25 % de la superficie des terres :

    • dans l’hémisphère Nord, une partie de l’Amérique du Nord était recouverte de glace et l’inlandsis scandinave s’étendait jusqu’à la Grande-Bretagne ;
    • dans l’hémisphère Sud, la cordillère des Andes était recouverte par le glacier de Patagonie et la Nouvelle-Zélande et la Tasmanie comptaient de nombreux glaciers.

    Des cycles de périodes glaciaires et interglaciaires se sont succédé tout au long du Pléistocène. C’est sous l’effet de ces changements de température que les glaciers ont abrasé les sols et les parois qui les enserraient en se déplaçant.

    Carte de l'hémisphère Nord lors de la dernière glaciation.
    Étendue des calottes glaciaires (inlandsis) dans l’hémisphère Nord lors du dernier maximum glaciaire. Le niveau marin était environ 120 mètres plus bas que le niveau actuel. Crédit photo : Hannes Grobe, Creative Commons

    La mer gagne du terrain

    La déglaciation qui a suivi le dernier maximum glaciaire a commencé il y a environ 18 000 ans et s’est étendue sur environ 8 000 ans. Elle a eu deux principaux effets : la fonte des glaciers et, par conséquent, la hausse du niveau de la mer.

    En fondant, les glaciers se sont éloignés de la mer en se rétractant vers les sommets plus froids. Ils ont libéré les vallées qu’ils avaient creusées en auge (vallée à fond plat et large) et qui s’incurvaient souvent bien en dessous du niveau actuel de la mer. Ainsi, les eaux maritimes ont pu pénétrer à l’intérieur des terres et remplir progressivement les profonds bassins délaissés par la glace.

    En se retirant, les glaciers ont progressivement déposé sur les sols des amas irréguliers de sable et de gravier jusqu’alors emprisonnés dans la glace. Ces dépôts ont formé des barrières sous-marines, appelées seuils. Ce sont ces seuils qui délimitent les différents bassins qui constituent le fjord, ceux-ci pouvant être de profondeurs différentes.

    Un fjord est une ancienne vallée glaciaire qui a été inondée lors de l’élevation du niveau marin à la fin de l’ère glaciaire, il y a environ 10 000 ans.

    La glace l’emporte sur la tectonique

    C’est au 19ème siècle que le minéralogiste dano-norvégien Jens Esmark (1763 – 1839) formule pour la première fois la théorie selon laquelle les fjords résulteraient de la fonte des glaces qui recouvraient l’Europe du Nord pendant la Préhistoire.

    Le géologue britannique John Walter Gregory (1864 – 1932) le contredira quelques années plus tard en soutenant que les fjords sont principalement d’origine tectonique, mais ses hypothèses seront rapidement invalidées.

    Aujourd’hui, on considère que l’origine glaciaire de la formation des fjords est attestée par deux principales observations :

    • les bassins des fjords sont plus profonds que le niveau de la mer, ce qui démontre l’érosion antérieure des sols par la glace ;
    • l’embouchure des fjords présente des seuils sous-marins constitués de dépôts glaciaires, qui attestent de la fonte d’un glacier.
    Carte de l'Europe pendant la dernière glaciation.
    L’Europe durant la dernière glaciation, entre 20 000 et 70 000 ans BP (before present, avant 1950) avec l’étendue des différentes calottes glaciaires et glaciers de montagnes. Crédit photo : Ulamm, Creative Commons

    Quelles sont les principales caractéristiques d’un fjord ?

    Morphologie d’un fjord

    L’ouverture du fjord sur la mer est appelée bouche ou embouchure. Elle peut être marquée par une plus faible profondeur d’eau que le reste du fjord. Ce seuil sous-marin indique la position de l’ancien front glaciaire : c’est la limite basse de l’ancien glacier, là où la glace était la moins épaisse. Plus on s’éloigne du sommet de la montagne, plus l’épaisseur d’un glacier s’amoindrit : l’embouchure marque donc l’endroit où l’érosion glaciaire est la plus faible.

    La profondeur maximale du fjord est atteinte en amont de ce seuil, là où l’érosion glaciaire est la plus importante. On appelle cette partie du fjord le fond marin, qui est donc le plus souvent situé en-dessous du niveau de la mer.

    Eau douce et eau salée

    Une des principales particularités du fjord est qu’il fait cohabiter eau douce et eau salée : l’eau salée venant de la mer est diluée par les cours d’eau douce qui viennent régulièrement se déverser dans le fjord.

    Ces cours d’eau douce sont alimentés par l’eau de pluie s’écoulant des bassins hydrologiques et par la fonte des neiges de montagne et de la glace en été. Cette eau de fonte glaciaire transporte avec elle de nombreux sédiments en suspension, qui donne à l’eau du fjord son apparence laiteuse.

    La salinité et la température de l’eau douce et de l’eau salée étant très différentes, elles se mélangent peu : l’eau douce, moins dense, vient couvrir l’eau salée et reste à la surface.

    Cascade d'eau douce dans un fjord en Norvège.
    Une cascade d’eau douce se déverse dans un fjord en Norvège. Crédit photo : Pixabay

    Le phénomène de circulation d’estuaire

    La circulation de l’eau douce et de l’eau salée dans le fjord produit un phénomène dont l’impact est déterminant sur l’écosystème sous-marin : la circulation d’estuaire.

    La couche supérieure d’eau douce qui s’écoule de la montagne vers la mer entraîne avec elle une partie de l’eau salée de la couche inférieure. Cette perte en eau salée s’équilibre avec l’eau de mer qui pénètre continuellement dans le fjord. Ce phénomène permet de ventiler ou de renouveler les eaux du bassin.

    Cependant, si le seuil à l’embouchure du fjord est très peu profond, la ventilation des eaux peut être entravée : l’eau stagne et s’appauvrit en oxygène, ce qui empêche la faune sous-marine de se développer.

    Dans certains fjords, cette stagnation peut durer plusieurs années, tandis que dans d’autres, l’afflux d’eau salée se produit de façon saisonnière.

    Les fjords de l’ouest de la Norvège : qu’ont-ils de si particulier ?

    Les fjords emblématiques de l’ouest norvégien

    Le littoral norvégien compte plus d’un millier de fjords. Les plus importants se situent sur la côte ouest du pays, littéralement dentelée de fjords sur toute sa longueur.

    Parmi les plus emblématiques, le Geirangerfjord et le Nærøyfjord, sont situés à 120 km de distance et s’étendent de Stavanger au sud jusqu’à Åndalsnes à 500 km au nord-est. L’Unesco les a inscrits sur la liste du patrimoine mondial en 2005 avec le commentaire suivant : « les deux fjords, qui sont parmi les plus longs et les plus profonds du monde, sont considérés comme caractéristiques de la géographie des fjords et comme l’un des paysages les plus spectaculaires de la planète ».

    Le plus long et le plus profond fjord de Norvège est le Sognefjord, qui est aussi le deuxième plus grand fjord du monde. Sa partie inférieure est recouverte par le plus grand glacier d’Europe continentale, le Jostedalsbreen, d’une superficie de 486 km².

    Carte des fjords du sud-ouest de la Norvège.
    Le sud-ouest de la Norvège et ses innombrables fjords. Crédit photo : Ulamm, Creative Commons

    Des conditions climatiques exceptionnelles pour l’écosystème marin

    La côte ouest de la Norvège bénéficie des courants atmosphériques et marins provoqués par la force de Coriolis, ainsi que du Gulf Stream qui apporte les eaux chaudes du Golfe du Mexique avant de se diluer dans les eaux glacées de l’Antarctique.

    Ces conditions particulières permettent à un écosystème marin d’une grande diversité de se développer. Les eaux sont habitées par de nombreux mammifères marins tels que les phoques, les orques, les castors et les loutres. Elles regorgent également d’une grande variété d’espèces de poissons, dont la pêche et le commerce constituent une part fondamentale de l’économie du pays. Certaines espèces sont endémiques, d’autres proviennent de migrations, comme le skrei, un cabillaud originaire de la mer de Barents qui afflue chaque hiver pour se reproduire dans les eaux du Vestfjord.

    Quelques fjords norvégiens abritent également des récifs coralliens d’eau profonde. Le Lophelia pertusia, une espèce de corail d’eau froide très répandue le long de la côte norvégienne, peut notamment être observé dans le fjord de Trondheim.

    La faune sauvage préservée des fjords de l’ouest norvégien

    Les fjords de l’ouest norvégien bénéficient d’un climat relativement doux et sont le plus souvent libres de glace. Sur leurs reliefs, on observe encore de nombreux mammifères vivants dans les forêts de conifères comme les rennes, les élans ou les bœufs musqués. L’ours, le loup ou le lynx boréal, qui ont été chassés pendant des centaines d’années, tendent à se raréfier et sont repoussés vers le Grand Nord.

    De grands oiseaux marins, des rapaces et de petites espèces forestières trouvent également refuge dans cet environnement protégé. Beaucoup d’oiseaux insectivores migrent au printemps depuis les tropiques vers les fjords norvégiens pour y trouver leur nourriture. Les îles Lofoten, situées entre le Vestfjord et la mer de Norvège au nord du cercle polaire, constituent la plus grande réserve d’oiseaux du pays. On peut y observer notamment le Guillemot, le macareux, le fou de Bassan, l’Aigle royal, le Faucon pèlerin ou encore le Faucon gerfaut.

    Vue sur les îles Lofoten dans les fjords de Norvège.
    Les îles Lofoten constituent la plus grande réserve d’oiseaux de la Norvège. Crédit photo : Adobe Stock

    Cet écosystème précieux et fragile est menacé par le changement climatique, mais aussi par l’activité humaine qui se développe autour de la construction de barrages hydroélectriques et de l’exploitation de carrières.

     


    RETENEZ


    • Un fjord est une ancienne vallée glaciaire qui a été envahie par la mer.
    • Ces vallées glaciaires ont été creusées par l’abrasion glaciaire au cours de la dernière période glaciaire.
    • Bien que la grande majorité des fjords se situe dans l’hémisphère Nord, on en trouve certains dans l’hémisphère Sud.
    • Les eaux des fjords sont constituées d’un mélange d’eau de mer salée et d’eau douce qui conditionne l’existence d’une vie sous-marine dans le fjord.
    • Les fjords de l’ouest de la Norvège, dont certains sont classés par l’Unesco, abritent un écosystème fragile et précieux, à préserver.

    1.
    Hestmark G. Jens Esmark’s mountain glacier traverse 1823 − the key to his discovery of Ice Ages. Boreas. 1 mai 2017;47.
    1.
    UNESCO Centre du patrimoine mondial [En ligne]. mondial UC du patrimoine. Fjords de l’Ouest de la Norvège – Geirangerfjord et Nærøyfjord; [cité le 11 avr 2022]. Disponible: https://whc.unesco.org/fr/list/1195/
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    L’Encylopédie Canadienne [En ligne]. Fjord | l’Encyclopédie Canadienne; [cité le 11 avr 2022]. Disponible: https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/fjord

    Pourquoi le ciel est-il bleu ?

    Y a-t-il une explication à la couleur bleue du ciel ? Est-ce dû au reflet des océans ? Non, car le bleu ne serait pas aussi limpide et intact. L’interaction entre les rayons du Soleil et les particules présentes dans l’atmosphère est l’une des explications de ce phénomène. L’observateur est également un élément à prendre en compte. Quel est donc le mécanisme entre ces trois facteurs qui fait que le ciel est perçu comme bleu ?

    La composition de la lumière du Soleil 

    Le Soleil réchauffe notre planète grâce à l’énergie qu’il propage via ses rayons. Cette lumière, visible à l’œil nu, est une longueur d’onde qui se décompose en spectres lumineux. On y trouve des particules qui émettent de l’énergie de différents niveaux. 

    Ces particules sont classées par couleur : le rouge, le bleu et le vert que l’on retrouve dans l’arc-en-ciel. Par ailleurs, ces couleurs primaires permettent d’obtenir d’autres nuances lorsqu’elles se confondent. Le mélange de toutes ces couleurs correspond à la couleur blanche de la lumière du Soleil

    Un spectre lumineux est exprimé en nanomètre (NM). Plus le nanomètre est petit, plus la longueur d’onde est courte, et inversement. 

    La couleur rouge a une longueur d’onde de 650 NM et une fréquence de 530 THZ. Le spectre lumineux bleu a, quant à lui, une longueur d’onde de 500 NM et une fréquence de 600 THZ.

    La couleur bleue a donc une longueur d’onde plus courte que la longueur d’onde rouge. Cette notion de grandeur est à garder en tête, car elle sera très utile pour comprendre le bleu du ciel. 

    Mais pourquoi le ciel paraît bleu alors que la lumière du Soleil est composée de plusieurs couleurs ? Pour cela, il faut se tourner du côté de l’atmosphère terrestre.

    Que se passe-t-il lorsque les rayons du Soleil pénètrent dans l’atmosphère ?

    L’atmosphère terrestre est constituée de 5 couches différentes (troposphère, stratosphère, etc.) qui permettent de garder la chaleur sur notre planète, de maintenir une pression acceptable et de la protéger contre les effets néfastes des rayons ultraviolets, grâce à la couche d’ozone située dans la stratosphère. 

    L’atmosphère est principalement composée de petites molécules d’oxygène (O2) et d’azote (N) présentes en quantité abondante. On y trouve également du dioxyde de carbone (C02), des particules de poussière, des microgouttelettes d’eau et des petites particules de glace.

    Lorsque la lumière blanche diffusée par le Soleil traverse l’atmosphère, certaines longueurs d’ondes sont plus diffusées que d’autres, c’est-à-dire renvoyées dans de multiples directions.

    La diffusion des rayons du Soleil par les particules présentes dans l’atmosphère terrestre est à l’origine de la couleur bleue du ciel.

    L'atmosphère terrestre.
    La diffusion des rayons du soleil par les particules présentes dans l’atmosphère terrestre est à l’origine de la couleur bleue du ciel. Crédit photo : NASA

    Avant d’aller plus loin, il est intéressant de savoir de quelle couleur serait le ciel en l’absence d’atmosphère. Le regard de l’observateur (l’œil humain) perçoit une lumière blanche. En revanche, en dehors de la direction du Soleil, le ciel paraîtrait noir, comme sur la Lune. L’atmosphère terrestre joue donc un rôle crucial dans la coloration du ciel. 

    Il y a une interaction entre la lumière du Soleil et les molécules présentes dans l’atmosphère. Les petites molécules d’azote et d’oxygène interagissent avec les longueurs d’ondes de la lumière en réalisant des mouvements d’oscillation. 

    Plus la fréquence de la longueur d’onde est importante, plus les petites molécules oscillent et donc diffusent la couleur associée au spectre lumineux. Les couleurs bleue et violette ayant une fréquence plus importante et une longueur d’onde plus courte que le rouge, sont donc beaucoup plus diffusées dans le ciel. Ce phénomène de diffusion de la lumière se nomme la diffusion de Rayleigh.

    Pourquoi alors le ciel n’est-il pas violet ? Cette couleur est bel et bien présente dans le ciel mais l’œil humain est beaucoup plus sensible à la couleur bleue qu’à la coloration violette. La perception de la couleur bleue du ciel dépend donc de l’observateur. C’est pourquoi, ce facteur est également à prendre en considération pour expliquer la couleur bleue du ciel.

    Pourquoi le ciel n’est-il pas tout le temps bleu ? 

    Le ciel peut paraître rouge-orangé au lever ou au coucher du Soleil. En effet, le Soleil étant situé plus bas dans le ciel, la distance parcourue par ses rayons pour traverser l’atmosphère, plus épaisse, est plus importante. Les longueurs d’ondes bleues sont alors bien plus diffusées qu’en journée, et ont tendance à s’atténuer pour laisser place aux longueurs d’ondes rouge, orange et jaune. Mettant plus de temps pour se répandre, elles sont donc plus facilement perçues par l’observateur. C’est pourquoi, le ciel paraît rouge-orangé.


    RETENEZ


    • La couleur bleue du ciel est liée à l’interaction de la lumière du soleil et les molécules présentes dans l’atmosphère terrestre.
    • La diffusion de Rayleigh explique le phénomène de la coloration bleue du ciel.
    • Les longueurs d’ondes les plus courtes sont celles les plus visibles dans le ciel, comme le bleu.
    • L’observateur joue un rôle important dans la perception bleue du ciel.

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    La Petite Histoire de la Géologie du Grand Canyon

    Surnommé « la machine à remonter le temps » par les géologues, le Parc national du Grand Canyon en Arizona ne laisse personne indifférent par la beauté de ses précipices vertigineux et de ses paysages sauvages. En étudiant la géologie du Grand Canyon, il est possible de retracer 2 milliards d’années de l’histoire du site. S’étendant sur 445 km et d’une largeur pouvant varier de 500 m à 30 km, les dimensions des gorges du canyon fascinent les visiteurs depuis des générations. Mais quels éléments naturels ont formé le Grand Canyon et quand a-t-il été créé ? Que cachent les secrets du fleuve Colorado ? C’est parti pour un petit plongeon à travers les âges, dans les profondeurs de ces failles ancestrales…

    Le berceau de la géologie du Grand Canyon

    Le Grand Canyon livre l’histoire géologique de la Terre sur deux milliards d’années, dans l’État d’Arizona, à l’ouest du continent Nord-Américain. À l’époque, les États-Unis subissent un climat rude et hostile. Ils occupent un peu moins des deux tiers de leur surface actuelle. Après les périodes de glaciation du Protérozoïque, entre 2,5 milliards d’années et 542 millions d’années en arrière, le plateau du Colorado ressemble à une vaste étendue de chaînes de montagnes attaquées par la pluie, le vent et le gel. De nombreux volcans en activité modèlent le paysage en déversant des kilomètres cubes de lave.

    La chaîne de montagnes située à l’ouest de l’Arizona, appelée « Schistes de Vishnu », culmine à 10 000 mètres d’altitude. Elle est constituée de schiste à quartz, de mica ainsi que d’un mélange de sable et d’argile métamorphisé. La transformation minérale d’une roche soumise à une forte pression et température s’appelle le métamorphisme.

    Les roches de Vishnu expliquent une partie de la geologie du Grand Canyon
    Les roches de Vishnu sont les roches les plus anciennes du Grand Canyon. Crédit Photo : National Park Service

    Pourquoi ces roches, situées aujourd’hui à la base du Grand Canyon, ont-elles été ensevelies sous des mètres de roches de nature géologique différente ?

    Les conséquences de la tectonique des plaques

    L’immersion des terres du Colorado

    Sous l’action des forces sismiques et de la tectonique des plaques, les blocs terrestres ont modifié leur contour et le niveau de l’eau a été modifié. Pendant des dizaines de millions d’années, plus de 8 mers primitives se sont succédées sur le site des montagnes de Vishnu et l’ensemble du Colorado. En novembre 2012, le géologue Karl Karlstrom, de l’université d’Albuquerque dans le Nouveau-Mexique, démontre que les strates les plus basses du Grand Canyon, vestiges des anciens sommets de Vishnu, sont datées de 1,7 milliards d’années. Par l’analyse d’un extrait de cette roche, le scientifique a observé une réaction géochimique : la présence de grenat à l’état transparent, révélant l’action d’une pression importante et continue.

    La dernière mer du Crétacé

    Entre – 90 et – 80 millions d’années avant notre ère, la dernière mer du Crétacé recouvre encore une grande partie de l’intérieur de l’Amérique du Nord malgré son aspect étroit et peu profond. Lorsqu’elle vient à se retirer, poussée par la dérive des continents, elle met à nu des vestiges d’espèces marines reposant au fond et sur les flancs des montagnes de Vishnu. Une grande quantité de sable et de boue s’agglutinent en couches successives et se transforment petit à petit en roche. Requins, tortues, huîtres et ammonites sont, aujourd’hui, fossilisés dans du schiste argileux.

    Les montagnes de Vishnu, érodées par la mer, se retrouvent ainsi lentement ensevelies sous plusieurs couches de sédiments compactées sur plusieurs centaines de mètres de haut.

    De la sedimentation resulte la formation des roches racontant la geologie du Grand Canyon
    Le processus de sédimentation et de formation de roche sédimentaire. Crédit Photo : Science North

    La modification du relief en Arizona

    Il y a 65 millions d’années, la force de collision entre l’épaisse plaque océanique du pacifique, constituée de basalte et la plaque continentale Nord-Américaine granitique déclenche un bouleversement topographique :

    • l’élévation du plateau du Colorado sur plus de 3000 m ;
    • la formation de la chaîne des Rocheuses au Nord ;
    • la formation des montagnes de Mogollon au Sud, destinées à s’aplanir par la suite.
    Schema du phenomene de subduction
    Mécanisme des zones de subduction. Source : USGS/Wikimedia Commons

    Il en résulte alors le phénomène de subduction suite à cette collision : la plaque de plus forte densité “plonge” sous la plaque plus “légère”, comme c’est le cas la plupart du temps.

    Les deux types de discordance du Colorado

    Constituées d’un empilement d’une quarantaine de couches métamorphiques et sédimentaires, les parois du Grand Canyon sont comparables à un mille-feuille. La discordance angulaire a été identifiée par John Wesley Powell, directeur de l’USGS (Société de géologie des États-Unis) en 1869. C’est le phénomène qui se produit lorsque des couches de roches viennent se déposer sur d’autres couches géologiques plus anciennes pendant une orogenèse, autrement dit, la formation de nouvelles montagnes. Celles-ci déforment le plancher terrestre et provoquent une inclinaison des dépôts. Les sédiments sont d’abord dispersés par des courants marins et éoliens, puis se compactent sur le sommet d’une roche pour être transformés en grès.

    On distingue deux ruptures majeures sur les flancs du précipice. La première, appelée « grande discordance », ne permet aujourd’hui aucune interprétation concernant la géologie du Grand Canyon à cause d’une absence de fossiles et donc une difficulté de datation. La seconde, remontant à -525 millions d’années, présente des strates horizontales taillées par l’érosion.

    Suivant leur composition, elles arborent différentes couleurs : la teinte rouge présente, par exemple, un calcaire riche en oxyde de fer. Comme elles sont friables, ces différentes strates constituent une surface de ravinement, ou d’érosion subite, propice à la formation de canyon lors d’une inondation ou de fortes pluies, par exemple.

    La geologie du Grand Canyon offre un panorama naturellement colore
    Suivant la nature géologique de la roche, on observe différentes couleurs sur les falaises du Grand Canyon. Crédit photo : Nate Loper via Flickr

    « Selon des études scientifiques portant sur la géologie du Grand Canyon, le précipice serait plus jeune que ce que l’on pensait auparavant. »

    Les traces de discordance angulaire que l’on peut observer à certains endroits du canyon sont le résultat d’une lente accumulation de roches sédimentaires sur de la roche métamorphique après un soulèvement de ces massifs. La photo suivante montre la discordance angulaire entre les deux natures de roches, grignotées par l’érosion sur plusieurs centaines de millions d’années.

    Geologie du Grand Canyon : les differentes orientations du relief
    La discordance angulaire sur le site du Grand Canyon. Crédit photo : Unsplash

    La formation des reliefs du Grand Canyon

    La jonction de canyons

    Selon des études menées par plusieurs géologues, dont Karl Karlstrom, et publiées dans la revue « Nature » en 2014, le Grand Canyon serait plus jeune que ce que l’on pensait auparavant. La méthode de thermochronologie, basée ici sur la teneur en hélium de la roche, permet d’affirmer qu’il a été creusé d’Ouest en Est. Des canyons indépendants se sont réunis à la manière d’un puzzle géant, sur différentes périodes.

    Les traces actuelles de fission de l’apatite, minéral recouvrant les versants du Grand Canyon, ont permis cette technique de datation. En comparant les taux d’hélium et d’uranium des différents extraits de roche, les chercheurs ont pu déterminer des parties du canyon plus anciennes que les autres.

    Les cinq grands canyons

    On peut donc décomposer le Grand Canyon en 5 segments :

    • les deux extrémités, Western Grand Canyon à l’Ouest, d’origine volcanique et Marble Canyon à l’Est sont âgés de 5 à 6 millions d’années ;
    • les segments Hurricane et Mauv Gorge existent depuis 50 à 70 millions d’années ;
    • Eastern Grand Canyon s’est formé il y a 25 à 15 millions d’années.

    L’érosion a lentement élargi les gorges de 100 à 200 mètres par millions d’années, pour finir par les relier les unes aux autres et aboutir au Grand Canyon actuel.

    Schema des cinq segments du grand canyon
    Les cinq principaux segments du Grand Canyon d’Arizona. Crédit photo : Albuquerque Journal

    L’affaissement des montagnes de Mogollon

    Il y a 20 millions d’années, une poche de magma prisonnière à des kilomètres sous terre fait subir une pression extraordinaire à la croûte terrestre qui commence à s’étirer. En surface, le plancher se déforme et s’étire sous l’effet des tremblements de terre. Les montagnes de Mogollon, bordant une partie du Grand Canyon, s’élèvent et se tassent plusieurs fois avant de s’incliner sur elles-mêmes, comme des dominos. Surnommée la « province de Basin & Range » par les géologues, où se situe la Vallée de la mort, la région devient un vaste ensemble de cuvettes et de reliefs émergeant à basse altitude.

    En s’affaissant, les montagnes se sont inclinées fortement : les différentes couches de roche de Mogollon, essentiellement du calcaire et du grès, se sont retrouvées dressées à la verticale et la topographie du secteur a changé. Ces mutations pourraient expliquer les variations de courant constatées dans les différentes rivières, aujourd’hui asséchées, du plateau du Colorado.

    Le plateau de Kaibab surplombant Mogollon Rim en Arizona
    Les montagnes de Mogollon, vues depuis le plateau de Kaibab. Crédit Photo : Foter

    Les plus hautes parois du Grand Canyon sont celles du plateau de Kaibab. S’élevant à plus de 2 740 mètres au-dessus du niveau de la mer et constituées de roches âgées de 270 millions d’années, ce sont aussi les plus jeunes précipices. Avec le plateau de Coconino, les falaises du plateau de Kaibab constituent les contreforts de Mogollon. Elles sont aménagées pour le tourisme du fait de leur point de vue impressionnant sur l’étendue du Grand Canyon.

    Le Colorado, un fleuve puissant

    Le plateau du Colorado inondé

    Il y a 70 millions d’années, le plateau du Colorado est recouvert d’eau originaire de la fonte des neiges et des pluies diluviennes. Cette dernière s’écoule du nord-est au sud-ouest en se frayant un chemin à travers les roches et emporte avec elle des blocs de pierres et de boue. Petit à petit, ses sillons s’élargissent et son courant gagne en puissance. Par endroit, le débit est comparable à celui de la rupture d’un barrage.

    Les cours d’eau se ramifient en plusieurs rivières et torrents, parfois indépendants. Ils serpentent le plateau et ses falaises jusqu’à se jeter dans le Golfe de Californie.

    Schema du plateau du Colorado a l'ere secondaire
    Le plateau du Colorado, il y a 70 millions d’années. Crédit photo : Haakon Fossen

    Le Colorado a creusé le Grand Canyon

    Le puissant fleuve Colorado et ses affluents ont façonné le canyon sur des profondeurs équivalentes à cinq fois la tour Eiffel, soit plus de 1 500 m par endroit.

    En effet, pour donner au Grand Canyon son allure spectaculaire agrémentée de gorges et de précipices vertigineux, le pouvoir érosif de l’eau a joué un rôle capital. Les nombreux rapides du fleuve, sa forte pression et son importante élévation ont été déterminants dans sa progression. Sa pente chute de 3 mètres tous les 1600 mètres, tandis que le fleuve Mississippi (quatre fois plus large) prenant sa source à seulement 450 mètres d’altitude, ne descend que de 30 cm à distance égales.

    Le type de roche est aussi important pour apprécier toute la dimension de l’érosion. La géologie du Grand Canyon révèle qu’il est composé majoritairement de calcaire et de grès, de nature friable. Le granite étant une roche dure, il montre plus de résistance face à l’eau, d’où la formation de roches étroites à certains endroits. À l’inverse, en présence d’une pierre tendre comme le schiste argileux, le canyon sera plus large.

    le fleuve Colorado et la formation du Grand Canyon
    Le fleuve Colorado est un des facteurs clés de la géologie du Grand Canyon, de part son pouvoir érosif. Crédit photo : Foter

    Un fleuve qui érode et produit de la roche

    S’il peut se comparer à un bulldozer pour sa force tempétueuse, le fleuve Colorado s’avère également capable de bâtir de nouvelles roches. L’eau s’écoulant à la base du canyon est saturée en dioxyde de carbone, issu des profondeurs de la terre. Rendue plus acide, elle dissout le calcaire de la pierre avant que le dioxyde ne s’échappe sous forme de bulles et ne donne naissance à un nouveau type de roche en carbonate de calcium. Nommée « travertin », elle recouvre tout ce qu’elle trouve sur son passage. C’est pourquoi, à certains endroits on peut observer des cascades pétrifiées où s’écoule une eau turquoise.

    Roches travertines dans une cascade du grand canyon a havasupai falls
    Cascade recouverte de travertin sur le site d’Havasupai Falls, à la base du Grand Canyon. Crédit photo : Jon Roig via Flickr

    La Terre poursuivant son activité, il est possible que d’ici un ou plusieurs millénaires, ce spectacle vertigineux soit à nouveau transformé et les à-pics surélevés, inscrivant ainsi un nouveau chapitre sur la géologie du Grand Canyon. Terre sacrée des tribus indiennes, le parc est préservé en grande partie grâce à ses accès difficiles et escarpés. Cependant, les exploitations touristiques et industrielles entraînent l’assèchement des affluents du fleuve Colorado. Elles menacent la faune et la flore du site par des barrages hydrauliques, l’extraction d’uranium et la pollution générée par les hélicoptères.

    Le parc national du Grand Canyon a été reconnu par l’Unesco en 1979, un an après le plus vieux parc national au monde : Yellowstone. Il gère les ressources et contribue à la protection écologique de ce lieu majestueux représentant l’une des sept merveilles naturelles du monde.

    RETENEZ


    • Quatre mots résument la géologie du Grand Canyon : dépôts, soulèvement, affaissement et érosion.
    • Le paysage a été modelé par de nombreux épisodes sismiques et par l’activité tectonique sur des millions d’années.
    • Les eaux des glaciers et les pluies torrentielles ont creusé des chemins à travers les roches.
    • Le fleuve Colorado a creusé les gorges du Grand Canyon en seulement 6 millions d’années.

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    Formation de Bryce Canyon : le Plateau Déchiqueté

    Situé dans l’Utah aux États-Unis, le parc national de Bryce Canyon fait partie du grand plateau du Colorado. À une altitude moyenne de 2 500 mètres, Bryce Canyon étonne par son histoire et son paysage. Il n’est en réalité pas un canyon, mais un plateau argilo-calcaire, ciselé par l’érosion. Cet ensemble d’amphithéâtres ou cirques naturels est protégé depuis 1928 au sein du parc national de Bryce Canyon. La particularité de ce parc est la présence de ces armées de cheminées de fées ou Hoodoos qui se dressent fièrement par milliers. Mais comment ce sont-elles formées ? Et pourquoi les nomme-t-on ainsi ? Découvrez les secrets de la formation de Bryce Canyon : le plateau déchiqueté.

    Formation de Bryce Canyon : une histoire géologique ancienne et agitée

    Le grand plateau qui abrite aujourd’hui Bryce Canyon a connu de nombreux bouleversements, depuis plus de 200 millions d’années. Son histoire géologique ancienne est la clef qui permet de comprendre le paysage que nous connaissons aujourd’hui.

    Bryce Canyon se situe au nord du plateau de Paunsaugunt (aussi appelé le grand escalier), sur sa partie haute. Cet ensemble sédimentaire dont l’altitude varie de 2 100 à 2 800 mètres d’altitude abrite également les parcs nationaux de Zion Canyon et du Grand Canyon (voir figure). Les roches de Bryce Canyon sont issues des formations de Claron, qui sont parmi les plus jeunes de ce vaste plateau.

    Figure schématique de la géologie du plateau de Bryce Canyon.
    Géologie détaillée du plateau de Bryce Canyon. Crédit photo : Wikimédia, domaine public

    C’est entre 90 et 65 millions d’années avant notre ère que les choses se sont accélérées dans la région de Bryce Canyon. À l’époque, la zone est une plaine alluviale qui reçoit des sédiments en grande quantité, provenant de montagnes proches. C’est dans de grands marécages, épisodiquement recouverts par la mer, qu’argiles et grés se forment. Ces couches sédimentaires organisées en strates ont ensuite été perturbées par une activité tectonique importante.

    Au début du Cénozoïque, profitant d’une période plus calme, et alors que viennent de s’éteindre les dinosaures, la sédimentation reprend. Il y a 50 millions d’années, la zone est constituée d’un système de grands lacs et de plaines inondables, toujours entourée de reliefs plus élevés. Le ruissellement arrache des particules à ces hautes terres qui viennent s’accumuler dans ces lacs pendant plusieurs millions d’années. Ce sont plus de 300 mètres de sédiments qui se déposent pour former les roches qui composent l’actuel plateau de Bryce Canyon (calcaires, dolomies, argiles, siltites et grès).

    Les roches de Bryce Canyon se sont donc formées près du niveau de la mer. La tectonique des plaques, très active, viendra ensuite soulever ce qui est aujourd’hui la région du Colorado. Il y a plus de 20 millions d’années, la plaque tectonique nord-américaine et celle de Farallon entrent en collision. Cette dernière va alors plonger sous la plaque nord-américaine. On appelle ce processus d’enfoncement d’une plaque tectonique sous une autre la subduction. Dans le cas de la plaque de Farallon, la subduction a été peu profonde, entraînant une élévation importante de la plaque nord-américaine.

    Ces bouleversements géologiques ont permis le soulèvement des roches de Bryce Canyon à une altitude qui permit à divers phénomènes météorologiques d’éroder les roches pour créer les cheminées de fées si caractéristiques de ce site naturel.

    Les particularités géologiques de Bryce Canyon : les cheminées de fées

    L’armée de cheminées de fées présente à Bryce Canyon est une merveille géologique rare qui constitue la plus grande collection de Hoodoos au monde. Qu’on les nomme cheminées de fées ou Hoodoos, ces pinacles aux couleurs allant du jaune orangé au rouge profond sont indissociables de Bryce Canyon. Ce sont les oxydes ferriques, présents dans les roches à des concentrations variables, qui permettent d’admirer ce camaïeu de couleurs chaudes.

    La formation des cheminées de fées est le résultat de différents types d’érosion. Le ruissellement torrentiel est en partie responsable du paysage déchiqueté de Bryce Canyon mais c’est surtout le gel qui l’a façonné.

    L’érosion par ruissellement torrentiel

    La longue histoire géologique de Bryce Canyon a façonné ce plateau. Il est caractérisé par une alternance de strates sédimentaires principalement argileuses, gréseuses et calcaires. Ces couches, plus ou moins résistantes à l’érosion, sont régulièrement soumises à un ruissellement puissant.

    Situés en aval d’un affluent du Colorado, les cirques qui cisèlent le plateau de Bryce Canyon forment le bassin de réception des eaux d’un système d’érosion torrentiel très actif. Bien que les précipitations ne soient pas très importantes dans cette région (environ 450 mm/an), le régime des pluies est ici particulier. La majorité de l’eau tombe lors d’épisodes orageux violents de fin d’été et sur de courtes durées. Les sols secs de Bryce Canyon sont très imperméables et empêchent l’eau de s’infiltrer correctement. Elle va donc ruisseler à la surface de la roche. Son pouvoir abrasif est alors important. Ce ruissellement torrentiel est responsable du ravinement du plateau de Bryce Canyon. Il s’agit de la première étape nécessaire à la création des Hoodoos.

    La formation des cheminées de fées est le résultat de différents types d’érosion. Le ruissellement torrentiel est en partie responsable du paysage déchiqueté de Bryce Canyon mais c’est surtout le gel qui l’a façonné.

    L’érosion par le gel

    Lorsqu’il pleut, l’eau s’infiltre dans les fissures de la roche de Bryce Canyon et y gèle parfois. En gelant, l’eau exerce à l’intérieur de la roche d’importantes pressions. En effet, la glace occupe un volume plus important que l’eau (+9%). Au fil du temps et des alternances de gel et dégel, la roche devient plus friable, plus fragile et donc plus sensible à l’érosion. Ce changement d’état de l’eau qui participe à la fragmentation de la roche est appelé cryoclastie ou gélifraction.

    On dénombre à Bryce Canyon environ 170 nuits d’hiver rigoureux par an, favorables à ce phénomène de cryoclastie. L’alternance de cycles gel (la nuit) – dégel (le jour) est principalement responsable de la lente formation des pinacles. Le ravinement important a formé, à Bryce Canyon, de nombreuses parois rocheuses, des murs naturels, à l’épaisseur variable. La cryoclastie parvient à perforer ces murs au niveau de leurs points faibles, formant des ouvertures ou des arches qui fragilisent les parois. Sous l’action continue de la gélifraction, ces arches s’agrandissent jusqu’à ce que leur partie haute s’effondre, formant les fameux Hoodoos. C’est l’action conjointe de ces types d’érosion qui permet au visiteur d’admirer le paysage actuel de Bryce Canyon.

    Figure des étapes de formation des Hoodoos de Bryce Canyon.
    Les différentes étapes de la formation des Hoodoos. Crédit photo : Brian Roanhorse/NPS

    Un plateau inhospitalier à la biodiversité riche

    Le plateau de Paunsaugunt est une zone inhospitalière où la pluviométrie est faible et où l’amplitude thermique est très importante. Les hivers sont très froids et les étés particulièrement chauds. Bryce Canyon, situé au nord du plateau, sur sa partie la plus haute, fait figure d’oasis au milieu de ces conditions climatiques rudes. Du fait de son altitude, les étés y sont plus frais et la pluviométrie plus importante. Ces conditions ont favorisé l’établissement d’une biodiversité riche et unique.

    On dénombre à Bryce Canyon 59 espèces de mammifères dont des chiens de prairies ou les terribles pumas, aussi appelés lions de montagne. 175 espèces d’oiseaux sont recensées et on peut apercevoir, en levant la tête, faucons pèlerins et aigles royaux. On peut également trouver au sein du parc national 11 espèces de reptiles, 4 espèces d’amphibiens et plus d’une soixantaine d’espèces de papillons.

    En ce qui concerne la flore de Bryce Canyon, elle est organisée en étages. On rencontre principalement sur le haut du plateau des sapins blancs, des épicéas et des trembles. Les altitudes moyennes sont dominées par les pins Ponderosa. Quant aux parties basses des cirques, elles sont occupées par des genévriers, des cactus et des yuccas. Une grande diversité de fleurs sauvages vient compléter le tableau.

    Des pins Ponderosa dans un cirque de Bryce Canyon.
    Les pins Ponderosa de Bryce Canyon. Crédit photo : Laura Bagès, Tous droits réservés

    L’arbre le plus caractéristique du parc est le pin Ponderosa. Il est l’un des plus grands arbres du Sud-Ouest américain. Il peut atteindre 60 à 70 mètres de hauteur et vivre jusqu’à 500 ans. Apprécié pour son bois dense, il est un des principaux bois de construction dans le sud-ouest du pays. Il se plaît sur des pentes ou des plateaux secs où ses profondes racines permettent de subvenir à ses besoins modérés en eau. Le pin Ponderosa se démarque par son écorce de couleur rouille orangée à l’odeur de vanille et de caramel. C’est un arbre également très utilisé en dendrochronologie, qui est la datation d’un arbre par l’étude de ses cernes. Il a ainsi permis de connaître précisément les dates de construction de nombreuses ruines indiennes, dont il constituait les poutres des toits. C’est même pour exploiter son bois qu’un pionnier dénommé Ebenezer Bryce est venu jusque sur le site.

    Les Hommes et le parc national de Bryce Canyon

    Bryce Canyon, c’est aussi une histoire d’Hommes, un endroit où se mêlent mythes et légendes.

    Le plateau était occupé entre 200 et 1200 par les peuples indiens Fremont et Anasazi. Puis, à partir de 1 200, ce sont les indiens Paiute qui parcoururent l’actuel site. Aucune trace d’occupation permanente n’a été retrouvée, mais on sait aujourd’hui que les Paiute pratiquaient la cueillette et la chasse dans les cirques de Bryce Canyon. C’est aux légendes des Paiute que l’on doit le nom de Hoodoo, utilisé encore aujourd’hui pour désigner les pinacles de Bryce Canyon. Les Hoodoos seraient des personnes mauvaises, maléfiques, qui auraient été pétrifiées.

    Plus tard, au XIXème siècle, des communautés s’installent dans les environs. Ebenezer Bryce construit une route pour permettre un accès plus aisé aux ressources en bois de la zone. Les gens commencèrent à appeler l’amphithéâtre, où la route se terminait, Bryce Canyon. C’est ce nom qui resta.

    Vue sur le plateau érodé rouge de Bryce Canyon.
    Le plateau érodé de Bryce Canyon. Crédit photo : Laura Bagès, Tous droits réservés

    À partir de 1916, les cirques et leurs Hoodoos se font petit à petit connaître du grand public et les subventions de l’État permettent les premiers aménagements. En 1919, les premiers touristes se rendent à Bryce Canyon. Le site naturel est proclamé monument national par le président Harding en 1923. C’est en 1928 que Bryce Canyon devient un parc national.

    Dans l’ombre des grands parcs nationaux du Sud-Ouest américain, le temps a façonné Bryce Canyon pour en faire un lieu singulier. Ses cheminées de fées, témoins du passé chahuté du site, interpellent le visiteur. Son histoire géologique étonne, tant il est difficile d’imaginer qu’on se trouve à un endroit auparavant baigné par les eaux d’un océan. Pour l’ensemble de ces particularités, le plateau déchiqueté est aujourd’hui mis en valeur et protégé par les autorités américaines. Singularité géologique pour certains ou lieu de croyance pour d’autres, les Hoodoos ont l’œil sur le visiteur qui s’aventure dans Bryce Canyon.

    RETENEZ


    • La formation de Bryce Canyon : une histoire géologique ancienne de plus de 200 millions d’années.
    • Une alternance de phases de sédimentation et de perturbations tectoniques qui ont permis la création de cheminées de fées.
    • Une armée de Hoodoos résultat de deux types majeurs d’érosion : le ruissellement torrentiel et le gel (cryoclastie).
    • Une biodiversité riche rendue possible par un climat clément.
    • En 1928, Bryce Canyon devient un parc national aux Etats-Unis.

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    Le Top 10 des Plus Beaux Déserts du Monde

    Imaginez-vous en plein désert. Vous avez sans doute en tête un paysage de hautes dunes balayées par les vents, et une mer de sable à perte de vue. L’atmosphère y est brûlante, la lumière aveuglante et le soleil de plomb… Ce type de paysages est effectivement caractéristique des déserts de sable, tels que le Sahara ou le Namib. Pour autant, tous les déserts ne se ressemblent pas. Le sable recouvre moins d’un quart des déserts de la planète. Déserts de pierres, de sel ou même de glace, la planète regorge de ces lieux énigmatiques dont le point commun est l’aridité. En effet, il y a très peu de précipitations dans le désert. Les conditions de vie y sont particulièrement difficiles. Soumis à des conditions extrêmes, ces milieux naturels sont par conséquent peu habités, et la végétation y est rare. De ces lieux hors du commun naissent des paysages diversifiés qui invitent le visiteur à la contemplation. Partons à la découverte des 10 plus beaux déserts du monde.

    L’Antarctique, les multiples records d’un des plus beaux déserts du monde

    L'Antarctique, le plus grand, le plus aride et le plus froid des deserts
    L’Antarctique, un désert polaire. Crédit photo : Adobe Stock

    L’Antarctique, un désert ? Effectivement, ce continent couvert de glace situé autour du pôle Sud est aussi un désert polaire. En effet, il neige très peu en Antarctique, ce qui en fait un lieu d’une sécheresse incomparable. Plus étonnant encore, il est même reconnu comme le désert le plus aride sur terre.

    Environnement hostile aux conditions extrêmes, il détient plusieurs autres records. Il est ainsi le tenant du titre de plus grand désert de la planète, avec une superficie de plus de 14 millions de km2. Il devance donc le Sahara, plus grand désert chaud du globe. C’est aussi l’endroit le plus froid du monde, avec des températures records estimées à – 93,2° C.

    Plusieurs facteurs sont responsables de ces conditions : l’altitude, le faible ensoleillement, l’isolement du continent par le courant circumpolaire antarctique ainsi que le pouvoir réfléchissant de la glace, qui renvoie près de 80 % des rayons vers l’atmosphère.

    Le Sahara, le plus grand désert chaud de la planète

    Le Sahara, plus grand desert chaud du monde
    Les dunes de sable du Sahara. Crédit photo : Emma Van Sant via Unsplash

    Célèbre pour ses dunes de sable et sa population nomade, le Sahara est également la plus vaste zone désertique chaude de la planète. Contrairement aux idées reçues, le sable ne couvre que 20 % de sa superficie. Avec ses 9 millions de km2, il traverse l’Afrique de part en part, de l’océan Atlantique jusqu’à la mer Rouge et déborde même sur la péninsule arabique. Il s’étend ainsi sur une douzaine de pays et sa superficie est équivalente à celle des États-Unis. De nombreux sites sont classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.

    Le Sahara est aussi l’un des déserts les plus chauds de la planète, juste derrière la Vallée de la Mort en Californie. Balayé par des vents arides et brûlants, la température y atteint plus de 50° C en été.

    Pourtant, le Sahara n’a pas toujours été un désert. Il y a plus de 5700 ans, la région était couverte d’une végétation luxuriante. Les lacs et les fleuves parsemaient la zone, et on y trouvait une faune et une flore abondantes. Le Sahara est depuis entré dans une période sèche, à laquelle succèdera probablement une nouvelle période humide.

    Le désert d’Atacama au Chili, royaume de l’aridité extrême

    Le desert d'Atacama au Chili
    Le volcan Licancabur dans le désert d’Atacama. Crédit photo : Aliaksei, Adobe Stock

    Après l’Antarctique, la zone la plus aride du monde est le désert d’Atacama. Il s’étend de la vallée de Copiapó au Chili à la frontière péruvienne. Certaines zones sont si sèches qu’aucune pluie n’y a jamais été enregistrée !

    Au cœur de ce plateau désertique de 900 km, l’aridité est extrême. Rien ne pousse. Aucune plante ou animal ne peut y survivre. Même les matières organiques s’assèchent et se momifient au lieu de pourrir. C’est en partie grâce à cette aridité que les momies du peuple Chinchorro, présent sur la côte nord du désert 6000 ans avant notre ère, sont aussi bien conservées. La peau et les cheveux de ces momies, qui sont les plus anciennes du monde, sont ainsi restés intacts.

    La région est par ailleurs l’objet d’une intense exploitation minière. Les gisements de cuivre exploités à ciel ouvert en constituent aujourd’hui la principale richesse.

    Le Namib en Namibie, le plus vieux désert du monde

    Le desert du Namib en Namibie
    Les dunes du Namib et l’océan Atlantique. Crédit photo : Uwe, Adobe Stock

    Son nom signifie « pays où il n’y a rien » en langue Nama. Ce désert côtier et pratiquement inhabité est considéré comme le plus ancien désert du monde. Le Namib se serait formé il y a 55 millions d’années, au sud-ouest de l’Afrique dans une région qui correspond aujourd’hui à la Namibie.

    Ses dunes plongent dans l’océan Atlantique tout proche, et sont fréquemment couvertes de brume. Principale source d’eau au sein de ce désert aride, le brouillard permet à la vie de se développer dans ce milieu hostile.

    Ce désert insolite est aussi connu pour ses magnifiques dunes de sable aux couleurs changeantes. Inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, le Namib propose un spectacle unique au monde aux tons jaune, orange et rouge. Cette coloration plus ou moins intense est due à la présence d’oxydes de fer sur les grains de sable. Les variations de couleurs sont aussi liées aux mélanges de sables anciens et plus récents. Sculptées par les vents, les dunes du Namib surprennent par la diversité de leurs formes, linéaires, en croissant ou en étoile. Certaines d’entre elles mesurent plus de 300 m de haut, et se classent parmi les hautes du monde.

    Le désert blanc égyptien, au royaume de la craie

    Le desert blanc en Égypte
    Le désert Blanc en Égypte. Crédit photo : grandpa_nekoandcoro, Adobe Stock

    Dans la partie orientale du Sahara, à l’ouest de l’Égypte, se trouve un désert blanc. Il doit son nom à ses étonnantes sculptures de craie en forme de champignons, d’arbres ou d’animaux. Ces formations géologiques composées de calcaire datent de l’époque du Mésozoïque.

    Il y a 70 millions d’années, la moitié nord de l’Égypte est couverte d’une mer chaude et peu profonde. La vie s’y développe sous forme d’algues. Certaines espèces de ce plancton sont constituées de plaques de carbonate de calcium. À la mort du plancton, celles-ci se déposent au fond de la mer, et se mélangent à des restes d’oursins, de foraminifères ou d’éponges. Au cours du temps, cette accumulation de débris entraîne la formation de craie.

    Lorsque la mer se retire, elle laisse au passage de larges monticules de calcaire. Les grains de quartz transportés par les vents se chargent de façonner les blocs de craie, et leur donnent ces formes caractéristiques si appréciées des voyageurs aujourd’hui.

    Le sable recouvre moins d’un quart des déserts de la planète.

    Les menhirs du désert des Pinnacles en Australie

    Le desert des Pinnacles en Australie
    Les Pinnacles du désert australien dans le Parc National de Nambung. Crédit photo : dblumenberg, Adobe Stock

    Des menhirs de calcaire de plus de 4 m de haut : c’est le spectacle insolite qu’offre le désert des Pinnacles. En forme de cônes ou de champignons, ces étonnantes formations calcaires sont à découvrir au cœur du parc national de Nambung en Australie.

    La roche qui les compose est appelée eolianite, en référence à son mode de formation issu de l’influence des vents. Entre – 400 000 et – 10 000 ans, cette région du sud-ouest de l’Australie est couverte d’une mer peu profonde. Les récifs coralliens s’y développent, et se fragmentent peu à peu pour former un sable grossier. Lorsque la mer se retire, des dunes de sable se forment sous l’influence des vents puis se sédimentent jusqu’à former une épaisseur de 150 m. L’eolianite ainsi formée se désagrège au fil du temps sous l’effet de l’érosion, pour ne laisser intactes que les parties les plus dures, formant les célèbres menhirs naturels du désert australien.

    Le désert Mojave aux États-Unis, l’endroit le plus chaud sur terre

    Le desert Mojave aux Etats-Unis
    Le canyon de Red Rock dans le désert Mojave. Crédit photo : Chee-Onn Leong, Adobe Stock

    Situé dans l’ouest des États-Unis, le désert Mojave est célèbre pour ses lieux mythiques tels que la fameuse Vallée de la Mort ou la cité folle de Las Vegas, capitale des jeux de hasard. Univers de plaines rocailleuses, de canyons, de dunes et de massifs montagneux, cette immense étendue désertique s’étire sur 40 000 km2 entre la Californie, le Nevada et l’Arizona.

    D’une aridité extrême, le désert Mojave se caractérise par de grandes amplitudes thermiques. La Vallée de la Mort détient le titre d’endroit le plus chaud du globe. On y a enregistré les températures les plus élevées au monde, avec le record inégalé de + 57° C en 1913. À l‘inverse, les températures peuvent descendre en dessous de zéro dans les zones d’altitude, au point que la neige y tombe parfois en hiver. Cette amplitude thermique s’explique par la grande variété de reliefs dans ce désert. Le sommet de Clark Moutain culmine à 2416 m, tandis que le site de Bad Water constitue le point le plus bas de toute l’Amérique du Nord, avec une altitude à 85,5 m au-dessous du niveau de la mer.

    Le salar d’Uyuni en Bolivie, un désert de sel

    Salar d'Uyuni
    Le salar d’Uyuni est le plus grand désert de sel de la planète. Crédit photo : Matt Werner gorbulas_sandybanks via Foter.com / CC BY-NC-SA

    Univers d’une blancheur immaculée, le salar d’Uyuni est un désert de sel. Perché à 3654 m au sein de l’altiplano bolivien, il s’étend sur 10 000 km2. Le salar d’Uyuni provient de l’assèchement du lac salé de Tauna il y a 10 000 ans.

    On compte 12 couches de sel successives sur plus de 100 m de profondeur, séparées par des sédiments. La première croûte de sel correspond à celle visible actuellement en surface du salar. Elle mesure jusqu’à 11 m d’épaisseur en certains endroits, et se compose de halite, de gypse et de sel gemme. Les couches profondes renferment quant à elle la plus grande réserve de lithium au monde, faisant du salar d’Uyuni une ressource stratégique pour la Bolivie.

    En saison sèche, la croûte superficielle se cimente en une dalle compacte qui se craquelle par endroits. La surface du salar ressemble alors à un puzzle géant. Lorsque les pluies arrivent, le niveau de la nappe remonte et la couche supérieure est inondée. Le désert de sel prend alors un aspect magique de miroir à ciel ouvert.

    L’emblématique désert de Wadi Rum en Jordanie

    Le desert de Wadi Rum en Jordanie
    Une arche de pierre dans le désert de Wadi Rum. Crédit photo : tobago77, Adobe Stock

    Incontournable au classement des plus beaux déserts du monde, le désert de Wadi Rum en Jordanie a gagné sa notoriété auprès du grand public grâce aux écrits de T.E Lawrence, plus connu sous le nom de Lawrence d’Arabie. Classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, le site de Wadi Rum est reconnu mondialement comme un paysage désertique emblématique. Il offre une diversité de formations géologiques de grès composée de canyons, d’arches naturelles, de falaises abruptes, de gorges étroites et de cavernes.

    Une autre particularité notable de ce désert vient de la présence de pétroglyphes, d’inscriptions et de vestiges archéologiques. Véritables trésors culturels, 25 000 pétroglyphes et 20 000 inscriptions retracent l’évolution de la pensée humaine et les débuts de l’écriture alphabétique. Ces traces d’occupation ancienne constituent un précieux témoignage de 12 000 ans d’activité humaine dans la région.

    Le désert de Gobi en Mongolie

    Le desert de Gobi en Mongolie
    Canyon dans le désert de Gobi en Mongolie. Crédit photo : Mirko Macari, Adobe Stock

    Dans le désert de Gobi, il ne faut pas s’attendre à une mer de dunes à perte de vue. Cette immense région d’Asie centrale est davantage un désert de pierres qu’un désert de sable. Son nom lui vient du terme mongol « gobi », qui désigne de grands bassins fermés à fond caillouteux, très répandus dans la région.

    Le désert de Gobi est l’un des plus vastes du monde. Il recouvre un tiers de la surface de la Mongolie et s’étend jusqu’en Chine. Ses 1 300 000 km2 de superficie abritent des réalités bien différentes, avec cinq sous-régions aux caractéristiques environnementales et géologiques particulières. Largement dominé par des plaines rocailleuses de faible altitude et une végétation rase, le désert de Gobi offre cependant des paysages très diversifiés. Vastes steppes, étendues de terre ou de sable, dunes, lacs, bassins et chaînes de montagne offrent à l’œil du voyageur une large palette de couleurs.

    Plusieurs espèces rares de plantes et d’animaux y vivent, malgré les conditions difficiles. Certaines sont en danger critique d’extinction, telles que l’ours de Gobi, le chameau sauvage de Bactriane, le cheval de Przewalski, le léopard des neiges, l’antilope saïga ou encore la gazelle à goitre.

    RETENEZ


    • Le point commun de tous les déserts du monde est leur aridité.
    • L’Antarctique est le plus grand et le plus aride des déserts de la planète.
    • Moins d’un quart des déserts sont couverts de sable.

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    Rapport du GIEC : Quels Messages Clés pour Comprendre le Réchauffement Climatique et ses Impacts ?

    En février 2022, le second volet du 6ème rapport du Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) a été rendu public. Il dresse un bilan sans appel sur les impacts du réchauffement climatique. Les messages sont alarmants : l’ensemble de la planète et des écosystèmes sont menacés. Selon les estimations, entre 3,3 et 3,6 milliards de personnes vivent dans des zones fragilisées par les effets du changement climatique.

    Ce second volet fait suite à celui publié à l’été 2021, qui s’attardait sur les aspects physiques du changement climatique. Dans ce premier volet, les experts du climat tiraient déjà la sonnette d’alarme. L’un des messages repris par les médias était sans équivoque : « Les activités humaines sont responsables d’un réchauffement accéléré de la planète et les conséquences sont très alarmantes. »

    Cet article se concentre uniquement sur les messages du premier volet du 6ème rapport du GIEC, publié en août 2021. Mais avant de se lancer dans le décryptage de ce premier volet et les missions du GIEC, il est intéressant de revenir sur certaines notions de climatologie pour mieux appréhender les dérèglements climatiques en cours et à venir. Comment définir le climat ? A quoi sont dus les changements climatiques terrestres ? Qu’est-ce que le réchauffement climatique ? Quelles en sont les causes et les conséquences ? De quelle manière les activités humaines influencent-elles le système climatique ? Quels sont les futurs climatiques possibles pour la Terre et l’Humanité ? Décryptage d’un phénomène complexe.

    Qu’est-ce que le climat ?

    Le climat en quelques mots : définition et classification

    Un climat se définit par une succession de conditions météorologiques (moyennes des températures, de pression, vents observés, précipitations, etc.) sur une période et dans une région donnée. Ces observations doivent se répéter sur un lapse de temps relativement long (au moins 30 ans selon l’Organisation Mondiale de la Météorologie).

    La classification des climats se fait en général en croisant les données des températures et précipitations. De ces croisements se dégagent 5 grandes zones climatiques : équatoriale, sèche, tempérée, continentale et polaire.

    De nombreuses zones climatiques se dessinent autour des latitudes et longitudes de la planète.
    Classification des climats de Köppen-Geiger. Les couleurs correspondent à différents types de climat, eux-mêmes définis par des niveaux moyens de températures et précipitations enregistrés au cours d’une année. Crédit photo : Rubel and Kottek.

    Sur la planète, pourquoi observe-t-on différents climats ? Par exemple, pourquoi les températures sont-elles si froides aux pôles et si élevées à l’équateur ?

    Pour y répondre, il faut revenir en amont sur la notion de températures.

    Les températures, clés de voute du système climatique

    Energie des rayons du Soleil et phénomène d’effet de serre

    Tout commence avec le Soleil qui émet des rayons lumineux. Ces rayons arrivent dans l’atmosphère terrestre. Ils sont alors réfléchis vers l’espace (30 %) ou absorbés (70 %) par l’atmosphère, les continents et les océans.

    En absorbant les rayons solaires, la planète capte de l’énergie et se réchauffe. A son tour, elle va restituer de l’énergie, donc se refroidir. De cet échange thermique se crée un équilibre de températures.

    L’énergie libérée par la planète se fait sous forme de chaleur (30 %) et rayonnement infrarouge (115 %). Les infrarouges seront alors absorbés en grande partie par les particules atmosphériques (97 %). Celles-ci émettront à leur tour dans toutes les directions un rayonnement de même longueur d’onde (102 %).

    Sans atmosphère, les infrarouges repartiraient vers l’espace. Une grande quantité d’énergie serait donc perdue. Ce phénomène est celui de l’effet de serre : il est avant tout un phénomène naturel. L’effet de serre régule le climat et maintient les températures à des niveaux en dessous desquels la vie sur terre ne serait pas possible. Car sans lui, il ferait jusqu’à – 18 °C sur notre planète !

    Le devenir du rayonnement solaire et le phénomène d'effet de serre sont responsables des équilibres de températures observés à la surface de la planète.
    Les flèches de couleur grise décrivent les flux des rayons lumineux à la surface de la planète. Les rayons du Soleil arrivent dans l’atmosphère et à la surface de la Terre : ils sont réfléchis vers l’espace ou absorbés. Les surfaces qui absorbent les rayons solaires émettent un rayonnement infrarouge, qui sera à son tour absorbé dans l’atmosphère ou retransmis vers l’espace. Les surfaces terrestres libèrent aussi de l’énergie sous forme de chaleur (flèche rouge) ou par évapotranspiration (flèche orange). L’énergie des rayons lumineux est exprimée en W/m². De ces échanges se crée un équilibre de températures à la surface de la planète. Crédit photo : Kiehl et Trenberth, 1997

    Structure des continents, des océans et de l’atmosphère : quelles influences sur les températures ?

    Le pouvoir réfléchissant ou absorbant des rayons varie selon les surfaces rencontrées. Sur les continents, l’occupation des sols impactera le devenir des rayons du Soleil : par exemple, réflexion élevée par un sol neigeux et absorption importante par une végétation sombre. En termes plus techniques, ces caractéristiques correspondent à l’albédo, ou part du rayonnement solaire renvoyé par une surface. Les valeurs de l’albédo sont comprises entre 0 et 1, allant du moins au plus réfléchissant.

    Dans le cas des infrarouges, c’est dans l’atmosphère que les choses se jouent. Certains gaz ont une forte capacité à absorber ces rayons : il s’agit des gaz à effet de serre. Parmi les plus célèbres, l’eau (H2O), le dioxyde de carbone (CO2), le méthane, (CH4) ou le dioxyde d’azote (NO2). Et malgré le fait qu’ils soient à l’état de traces dans l’atmosphère (par exemple, il n’y a que 0,04 % de CO2 dans l’air), ils sont à l’origine du phénomène d’effet de serre. C’est la raison pour laquelle, la variation de leurs concentrations impacte l’équilibre des températures.

    Les températures diffèrent d’une région à l’autre et selon la période de l’année

    Parce que la Terre est sphérique, la quantité de rayons lumineux est plus importante au niveau de l’équateur et diminue en se dirigeant vers les pôles. C’est pour cela que les températures sont différentes d’une région à l’autre.

    Pour comprendre les saisons, il faut revenir sur le mouvement de la Terre. Celle-ci tourne autour du soleil en 365 jours et sur elle-même en 24 heures. Or, son axe de rotation est incliné. En raison de cette obliquité et du mouvement quasi-circulaire de la Terre autour Soleil, la quantité d’énergie solaire reçue varie au cours de l’année.

    Les differents cycles des equinoxes et des solstices.
    Les équinoxes et les solstices. Crédit image : Adobe Stock.

    Les températures sont centrales pour comprendre le climat. Mais celui-ci ne se résume pas à cet unique paramètre.

    Précipitations et vents : deux autres éléments centraux pour définir un climat

    La formation des précipitations est liée aux températures. Lorsqu’il fait plus chaud, le phénomène d’évapotranspiration, processus par lequel l’eau passe de l’état liquide à l’état gazeux, est accentué. Les molécules d’eau sont moins denses sous forme gazeuse : elles montent alors dans l’atmosphère. Lors de cette ascension, les températures diminuent avec l’altitude, l’eau se condense, les nuages se forment, puis la restituent sous forme de précipitations.

    La formation des vents résulte des différences de températures et de pression entre les différentes régions du globe : des courants d’air chauds se déplacent de l’équateur vers les pôles. La rotation de la Terre joue sur les trajectoires de ces vents ; ils sont déviés vers la droite dans l’Hémisphère Nord et vers la gauche dans l’Hémisphère Sud.

    Ces descriptions très résumées illustrent la place centrale des températures, ainsi que l’interconnexion entre les différents indicateurs et phénomènes climatiques. De ces interconnexions découle notamment un climat qui, à l’échelle de la planète, évolue avec le temps.

    Depuis le début de l’histoire de la Terre, le climat fluctue

    Les facteurs naturels qui font varier le climat

    Le climat de la Terre n’est pas figé. Les climatologues ont mis en évidence des variations notables sur des centaines de milliers d’années. Les alternances entre ères glaciaires et interglaciaires en sont l’illustration.

    Il existe donc des facteurs naturels pour expliquer les changements climatiques :

    • Le facteur le plus cité est la variation de l’angle d’inclinaison de l’orbite de la Terre autour du Soleil. Cette variation joue sur l’intensité de l’énergie solaire reçue et donc sur les équilibres de températures ;
    • Un deuxième facteur est la variation de la concentration atmosphérique en CO2, qui a été corrélée aux alternances entre ères glaciaires et interglaciaires. Ces variations sont liées à la présence plus ou moins importante de puits naturels de carbone sur Terre. Ces puits captent et stockent la matière carbonée, ce qui joue sur les concentrations atmosphériques. Il s’agit des végétaux, roches sédimentaires, etc. ;
    • Bien que moins cité, le mouvement des plaques a aussi un rôle. En impactant les circulations océaniques, il joue sur les échanges d’énergie entre océans, continents et atmosphère, ce qui perturbe les équilibres de températures.
    • Enfin, les grands épisodes volcaniques modifient les concentrations atmosphériques en certaines particules, les aérosols soufrés en particulier. Ces aérosols réfléchissent fortement les rayons du Soleil, ce qui refroidit l’atmosphère.

    Les facteurs anthropiques qui font varier le climat

    Depuis l’ère préindustrielle, le climat se réchauffe et à des vitesses sans précédent si l’on remonte les 800 000 dernières années d’histoire climatique de la Terre (+1,2°C environ entre 1880 et aujourd’hui). Ces vitesses de réchauffement ne peuvent pas uniquement trouver leur origine dans des causes naturelles.

    Depuis cette période, ce sont les activités humaines qui ont fortement joué sur l’évolution du climat.

    Le principal facteur est la libération dans l’atmosphère de gaz à effet de serre. Ils sont la conséquence du développement des industries et de la combustion des énergies fossiles. Une deuxième cause anthropique est l’occupation des sols. L’exemple le plus cité est celui de la destruction des puits de carbone naturels via notamment les déforestations massives. Or, ces puits ont la capacité de compenser en partie l’accumulation de carbone atmosphérique.

    La prise de conscience des impacts anthropiques sur le climat est récente et a émergé courant de la seconde moitié du 20ème siècle. C’est dans ce contexte que le Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) est né.

    Quels sont les objectifs de ce groupe et comment fonctionne-t-il ?

    Le GIEC, une expertise collective sur l’évolution du climat

    En 1988, sous l’impulsion des gouvernements du G7, le GIEC voit le jour. Cette époque est marquée par une prise de conscience des liens possibles entre activités humaines et réchauffement planétaire. En 1979, le météorologue américain Jules Charney rapporte un lien entre concentration atmosphérique en dioxyde de carbone (CO2) et élévations des températures. Plus tard, en 1987, le glaciologue français Claude Lorius et son équipe confirmaient cette corrélation.

    Depuis cette date, le GIEC réunit les experts scientifiques de différentes disciplines en vue de rassembler, évaluer et synthétiser les connaissances sur le changement climatique. Le GIEC n’est pas une instance décisionnelle. En revanche, les résultats de leurs expertises doivent appuyer les décisions en matière de politiques environnementales.

    Le GIEC s’organise autour d’une assemblée générale (AG), constituée des représentants des 195 pays membres, ainsi que d’un bureau ou organe exécutif. L’AG se réunit plusieurs fois par an et acte sur les orientations thématiques abordées par les différents groupes de travail du GIEC. Le bureau, composé d’une trentaine de scientifiques, réunit les experts et coordonne l’élaboration des rapports d’évaluation, environ tous les 5 ans.

    Le GIEC fonctionne par cycle. A chaque cycle, un rapport est élaboré, lui-même s’articulant autour de quatre volets thématiques ;

    1. Éléments scientifiques du système et changement climatiques,
    2. Éléments d’impacts et de vulnérabilité du changement climatique sur les différents systèmes, et adaptations possibles,
    3. Éléments d’atténuation du changement climatique,
    4. Inventaires nationaux sur les gaz à effet de serre (GES) et mise en place d’un guide méthodologique pour le suivi des émissions.
    Le GIEC s’articule autour d’organes décisionnels, de groupes de travail réunissant les experts du climat, ainsi que de relecteurs et examinateurs extérieurs.
    Structure et organisation du Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat. Crédit photo : IPCC

    En août 2021 a été publié le 1er volet du 6ème rapport du GIEC sur les « fondements scientifiques du changement climatique ». En termes simples, ce rapport dresse un bilan exhaustif et actualisé de l’état des connaissances scientifiques sur les causes physiques du réchauffement climatique et de ses liens avec les activités anthropiques. Un rapport complet et un résumé pour les décideurs politiques sont mis à disposition du grand public.

    Que retenir de ce dernier rapport ?

    6ème rapport du GIEC : quelle photographie du climat en 2022 ?

    L’impact des activités humaines sur le climat est avéré

    L’Homme est le principal responsable de la hausse des températures mondiales

    Dès la fin du 19ème siècle, les températures moyennes à la surface du globe ont commencé à augmenter. Cette tendance n’a fait que s’accentuer et les dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées depuis des décennies.

    Aujourd’hui, il est possible d’affirmer la nature anthropique de ce réchauffement. Entre les périodes actuelles et préindustrielles (2010-2019 vs. 1850-1900), les activités humaines auraient été responsables d’une hausse des températures d’environ 1,07°C. Les modélisations des climatologues montrent même que, sans l’Homme, la planète se serait même refroidie au cours du 20ème siècle.

    Entre les périodes actuelles et préindustrielles, les activités humaines auraient été responsables d’une hausse des températures d’environ 1,07°C. Sans l’Homme, la planète se serait même refroidie au cours du 20ème siècle.

    Toutes les régions du globe sont impactées par le réchauffement climatique. Cependant, certaines zones sont plus touchées que d’autres, notamment au niveau des pôles.

    La prédominance des zones rouges illustre un réchauffement global de la planète.
    Anomalies observées sur les températures moyennes de surface, juillet 2019, période de référence : 1981-2010. Les zones rouges indiquent qu’en 2019 les températures étaient plus élevées que les moyennes enregistrées sur la période de référence. Les zones bleues indiquent des températures moins élevées. L’intensité de la couleur correspond à l’importance de l’écart. Cette carte illustre bien le réchauffement global de la planète (prédominance des zones rouges), ainsi que l’importance des variations régionales. Crédit photo : Copernicus Climate Change Service/ECMWF

    Bouleversement du système climatique et fragilisation des écosystèmes

    • Les précipitations moyennes à la surface des continents augmentent depuis 1950 et de plus en plus rapidement depuis les années 80.
    • Entre 1901 et 2018, le niveau moyen des mers s’est élevé, avec une estimation moyenne de +0,20 m. Cette hausse s’est accélérée tout au long du 20ème siècle et depuis les années 70, l’Homme serait le principal responsable.
    • Dans l’Hémisphère Nord, la banquise, le permafrost et les glaciers sont en net recul. Entre 2011 et 2020, l’étendue moyenne de la banquise n’avait jamais atteint des niveaux aussi bas depuis 1950. Et les glaciers continentaux perdent aussi du terrain, à des niveaux sans précédents si l’on regarde les 2 000 dernières années.
    • Les évènements climatiques extrêmes sont plus nombreux et leurs impacts plus violents : extrêmes de chaleur, précipitations diluviennes, épisodes de sécheresses, intensité des épisodes de moussons, intensification des cyclones.
    • De nombreuses espèces végétales et animales sont contraintes de migrer vers de nouvelles aires géographiques.
    • Les saisons sont perturbées. Les printemps précoces dans l’Hémisphère Nord en sont un exemple.

    Ces perturbations sont liées à l’élévation des températures. Par exemple, le réchauffement favorise le phénomène d’évapotranspiration, donc celui des précipitations. Il provoque une accélération de la fonte des glaces. Ou encore, parce que les températures s’élèvent, les molécules d’eau se dilatent, ce qui engendre une élévation du niveau des mers.

    Le climat évolue et l’origine anthropique est certaine. Mais comment les activités humaines impactent-elles le climat ?

    Les gaz à effet de serre et réchauffement du climat

    Ce sont les émissions de gaz à effet de serre (GES) qui provoquent en grande partie l’élévation des températures : en renforçant le phénomène d’effet de serre, elles provoquent un réchauffement global de la planète.

    Depuis l’ère préindustrielle, leurs concentrations augmentent dans l’atmosphère. Ces hausses sont liées aux émissions anthropiques : entre 1750 et 2020, + 47 % pour les concentrations en CO2, + 156 % pour le CH4 et + 23 % pour le N2O.

    Le dioxyde de carbone (CO2) arrive en tête des GES jouant le plus sur le réchauffement climatique, avec des émissions de plus de 40 gigatonnes par an. La concentration du CO2 dans l’atmosphère s’élève aujourd’hui à 410-415 parties par million (ppm). Selon une étude publié en 2019, dans la revue Nature Advances, pour retrouver de telles concentrations il faut remonter au Pliocène, il y a 3 millions d’années. A l’époque, les températures étaient vraisemblablement plus élevées de 3 à 4°C qu’aujourd’hui.

    Les émissions de GES ne déséquilibrent pas uniquement les températures. L’un des exemples est celui de l’acidification des océans, qui absorbent de plus en plus de CO2. Cette acidification perturbe les écosystèmes marins. En particulier, elle favorise la dissolution des coquilles de crustacés et des coraux, ce qui menace directement leur survie.

    Aujourd’hui, les scientifiques tentent de répondre à l’une des questions clé pour le siècle à venir : quels futurs possibles pour le climat ?

    Les futurs climatiques possibles

    Pour appréhender le climat, différents scenarii ont été imaginés par le GIEC, avec un accent particulier mis sur les émissions de GES. Pour simplifier, 5 projections climatiques ont été émises, allant de niveaux d’émissions très faibles à très élevés.

    Hausse des températures et projections climatiques

    • Quels que soient les niveaux d’émissions futurs, les températures moyennes à la surface de la planète continueront d’augmenter d’ici 2050 ;
    • Seules des réductions drastiques des émissions en GES permettraient de ne pas dépasser les seuils de 1,5°C et 2,0°C d’ici à 2100 ;
    • Pour limiter le réchauffement à un niveau de 1,5 °C, il faudrait réduire les émissions mondiales de CO2 de 50 % d’ici l’horizon 2030 et atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 ;
    • Si l’on conserve le rythme actuel d’émissions en CO2, il ne nous resterait que dix ans avant d’atteindre les 1,5 °C.

    En prenant la période préindustrielle comme référence, les estimations d’ici 2081-2100 montrent des élévations de températures :

    • Entre + 1,0 et + 1,8°C pour des niveaux d’émissions très faibles ;
    • Entre + 2,1 et+ 3,5°C pour des niveaux d’émissions moyens ;
    • Entre + 3,3 et + 5,7°C pour des niveaux d’émissions très élevés.

    Toutes les régions du globe sont concernées par ces projections. En revanche, les surfaces terrestres se réchaufferont davantage que les océans. Les zones Arctiques seront les aires géographiques les plus impactées à l’échelle de la planète.

    Intensification des bouleversements climatologiques et météorologiques

    La hausse des températures moyennes à la surface de la planète jouera sur l’évolution du système climatique dans son ensemble. Plus celles-ci seront élevées, plus les changements se feront intenses et fréquents :

    • Les précipitations moyennes seront en hausse au niveau des continents : à l’échelle de la planète, chaque degré supplémentaire entraînera une intensification d’environ 7 % de ces moyennes ;
    • Les climats très humides ou très secs seront de plus en plus humides versus de plus en plus secs ;
    • Les épisodes de moussons seront plus nombreux et plus intenses ;
    • Les tempêtes estivales de latitudes moyennes dans l’Hémisphère Sud seront plus intenses et changeront d’aire géographique, en migrant vers le Sud ;
    • Les évènements climatiques extrêmes seront plus fréquents et plus violents pour chaque 0,5°C supplémentaire.
    Schémas de l'évolution des précipitations selon différents scenarii de réchauffement mondial.
    Variations annuelles des précipitations moyennes de surface, selon différents scenarii de réchauffement, en comparaison de 1850-1900. Pour trois scenarii de réchauffement, les évolutions annuelles des précipitations moyennes de surface sont estimées (période de référence 1850-1900). Dans le cas des précipitations, les zones de couleurs jaune ou orangée correspondent à des baisses de précipitations et les zones de couleurs bleues à des hausses. Crédit photo : IPCC

    Des changements climatiques irréversibles

    Bien que les émissions futures en GES influent leur devenir, certaines évolutions ont d’ores et déjà atteint des points de non-retours. Pour celles-ci, les tendances observées se poursuivront tout au long du siècle à venir :

    • Les océans continueront de se réchauffer et s’acidifier tout au long du 21ème siècle ;
    • Les glaciers et neiges montagneuses poursuivront leur recul sur des dizaines voire des centaines d’années ;
    • La calotte glaciaire du Groenland continuera de perdre du terrain tout au long du 21ème siècle et ce recul ne fera que s’accélérer avec une hausse des émissions en GES. En 2012, une étude publiée dans la revue Nature, révélait un risque de disparition de cette calotte d’ici 2100 pour un réchauffement estimé à 1,6°C ;
    • Le niveau moyen des mers continuera d’augmenter tout au long du 21ème siècle et plus les émissions en GES seront importantes, plus ces élévations seront marquées.

    Épilogue…

    L’Homme est responsable du changement climatique et de son accélération.

    Les émissions de gaz à effet de serre jouent un rôle central dans le réchauffement de la planète, à la fois de l’atmosphère, des continents et des océans.

    Ce réchauffement est lui-même à l’origine des perturbations observées sur le système climatique dans son ensemble : hausses des précipitations, élévations du niveau de la mer, intensification des évènements extrêmes, recul des banquises, des calottes glaciaires et des glaciers continentaux, bouleversement des saisons, etc.

    Les dernières projections climatiques montrent clairement qu’en l’absence de réduction drastique et rapide des émissions de gaz à effet de serre, le réchauffement global se poursuivra, pour dépasser les seuils symboliques de 1,5 °C et 2,0 °C. L’atteinte, a minima, de la neutralité carbone à l’horizon 2050 est l’un des objectifs principaux.

    Le second volet du rapport du GIEC, publié en février 2022, révèle qu’une limitation du réchauffement à 1,5°C serait nécessaire pour limiter de trop graves conséquences sur les écosystèmes de la planète et les sociétés humaines. Pour l’illustrer, les propos du secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, sont criants : « Ce dernier rapport est un Atlas de la souffrance humaine et un constat accablant de l’échec du leadership climatique. Il révèle que les humains et la planète se font démolir par le changement climatique ».

    Dans ce même rapport, les experts du GIEC mettent l’accent sur le développement du caractère résilient des écosystèmes et des sociétés humaines. En d’autres termes, le choix de politiques plus durables, de mesures d’adaptation au changement climatique, aurait rapidement des effets positifs sur l’état de notre planète et la santé de nombreux écosystèmes.

    Des exemples en termes d’adaptation sont d’ailleurs présentés, avec des différences contrastées entre régions de la planète : adaptations urbaines face aux risques d’inondation, développement d’une nature en ville, transition sur les pratiques agricoles pour faire face à l’aridification, limitation de la déforestation, décarbonation de l’énergie, des transports, utilisation raisonnée des sols, méthodes de stockage du carbone, etc.

    Un troisième et dernier volet du sixième cycle de rapports du GIEC est attendu en avril prochain. Dans celui-ci seront présentées les mesures d’atténuation, deuxième pilier pour limiter l’intensité du changement climatique.

    A la sortie de la lecture de ces deux rapports du GIEC, il n’y a en tout cas plus de doute sur l’existence d’une urgence climatique planétaire.

    RETENEZ


    • Les températures sont centrales pour comprendre comment se mettent en place les différents climats de la planète.
    • Depuis la fin du 19ème siècle, l’Homme est responsable d’un réchauffement climatique sans précédent dans l’histoire de la planète.
    • Le Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) a été créé pour évaluer et synthétiser les connaissances sur le changement climatique.
    • L’injection de gaz à effet de serre dans l’atmosphère par les activités humaines joue un rôle central dans l’élévation des températures mondiales.
    • Pour limiter le réchauffement à +1,5 °C, il faudrait a minima atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.

    1.
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    Comment les Scientifiques Déterminent-ils l’Élévation du Niveau de la Mer ?

    Les océans constituent la principale ressource en eau de la planète. Les activités humaines ont un impact majeur sur le climat et les océans. Les surveiller est fondamentale pour comprendre comment la quantité et la qualité des eaux évoluent avec le temps. Un paramètre physique qui est surveillé de près depuis des centaines d’années par les scientifiques est celui du niveau moyen des océans. Il est en constante augmentation depuis plus d’un siècle et s’accélère ces dernières décennies. Comment les scientifiques mesurent-ils cette variation du niveau marin ? Depuis combien de temps ? Pourquoi est-ce que le niveau moyen des océans augmente depuis des décennies ? Qu’est-ce que la montée des eaux ou élévation du niveau de la mer ? Quelles en sont les causes et les conséquences ?

    Les mesures locales du niveau moyen des océans

    Les marégraphes

    Les premières mesures du niveau moyen des océans ont été effectuées par l’intermédiaire de marégraphes, à partir du XIXème siècle. Les mesures étaient réalisées à la main et en journée. A partir des années 1840, le déploiement des marégraphes analogiques (ou marégraphes à flotteur) a permis d’effectuer des mesures continues du niveau marin, à proximité des côtes françaises. En 1859, il y en avait une dizaine en activité sur le littoral français.

    De nos jours, ce sont les marégraphes numériques qui ont pris le relais. Ils mesurent les changements du niveau de l’océan en fonction d’une hauteur de référence : le datum. En complément de cette mesure, il est nécessaire de réaliser un certain nombre de corrections géophysiques. Les plus importantes sont liées aux marées ou encore au positionnement absolu de la station de mesure qui peuvent fausser les mesures.

    Les bouées météorologiques GPS

    De nos jours, les météorologues utilisent également des bouées océanographiques. Elles présentent l’intérêt de pouvoir transmettre en temps réel leurs données, grâce au système de liaison VHF ou encore par satellite (système ARGOS).

    Deux types de bouées météorologiques existent :

    • Les bouées dérivantes permettent de mesurer la température des eaux de surface et la pression atmosphérique. Elles peuvent peser jusqu’à 100 kg.
    • Les bouées GPS ancrées sont fixes et peuvent peser plusieurs tonnes. Elles peuvent enregistrer de nombreux paramètres géophysiques tels que la houle, la pression, la température, l’humidité ou encore la force du vent. Certains bouées ancrées sont souvent dédiées qu’à une seule mesure. Ce type de bouée permet d’effectuer des mesures en des points précis de l’océan. Les données obtenues sous forme de valeurs absolues sont utilisées pour certaines études climatiques.
    Bouée météorologique ancrée posée au sol.
    Bouée météorologique ancrée, pesant quelques tonnes. Crédit média : Wikimedia, Z22, CC BY-SA 4.0

    Les mesures globales des océans via l’altimétrie satellitaire

    Dans les années 1970, le développement de l’altimétrie satellite a révolutionné le travail de calcul de la variation du niveau des océans. En effet, les altimètres radar ont permis aux scientifiques d’avoir une vision plus globale des surfaces océanographiques.

    Le schéma suivant explique le principe de l’altimétrie satellite. Cette méthode permet de mesurer avec précision (de l’ordre du centimètre) la distance qui sépare le satellite de la surface des océans.

    Plusieurs réglages et paramètres sont à prendre en compte, il faut notamment :

    • Positionner avec précision le satellite sur son orbite. Ceci est réalisé grâce aux mesures GPS ainsi qu’aux stations DORIS et laser, positionnées sur l’ensemble du globe terrestre. Le satellite est toujours positionné par rapport à une surface mathématique imaginaire, appelée ellipsoïde de référence (WGS84) ;
    • Réaliser des mesures altimétriques en plein océan au nadir du satellite. Cela signifie que le satellite doit toujours réaliser des mesures à la verticale par rapport à son orbite ;
    • Mesurer avec précision la distance séparant le satellite de la surface océanique. Cette quantité s’appelle le range et il est mesuré avec une précision atteignant les 2 cm ;
    • Evaluer la topographie de l’océan grâce au géoïde. Le géoïde est une surface géophysique fondamentale qui sert de référence pour les mesures précises d’altitudes.
    Schéma du principe de l'altimétrie satellite.
    Principe de positionnement et de mesure avec l’altimétrie satellitaire. Crédit photo : NASA, Public domain, via Wikimedia Commons

    Surveiller le niveau moyen des océans est primordial pour comprendre l’évolution du climat mais aussi pour anticiper les conséquences socio-économiques de l’élévation des océans, dans le cadre du rechauffement climatique.

    L’élévation du niveau de la mer, conséquence du réchauffement climatique

    Les deux missions altimétriques franco-américaines Topex-Poséidon (1992-2005) et Jason-1 (2001-2015), ont permis d’étudier de manière continue le niveau moyen des océans (aussi appelé Mean Sea Level en anglais, en abrégé MSL). D’autres missions satellitaires ont permis d’affiner les données de variation du niveau marin (Jason-2/3, Sentinel-3/6, Saral/AltiKa, etc).

    La carte présentée ci-dessous a été réalisée en combinant les différentes missions altimétriques disponibles entre les périodes de janvier 1993 et octobre 2019.

    Cartographie du niveau moyen des océans par les altimètres.
    Évolution du niveau moyen des océans vu par les altimètres entre Janvier 1993 et Octobre 2019. Crédit photo : AVISO+, Satellite Altimetry Data

    Les zones où le niveau des mers a augmenté sont symbolisées en rouge sur le planisphère, tandis que celles où il a baissé sont représentées en couleur cyan. De manière générale, le niveau moyen des océans augmente de manière continue sur la majorité du globe. Cette élévation est particulièrement flagrante au large du Japon, de l’Argentine et de l’Australie avec des taux allant de 5 à 10 millimètres par an.

    La montée des eaux s’explique par deux principaux phénomènes, de manière conjointe :

    • La fonte des glaces continentales – calottes de glace du Groenland et de l’Antarctique (35%) et glaciers de montagnes (24%) – liée au réchauffement de l’atmosphère par les gaz à effet de serre. Après la fonte des glaces, le volume d’eau liquide se surajoute à l’océan. Mécaniquement la hauteur du niveau marin augmente.
    • La dilatation ou l’expansion thermique des océans (35%). Le volume de la masse d’eau océanique augmente en raison de la hausse de la température de l’eau. Une eau plus chaude est une eau qui occupe plus de volume.

    La figure suivante confirme que la hausse du niveau marin entre 2006 et 2015 est majoritairement liée à la fonte des inlandsis continentaux du Groenland et de l’Antarctique, ainsi que l’expansion thermique des océans.

    Histogramme montrant les différentes causes de la montée du niveau moyen des océans.
    Principales contributions à l’élévation du niveau moyen des océans (entre 2006 et 2015). Crédit photo : Wikimedia, Raminagrobis, CC BY-SA 4.0

    Globalement, le niveau marin augmente en moyenne de +3,4 millimètres par an (erreur de ±0.5mm/an) depuis les années 1990. Le rythme est trois supérieur à ce qui était mesuré par les marégraphes avant 1950. La figure suivante montre cette variation depuis le début des années 90 jusqu’à nos jours. Les altimètres radar ont permis aux scientifiques d’avoir une vision plus globale des surface océanographiques, à la fois dans le temps et dans l’espace.

    Courbe de la hausse du niveau moyen des océans avec son incertitude.
    Variation du niveau moyen des océans depuis les premières mesures altimétriques jusqu’à nos jours. La tendance actuelle est de 3.4mm/an avec une erreur de ±0.5mm/an (courbe grise). Crédit photo : NASA, Public domain, via Wikimedia Commons

    L’étude des surfaces océaniques est rendue complexe du fait d’un nombre important de paramètres en jeu. L’élévation du niveau moyen des océans est l’un des indicateurs les plus visibles du réchauffement climatique. Surveiller cet indicateur est primordial pour comprendre l’évolution du climat mais aussi pour anticiper les conséquences socio-économiques de l’élévation des océans. De nombreuses populations côtières vont devoir migrer vers des terres hors d’eau, comme par exemple au Bangladesh, au Nigeria ou encore en Indonésie qui subissent déjà la montée des eaux. Ce phénomène est voué à s’accentuer dans les prochaines décennies si les puissances mondiales ne diminuent pas drastiquement et rapidement leurs émissions de gaz à effet de serre.

    RETENEZ


    • La variation du niveau moyen des océans est mesurée à la fois par des marégraphes et des satellites.
    • L’élévation du niveau de la mer est liée à 2 phénomènes complémentaires : la fonte des glaces continentales et la dilatation thermique des océans.
    • Le niveau marin augmente de manière continue depuis un siècle et s’accélère ces dernières décennies.

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    Refmar [En ligne]. Evolution du niveau des mers - Refmar; [cité le 16 févr 2022]. Disponible: http://refmar.shom.fr/fr/applications_maregraphiques/niveaux_moyens_des_mers
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    Comprendre le Phénomène des Marées : l’interaction sans fin entre les Océans et les Astres

    4

    La surface des océans sert de repère général pour définir l’altitude zéro des cartes topographiques. Ces gigantesques étendues d’eau, qui occupent plus de 70 % de la surface de notre planète, sont rythmées par des mouvements réguliers : les vagues et les marées. Ce phénomène, observé le long de la plupart des côtes maritimes, est le processus qui fait inlassablement varier le niveau de la mer plusieurs fois par jour. Grâce aux observations réalisées par les plus grands scientifiques, il est possible de comprendre le phénomène des marées à travers le monde. Pourquoi, comment et quand se forment-elles ? Par quel moyen arrivons-nous aujourd’hui à prévoir, observer et anticiper ce mouvement ?

    Les marées : une source d’observations et de découvertes depuis l’Antiquité

    Des premières observations à l’attraction de la Lune

    C’est un astronome Grec nommé Pythéas qui, vers 330 avant Jésus-Christ, entreprit un voyage depuis Marseille jusqu’en Angleterre. Il constata alors que le phénomène de marée était en lien direct avec le cycle lunaire.

    Après lui, de nombreux observateurs confirmèrent le lien étroit avec cet astre nocturne. Platon, quant à lui, soutenait comme d’autres scientifiques, que les différents mouvements de la Terre étaient la cause des marées. Plus tard, Galilée s’appuya sur les travaux de Copernic pour affirmer que ces dernières étaient générées par l’effet combiné de la rotation de la Terre autour de son axe et de son mouvement autour du Soleil.

    Les travaux d’Isaac Newton

    Les véritables bases de la compréhension du phénomène des marées voient le jour au 17e siècle grâce à la théorie de la gravitation universelle d’Isaac Newton. Il démontre que notre planète, en tournant sur elle-même, exerce deux forces : la force gravitationnelle et la force centrifuge.

    La force gravitationnelle

    La force gravitationnelle permet à la Lune de tourner autour de la Terre sans jamais la percuter. Newton précise que la Lune exerce la même force d’attraction sur la Terre et attire vers elle ce qui se trouve à sa surface. Voilà pourquoi l’eau des océans est attirée vers la Lune.

    La force centrifuge

    La force centrifuge, quant à elle, tend à éloigner tout ce qui se trouve à la surface de la Terre en raison de sa rotation. Il s’agit du mécanisme que l’on peut ressentir dans un manège qui tourne très vite : les personnes ont la sensation d’être éjectées à l’extérieur du manège.

    Ces deux forces agissent ensemble. D’un côté de notre planète, la force gravitationnelle attire une partie de l’océan et la force centrifuge va éloigner de la Terre l’autre partie. Ainsi, l’océan se déforme en deux bourrelets diamétralement opposés. Deux marées hautes vont apparaître simultanément de chaque côté du globe alors que les marées seront basses aux deux pôles.

    Pour visualiser ce phénomène à plus petite échelle, il suffit d’appuyer sur une balle en mousse avec la main : les deux côtés opposés s’étirent comme le font les océans sous l’effet de ces deux forces.

    Les forces en action dans l’attraction entre la Terre et la Lune
    Les forces d’attraction entre la Terre et la Lune. Source : Wikimedia Commons

    L’influence du Soleil

    La preuve de l’influence de la Lune sur les marées est posée. Mais qu’en est-il du Soleil ? Bien que sa masse soit bien plus grande, du fait de son éloignement plus important, le Soleil exerce une attraction sur la Terre équivalente à 46 % à celle de la Lune. Le phénomène des marées est donc dû à la fois à l’attraction de la Lune et à celle du Soleil sur nos océans.

    Les clés pour comprendre le phénomène des marées

    Lorsque la Lune et le Soleil sont alignés, c’est-à-dire durant les périodes de pleine et nouvelle Lune, les effets d’attractions se renforcent (à gauche dans le schéma ci-après) Cela donne naissance à de grandes marées, appelées également vives-eaux. En revanche, lorsqu’ils sont en quadrature, aux premiers et derniers quartiers de Lune (à droite dans le schéma), les effets se compensent et les marées sont de plus faible amplitude ; il s’agit des mortes-eaux.

    Les differents cycles entre la lune et les marees
    Les cycles de la Lune et des marées. Crédit image : Adobe Stock

    L’orbite lunaire en décalage

    Les travaux d’Isaac Newton ont montré que le déplacement de la Lune sur son orbite n’est pas exactement calé sur celui de la Terre. Le temps qu’il faut à la Lune pour réaliser un seul tour sur elle-même est de 24 heures et 50 minutes alors que pour la Terre il est de 24 heures. C’est ce décalage qui fait que les marées ne se forment jamais à la même heure d’un jour à l’autre.

    En se postant face à la mer, il est assez facile d’observer que le flot (mouvement de montée des eaux) et le jusant (la descente) sont quotidiennement en décalage de quelques minutes par rapport au jour précédent.

    Le cycle semi-diurne

    Ce cycle de deux marées hautes par jour est appelé semi-diurne. Il est observable, entre autres, sur la côte Atlantique. Bien que ce phénomène se répète à un rythme régulier, les deux marées quotidiennes ne sont jamais de même hauteur ; cela dépend de la position de la Lune par rapport à notre planète.

    Pour bien comprendre ce point, il faut rappeler qu’en une journée, la Terre tourne sur elle-même autour d’un axe nord-sud. Cet axe est séparé par une ligne perpendiculaire, le plan équatorial qui sépare notre planète en deux hémisphères, sud et nord. L’orbite lunaire est décalée de 5 degrés par rapport à cet équateur. Elle peut donc, se trouver soit plus haute, soit plus basse ou en face de notre plan équatorial. Ce sont ces variations de positions qui vont influencer directement la hauteur des marées.

    L'orbite lunaire en decalage de cinq degres par rapport au plan equatorial de la Terre
    Le décalage de l’orbite lunaire par rapport au plan équatorial
    de la Terre. Crédit image : Adobe Stock.

    Les équinoxes et les solstices

    Dans cette même logique, lorsque tous les astres sont alignés avec l’équateur terrestre, l’attraction est forte. C’est aux équinoxes de printemps et d’automne que les plus grandes marées sont générées.

    À l’inverse, durant les solstices d’hiver et d’été, l’attraction est plus faible car l’équateur est décalé par rapport aux astres. Les marées sont donc moins intenses en ces périodes.

    Newton, dans son explication des mouvements de nos océans, part du principe qu’il n’y a que de l’eau sur toute la surface du globe terrestre. Il s’agit là d’un modèle statique. Les éléments qui permettent de comprendre le phénomène des marées sur notre planète sont plus complexes et intègrent d’autres aspects très importants.

    La compréhension moderne des marées

    En 1799, les travaux de Paul-Simon de Laplace ont une influence déterminante. Dans son Traité de Mécanique Céleste, il complète les observations de Newton et démontre que les marées sont en réalité dynamiques. Il propose d’imaginer en premier lieu un doigt qui soulèverait l’eau et la relâcherait sur une terre immobile sans rien d’autre que l’océan et sans Lune ni Soleil. Inévitablement, une grande vague se crée, comme une ondulation qui traverse le globe. Pour comprendre le phénomène des marées, Laplace ajoute à cette vision de base les différents facteurs qui vont interagir avec les mouvements aquatiques terrestres.

    Les continents

    La forme géométrique des côtes joue un rôle crucial dans la propagation des marées. L’ondulation rencontre un obstacle de taille qui freine et bloque sa course.

    Le marnage

    L’importance des marées dépend également en grande partie du marnage. Ce terme décrit la différence entre le niveau de l’eau lors de la plus haute marée et celui de la plus basse marée.

    schema explicatif du marnage
    Le marnage : la différence de niveau entre marée haute et
    marée basse. Crédit média : Adobe Stock.

    Sur les côtes françaises, le marnage est plutôt fort au niveau de l’océan Atlantique avec des grandes marées qui peuvent monter à plus de 10 mètres au Mont Saint-Michel. À contrario, il est très faible en mer Méditerranée avec une amplitude d’environ 40 centimètres, d’où la difficulté de visualiser le phénomène de marées sur les côtes méditerranéennes.

    La baie de Fundy, au Canada, sur la côte Atlantique, est un bras de mer en forme d’entonnoir entre le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse. Il s’agit de la plus grande amplitude connue au monde. Elle peut monter jusqu’à seize mètres dans certaines conditions.

     La force de Coriolis

    Le mouvement de rotation de la Terre créé sur le globe la force de Coriolis. Celle-ci provoque un déplacement des mouvements d’eau sur la planète. Dans l’hémisphère sud, l’eau est dirigée dans le sens des aiguilles d’une montre. Dans l’hémisphère nord, elle est déviée dans le sens inverse. Ainsi l’onde de la marée se déplace sous l’effet de la force de Coriolis.

    Le deplacement des ondes de maree et la force de Coriolis
    La force de Coriolis dévie les ondes de marées dans un sens ou dans l’autre suivant l’hémisphère dans lequel on se situe. Crédit image : Adobe Stock.

    Le schéma ci-dessus montre bien le déplacement des ondes de la marée sur la Terre. Pour bien comprendre, il faut prendre l’exemple d’une marée haute au niveau de Brest à cinq heures. Cette même marée sera haute au Havre qui se situe au nord-est de Brest car la force de Coriolis tend à dévier l’onde de la marée vers la droite.

    En conséquence, aucune marée n’est identique au même moment sur différents points du globe à un instant donné.

    Les marées sont façonnées par l’attraction de la Lune et du Soleil sur la Terre et par les mouvements de notre planète, ses particularités géographiques et la profondeur de ses océans.

    Observer et prévoir les marées

    Depuis le 19e siècle, l’Homme a bien perçu l’importance de comprendre le phénomène des marées. Il faut garantir les meilleures conditions de navigation maritime et prévoir les impacts sur le littoral en fonction des mouvements de l’océan. Pour mesurer les hauteurs d’eau, l’utilisation de marégraphes à flotteur à longtemps été de rigueur. Aujourd’hui les données GPS sont d’une fiabilité sans précédent de l’ordre du centimètre. Observer le niveau de la mer est d’ailleurs une spécialité typiquement française grâce au SHOM, le Service Hydrographique et Océanographique de la Marine.

    Les partitions des marées : les harmoniques

    Dans cette recherche, la science s’intéresse particulièrement aux harmoniques des marées. Celles-ci correspondent à l’amplitude d’une marée relevée à un endroit donné durant une période précise. Les harmoniques sont représentées sous forme de graphiques qui donnent une vision précise du mouvement et de la fréquence de la marée. Elles permettent de mesurer et prédire le phénomène avec précision, mais seulement là où les spécialistes les ont observées, soit principalement le long des côtes. Grâce à elles, il est aisé de voir qu’aucune marée n’est identique sur le globe.

    Alors qu’à Brest, l’harmonique traduit une marée semi-diurne (deux marées hautes par jour), d’autres localités sur le globe sont sujettes à des marées totalement différentes. À Do Son, au Vietnam, la marée est diurne (une seule par jour). À Victoria, au Canada, la marée est de type mixte (entre une à deux par jour). À Seattle, la marée est de type semi-diurne à inégalité diurnes. À cet endroit de la côte ouest américaine, on observe le même cycle de marée qu’en France mais avec des inégalités plus marquées du niveau de la mer.

    Les coefficients de marées

    Les coefficients de marée sont un autre indicateur utilisé uniquement pour les côtes françaises. Ils permettent de savoir si la mer a un marnage faible ou important en un lieu donné. Ils varient de 20 à 120 ; 90 étant une grande marée. Le coefficient 119 a été atteint deux fois, en 1918 et en 1993.

    Ces indicateurs ne donnent cependant pas la hauteur d’eau. Sur deux journées distinctes dans l’année avec un coefficient identique, une des marées basses peut atteindre une hauteur plus faible. Dans ce cas de figure, à marée haute, le niveau de la mer sera également plus bas alors que le marnage et le coefficient restent les mêmes.

    Les effets des marées et de l’attraction sur la planète

    D’autres phénomènes notables sont directement liés aux marées. Certains courants peuvent ainsi être rapides et dangereux par le resserrement de l’onde dans un détroit par exemple.

    L’attraction sur les continents

    L’attraction fait varier la hauteur des continents. Sous nos pieds, le sol monte et descend d’environ vingt-deux centimètres chaque jour au moment des marées. Cela reste difficile à percevoir car le phénomène est à la fois lent et de très grande ampleur.

    Le mascaret

    Le mascaret est la rencontre du courant d’un fleuve qui se jette dans l’océan et de la force d’une grande marée qui se dirige en sens inverse. La poussée d’eau de la marée qui se déplace vers l’intérieur des terres crée des vagues proches d’un tsunami. Le plus grand mascaret se trouve sur le fleuve Qiantang au sud-est de la Chine. Sa vague peut atteindre neuf mètres de haut et une vitesse de quarante kilomètres par heure.

    Au Brésil, le Pororoca, d’une hauteur de quatre mètres, parcourt une distance de huit cents kilomètres sur l’Amazone. Le bruit de la vague précède l’effet de trente minutes. Il s’agit d’un des endroits les plus dangereux pour l’homme, la faune et la flore locale.

    Surfeurs sur le mascaret de Saint-Pardon en Gironde
    Le mascaret de Saint-Pardon en Gironde. Crédit photo : Alain le GUEN, Licence CC BY 2.0, modifié, via Flickr.com.

    Le raz de marée, une exception

    Le raz de marée est un phénomène de submersion. Ce terme désigne des inondations liées à des dépressions atmosphériques marquées (des très basses pressions) et à des phénomènes de tempêtes. Bien que la marée n’ait pas de réel rapport avec ce phénomène, le terme de « raz-de-marée » est devenu une expression généraliste qui définit tous les phénomènes de submersion marine. La force de friction du vent peut également influer sur le niveau de l’eau. Celui-ci a tendance à baisser lorsque le vent est dirigé vers le large et à monter quand il souffle vers les terres.

     

    RETENEZ


    • La force centrifuge et la force gravitationnelle entre la Terre et la Lune créent le phénomène des marées.
    • Le Soleil exerce aussi une attraction sur la Terre.
    • Les hauteurs des marées varient selon la position des astres.
    • Les spécificités géographiques de la Terre jouent un rôle sur les marées.
    • Il existe différents types de marées dans le monde.
    • Les marées peuvent provoquer des phénomènes variés sur la planète.

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    Devils Tower : le Rocher Sacré du Wyoming

    Aux États-Unis, au nord-est du Wyoming, le National Park Service abrite une curiosité géologique aux proportions remarquables : la Devils Tower, littéralement la « tour du diable ». Premier monument national inauguré aux USA en 1906, ce monolithe de plus de 200 mètres de haut est composé de longues colonnes hexagonales aux formes épurées. Zoom sur cette formation rocheuse dont les origines restent un mystère.

    Devils Tower : une roche d’origine magmatique

    La Devils Tower surplombe les prairies, les marais et les forêts de pins du massif montagneux des Blacks Hills, non loin du célèbre Mont Rushmore et à proximité immédiate de la rivière Belle Fourche. Elle n’est pas pour autant l’œuvre du diable. On se demande néanmoins comment un tel rocher a pu se retrouver planté au milieu de ce décor.

    Les géologues étudient Devils Tower depuis 1875 et s’accordent sur le fait que cette formation résulte d’une poussée de lave solidifiée enfouie sous la surface de la Terre. Il y a environ 50 à 60 millions d’années, au cours de l’ère tertiaire, les pressions tectoniques dans l’ouest de l’Amérique du Nord ont atteint leur apogée, soulevant les montagnes Rocheuses et les Black Hills. À ce moment ou peu de temps après, du magma (roche en fusion) s’est frayé un chemin dans les couches sédimentaires sous la surface ou à l’intérieur d’une cheminée dans les profondeurs d’un volcan.

    Les avis scientifiques divergent sur le processus par lesquels le magma s’est refroidi pour prendre cette forme et sur sa relation avec la géologie régionale.

    Plusieurs théories tentent d’expliquer la formation du monolithe.

    Pour certains géologues, Devils Tower résulte d’un stock (figure 1) ou d’une laccolithe (figure 2). Ces deux formations sont une intrusion ignée qui s’est formée lorsque le magma s’est refroidi avant d’atteindre la surface de la terre. La première dessine une forme irrégulière (dit isodiamétrique) alors que la seconde prend la forme d’une cloche ou d’un champignon. Prise sous un ensemble de roches sédimentaires, l’érosion des roches plus fragiles a peu à peu dégagé le rocher demeuré seul au milieu de la plaine.

    D’autres supposent que Devils Tower émane d’un bouchon volcanique. La tour serait une intrusion ignée en forme de cylindre faisant partie d’un volcan. Le tuyau alimentant le volcan s’est bouché lorsque le magma s’est solidifié sous terre (figure 3).

    En 2015, le géologue Prokop Závada et ses collègues ont comparé la tour du diable à une formation de butte similaire en République tchèque. Leur hypothèse suggère qu’elle vient d’un volcan de type maar-diatrème (figure 4). Ceux-ci naissent lorsque le magma rencontre les eaux souterraines sous la surface de la Terre. L’eau surchauffée se transforme en vapeur qui se dilate de manière explosive et crée un cratère à la surface. Le cratère se remplit de lave qui refroidit et se solidifie formant une structure en dôme. L’érosion a ensuite sapé des parties du dôme pour laisser apparaitre la tour telle que nous la voyons aujourd’hui.

    Les 4 hypothèses de mise en place présentées par le Devils Tower National Monument en 2017. Crédit photo : © 2017 D'après National Park Service, modifié
    Les 4 hypothèses de mise en place présentées par le Devils Tower National Monument en 2017. Crédit photo : © 2017 D’après National Park Service, modifié

    L’état actuel des connaissances ne permet pas de trancher pour l’une ou l’autre de ces quatre hypothèses.

    Les gigantesques orgues volcaniques de Devils Tower : une particularité géologique

    Les prismes qui composent le contour du rocher sont issus d’un phénomène appelé jonction colonnaire ou orgues volcaniques. Ce sont des formations de magma qui, en refroidissant, accumulent du stress jusqu’au moment où ils se fissurent, ce qui donne naissance à ses prismes qui prennent cette forme de colonnes hexagonales compactes, rappelant les tuyaux de l’instrument à vent dont elles tirent leur nom. Plus le refroidissement est lent et constant, plus les prismes sont réguliers.

    On retrouve ces jointures colonnaires de type basaltique dans plusieurs endroits du monde, comme la Chaussée des géants en Irlande du Nord. Sur ces sites géologiques, les colonnes peuvent mesurer de quelques centimètres à trois mètres de diamètre et peuvent atteindre 30 mètres de haut.

    Grimpeurs sur les orgues phonolithiques de la tour du diable dans le Wyoming.
    Les orgues phonolithiques de la Tour du Diable atteignent plus de 200 mètres de haut. Crédit photo : Christian Collins, CC BY-SA 2.0, via Flickr

    La roche de la tour du diable est de type phonolithe, riche en potassium et sodium. Il s’agit d’une roche magmatique volcanique qui tire son nom du son aigu qu’elle produit lorsqu’on frappe dessus avec un marteau. La lave qui a formé la roche a une teneur moyenne en silice. Les orgues phonolithiques de la tour du diable sont de taille inégalée. Les colonnes, situées à 265 mètres de hauteur, offrent un terrain de jeu extraordinaire aux férus d’escalade.

    La Devils Tower (la Tour du Diable) est l’exemple le plus grand et le plus spectaculaire d’orgues volcaniques au monde.

    L’érosion de la tour

    L’érosion a radicalement modifié le paysage environnant. Lorsque la tour s’est formée, il y a environ 50 millions d’années, elle se trouvait à plus de 2 km sous la surface de la Terre. Puis, il y a entre 5 et 10 millions d’années, des forces érosives ont commencé à exposer la tour. Ces forces, en particulier celle de l’eau, ont emporté les sédiments au-dessus et autour du monolithe. Les colonnes grises de la Devils Tower ont commencé à émerger au-dessus des plaines alentour.

    Devils Tower s’érode aussi lentement, mais la roche ignée qui la compose est plus résistante à ce phénomène. Au pied de la tour, on peut observer les empreintes des changements qu’elle a subi tout au long de son histoire géologique. Des roches massives, dont certaines mesurent la taille d’un bus, dessinent un champ de 5 hectares. Principalement situé autour des faces ouest et sud du monument, ce champ de roches géantes s’est formé au fur et à mesure que des fragments de la tour se détachaient. Cependant, bien que de petites roches tombent régulièrement de la tour, l’histoire récente n’a enregistré aucune chute de colonne.

    Les théories décrivant la formation de la tour s’accordent sur le concept d’érosion de ce monument. Ironiquement, ce phénomène naturel d’érosion a effacé les preuves nécessaires pour déterminer quelle théorie de la formation de Devils Tower est la plus probable.

    La tour du diable au cœur des plaines environnantes.
    La Devils Tower est un rocher sacré pour les Indiens. Crédit photo : Par checubus, Adobe Stock

    La géologie de Devils Tower garde donc une part de mystère, tant pour les visiteurs occasionnels que pour les scientifiques. Loin de l’approche scientifique, la légende indienne raconte que le rocher fut griffé par des ours qui tentaient d’attraper 7 jeunes filles réfugiées dessus. Le grand esprit fit grandir le rocher et les plantigrades rayèrent les parois en glissant. Ainsi naquit, pour les Indiens, ce lieu sacré qu’ils nomment, non pas la « tour du diable », mais « la maison de l’ours ».

    RETENEZ


    • Devils Tower, une roche ignée dont le processus de formation reste un mystère pour les scientifiques.
    • La Tour du Diable est un monolithe géant de plus de 200 mètres de hauteur.
    • Un exemple d’orgues volcaniques aux dimensions inégalées.

    1.
    L’univers de la géologie [En ligne]. Devils Tower, monument du Wyoming; 2 mars 2019 [cité le 24 janv 2022]. Disponible: https://actugeologique.fr/2019/03/devils-tower-monument-du-wyoming/
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    Techno-Science.net [En ligne]. 🔎 Devils Tower National Monument - Histoire géologique; [cité le 24 janv 2022]. Disponible: https://www.techno-science.net/glossaire-definition/Devils-Tower-National-Monument-page-2.html
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