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    Les Inondations en France : État des Lieux du Risque Naturel

    Les inondations en France représentent le premier risque naturel de notre pays. Un habitant sur quatre vit en zone inondable et 9 millions d’emplois sont susceptibles d’être affectés par une inondation. Aucune région n’est épargnée. Ces chiffres montrent l’ampleur du risque dans l’Hexagone. Mais qu’est-ce qu’une inondation ? Quels sont les paramètres qui définissent une inondation ? Comment s’en protéger et lutter contre le risque ? Découvrons ensemble les dessous des inondations en France.

    Différents types d’inondation en France

    On dénombre 4 grandes catégories d’inondations qui peuvent être classées en dynamique lente ou rapide.

    Les remontées de nappes

    Les inondations par remontées de nappes se forment lorsque les nappes phréatiques sont gorgées d’eau. Ce type d’inondation a touché la Somme entre mars et mai 2001. Les infrastructures et les populations ont été inondées pendant 2 mois.

    Les précipitations des mois passés étaient plus de deux fois supérieures à la normale. À cause du terrain et de la forte pluviométrie, la nappe se remplit rapidement, débordant par des sources temporaires. Le relief joue un rôle dans l’inondation : l’eau stagne dans les dépressions, transformant le paysage en une vaste zone immergée. Les sols crayeux ou calcaires sont plus susceptibles d’être touchés par ce phénomène. La décrue, c’est-à-dire le retrait des eaux, est longue car la nappe doit se vider.

    Les dégâts liés aux remontées de nappes sont nombreux et sont liés autant à l’inondation qu’à la décrue : 

    • cave et sous-sols inondés ;
    • immeubles fragilisés ;
    • dommages aux réseaux routiers, ferrés et aux canalisations enterrées.

    Le coût de cet épisode a été évalué à près de 150 millions d’euros. Heureusement, ce type d’inondation se développe très lentement et fait rarement des victimes humaines. En effet, l’eau monte entre 1 à 10 cm par jour, ce qui laisse le temps d’agir.

    Inondations : l’eau continue à monter à Abbeville. Crédit vidéo : Images d’archive INA

    Les inondations de plaines

    Les inondations de plaines sont aussi à ranger dans la catégorie à cinétique lente. Néanmoins, la montée des eaux est beaucoup plus rapide que pour les crues par remontée de nappes : environ un centimètre par heure. Pourtant les débits relevés peuvent être jusqu’à dix fois supérieurs au débit normal (appelé module). 

    Mais alors, comment expliquer la faible vitesse de montée des eaux ? Premièrement, le lit des cours d’eau touchés a une faible pente. Ensuite, les différents « étages » du lit permettent de contenir le surplus, sauf quand ces espaces sont occupés par les infrastructures humaines. En effet, l’étalement urbain et l’artificialisation des sols ralentit l’absorption de l’eau dans le sol.

    La Seine sort de son lit.
    La Seine sort de son lit en mai 2016. Crédit photo : Flickr, CC BY-NC 2.0 Deed

    Les exemples d’inondation de plaines sont nombreux, de la crue de la Seine qui inonda Paris en 1910, à celle du Rhône en 2003 pour n’évoquer que les plus connues. Pour autant, il ne faut pas se fier à la lenteur de la montée des eaux dans ce cas. En effet, l’étendue des zones touchées et la présence de multiples enjeux engendrent des bilans humains souvent très lourds. Lors du débordement du Rhône en 2003, sept personnes perdirent la vie et les dégâts furent estimés à plus d’un milliard d’euros.

    Les crues soudaines ou crues-éclairs

    Les crues soudaines, aussi appelées aussi crues-éclairs (flash flood en anglais), sont particulièrement redoutées car très difficiles à prédire. Le géographe Élisée Reclus présentait ce type de crues de la manière suivante : « Dans le lit où d’ordinaire un petit torrent d’eau pure bondit en cascatelles argentines coule maintenant avec fracas une sorte de bouillie, à demi liquide, à demi solide, qui est en même temps un déluge et un écroulement » (Histoire d’un ruisseau, p.103, 1869). 

    Cette “bouillie visqueuse” emporte tout sur son passage comme des ponts, des routes, voire des immeubles. Mais comment se forme-t-elle ? Les crues-éclairs sont le résultat de pluies intenses et concentrées qui se déversent sur une topographie accidentée. Elles surviennent essentiellement en montagnes lors de la fonte des neiges et dans les départements du pourtour méditerranéen. Dans ces régions, des orages très puissants et localisés inondent de petits bassins versants. Un phénomène connu sous le nom d’épisodes méditerranéens.

    La taille réduite de bassins versants et leurs fortes pentes, caractéristiques des fleuves côtiers, ne leur permet pas d’absorber les hectolitres de pluies qui s’abattent sur eux. On dit qu’ils ont une réponse rapide, car la montée des eaux intervient très peu de temps après le début des pluies intenses.

    Les suites de la tempête Alex en 2020 sur la vallée de la Roya et de la Vésubie dans les Alpes maritimes sont éclairantes : un ruisseau quasiment sec le matin s’est transformé en début d’après-midi en un mur d’eau de 7 mètres de hauteur, ravageant tout sur son passage. Près de 500 mm d’eau, l’équivalent de plusieurs mois de précipitations se sont abattues en moins de 24 h. Les images impressionnantes dans les médias ont témoigné de la force des flots.

    Suite à des pluies diluviennes en amont sur les Cévennes, le Gardon entre en crue éclair avec l’arrivée d’une vague. En peu de temps, le Gardon a pris 6 mètres avec malheureusement des inondations dans le centre d’Anduze. Source vidéo : Météo Languedoc, Youtube

    Les ruissellements urbains

    Comme leur nom l’indique, les inondations par ruissellements urbains se produisent dans des espaces urbanisés. Avec ce type d’inondation, parler de catastrophe naturelle n’a pas de sens tant la responsabilité dans le déclenchement du phénomène incombe aux hommes. Initialement, c’est bien la pluie qui est à l’origine des inondations en milieu urbain. Mais l’artificialisation des sols est le facteur principal expliquant l’ampleur du phénomène.

    Qu’entend-on par ruissellement ? Lorsque le réseau d’évacuation des eaux est pour une raison ou une autre défaillant, alors il ne peut plus recevoir les eaux de pluie. Ces dernières se répandent donc là où elles ne s’écoulent pas habituellement. C’est bien souvent sur la chaussée que les eaux se répandent, mais aussi dans des caves, des sous-sols, des parkings et les réseaux souterrains de tous types (métro, réseaux de gaz et d’électricité, etc.). La vitesse et le volume d’eau charriés dépendent à la fois de la topographie des lieux et du niveau de perméabilité des sols. Un espace peut se retrouver inondé sans même qu’il n’ait reçu d’eau de pluie. En effet, les territoires situés plus en amont, en tête de bassin versant, alimentent les vallées plus en aval avec leurs propres ruissellements.

    Hormis leur origine pluviale, les inondations en France sont très différentes les unes des autres. A cela, s’ajoutent les inondations d’origine purement humaine, comme les ruptures de barrages (par exemple la catastrophe de Malpasset dans le Var en 1959), ou celles liées à des événements non climatiques comme les tsunamis et les mouvements de terrain. 

    Comment lutter contre les inondations en France ?

    Sommes-nous démunis face aux inondations ? Quelles parades sont les plus efficaces pour limiter les dégâts ? Désormais, penchons-nous sur les grandes lignes de la prévention du risque inondation en France.

    Le Plan de Prévention du Risque Inondation (PPRI)

    Un risque se caractérise par la rencontre d’un aléa, dans notre cas l’inondation, et d’enjeux (humains, bâtiments, infrastructures, etc.). Une des solutions consiste à limiter la rencontre de l’aléa et des enjeux. C’est l’une des missions de l’État avec un document réglementaire qui maîtrise l’urbanisation future : le Plan de Prévention du Risque Inondation (PPRI). Comment ? En réglementant tout particulièrement l’occupation du sol dans les zones à risques afin de réduire les dommages aux biens et aux personnes.

    Le PPRI prévoit un zonage du risque inondation dans une commune et y réglemente les règles d’urbanisme.

    • Dans les zones rouges, particulièrement exposées aux inondations, toute nouvelle construction est en général interdite, et les modifications architecturales des bâtiments se font sur autorisation stricte, au cas par cas. Le but étant de réduire les vulnérabilités humaines.
    • Dans les zones bleues, l’aléa est considéré comme modéré. Dans ce cas, les constructions sont soumises à certaines conditions, comme par exemple la construction sur pilotis ou l’utilisation de certains matériaux.

    Entretenir la mémoire des inondations passées

    La loi de 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, dite loi Bachelot, stipule que tout citoyen a le droit d’être informé des risques qui l’entourent et des moyens utilisés par les autorités pour y faire face. Les Documents d’Information Communale des Risques Majeurs (DICRIM), les Dossiers Départementaux des Risques Majeurs (DDRM) et autres Informations Acquéreurs Locataires (IAL) participent à cette sensibilisation du public et des élus. Ces documents doivent être complétés par des réunions d’informations et concernent divers risques, qu’ils soient naturels ou technologiques. 

    D’autres dispositifs sont destinés à entretenir spécifiquement la mémoire des inondations en France comme la mise en place de repères de crues. Comme leur nom l’indique, les repères de crues sont les témoins du niveau maximal atteint par des inondations majeures. Les municipalités ont l’obligation d’entretenir ces marques, parfois très anciennes (certaines datent du XVIème siècle, le long du Rhône par exemple). Depuis 2006, ces repères sont uniformisés et une plate-forme participative permet à tous d’y apporter sa contribution. 

    Repère de crue.
    Repère de crue à la gare de Tours. Crédit photo : Kalepom, CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons

    Entretenir la mémoire du risque inondation permet à la population de mieux comprendre les actions de prévention et d’être mieux informée en cas de crise.

    La prévention et l’éducation au service de la protection des populations

    Le gouvernement émet régulièrement des recommandations sur les bons comportements à adopter en cas de risque d’inondation. Ces rappels sont nécessaires, car chaque année, lors d’inondations, on peut constater des prises de risques qui ont parfois un dénouement dramatique. Certains comportements relèvent du bon sens, mais il est toujours intéressant de les rappeler et de les diffuser au plus grand nombre.

    Voici les recommandations à adopter lors de la survenue d’une inondation :

    • S’informer du déroulement des événements sur les comptes officiels des autorités via les réseaux sociaux et les radios nationales puis locales. Les bulletins météo permettent de se préparer et d’anticiper la crise.
    • Proscrire les déplacements, y compris en voiture. Une hauteur d’eau de 30 cm suffit pour faire flotter une voiture. Lorsque cela se produit, le véhicule devient incontrôlable et se transforme en piège pour ses occupants. De plus, les véhicules peuvent encombrer les accès pour les secours.
    • Éviter de s’approcher des cours d’eau, de stationner sur les berges ou les ponts et respecter la signalisation temporaire des services techniques.
    • Atteindre une zone en hauteur par rapport à la rivière pour les usagers de la route et s’abriter dans un bâtiment. Il convient également de s’éloigner des arbres lorsque l’orage gronde.
    • Éviter de descendre au sous-sol ou dans son parking pour ne pas rester piégé. A titre d’exemple, la tragédie de Mandelieu-la-Napoule dans les Alpes maritimes, en octobre 2015, a provoqué le décès de 7 personnes qui tentaient de récupérer leur véhicule dans un parking souterrain.
    • Trouver un refuge en hauteur, si possible à l’étage s’il y en a un, peut sauver des vies. L’aménagement des chambres à l’étage sont vivement recommandées et des ouvertures sur le toit (comme des velux) peuvent favoriser l’évacuation.
    • Ne pas aller chercher ses enfants à l’école ou à la crèche au risque de se mettre en danger et d’encombrer les routes. Les établissements scolaires ont tous un Plan Particulier de Mise en Sécurité (PPMS) et des exercices ont lieu chaque année. Le personnel éducatif est formé à gérer ces situations et assurer la sécurité des enfants.
    • S’assurer de la mise en sécurité de ses proches et voisins, d’autant plus quand il s’agit de personnes vulnérables. Pour cela, privilégier les SMS pour ne pas saturer les réseaux téléphoniques qui doivent rester libres pour les appels de secours. En cas de péril d’une personne, prévenir les pompiers et ne pas intervenir soi-même.
    Les bons réflexes en cas d'inondations.
    Les bons réflexes à adopter en cas d’inondations. Crédit photo : Gouvernement français

    Les inondations en France prennent de nombreuses formes et dépendent avant tout de facteurs météorologiques, mais aussi de la topographie et de l’urbanisation de nos territoires. Dans le cadre du changement climatique, les projections climatiques prévoient une intensification des précipitations et de manière induite des inondations.

     

    RETENEZ


    • Les inondations en France se manifestent de plusieurs façons selon la topographie des lieux et l’urbanisation des territoires.
    • En France, la gestion du risque inondations est régie par des documents réglementaires dont les Plan de Prévention du Risque Inondation (PPRI)
    • Entretenir la mémoire des inondations passées, notamment à travers les repères de crues, est essentiel pour sensibiliser la population.
    • Des recommandations sont émises pour se prémunir contre le risque d’inondation, notamment en cas de crue soudaine.

    1.
    Leone F, Meschinet de Richemond N, Vinet F. Aléas naturels et gestion des risques [En ligne]. Paris : PUF, Presses universitaires de France; 2010. (Licence). Disponible: https://www.puf.com/content/Al%C3%A9as_naturels_et_gestion_des_risques
    1.
    Géorisques [En ligne]. M’informer sur les inondations; [cité le 18 oct 2023]. Disponible: https://www.georisques.gouv.fr/consulter-les-dossiers-thematiques/inondations

    Le Kawah Ijen : un Volcan Hors Norme qui Sent le Soufre

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    Le cratère du Kawah Ijen, situé sur l’île de Java en Indonésie, est bien connu des amateurs de volcans pour ses paysages remarquables. Il abrite en effet le plus grand lac acide au monde. Bien que splendide avec sa belle couleur verte, il n’en n’est pas moins redoutable. Les fumerolles chargées de soufre font également partie du décor du Kawah Ijen. Elles contribuent à créer un étrange phénomène se répétant chaque nuit : des flammes bleues se mettent à illuminer le cœur du volcan. Mais s’il ne fallait retenir qu’une seule chose du Kawah Ijen, ce sont les hommes qui s’activent dans cet environnement hostile. Munis d’un équipement minimaliste, les mineurs triment pour extraire le soufre et le transporter hors du cratère. Un travail effectué dans des conditions dantesques, et qui force le respect. Entre volcan à la beauté surnaturelle et lieu inhospitalier mettant les organismes à rude épreuve, tour d’horizon des particularités de ce volcan pas comme les autres.

    Le Kawah Ijen, un cratère particulier

    Formation du volcan Ijen

    Le volcan Ijen se trouve en Indonésie, à la pointe est de Java, en face de Bali. Il a vu le jour il y a 6 000 ans environ. Il s’agit du plus jeune volcan appartenant à un grand système volcanique né il y a plus de 300 000 ans. À cette période, un stratovolcan nommé Old Ijen et culminant à 3 500 mètres s’est formé. Un stratovolcan désigne un volcan possédant un volcanisme explosif, qui se distingue par des flancs très abrupts, coiffé d’un dôme à son sommet. Le volcanisme explosif se caractérise par des projections de cendres et de blocs de lave lors d’une éruption.

    Il y a 50 000 ans, l’éruption du volcan a créé la caldeira de Kendeng. Une caldeira (ou caldera) est un vaste cratère d’effondrement volcanique dont le diamètre peut atteindre plusieurs kilomètres. Son pourtour peut être circulaire ou ovale. L’origine de ce mot provient du portugais et signifie « chaudron ». La caldeira de Kendeng possède un diamètre de plus de 20 kilomètres. Au sein de cet ensemble, plusieurs volcans actifs sont présents, comme le Raung. Au sud de la caldeira, l’activité volcanique a continué et s’est ainsi que s’est formé le Kawah Ijen. 

    Carte d'ensemble du complexe volcanique Ijen.
    Carte d’ensemble montrant le complexe volcanique de l’Ijen. Le Kawah Ijen se trouve à l’est de la Caldeira de Kendeng. Crédit photo : Smithsonian Institution

    Kawah Ijen veut dire « cratère vert » en javanais. Le nom de Kawah Ijen désigne donc le cratère du volcan et son lac d’une intense couleur verte. Le volcan Ijen culmine à 2 800 mètres d’altitude tandis que son cratère principal atteint une altitude de 2 380 mètres. Ce dernier mesure 1 kilomètre de long pour 700 mètres de large.

    À l’inverse de l’Etna en Europe, le Kawah Ijen est un volcan peu actif, bien qu’une activité fumerolienne subsiste. Sa dernière éruption remonte à 2002 et n’avait pas occasionné de dégâts.

    Le plus grand lac acide au monde

    Le Kawah Ijen est réputé pour abriter le plus grand lac d’acide sulfurique au monde. La couleur du lac, d’un magnifique vert intense, fait également sa renommée. 

    Son pH, dont la mesure est inférieure à 0,3, compte parmi les plus faibles qui soient connus. Preuve de son extrême acidité, une craie plongée dans ce bain agressif finit par être rongée en quelques secondes. La température de l’eau peut atteindre les 50 degrés.

    Le lac représente l’équivalent de 7 000 piscines olympiques. Ses fumerolles sous-marines produisent un mélange composé d’acide sulfurique et d’acide chlorhydrique. 

    Les zones d’où proviennent ces émanations portent le nom de solfatare, dérivé du latin sulpha terra et qui signifie « terre de soufre ». L’origine de leur nom viennent de la Solfatare, un cratère volcanique situé dans la banlieue de Naples en Italie.

    En période d’éruption, le lac devient plus dangereux. Sa surface bouillonne, créant de grosses bulles, qui en explosant, libèrent des gaz toxiques en grande quantité. Il est alors impossible de survivre dans un tel environnement. 

    Pourtant, quelques individus se sont risqués à naviguer sur le lac. Le 5 août 1971, le célèbre volcanologue français Maurice Krafft, accompagné de son collègue géologue Gilbert Féraud, ont été les premiers à oser s’y aventurer pour effectuer des prélèvements. Le scientifique français, accompagné de son épouse Katia Krafft, avait également eu l’occasion d’observer le plus grand lac de lave au monde, à l’intérieur du cratère du volcan Nyiragongo.

    Le plus grand lac acide du monde au coeur du volcan Kawah Ijen.
    Vue au petit matin du lac acide du volcan Kawah Ijen, sur l’Île de Java en Indonésie. Crédit photo : Adobe Stock

    Les flammes bleues, un phénomène unique

    Il est impossible d’évoquer le Kawah Ijen sans parler de ses mystérieuses flammes bleues. Il s’agit du seul endroit au monde où l’on peut observer ce phénomène irréel et très photogénique. À cause de la lumière du jour, ce spectacle saisissant est uniquement visible de nuit. Dans l’Antiquité, Pline l’Ancien l’avait déjà décrit en observant le cratère du Vésuve, duquel s’échappaient des flammes bleues.

    La combustion du soufre du volcan Kawah Ijen produit des flammes bleues.
    Au cœur du volcan Kawah Ijen, on peut admirer les flammes bleues produites par la combustion du soufre liquide. Crédit photo : Adobe Stock

    Les gaz qui émanent du volcan sont chargés de dioxyde de soufre et de sulfure d’hydrogène. Les plus chauds peuvent atteindre des températures allant de 600 à 700 degrés. Lorsqu’ils sortent à l’air libre, ils s’embrasent, ce qui donne naissance à des flammes bleues pouvant mesurer entre 6 à 8 mètres de hauteur. Certaines se dressent à la verticale, semblables à des torches. D’autres demeurent à l’horizontale, en épousant le sol. Leur couleur bleue métallique est surprenante et rappelle le mercure.

    Lorsque le soufre se refroidit, il se condense et devient liquide. Puis il se cristallise et se transforme alors en concrétions. Une concrétion désigne l’action, pour un corps liquide, solide ou gazeux, de se solidifier ou de s’agglomérer grâce à l’intervention d’un phénomène physique ou non. La couleur des concrétions de soufre produites par le Kawah Ijen varie entre le jaune canari et l’orange. 

    « Entre la beauté exceptionnelle du lac turquoise, le cratère jaune
    vif par endroits, l’activité des mineurs et les flammes bleues, le volcan Ijen est un endroit unique au monde. » Florent Mamelle, photographe pour le National Geographic.

    Le soufre du Kawah Ijen, une exploitation périlleuse

    Rencontre avec les forçats de l’or jaune

    Plusieurs fois par jour, des mineurs gravissent et redescendent les pentes abruptes de la montagne pour y extraire « l’or jaune », autrement dit le soufre. Celui-ci est produit par la cristallisation des gaz émanant du cratère. Il est très recherché par de nombreuses industries, comme celles qui s’occupent de blanchir le sucre ou de fabriquer du savon.

    Le labeur de ces hommes se déroule dans des conditions très pénibles : en plus du fort dénivelé, ils ne sont pas équipés de masques à gaz, et respirent en permanence des fumées toxiques. Composées de dioxyde de soufre, elles sont hautement nocives pour le système respiratoire.

    Les flancs du volcan abritent une cabane faisant office de café-restaurant pour les touristes. À proximité, on peut apercevoir un refuge où les ouvriers peuvent dormir lorsqu’ils travaillent à l’exploitation du soufre.

    Parfois, le volcan, surveillé de près par un observatoire, est inaccessible aux mineurs. Il suffit que l’aspect de la surface du lac se modifie pour que les volcanologues décrètent qu’il est dangereux de s’y rendre. Ils recommandent donc aux autorités de bloquer l’accès du Kawah Ijen aux travailleurs. En 1990, les mineurs n’ont pu se rendre sur le volcan durant plusieurs mois, ce qui les a forcés à chercher du travail ailleurs, notamment sur l’île voisine de Bali.

    Bien que cet environnement paraisse infernal, les mineurs sont conscients des risques. Le salaire qu’ils reçoivent pour cette besogne est supérieur au salaire minimum en Indonésie et font d’eux des hommes respectés, capables d’assurer une meilleure vie à leur famille.

    Mineurs transportant du soufre dans le cratère du volcan Kawah Ijen.
    Des mineurs transportant des paniers remplis du soufre qu’ils viennent d’extraire dans le cratère du volcan Kawah Ijen en Indonésie. Crédit photo : Adobe Stock

    L’extraction dans la zone de solfatare

    L’exploitation du soufre au Kawah Ijen a débuté en 1911, durant la période coloniale hollandaise. Depuis 1968, c’est une société privée qui gère les quelque 200 mineurs travaillant de manière indépendante.

    Comment les mineurs procèdent-ils pour extraire le soufre du cratère ? Tout d’abord, équipés de deux paniers reliés par une tige en bambou, ils repèrent les fumerolles les plus épaisses de la zone de solfatare. Ensuite, ils installent des tuyaux leur permettant de canaliser les volutes volcaniques contenant du soufre liquide. L’un des inconvénients de ce système est que l’emplacement des tuyaux change au gré de l’activité volcanique, laquelle évolue constamment. À intervalles réguliers, ils doivent donc démonter et réinstaller leurs tuyaux en différents endroits du volcan.

    Une fois sorti des tuyaux, le soufre refroidit et durcit, passant d’une couleur rouge sang à un jaune caractéristique. Le minerai est prêt à être cassé et à être acheminé dans les paniers.

    Commence alors la remontée du cratère jusqu’à son bord, 250 mètres plus haut. Payés au poids, les mineurs ploient sous leurs paniers pouvant peser entre 70 et 120 kilos. Arrivés au sommet, ils chargent leurs corbeilles dans des charrettes, puis ils redescendent les pentes du volcan sur près de 3 kilomètres, jusqu’au point de collecte. Ils effectuent ce trajet deux à trois fois par jour. Afin d’éviter la chaleur, les hommes préfèrent travailler de nuit.

    Soufre liquide sortant de tuyaux dans le cratère du volcan Kawah Ijen.
    Du soufre liquide de couleur orange sort des tuyaux installés dans le cratère du volcan Kawah Ijen en Indonésie. Crédit photo: Adobe Stock

    La transformation du soufre en usine

    Au point de livraison, c’est maintenant l’heure de la pesée. Le poids du soufre récolté peut varier entre 140 et plus de 200 kilos. Les mineurs reçoivent 6,50 euros pour 100 kilos, remis par un caissier. Deux tonnes de soufre sont extraites chaque jour du Kawah Ijen.

    Mineurs portant des paniers de soufre extrait du volcan Kawah Ijen patientent pour la pesée.
    Des mineurs patientent pour faire peser les paniers remplis du soufre qu’ils ont extrait du volcan Kawah Ijen. A l’issue de la pesée, ils recevront leur salaire en fonction du poids de ce qu’ils ont récolté. Crédit photo : Adobe Stock

    Après avoir été pesé, l’or jaune est déposé dans des camions se rendant dans une usine de transformation nichée dans une forêt, à quelques kilomètres du Kawah Ijen.

    Les ouvriers utilisent des méthodes sommaires afin de refondre le soufre et de le débarrasser ainsi de ses impuretés. Il est ensuite coulé dans le but de former une croûte mince qui pourra être séparée en petits copeaux.

    La forêt entourant l’usine fournit du bois humide, qui lorsqu’il est brûlé dégage une importante fumée. À nouveau, les conditions de travail sont pénibles : tout en respirant l’âcre nuage, les travailleurs manient le soufre sans aucune protection.

    Après avoir été filtré, il est versé sur un sol carrelé et recouvert d’une fine couche d’eau. Au bout de quelques minutes, il cristallise et est prêt à être récolté. Un ouvrier se charge de briser des petits morceaux du précieux élément avec un couteau à long manche. La dernière étape consiste à placer les fragments dans des sacs de 50 kilos. Ces derniers seront ensuite expédiés dans une sucrerie qui les emploiera pour blanchir le sucre.

    Le Kawah Ijen est sans nul doute un volcan hors norme. Dans cet antre où le soufre règne en maître, deux mondes se côtoient : les visiteurs désireux d’admirer la nature qui se donne en spectacle, et les “hommes forts de Java” qui jour après jour mettent leur santé en danger pour gagner de quoi nourrir leurs proches. Cette ambivalence fait du Kawah Ijen un lieu unique qui ne laisse personne indifférent.

     

    RETENEZ


    • Le volcan Kawah Ijen, situé sur l’île de Java en Indonésie, abrite le plus grand lac acide du monde.
    • Le volcan Kawah Ijen est le seul endroit au monde où l’on peut admirer le phénomène des flammes bleues.
    • Au cœur du cratère du Kawah Ijen, des mineurs travaillent dans des conditions difficiles afin d’extraire le soufre.
    • Le soufre est principalement utilisé par l’industrie afin de blanchir le sucre.

    1.
    Mamelle F. Volcans. Gennevilliers : Éditions Prisma; 2018.
    1.
    Guérin A. Les volcans & les hommes. Grenoble Issy-les-Mouineaux : Glénat Arte éditions; 2019.
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    DELANO T. Volcans. Epa. [En ligne]. 2021 [cité le 9 sept 2022]. 336 p. Disponible: https://www.editionsepa.fr/epa/nature-et-animaux/volcans-9782376711681
    1.
    Chazot G. La belle histoire des merveilles de la terre [En ligne]. De Boeck Supérieur; 2020. 320 p. Disponible: https://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782807329119-la-belle-histoire-des-merveilles-de-la-terre

    Le Parc National de Yosemite : une Réserve Naturelle Millénaire

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    À l’est de la Californie (États-Unis), au cœur du massif montagneux et granitique de la Sierra Nevada, le parc national américain de Yosemite s’étend sur plus de 3000 km². Ses chutes d’eau parmi les plus hautes du monde, sa biodiversité et sa végétation variée en font une merveille de la nature inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1984. Les quelques millions de visiteurs annuels viennent surtout admirer sa vallée emblématique : la vallée de Yosemite. Avec sa topographie caractéristique, elle est un terrain de jeu idéal pour les géologues, les randonneurs et autres amoureux de la nature. Elle fait surtout le bonheur des alpinistes venus à l’assaut d’El Capitan ou encore de Half-Dome. Nous vous livrons tous les secrets de Yosemite dans cet article.

    La formation géologique du parc national de Yosemite

    À l’origine, la Sierra Nevada

    La Sierra Nevada est une chaîne montagneuse composée de roches granitiques. Elle s’étend sur 700 km à l’est de la Californie (États-Unis). Sa formation a commencé il y a plusieurs millions d’années. Entre la fin du dévonien (-419 à -359 millions d’années) et le permien (-300 à -250 millions d’années), la plaque tectonique nord-américaine s’est déplacée vers l’ouest et est entrée en collision avec la plaque océanique de Farallon. Cela a donné naissance à une longue chaîne de volcans actifs.

    Au cours du Mésozoïque (-250 à -65 millions d’années), une chaîne de montagnes de 4500 m d’altitude s’est érigée, hissant les roches sédimentaires anciennes aux sommets. La constitution de ce relief s’est accompagnée de phénomènes volcaniques et de remontées de magmas. Ces derniers, trop visqueux pour se déplacer facilement, se sont arrêtés à cinq ou six kilomètres de profondeur. Ils ont cristallisé lentement et ont formé de nombreuses masses de granodiorite de forme ovoïde appelées « plutons ».

    A la fin du Crétacé (-145 à -66 millions d’années), cette chaîne de montagne a connu une intense érosion. Les roches les plus tendres ont été dégagées. Des blocs de granite ont ainsi été mis à jour. Ils ont ensuite été polis par les intempéries pendant des millions d’années, d’où leur aspect actuel.

    Il y a 10 à 20 millions d’années, la Sierra Nevada a commencé à se soulever par l’est et à s’incliner vers le sud-ouest. Ce soulèvement a provoqué l’apparition de nombreuses failles et l’encaissement des cours d’eau. Ces derniers ont alors creusé des vallées et leur ont donné un profil caractéristique en « V ».

    Yosemite : un site façonné par l’eau et la glace

    Merced River, Tualomne River et Yosemite Creek sont les principaux cours d’eau qui traversent le parc national de Yosemite. Ils n’ont pas échappé à ces mouvements de soulèvement. Leurs pentes se sont accentuées, l’écoulement de l’eau s’est accéléré et a creusé les vallées du site.

    Les refroidissements climatiques survenus à l’ère Quaternaire (2,6 millions d’années) ont ensuite engendré la formation de glaciers. Cette glaciation a fondamentalement marqué le paysage de Yosemite. Elle a engendré un relief particulier comprenant :

    • du granite poli ;
    • des vallées en auge en forme de « U » à l’image de la vallée de Yosemite ;
    • des pics déchiquetés ;
    • des dômes arrondis tels que Sentinel Dome ou Half-Dome, très prisés des alpinistes ;
    • des chutes d’eau, qui comptent parmi les plus hautes de la planète, comme par exemple les chutes de Yosemite, Snow Creek Fall, ou celles de Sentinel Fall ;
    • des moraines, ces débris de pierres entraînés par le mouvement des glaciers et formant de grands amas ;
    • des blocs erratiques, des rochers tombés des pentes montagneuses à la surface d’un glacier. Ils sont ensuite transportés par le mouvement de ce dernier sur de longues distances ;
    • des lacs glaciaires.

    La vallée de Yosemite, probablement le site le plus réputé du parc national américain éponyme, présente une topographie caractéristique de la formation glaciaire de la région. Elle est composée de massifs emblématiques : El Capitan, Clouds Rest, Half-Dome, Sentinel Dome et Cathedral Rocks.

    Les processus géologiques et l’érosion ont façonné le parc de Yosemite sur plusieurs millions d’années. Ils offrent aujourd’hui un cadre naturel aux paysages variés, propices au développement d’une importante biodiversité.

    Half Dome surplombe la vallée de Yosemite.
    Half Dome (Demi-Dôme) surplombe la vallée de Yosemite avec sa face verticale d’environ 600 mètres de haut. Crédit photo : Adobe Stock

    Une réserve naturelle exceptionnelle

    Le parc national de Yosemite s’étend sur environ 300 000 hectares dont 95 % sont désignés réserve naturelle. La variété de sa végétation en fait un habitat privilégié pour plusieurs centaines d’espèces d’animaux.

    Une flore diversifiée

    L’altitude du parc de Yosemite varie de 600 à 4000 mètres. Au fur et à mesure de l’ascension, le climat, la topographie et l’hygrométrie varient et influent sur la flore. L’étagement de la végétation passe progressivement de chaparral (ensemble d’arbustes et d’arbrisseaux typiques des climats secs) à faible altitude, aux forêts subalpines puis aux prairies alpines. Près de 40 essences d’arbres différents dont le chêne bleu, le pin gris, le sapin rouge ou encore le pin tordu ainsi que des fleurs sauvages se succèdent tout au long des 1300 kilomètres de sentiers qu’offre la réserve naturelle.

    Les forêts de séquoias géants de Mariposa, Merced et Tuolumne sont une des attractions du parc. Ces arbres milliéraines constituent la forêt de basse montagne qui recouvre la vallée de Yosemite. Le célèbre Grizzli Giant, visible dans le secteur de Mariposa Grove, serait âgé d’environ 3000 ans (à quelques siècles près !), ce qui le classe au 25e rang des arbres les plus vieux de son espèce. La vallée comprend également des chênes noirs dont les glands étaient autrefois une part importante du régime alimentaire des Indiens d’Amérique et nourrissent aujourd’hui encore de nombreux animaux du parc.

    De nombreux séquoias géants dans le parc national de Yosemite.
    Le parc national de Yosemite abrite des arbres millénaires : les séquoias géants. Crédit photo : Adobe Stock

    Une faune développée et protégée

    Le parc national de Yosemite abrite pas moins de 400 espèces de vertébrés. On recense une douzaine d’espèces d’amphibiens, plus de 260 espèces d’oiseaux, une vingtaine de reptiles, plus de 90 espèces de mammifères, dont l’ours noir emblème de Yosemite, ainsi que des poissons et une grande diversité d’insectes. Cette biodiversité est liée à la variété des habitats de la réserve naturelle. Entre prairies, forêts de conifères et paysages subalpins et alpins, chaque animal y trouve un lieu propice à son épanouissement.

    Malgré la qualité et la préservation de ces écosystèmes, environ 40 espèces sauvages sont protégées au sein du parc parmi lesquelles la grenouille à pattes jaunes de la Sierra Nevada, l’aigle royal, la chauve-souris blonde ou encore le mouflon de la Sierra Nevada. En effet, la pollution de l’air, le changement climatique, les espèces non indigènes ou bien la présence humaine (nourriture, accidents de voiture, etc.) sont de réelles menaces pour la faune et leurs milieux naturels.

    Protégé pour la première fois en 1864, le parc national de Yosemite est une vaste zone sauvage connue pour ses cascades, ses anciennes vallées glaciaires, de grandes prairies, ou encore ses séquoias géants.

    Un écosystème sous haute surveillance

    Le parc de Yosemite : un laboratoire scientifique à ciel ouvert

    La réserve naturelle est un terrain d’étude idéal pour les différents scientifiques.

    Le granite, par sa résistance et sa durabilité, préserve le relief et permet les recherches géologiques. Les processus érosifs actuels tels que les chutes de pierres sont également analysés par les géologues.

    Les glaciers, aujourd’hui visibles uniquement sur les plus hauts sommets, ont tout de même laissé des traces dans le paysage. Ces dernières donnent de nombreux indices aux glaciologues sur l’évolution paysagère du parc.

    L’eau est l’un des éléments les plus présents et donc les plus étudiés de Yosemite. Les cascades, mais aussi l’accumulation de la neige hivernale, sa fonte, les rivières, ou encore les inondations printanières, sont étudiées par les hydrologues de la réserve.

    Changements climatiques et restauration écologique

    Réduction du manteau neigeux et assèchement des cours d’eau

    Le changement climatique mondial n’épargne pas le parc national de Yosemite. Les spécialistes de la réserve naturelle ont constaté plusieurs changements écologiques. On observe une modification du régime des précipitations : la neige, qui tombe habituellement en hiver et s’accumule en altitude, se mue en pluie. Par conséquent, le débit des cours d’eau et des cascades est à son apogée pendant la période hivernale. Les inondations sont également plus nombreuses.

    Or, c’est la fonte du manteau neigeux qui alimente les cours d’eau au printemps. La neige étant moins abondante, l’écoulement printanier est largement diminué, voire inexistant en été.

    Augmentation des incendies et des épisodes de sécheresse

    Ces bouleversements hydriques influent sur les feux de forêt. En effet, la végétation étant plus sèche, les départs de feux sont plus nombreux. Selon l’unité de gestion des incendies du parc, on en compte jusqu’à six fois plus les années de faible accumulation neigeuse. D’autre part, les surfaces brûlées augmentent et la saison des incendies s’allonge.

    À la fin du 19ème siècle, les colons éteignaient systématiquement les incendies naturels et périodiques qui régulaient la végétation. Par conséquent, les forêts sont devenues denses et encombrées. Malgré la gestion actuelle des feux, certaines zones restent très boisées. Il y a donc un nombre important d’arbres qui cherchent à puiser l’eau du sol. Cependant, lors des périodes arides, le taux d’humidité est limité et ne permet donc pas de contenter tous les végétaux.

    De plus, la Californie a récemment connu des épisodes de sécheresse importants. Cela a augmenté l’évapotranspiration, phénomène d’évaporation de l’eau par transpiration des végétaux. L’eau du sol et des nappes phréatiques diminue également. Les arbres, stressés par la sécheresse, peuvent développer d’autres problèmes de santé (invasion d’insectes, champignons, etc.), ce qui augmente leur mortalité au sein du site.

    Évolution des écosystèmes

    Ces bouleversements climatiques remodèlent les écosystèmes. En effet, les espèces animales et végétales confrontées à ces changements de leur milieu ont plusieurs options. Premièrement, elles peuvent s’adapter en ajustant leur comportement et leur mode de vie, ce qui modifie l’espèce sur plusieurs générations. Ensuite, elles peuvent migrer afin de retrouver un habitat plus propice. Enfin, quand une espèce reste bloquée dans un environnement inhospitalier, sa population peut chuter, voire disparaître. Au sein du parc de Yosemite, une quarantaine d’espèces animales sont menacées d’extinction parmi lesquelles le renard roux de la Sierra Nevada, le crapaud de Yosemite ou encore la chouette lapone.

    Les actions mises en place par le parc pour préserver le site

    Consciente de ces changements environnementaux, l’administration de la réserve tente de s’y adapter. Plusieurs initiatives de développement durable ont vu le jour tel que l’instauration de transport en commun, le tri des déchets ou encore le choix de fournisseurs d’énergie verte.

    De nombreux projets de restauration écologique ont été entrepris par la direction du parc national de Yosemite ses vingt dernières années et sont toujours en cours. Ils portent sur les zones humides, les forêts, les rivières, les prairies, etc. L’objectif global est de préserver les écosystèmes et de maintenir l’équilibre naturel de Yosemite, tout en garantissant l’accès et le plaisir des visiteurs.

    Le parc travaille en étroite collaboration avec divers organismes de gestion des terres et des eaux de la Sierra Nevada, afin de protéger les richesses naturelles communes. La California Landscape Conservation Partnership, par exemple, associe les sciences et la gestion des ressources pour mettre en place des stratégies d’adaptation au changement climatique.

    Chute d'eau vernal dans le parc national de Yosemite.
    La chute d’eau Vernal d’une hauteur de 97 mètres dans le parc national de Yosemite. Crédit photo : Adobe Stock

    L’importance des feux de forêt

    Les spécialistes ont découvert il y a quelques années déjà que le feu faisait partie intégrante des écosystèmes forestiers de Yosemite. Les incendies spontanés permettent d’éclaircir les forêts, d’ouvrir la canopée et de laisser passer la lumière du soleil. Ils réduisent également l’accumulation dangereuse de débris de bois morts. Enfin, ils restituent les nutriments au sol et déclenchent la floraison, la libération de graines et la germination de certaines plantes.

    Le personnel du parc de Yosemite a établi un programme de gestion des incendies afin de garantir un équilibre entre la protection de la vie, des biens et des richesses naturelles et culturelles du site. Ils utilisent trois techniques différentes pour bénéficier des effets du feu sur les écosystèmes :

    • la gestion des incendies de forêt pour des objectifs de ressources et de préservation du milieu naturel. La foudre entraîne régulièrement des départs d’incendies au sein du parc. Certains sont volontairement maintenus et supervisés par le personnel. Mais le feu est éteint s’il menace des biens ou des propriétés.
    • L’incendie dirigé. Si les employés qualifiés du parc de Yosemite estiment que la couverture végétale morte et envahissante d’une zone précise doit être brûlée, le feu est alors allumé dans des conditions optimales. Il est ensuite, bien sûr, étroitement surveillé et maîtrisé si nécessaire.
    • L’éclaircie mécanique et le brûlage en tas. Tous les ans, le personnel enlève la végétation morte et duveteuse autour des zones fréquentées du parc. Cette manœuvre réduit la forte accumulation de combustibles dans les zones boisées et prévient le déclenchement de nouveaux incendies.

    Des terres amérindiennes ancestrales

    Le parc national de Yosemite est marqué par l’occupation des tribus amérindiennes. Ces dernières seraient arrivées dans la région il y a 4000 ans. La vallée de Yosemite était d’ailleurs autrefois appelée Ahwahnee, un nom amérindien qui signifie « un endroit qui ressemble à une bouche béante ». On peut, aujourd’hui encore, visiter un village baptisé Ahwahnee au sein de la réserve. Il a été construit à l’ancien emplacement du plus grand village indien de la vallée. Le site est encore activement utilisé par les membres de la communauté locale pour des cérémonies et des rassemblements.

    Les Indiens ont longtemps géré les terres de Yosemite dans le respect de l’écologie et en adéquation avec leur culture et leur spiritualité. Mais la venue de personnes non indigènes dès la fin du 18ème siècle a troublé la vie paisible des Amérindiens. Puis en 1849, la ruée vers l’or en Californie a provoqué l’arrivée de milliers de mineurs dont certains sont entrés en conflits meurtriers avec les autochtones. L’installation progressive des colons a changé radicalement le quotidien des Amérindiens. Mais malgré la nette diminution de la population amérindienne, elle fait partie intégrante de l’histoire du parc national.

     

    RETENEZ


    • La vallée de Yosemite est une partie du Parc National américain de Yosemite et se situe au cœur de la Sierra Nevada .
    • Le parc est une réserve naturelle avec une diversité animale et ses 400 espèces de vertébrés.
    • La vallée de Yosemite doit sa forme en auge (U) à la présence de glaciers il y a plusieurs millions d’années.
    • La direction du parc tente de préserver les écosystèmes des changements climatiques .
    • Les Amérindiens sont les habitants historiques de la réserve naturelle.

    1.
    UNESCO Centre du patrimoine mondial [En ligne]. mondial UC du patrimoine. Parc national de Yosemite; [cité le 6 sept 2023]. Disponible: https://whc.unesco.org/fr/list/308/
    1.
    Flammarion. Encyclopédie visuelle des merveilles de la nature [En ligne]. Paris : Flammarion; 2018. Disponible: https://editions.flammarion.com/encyclopedie-visuelle-des-merveilles-de-la-nature/9782081428713
    1.
    Editions Artemis [En ligne]. BEAU LIVRE SANCTUAIRES SAUVAGES - LES PLUS BEAUX SITES NATUREL; [cité le 9 sept 2022]. Disponible: https://www.editions-artemis.com/beauxlivres/2690-9782816014198-sanctuaires-sauvages-les-plus-beaux-sites-naturels-de-l-unesco.html
    1.
    Chazot G. La belle histoire des merveilles de la terre [En ligne]. De Boeck Supérieur; 2020. 320 p. Disponible: https://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782807329119-la-belle-histoire-des-merveilles-de-la-terre

    Chroniques de l’Évolution de la Vie sur Terre, une Modeste Histoire

    Et si une soupe de composés chimiques était à l’origine de l’évolution de la vie sur Terre ? S’agissait-il de simples molécules perdues au milieu d’une vaste étendue de bouillon primitif ? Après des siècles de recherches sur l’histoire de la vie, la réalité n’en est sans doute pas si éloignée. Suite à la formation de la Terre, il y a 4,54 milliards d’années, la croûte terrestre et les océans de notre planète se sont formés. Au sein de cette vaste étendue d’eau, une symphonie d’éléments chimiques tels que le carbone, l’hydrogène, l’azote et bien d’autres, se seraient associés, tout d’abord de manière aléatoire. Puis, les agencements chimiques les plus stables ont été retenus par l’évolution : c’est la première application de la sélection naturelle. Embarquez dans une lecture qui vous révélera les secrets enfouis du vivant au cœur de cette histoire captivante.

    Les origines de l’évolution de la vie sur Terre

    Les premières traces de vie : des cellules primitives

    La date d’apparition des premières cellules est encore assez discutée au sein de la communauté scientifique. En effet, une trace de carbone dans des roches australiennes datées de 4,1 milliards d’années (Ga) pourrait renfermer la plus ancienne trace de la vie sur Terre. De nos jours, des échantillons d’ADN, issus d’organismes vivants, donnent une estimation des prémices d’une vie ancienne. Ils indiquent également que tous les organismes vivants descendent d’un microbe hypothétique qui serait notre dernier ancêtre commun universel, dénommé LUCA (Last Universal Common Ancestor). Cependant, un déluge de météorites aurait tué toute forme de vie précoce entre -4,1 et -3,9 Ga : un épisode connu sous le nom de Grand bombardement tardif. Ainsi, les scientifiques estiment que la première cellule fossile daterait d’environ 3,8 Ga. Cette forme de cellule primitive deviendra par la suite le noyau des cellules dites complexes.

    Les stromatolithes : de la photosynthèse à une atmosphère oxygénée

    Entre -3,4 et -3,5 Ga, les stromatolithes ont fait leur apparition. Ces structures rocheuses abritent des colonies de cyanobactéries capables de réaliser la photosynthèse anoxygénique (sans production de dioxygène). Entretemps, les bactéries ont commencé à coloniser la terre ferme. Des sols riches en matière organique datant de 2,9 Ga, ont prouvé l’existence de cette forme de vie primitive sur la terre ferme. Des bactéries fossiles ont également été retrouvées et estimées à 2,6 Ga.

    Les stromatolithes de Shark Bay à marée basse.
    Les stromatolithes de Shark Bay en Australie. Les premiers stromatolithes datent de plus de 3,4 milliards d’années. Crédit photo : Adobe Stock

    La photosynthèse oxygénique (production d’oxygène) réalisée par les stromatolithes fait finalement son apparition il y a 2,45 Ga, libérant alors une grande quantité de dioxygène dans l’eau puis dans l’atmosphère : c’est la Grande oxydation. Il s’en suivra la première époque glaciaire.

    Apparition et évolution de la cellule eucaryote

    Les cellules eucaryotes sont des cellules complexes dotées d’un noyau qui contient leur matériel génétique (cellules végétales, animales et de champignons). Les cellules eucaryotes produisent des molécules qui leurs sont propres tels que les stéroïdes. Des traces de substances de ce type ont été trouvées dans des roches vieilles de 2,4 Ga. La plus ancienne trace fossile de cellule eucaryote correspond à un champignon fossile nommé Diskagma, qui serait vieux de 2,2 Ga.

    Les cellules eucaryotes ont évolué en présence des mitochondries, qui sont devenues les centrales énergétiques des cellules complexes il y a 2 Ga. Par la suite, les cellules végétales ont également développé des chloroplastes il y a 1,5 Ga, leur permettant d’utiliser la lumière du soleil comme source d’énergie. Entretemps, deux lignées, respectivement semblables aux plantes et aux animaux, se sont divisées il y a 1,6 Ga.

    Fossile de champignon au microscope Diskagma buttonii.
    Photographie et reconstitution de Diskagma buttonii, un champignon fossile ancien de 2,2 Ga, Afrique du Sud. Crédit photo : Retallack, via Wikimedia Commons

    Apparition de la vie multicellulaire

    Le plus ancien fossile d’un organisme pluricellulaire connu à ce jour est celui d’une algue : Bangiomorpha. Sur ce fossile datant de -1,2 Ga, des organes reproducteurs ont été identifiés ainsi que ce qui pourrait s’apparenter à un crampon (base de la tige servant à la fixation de l’organisme). Bangiomorpha est également le tout premier fossile d’un organisme eucaryote relevant d’un groupe toujours existant aujourd’hui : les algues rouges.

    Selon des échantillons d’ADN actuels, les plantes et algues vertes seraient apparues il y a 934 millions d’années (Ma), tandis que les premiers animaux, des éponges, auraient fait leur apparition 184 Ma plus tard, il y a environ 750 Ma.

    Explosion de la biodiversité

    L’énigmatique faune de l’Édiacarien

    La faune de l’Édiacarien (-635 à -541 Ma), qui doit son nom aux collines Édiacarien en Australie, est constituée d’organismes énigmatiques dont l’identification est encore discutée. Cependant, il s’agirait probablement des premiers fossiles de cnidaires (cousins des méduses et anémones marines actuelles) et même des premiers fossiles d’embryons d’animaux. Les animaux bilatériens auraient également émergé à cette époque comme le témoigne le fossile d’Ikaria wariootia, un animal vermiforme daté de 555 Ma. Malheureusement, la plupart de ces espèces se sont éteintes à la fin de l’Édiacarien.

    Reconstitution artistique de la faune de l'Ediacarien.
    Diorama de la vie marine édiacarienne exposée à la Smithsonian Institution. Crédit photo : Ryan Somma, via Wikimédia Commons

    L’explosion cambrienne et la vie océanique : une étape clé dans l’évolution de la vie sur Terre

    Le Cambrien marque un tournant majeur dans l’histoire de l’évolution de la vie sur Terre. Située entre -542 et -485 Ma, cette époque est marquée par l’apparition de la plupart des groupes actuels d’animaux mais aussi quelques autres disparus entretemps. Ainsi, des fossiles des premiers poissons (Myllokunmingia et Haikouichthys) connus ont été datés de -530 Ma. Des empreintes, datant de la même période, ont prouvé la présence d’arthropodes sur la terre ferme. Des tissus fossilisés semblables à des os ont également été retrouvés et datés de -510 Ma.

    Le géosite témoignant de la richesse biologique de cette période reste la faune de Burgess composée d’annélides (organismes vermiformes) et de chordés (principalement des arthropodes). Au total, ce sont plus de 80 000 spécimens de fossiles qui ont été retrouvés au sein du dépôt de schistes noirs du Parc national Yoho au Canada. Même si la faune retrouvée est exclusivement marine et principalement benthique (vivant proche du fond de l’océan), 140 espèces réparties en 119 genres ont été identifiés : 37% d’entre elles sont des arthropodes (19 espèces de trilobites) mais on retrouve également des algues, des mollusques, des éponges, des brachiopodes, et bien d’autres encore.

    Les plantes n’en étaient pas moins présentes. En effet, des spores fossilisées datées de -470 Ma ont été retrouvées, prouvant la colonisation de la terre ferme par des plantes similaires à des mousses. Avec l’extinction Ordovicien-Silurien, près de 85% de ces espèces ont disparu. C’est la première extinction de masse que la Terre ait connue.

    Fossile de trilobite dans le parc national Yoho au Canada.
    Fossile de Trilobite, Burgess, Parc national Yoho au Canada. Crédit photo : Edna Winti, via Wikimedia Commons

    À la conquête de la terre ferme

    Le Silurien (-443,4 à -419,2 Ma) est marqué par la sortie massive des eaux des organismes. Les plantes poursuivent alors leur conquête des territoires émergés. Une étonnante diversification des plantes terrestres débute durant le Dévonien (-419 à -359 Ma). Suite au développement des plantes ligneuses telles que les prêles ou les fougères au début de la période, les premières plantes à graines (ou spermaphytes) ont fait leur apparition au Dévonien supérieur. Des fossiles d’arbres datant de -380 Ma ont également prouvé l’existence des premières forêts.

    Au cours de cette période, les animaux sortent également des eaux. Le fossile d’un mille-pattes daté de -428 Ma présente un corps qui suggère une respiration à l’air libre et une fécondation interne. Ces évolutions morphologiques vont permettre une importante diversification des animaux terrestres.

    Un fossile de tétrapode daté de -375 Ma a prouvé l’émergence des premiers vertébrés terrestres avant de subir la seconde extinction de masse de la planète. Il s’agit l’extinction du Dévonien qui s’étend de −380 à −360 Ma qui a fait disparaître près de 75% des espèces.

    Développement du gigantisme au Carbonifère

    Le Carbonifère est une période géologique très riche en dioxygène marquée par un gigantisme chez les animaux et végétaux. Son nom provient des couches de charbon laissées en Europe de l’Ouest issues de la dégradation de toute la matière végétale de l’époque.

    Si l’on souhaite se représenter cette période, il suffit d’imaginer des forêts primitives peuplées d’arbres de près de 40m de haut (lépidodendrons), de fougères arborescentes entre lesquels slaloment des mille-pattes géants (myriapodes) et libellules géantes de 70 cm d’envergure (meganeura).

    Comparaison de la taille entre un humain et une libellule au Carbonifère.
    Comparaison de l’envergure des libellules géantes du Carbonifère avec la taille moyenne d’une femme actuelle. Crédit infographie : Élise Heinen

    Cette période est également marquée par la formation d’un supercontinent nommé La Pangée ainsi que par l’émergence de plusieurs groupes d’animaux encore présents aujourd’hui tels que les amphibiens (-360 Ma), les amniotes (-330 Ma) ou encore les reptiles (-318 Ma). Même si les mammifères n’ont pas fait leur apparition immédiatement, la découverte d’un fossile de cynodonte datant de -260 Ma présente des caractéristiques morphologiques intéressantes. En effet, ce reptile mammalien possédait une mâchoire puissante avec des dents différentes et une grande boîte crânienne. Ces caractéristiques seront ensuite transmises à ses descendants : les mammifères.

    L’extinction permienne a marqué la fin de l’ère géologique du Paléozoïque. Celle-ci reste à ce jour la plus grande extinction de masse jamais connue par la biosphère. Elle décima près de 70% de la biodiversité de l’époque dont 95% des espèces marines.

    « Les humains ne sont pas le résultat final d’un progrès évolutif prédictible mais plutôt une minuscule brindille sur l’énorme buisson arborescent de la vie qui ne repousserait sûrement pas si la graine de cet arbre était mise en terre une seconde fois. » Stephen Jay Gould, Paléontologue

    Des dinosaures aux premiers Hommes

    Apparition des dinosaures et des mammifères

    Les premiers fossiles de dinosaures datés de -231 Ma annoncent l’ère des reptiles géants. Cependant, ce n’est pas le seul groupe à apparaître et à s’étendre au Trias (-252,2 Ma à -201,3 Ma). En effet, les premiers mammifères apparaissent peu de temps après l’apparition des dinosaures avec notamment l’apparition d’Adelobasileus (-225 Ma), une sorte de rat probablement insectivore. Ce n’est que 15 millions d’années plus tard que la production de lait chez les mammifères fera son apparition.

    Étonnamment, c’est l’extinction Trias-Jurassique (-200 Ma) qui permettra l’explosion radiative (évolution rapide) des dinosaures et des mammifères en libérant notamment des niches écologiques.

    Un règne de 166 millions d’années…

    Les dinosaures ont marqué une étape importante dans l’histoire de l’évolution de la vie sur Terre, malgré leur extinction à la limite Crétacé-Paléogène aussi tragique que brutale. Leur disparition serait vraisemblablement liée à l’impact sur Terre d’un astéroïde, entre autres, il y a 66 Ma. Leur présence sur Terre s’apparente à un véritable règne, de 166 millions d’années. Durant cette période, les dinosaures ont eu la chance d’assister à des évolutions majeures du vivant : de la diversification des plantes à graines et à fleurs (-190 Ma et -120 Ma) à la maîtrise de l’art du vol chez les oiseaux (archæoptéryx, -150 Ma) en passant par la division du supercontinent de la Pangée…

    Débuts de l’âge d’or des mammifères

    L’extinction Crétacé-Paléogène n’a pas causé uniquement de tort aux dinosaures. Les mammifères ont également été touchés et quasiment éradiqués. Cependant, quelques espèces ont survécu, particulièrement des placentaires. Les placentaires sont des organismes dont la progéniture se développe la majeure partie de son temps dans l’utérus de la femelle grâce au placenta. Celui-ci assure de nombreux échanges entre la mère et sa progéniture.

    Ainsi, les premiers primates ont fait leur apparition il y a 56 Ma, puis les grands singes, il y a 25 millions d’années. Entretemps, la faune et la flore se sont développées et diversifiées considérablement pour se rapprocher de celles que nous connaissons aujourd’hui. Le site fossilifère du lac de Messel en Allemagne est daté de 47 Ma à 48 Ma et représente une véritable capsule temporelle traduisant notamment de l’évolution des mammifères.

    Faune et flore du site fossilifère du lac Messel en Allemagne.
    Faune et flore du site fossilifère du lac Messel : une étape clé dans l’histoire de l’évolution du vivant. Crédit infographie : Élise Heinen

    Des mammifères à la lignée humaine

    Squelette partiel de Lucy, australopithèque.
    Squelette « Lucy » (AL 288-1) Australopithecus afarensis. Crédit photo : Muséum national d’histoire naturelle, Paris, via Wikimedia Commons

    Les grands-singes ont évolué rapidement. La séparation entre les prémices de la lignée humaine et celle des chimpanzés est encore discutée par les spécialistes mais les estimations varient en général entre 6 et 10 Ma. Il s’en suivra le début de la Préhistoire qui s’étend de 2,8 Ma à 3 300 avant Jésus-Christ. Les bornes de cette période sont marquées par l’apparition de la lignée humaine, et l’invention de l’écriture qui marquera le début de l’Antiquité.

    Les origines de l’Homme sont encore assez floues dans la toile paléontologique. Cependant, certains fossiles emblématiques nous aident à mieux comprendre cette période et l’évolution du genre humain. Parmi eux Lucy, un spécimen fossile australopithèque Australopithecus afarensis (espèce éteinte). Ce spécimen appartenant à la lignée humaine est daté de 3,18 millions d’années. Longtemps considéré comme le plus ancien fossile de la lignée humaine, Lucy s’est vue détrônée par Abel qui est le premier spécimen de l’hominidé fossile Australopithecus bahrelghazali, découvert en 1995. Il aurait vécu entre 3,5 et 3 Ma et serait un contemporain d’Australopithecus afarensis.

    En résumé…

    Si l’on devait représenter l’histoire de l’évolution de la vie sur Terre sur une horloge, la Terre se formerait à minuit. Les premières formes de vie apparaîtraient à 4h10 du matin, tandis que les premiers organismes pluricellulaires feraient leur apparition à 17h45. Les dinosaures arriveraient à 23h40 et l’Homme seulement à 23h59 et 56 secondes…

     

    RETENEZ


    • Les formes de vie les plus anciennes sur Terre dateraient de 3,8 milliards d’années.
    • Les stromatolithes ont joué un rôle essentiel dans l’évolution de la vie sur Terre en oxygénant les océans et l’atmosphère terrestre.
    • L’apparition des premières formes de vie multicellulaire, puis l’explosion cambrienne il y a 542 Ma, ont conduit à une grande diversité biologique sur Terre.
    • Les plantes et les animaux ont progressivement conquis la terre ferme, tandis que les dinosaures ont dominé la Terre pendant 166 millions d’années.
    • L’évolution humaine a débuté il y a 6 à 10 millions d’années, aboutissant à notre espèce : Homo sapiens ou « homme moderne ».

    1.
    Coenraads RR, Koivula JI. Géologica: la dynamique de la terre les temps géologiques, les supercontinents, le climat, les formes de relief, les animaux, les plantes. Königswinter (Allemagne)] [Paris : H. F. Ullmann; 2008.
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    Chazot G. La belle histoire des merveilles de la terre [En ligne]. De Boeck Supérieur; 2020. 320 p. Disponible: https://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782807329119-la-belle-histoire-des-merveilles-de-la-terre
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    Burney D, Challoner J, Coyne C, Harrar S, McGhee K. La Terre extrême et prodigieuse : faune, flore, climat, relief. Cachan (Val-de-Marne) : Sélection du Reader’s Digest; 2019. 320 p.

    Thingvellir en Islande : les Colères de la Terre, le Berceau d’une Nation

    Þingvellir” (en islandais) ou Thingvellir est l’un des sites les plus visités d’Islande. Il est inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2004. Son nom signifie “plaines du Parlement” en raison de son fort héritage culturel. Situé à moins de 40 km à l’est de la capitale Reykjavik, ce lieu remarquable constitue une singularité géologique. A la frontière des deux plaques tectoniques, il est un des deux seuls endroits sur Terre où le phénomène d’expansion du plancher océanique est visible depuis la surface (avec la vallée du Grand Rift africain). Zoom sur ce lieu unique, reflet d’une activité volcanique et tectonique remarquable, qui a vu naître la nation islandaise.

    La région de Thingvellir en Islande

    Située dans le Cercle d’Or, la région de Thingvellir est, avec la chute de Gullfoss et le champ géothermique de Geysir, un lieu emblématique de l’Islande. La partie nord de ce territoire est intégrée dans un parc national qui protège ce milieu naturel exceptionnel.

    Le cœur de cette région est dominé par le lac glaciaire Thingvallavatn (“vatn” signifie eau). Ce lac occupe une vaste dépression appelée fossé d’effondrement ou graben (“fossé” en allemand). L’altitude moyenne au fond du fossé est d’environ 100 m, tandis que, sur les plateaux environnants, d’une altitude de 200-300 m, les plus hauts sommets culminent quant à eux jusqu’à 1000 m.

    Les formations rocheuses uniques de Thingvellir proviennent d’une série de fractures et de failles qui incisent les coulées de lave constituant les plateaux. Ces structures sont parallèles les unes aux autres et concentrées de part et d’autre du fossé. Elles sont globalement orientées SO-NE et sont parfaitement visibles dans le paysage.

    Les failles qui entaillent la région se traduisent par des falaises escarpées ainsi que des murs de basaltes jusqu’à 30 m de hauteur. Ces escarpements sont légèrement inclinés vers le centre du fossé d’effondrement. Ces reliefs ont également sculpté des gorges dont certaines sont tellement larges qu’il est possible de cheminer à l’intérieur. Les deux grandes failles qui bordent la plaine de Thingvellir sont, à l’Ouest, la faille d’Almannagjá (“la faille de tous les Hommes”), de 7,7 km de long, et à l’Est, la faille de Hrafnagjá, d’une longueur de 12 km.

    La morphologie unique de ce lieu, mêlant falaises rocheuses, plaines en herbes, lacs et cours d’eau, reflètent une histoire géologique complexe et tumultueuse.

    L’origine volcano-tectonique de Thingvellir

    Un rift né de la tectonique des plaques

    L’Islande se situe sur la dorsale médio-atlantique, une chaîne de montagnes sous-marines qui s’étend sur plus de 16 000 km dans l’océan Atlantique. L’île se trouve à la jonction de deux plaques tectoniques majeures. Sur ce site, la plaque nord-américaine et la plaque eurasienne se séparent l’une de l’autre d’environ 2,5 cm/an depuis 16 millions d’années. Cette divergence des plaques est à l’origine du rift islandais. Un rift (qui signifie “faille”, “fissure”, “rupture” en anglais) est une zone où la croûte terrestre qui, soumise à l’action de force d’extension, s’amincit et forme en surface un fossé d’effondrement. Le rift islandais est, avec la vallée du Grand Rift en Afrique, une rare exception d’un rift océanique émergé. Cette particularité provient de la présence d’un point chaud sous la dorsale océanique. La forte activité volcanique liée à ce panache mantellique et la production élevée de lave associée sont les raisons pour lesquelles le rift islandais est émergé.

    En Islande, la dorsale change de direction et se segmente. Le rift axial, c’est-à-dire le long de la dorsale, est scindé en trois zones volcaniques majeures : la zone volcanique nord (ZVN), la zone volcanique est (ZVE) et la zone volcanique ouest (ZVO) dans laquelle se situe Thingvellir.

    Carte volcanique d'Islande et localisation du rift de Thingvellir.
    Carte du système volcanique et tectonique d’Islande. Crédit : modifiée d’après © Pinpin, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

    Le sol de Thingvellir s’enfonce inexorablement

    Le plancher du graben de Thingvellir est affecté par un mouvement de subsidence. Cela signifie qu’il s’enfonce continuellement à cause du phénomène d’extension de la croûte terrestre. Une étude récente a évalué un taux de subsidence d’environ 4 mm/an depuis 1967. Au cours de l’histoire géologique de la région, des déplacements de très grandes ampleurs ont eu lieu et se sont inscrits dans le paysage. Ainsi, des effondrements de 30-40 m se seraient produits il y a environ 9000 ans au niveau des failles bordières d’Almannagjá (à l’ouest) et de Hrafnagjá (à l’est). Des déplacements jusqu’à 200 m sont également reconnus au sud du lac Thingvallavatn.

    Subsidence du fossé d'effondrement du rift de Thingvellir délimité par deux failles majeures.
    La subsidence concerne toute la région de Thingvellir, entre la faille de Almannagjá (à gauche) et celle de Hrafnagjá (à droite). Crédit photo : © Thingvellir national park / Gagarín.

    Thingvellir : un paysage façonné par le volcanisme

    A l’image de l’Islande toute entière, le sol de Thingvellir est composé de roches volcaniques relativement jeunes (à l’échelle des temps géologiques). Les plus anciennes ne datent que de 3,1 Ma. Durant les périodes de glaciation, les éruptions sous-marines et/ou sous-glaciaires ont produit des roches particulières appelées hyalocastites. Elles sont issues du refroidissement brutal de la lave au contact de l’eau ou de la glace. En dehors de ces périodes, les laves émises sont des basaltes. Toutes les roches de cette région proviennent essentiellement de deux systèmes volcaniques : Botnssúlur-Laugarvatnsfjall au nord-est et Hengill-Hrómundartindur au sud. Ce dernier est d’ailleurs toujours actif actuellement. La dernière éruption ayant eu lieu dans le parc de Thingvellir date d’il y a environ 2000 ans et s’est produite à travers une fissure éruptive située au sud du lac. Au cours de l’éruption, cette fissure s’est propagée vers le NE, sous le lac. L’éruption phréatomagmatique qui s’en est suivie est à l’origine des cratères Sandey visibles au milieu du lac.

    Des structures volcaniques remarquables sont observables dans la région de Thingvellir. Ainsi, il est facile de voir des coulées de lave pāhoehoe (terme hawaïen) ou laves cordées. Elles proviennent de l’éruption d’Eldborgir qui s’est produite il y a environ 9100 ans. Elles ont recouvert une superficie de 200 km² (soit deux fois la superficie de la ville de Paris). L’horizon est également marqué par des reliefs très singuliers sculptés par les éruptions sous-glaciaires et appelés montagnes tables ou “tuyas”. Ces monts ont un sommet plat, des pentes très raides et sont souvent de forme cylindrique. Parmi ces montagnes, celles de Hrafnabjörg et Ármannsfell sont visibles vers le nord de Thingvellir, et celle de Búrfell vers le Sud.

    Au milieu d’une étendue de lande minérale s’ouvre le rift de Thingvellir, né des colères de la Terre et devenu le berceau d’une nation.

    Thingvallavatn, le joyau glaciaire d’Islande

    Un lac glaciaire sculpté par les laves

    Il y a entre 12 000 et 10 000 ans, toute la dépression de Thingvellir était occupée par un immense glacier. Devant la langue glaciaire, au sud du lac actuel, des lacs proglaciaires se sont formés. Puis, les glaciers se sont retirés et ont laissé place à un lac dont les dimensions devaient approcher celles du lac actuel. Ce lac était alors alimenté par des rivières glaciaires provenant principalement du glacier Langjökull situé alors juste au Nord (“jökull” signifie glacier).

    Les contours de ce lac glaciaire ont ensuite été redessinés par l’activité éruptive post-glaciaire. Il y a environ 9100 ans, les champs de lave de l’éruption de Eldborgir ont envahi le lac par l’Est réduisant drastiquement sa surface. Le niveau du lac est alors monté de près de de 25 m (soit 11 m au-dessus du niveau actuel) entraînant une submersion partielle des coulées de lave qui s’étaient récemment épanchées. L’érosion et les éruptions mineures qui ont suivi ont contribué à la forme actuelle du Thingvallavatn. Aujourd’hui, le lac continue de s’agrandir constamment en raison de la subsidence du graben dans lequel il se trouve.

    Des eaux diaphanes venues des glaciers

    L’éruption de Eldborgir n’a pas uniquement modifié les contours de Thingvallavatn. Elle est également responsable de changements dans le régime d’alimentation du lac. Avant cette éruption, le lac était alimenté par des rivières glaciaires, des rivières qui se forment à l’avant des glaciers (c’est le cas du Rhône qui s’échappe du glacier du même nom en Suisse). Lors de l’éruption, les coulées de lave émises ont endigué les torrents glaciaires qui arrivaient dans le Thingvallavatn. Depuis, l’alimentation du lac se fait à 90 % par des sources souterraines. L’origine de ces eaux est d’ailleurs connue depuis longtemps : elles proviennent très majoritairement du glacier Langjökull, situé aujourd’hui à 50 km. Là, les eaux s’infiltrent et circulent dans les roches très poreuses qui composent le sous-sol. Elles émergent ensuite dans et autour du lac. En traversant la lave, ces eaux sont filtrées par la roche ce qui leur confère une pureté exceptionnelle et explique ainsi leur limpidité.

    Le lac est également alimenté par de nombreuses rivières coulant depuis les plateaux. C’est le cas de la rivière Öxará qui rejoint le lac après avoir franchit l’escarpement ouest de la faille d’Almannagjá au niveau de la cascade d’Öxarárfoss (“foss” signifie « la chute d’eau »).

    Une faune et une flore aquatique foisonnante malgré une eau glaciale

    Thingvallavatn est le plus grand lac naturel de l’île (84 km²). Le lac est particulièrement fertile et riche en végétation, malgré un eau dont la température est comprise entre 2 et 4°C. Si seules trois espèces de poissons sont présentes dans le lac, il renferme toutefois pas moins de 50 types d’invertébrés et 150 types de plantes. Un tiers du fond du lac est d’ailleurs recouvert d’algues, comme les Tetraspora cylindrica, d’un vert fluo reconnaissable.

    Le Thingvallavatn offre également l’une des expériences les plus incroyables d’Islande : la plongée ou la randonnée subaquatique au cœur d’une faille géologique ! La Silfrugjá ou Silfra se trouve à l’extrémité nord du lac de Thingvellir. Cette faille se traduit par une fracture dans la roche de 100 m de long et qui atteint une profondeur maximale de 63 m. En grande partie immergée, elle offre un spectacle unique à qui se sent prêt à enfiler ses palmes pour affronter les eaux glaciales.

    L’Islande : une activité géothermale intense exploitée par l’Homme

    Les systèmes volcaniques situés au sud de Thingvallavatn sont le siège d’une activité géothermale intense. De manière générale, cette activité se manifeste en surface par la présence de fumerolles, de mares de boue et d’eau turbide, et d’une altération de la roche caractéristique avec ces nuances de couleurs ocres.

    Dans cette zone, la fracturation intense de la roche favorise les intrusions magmatiques. Le magma, et la chaleur qui l’accompagne, y sont plus proches de la surface. Ainsi, le gradient géothermique est très élevé dans cette zone (et en Islande de manière générale). Une étude récente a montré qu’à cet endroit la température est de 200°C à 500 m de profondeur et atteint 320°C à 1000 m. A titre de comparaison, en Europe continentale, le gradient géothermique est de 3°C tous les 100 m ; une température de 200 °C n’est atteinte qu’à environ 8 km de profondeur. Ce champ géothermal naturel est exploité depuis le début du XXe siècle par deux centrales électriques parmi les plus puissantes au monde : Nesjavellir et Hellisheiði.

    L’héritage culturel des “plaines du Parlement”

    Thingvellir n’est pas uniquement un site naturel incroyable, il est également bien culturel important, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2004. En effet, il est le lieu de rassemblement de l’Alþing, une assemblée constituée de chefs islandais descendants des premiers colons venus de Norvège, d’Ecosse et d’Irlande. La première Alþing a lieu en 930 et marque la naissance de l’État Libre Islandais.

    Chaque année, pendant deux semaines environ, ces évènements se déroulent autour d’un lieu central qu’est le “Rocher de la Loi” (le “Lögberg” en islandais). Le cœur de ce rocher, qui constitue l’un des rebords de la faille normale d’Almannagjá, est aujourd’hui encore considéré comme le lieu ayant accueilli le premier parlement au monde. Au cours de cette assemblée étaient décidées les lois, réglés les différends et prises les plus importantes décisions de ce jeune état. C’est en ce lieu emblématique par exemple que sera engagée la christianisation de l’Islande illustré par l’église Þingvallakirkja (“kirkja” signifie église).

    Ce lieu d’unicité nationale devenait également une fois par an le centre social et culturel du pays. Aujourd’hui, les vestiges d’une cinquantaine de cabanes de tourbes et de pierres sont connus sur le site. Elles ont probablement été construites pour les hauts dignitaires de l’époque. Les membres de leur les délégations devaient quant à eux se contenter de tentes dont il ne reste malheureusement aucune trace.

    Enfin, l’agriculture s’est également développée autour de ces rassemblements. Jusqu’à 4000 fermiers ont été réunis sur le site, accompagnant leur chef. Aujourd’hui, le parc national de Thingvellir s’attache à préserver le paysage agricole islandais. La ferme de Thingvellir, située près de l’église, se veut un témoin fidèlement reconstitué.

    Rocher de la loi situé au bord du rift de Thingvellir et lieu de naissance du parlement islandais.
    Le Rocher de la Loi (le “Lögberg”) était le lieu central des rassemblements de l’Alþing. Crédit : © Lucie Letourneur.

    Le site de Thingvellir, l’un des plus visités d’Islande, est sans nul doute un lieu unique à découvrir et à respecter, tant pour son héritage culturel précieux que pour son patrimoine naturel exceptionnel.

     

    RETENEZ


    • La région de Thingvellir est un fossé d’effondrement né de la divergence de deux plaques tectoniques.
    • Les nombreuses coulées de lave qui ont modelé la région proviennent d’une activité éruptive intense due à la présence d’un point chaud sous l’Islande.
    • Le lac Thingvallavatn, d’origine glaciaire et aux eaux limpides, occupe une partie du fond de la dépression géographique de Thingvellir.
    • Une forte activité géothermale est présente au sud du lac Thingvallavatn.
    • Le parc national de Thingvellir est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO pour son héritage culturel.

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    Quels Sont les Plus Vieux Arbres du Monde ?

    Les arbres sont de véritables témoins de notre passé. Les méthodes de datation des individus forestiers ont participé à retracer les récits de notre planète. En effet, leur étude a fortement contribué aux recherches sur les variations climatiques ou encore la datation des sites archéologiques. À travers ces travaux historiques, des scientifiques ont découvert des spécimens âgés de plusieurs milliers d’années. Quels sont les plus vieux arbres du monde ? Où se trouvent-ils ? Comment déterminer l’âge de ces ancêtres verts ? Quels sont leurs secrets de longévité ? Partons à la rencontre de ces espèces végétales millénaires qui défient le temps.

    Déterminer l’âge d’un arbre sans le couper

    L’apparence du tronc, de l’écorce et des racines

    On associe souvent l’âge d’un arbre à sa morphologie. Par exemple, plus son tronc est imposant et plus il aurait vécu. Cette généralité est ancrée chez la plupart des personnes et pourtant elle est complètement fausse ! Pour illustrer ce constat, le dendrochronologue Patrick Gasmann a comparé les courbes de croissance du tronc de deux chênes, situés en Suisse. L’arbre de Perreux a atteint une circonférence de 3,5 m en 450 ans, tandis qu’à une cinquantaine de kilomètres, celui de Gampelen l’a dépassé à 120 ans.

    Si l’on veut des indices visuels pour connaître l’âge des arbres, leur écorce, leur cime et leurs racines exposées sont des indicateurs plus justes. Par exemple, le bois des plus vieux conifères, en milieu semi-aride, est souvent fissuré, tordu, irrégulier, voire creux. Évidemment, ces indicateurs morphologiques apportent une réponse très approximative sur la longévité de ces individus forestiers. Alors quelles méthodes fiables permettent de déterminer l’âge d’un arbre ?

    La science de la dendrochronologie

    Compter les cernes de croissance

    Tout d’abord, la dendrochronologie correspond à l’étude des cernes de croissance d’un arbre, dans le but de calculer son âge. Cette technique de datation a été pensée par l’astronome américain Andrew Ellicott Douglass, au début des années 1990. En principe, chaque cerne correspond à une année vécue par l’individu. Pour cela, les scientifiques réalisent un forage au niveau de son tronc. Puis, ils prélèvent un cylindre de bois, de quelques millimètres de diamètre, allant de l’écorce jusqu’au cœur de l’arbre. La dendrochronologie a pour avantage de ne pas abîmer l’individu forestier.

    Une personne récupère un échantillon dans le tronc d'un arbre avec un tarière de Pressler.
    Personne effectuant un carottage dans le tronc d’un arbre avec un tarière de Pressler. Crédit photo : Institut fédéral de recherches WSL

    Cependant, le comptage des cernes de croissance sous-estime le nombre d’années vécues par les feuillus. En effet, les experts éprouvent généralement des difficultés à atteindre le centre de l’arbre, et donc, à extraire ses plus anciennes couches de bois. De plus, certaines espèces ne forment pas automatiquement un nouveau cerne par année. Par exemple, une étude menée par l’écologue forestier Jean-Luc Dupouey a révélé une absence de 33 cernes consécutifs sur un pin sylvestre de 143 ans. Et plus exceptionnellement, un arbre peut en produire plusieurs sur une année.

    Mesurer la largeur des couches de bois

    Pour repérer ces irrégularités, les scientifiques ont recours à l’interdatation. Cette méthode repose sur la datation précise de chaque cerne de croissance. Au lieu de les compter, les spécialistes mesurent leur largeur. En quoi ce dispositif permet-il de calculer l’âge d’un arbre ? Avant tout, il faut comprendre que l’espace entre deux cernes dépend essentiellement des variations climatiques.

    En effet, les dendrochronologues retrouvent des mesures relativement identiques entre des individus d’une même espèce localisés dans des environnements aux conditions atmosphériques similaires. En comparant les mesures non datées avec celles de référence, les scientifiques situent temporellement les cernes de croissance et identifient ceux manquants et excédents. Les résultats obtenus sont fiables à une année près.

    Zoom sur une partie des cernes de croissance annuels d'un tronc d'arbre.
    Cernes de croissance annuels d’un tronc d’arbre. Crédit photo : Jahresringe Holz / Adobe Stock

    La datation au carbone 14

    Évaluer la teneur en radiocarbone

    Dans certaines circonstances, la datation par dendrochronologie est impossible ! Par exemple, la plupart des arbres tropicaux ne possèdent pas de cernes de croissance annuelle, en raison de l’absence de saisons distinctes. Heureusement, une autre technique a fait ses preuves. Découverte par le chimiste William Libby, la datation au carbone 14 permet également de calculer l’âge d’un tronc.

    Cette méthode repose sur la présence du carbone 14, appelé aussi radiocarbone, que l’on retrouve dans tout organisme vivant. En effet, il s’oxyde au contact de l’oxygène présent dans l’atmosphère et forme des molécules de dioxyde de carbone. Celles-ci sont ensuite assimilées par les plantes, à travers la photosynthèse. Après la formation d’un premier cerne de croissance, la teneur en radiocarbone des arbres va diminuer exponentiellement.

    Pour cela, les atomes de carbone 14 se désintègrent de leurs propriétés radioactives pour devenir de l’azote non radioactif. Cette période, appelée demi-vie du carbone 14, dure 5 730 ans. Pour connaître l’âge d’un organisme végétal, les scientifiques utilisent soit un spectromètre de masse par accélérateur, soit un détecteur de scintillation. Le premier permet de compter la quantité de carbone 14 présente dans l’échantillon et le second de mesurer sa radioactivité.

    Comparer avec des mesures de référence

    Comme pour la dendrochronologie, les experts comparent leurs résultats avec des mesures de référence. Une courbe de référence a été établie concernant l’évolution du radiocarbone au sein d’un organisme végétal. Après analyses, les scientifiques sont ainsi capables de déterminer l’âge relatif carbone 14 de l’arbre analysé. Et pour calculer son âge réel, il est nécessaire de considérer les variations en radiocarbone de l’atmosphère, en utilisant une courbe de calibration.

    Cette dernière a notamment été réalisée grâce à l’accumulation de nombreuses données atmosphériques et à l’analyse d’échantillons d’air. Pour obtenir des données calibrées, les chercheurs ont mesuré la teneur en carbone 14 présente dans des arbres millénaires, pour lesquels leur âge avait été déterminé par dendrochronologie. La courbe de calibration qui en résulte continue d’être alimentée par de nouvelles données.

    Localiser les espèces forestières millénaires

    Les pins de Bristlecone : de Prométhée à Mathusalem

    Le 6 août 1964, l’arbre le plus vieux du monde est abattu au sud-ouest des États-Unis par Daniel Currey, un étudiant en géographie. Ce pin de Brislecone (Pinus longaeva) était situé au sommet du pic Wheeler dans le Nevada. Il faisait l’objet de recherches sur le petit âge glaciaire. En calculant l’âge des spécimens forestiers millénaires, Currey pouvait dater la fonte des glaciers et reconstituer la dynamique glaciaire de la région.

    Le jeune géographe a tenté de prélever deux carottes de bois sur l’ancien conifère mais a échoué. Finalement, le Service forestier américain l’autorise à le couper et lui donne les moyens pour l’abattre. En utilisant la méthode de la dendrochronologie, Daniel Currey comptabilise 4 844 cernes sur l’échantillon. Son interdatation récente révèle que ce spécimen aurait même plus de 4 900 ans.

    Renommé Prométhée par une association de conservation de la nature, ce pin de Brislecone serait probablement encore plus âgé. En effet, son tronc était creux au niveau de la souche, faisant disparaître ses plus anciens cernes. Après extrapolations, le plus vieil arbre du monde aurait donc autour de 5 000 ans. Sa naissance remonte à plusieurs siècles avant la construction des pyramides d’Égypte, tandis qu’en Europe, l’homme néolithique Ötzi venait de mourir.

    Un vieux pin de Bristelcone dans la neige avec une partie du tronc allongé sur le sol.
    Pin de Bristelcone (Pinus longaeva). Crédit photo : Anna Goncharova / Unsplash

    Puisque l’ancêtre végétal a été abattu, qui est son successeur ? Il s’agit d’un individu de la même espèce, nommé Mathusalem, qui aurait plus de 4 850 ans. Ce pin de Bristlecone a été découvert dans les montagnes blanches de la Californie, en 1957. Cependant, sa position exacte n’a jamais été révélée, afin de lui éviter un sort semblable à celui de son aîné.

    Les cyprès de Patagonie : l’arrière-grand-père chilien

    Ensuite, les cyprès de Patagonie (Fitzroya cupressoides) sont reconnus comme la deuxième espèce végétale longévive, après les pins de Bristlecone. En plus de leur incroyable longévité, les cyprès de Patagonie peuvent atteindre jusqu’à 45 mètres de hauteur. En 1993, le dendrochronologue Antonio Lara le prouve avec la découverte de ce spécimen vert, localisé dans la Cordillère des Andes, au Chili. Son étude révèle la présence de 3 622 cernes de croissance.

    Vue d'en bas de la cime d'un cyprès de Patagonie.
    Cyprès de Patagonie (Fitzroya cupressoides) du Chili. Crédit photo : Eduardo Schmeda / Flickr

    Pendant plusieurs années, les scientifiques ont pensé que ce cyprès était le plus âgé encore vivant. Ce n’est peut-être plus le cas. Le journaliste Gabriel Popkin a dévoilé, dans un article publié en mai 2022, la découverte du chercheur Jonathan Barichivich au sein du parc national chilien. En utilisant la dendrochronologie, il aurait trouvé un arbre de plus de 5 400 ans, avec 80 % de probabilité qu’il ait au moins 5 000 ans.

    Ce cyprès de Patagonie, nommé Gran Abuelo (arrière-grand-père en espagnol), est peut-être le nouveau record de longévité. Il serait né à la même période que l’invention de l’écriture. Les résultats de Barichivich doivent encore être évalués par des pairs, pour confirmer leur validité. Parmi la communauté scientifique, les avis des experts divergent quant aux conclusions de son étude.

    Les séquoias géants : des records d’âge et de taille

    Enfin, la troisième place sur le podium de la longévité revient aux séquoias géants (Sequoiadendron giganteum). Comme les cyprès de Patagonie, ils ont une taille surdimensionnée. La cime de ces arbres dépasse souvent 50 mètres de haut. Leur tronc est tout aussi impressionnant, avec un diamètre généralement supérieur à 6 mètres, ce qui fait de cette espèce la plus volumineuse au monde.

    Personne debout devant des troncs de séquoias géants.
    Parc national des séquoias géants (Sequoiadendron giganteum) aux États-Unis. Crédit photo : Vito Sommela / Unsplash

    D’après Wendell D. Flint, chercheur et écrivain, le séquoia géant le plus ancien, Muir Snag, aurait vécu au moins 3 500 ans. Cet arbre résidait dans le Giant Sequoia National Monument, une zone préservée dans les montagnes de la Sierra Nevada, en Californie, où l’espèce est endémique. Actuellement, le Sequoiadendron giganteum le plus longévif au monde a plus de 3 200 ans. Il n’était encore qu’une jeune pousse, au moment de la guerre de Troie.

    Situé dans le même espace protégé que son ancêtre, l’individu a été daté par le père de la dendrochronologie, Andrew E. Douglass. L’étude des cernes de croissance des arbres est le résultat de ses recherches sur la variabilité solaire et ses effets sur le climat terrestre à Flagstaff, en Arizona. Bloqué par le manque de données météorologiques, Douglass estimait que les troncs des pins millénaires de la région auraient conservé des traces de ces variations climatiques.

    Finalement, l’analyse d’Andrew Douglass a confirmé un lien entre les largeurs des cernes de croissance et les enregistrements disponibles des précipitations de la même zone. Ses résultats étaient si précis et cohérents, que le scientifique pouvait dater l’abattage des arbres, relié à des épisodes d’exploitation forestière, sans consulter d’autres documents. Pour cela, il a comparé les mesures des couches de bois des troncs coupés, avec la norme établie au cours de son étude.

    La longévité des arbres est un exemple de résilience et de capacité à s’adapter à leur environnement. Ils sont les témoins de l’histoire de notre planète et de ses manifestations environnementales.

    Comprendre les secrets de longévité des plus vieux arbres du monde

    L’environnement propice aux espèces millénaires

    Le premier facteur nécessaire à la longévité d’un arbre est d’éviter la concurrence avec les autres espèces, voire avec ses congénères. Pour cela, les individus forestiers vivant le plus longtemps sont généralement localisés dans des environnements plutôt hostiles, où les perturbations humaines et végétales se font plus rares. Par exemple, les pins de Bristelcone poussent sur des montagnes dénuées de végétation rase. Ils s’adaptent aux altitudes élevées et aux températures froides.

    Ensuite, les falaises et les ravins représentent un endroit privilégié pour trouver les plus vieux arbres. En effet, ils constituent des espaces éloignés des perturbations végétales, humaines et climatiques. En s’adaptant aux milieux extrêmes, les individus forestiers maximisent leur chance de survie. Comme peu d’espèces végétales sont capables de vivre dans des conditions aussi difficiles, les individus restants ne se font pas de l’ombre. Notamment, leurs racines n’empiètent pas chez le voisin.

    Le cyprès de Patagonie, identifié par Jonathan Barichivich, se trouve justement isolé sur une pente, à l’abri des incendies et jusqu’à dernièrement des activités humaines. Autres avantages de l’isolement, la progression des maladies et les attaques des insectes et des champignons se font plus rares lorsque les arbres sont éparpillés. À l’inverse, les forêts tropicales regorgent de vie, et donc, de nombreux dangers.

    L’organisme protecteur des anciens conifères

    Régénérer ses cellules éternellement

    Contrairement à la plupart des organismes, les arbres sont essentiellement composés de cellules mortes, qui constituent le duramen. Cette couche de bois, de couleur plus foncée, contient les plus anciens cernes de croissance de l’individu végétal. Ensuite, l’aubier correspond à la seule partie vivante du tronc. Situé entre le duramen et l’écorce, ce bois vivant est fabriqué par le cambium, une couche de cellules génératrices. Chaque année, elles forment un nouveau cerne de croissance.

    Les cellules de cambium se régénèrent pendant des milliers d’années. À l’inverse des autres organismes vivants, elles ne présentent aucun signe de vieillissement. Le dendrochronologue Peter M. Brown considère donc que les arbres ne meurent pas de vieillesse, mais un événement perturbateur doit leur arriver pour qu’ils dépérissent. Actuellement, aucune preuve scientifique ne le confirme.

    Schéma des principales parties d’un tronc d’arbre.
    Schéma des principales parties d’un tronc d’arbre. Crédit photo : Jahresringe / Adobe Stock

    Développer des mécanismes de défense

    Les espèces végétales les plus vieilles au monde ont une croissance très lente. Avec moins de menaces à proximité, ces conifères peuvent économiser leurs forces et investir dans des mécanismes de défense. En poussant aussi lentement, le bois des pins de Bristelcone et des séquoias géants se densifie, ce qui empêche les insectes et les bactéries d’y pénétrer. L’écorce du Sequoiadendron giganteum est si épaisse, qu’elle lui permet même de résister au feu.

    De plus, les vieux arbres font preuve de résilience. Par exemple, le Pinus longaeva peut surmonter des événements stressants, tels que l’affaissement de son tronc ou la dégradation de ses racines. Face à ces perturbations, les individus forestiers ne meurent pas, mais seulement la partie de leur organisme soumise au stress. Ces espèces végétales millénaires se sont adaptées à des conditions de vie extrêmes pour survivre. Avec l’accélération du changement climatique, les scientifiques questionnent leur résilience face à la multiplication de sévères perturbations comme la hausse des températures, la diminution de la pluviométrie, etc.

    Les pins de Bristlecone, les cyprès de Patagonie et les séquoias géants constituent les trois espèces présentant les plus vieux arbres au monde. L’analyse des cernes de croissance et de la présence du carbone 14 de ces espèces végétales nous donne l’opportunité de nous plonger dans les derniers milliers d’années d’histoire environnementale. D’autres éléments naturels nous offrent de précieux témoignages sur notre passé, comme les variations climatiques racontées par les glaces de l’Antarctique.

     

    RETENEZ


    • Un tronc d’arbre se compose de duramen (cellules mortes), d’aubier (cellules de cambium se régénérant pendant des milliers d’années) et d’écorce.
    • La datation des arbres a contribué aux recherches sur les variations climatiques et les sites archéologiques.
    • Pour calculer l’âge d’un arbre, les scientifiques utilisent la datation au carbone 14 et la dendrochronologie (étude des cernes de croissance).
    • Les trois espèces forestières les plus âgées sont les pins de Bristelcone, les cyprès de Patagonie et les séquoias géants.
    • Les arbres vivant le plus longtemps sont généralement localisés dans des environnements hostiles.

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    La Calotte Glaciaire du Groenland : un Écosystème en Danger

    Entre l’océan Atlantique Nord et l’océan Arctique, le Groenland constitue la plus grande île au monde, avec plus de 2 millions de km2. On y compte seulement 56 653 habitants, ce qui en fait le territoire le moins densément peuplé du globe. Et pour cause, l’île est recouverte à 80 % par la glace ! Une couche de glace tellement importante qu’elle comprime littéralement la croûte terrestre. Les habitants vivent sur les côtes, principalement dans la capitale Nuuk, au sud-ouest de l’île. Leur quotidien est rythmé par la danse conjointe des baleines à bosse et des icebergs qui rejoignent l’océan. Pourtant, aussi immuables qu’ils paraissent, ce paysage et ces neiges n’ont rien d’éternel. La calotte glaciaire du Groenland fond à la vitesse grand V et contribue largement à la hausse du niveau marin. Comment en est-on arrivé à ce constat ? Par quels moyens les scientifiques ont-ils déterminé la fonte de l’inlandsis groenlandais ? En route vers l’Arctique pour mieux comprendre l’écosystème de sa calotte glaciaire et les enjeux de sa fonte accélérée.

    La seconde plus grande calotte glaciaire terrestre

    Une île de glace aux confins du pôle Nord

    Occupé pour la première fois il y a environ 5000 ans, le Groenland est resté une colonie danoise jusqu’en 1953. Il a acquis son autonomie en 1979 et possède aujourd’hui le statut de territoire autonome danois.

    Sur le plan géographique, cette immense terre de glace, environ quatre fois plus grande que la France, se situe en Amérique du Nord. Sur le plan politique, elle dépend de l’Europe.

    Le climat y est tellement rigoureux que ses habitants n’y ont jamais vu un arbre et qu’ils y jouent sur des terrains de football recouverts de terre ou de sable en lieu et place du traditionnel gazon. Près des rives nord du Groenland, la petite île de Kaffeklubben, découverte en 1921, a été consacrée « terre émergée la plus au nord de la planète ». Tout se justifie : à 710 km à peine, se trouve le pôle Nord géographique !

    Maisons colorée sur la côte ouest du Groenland
    Maisons colorées dans la ville d’Aasiaat, sur la côte ouest du Groenland. Crédit photo : Unsplas

    La calotte glaciaire qui repose sur les terres groenlandaises représente un poids de 25 000 milliards de tonnes. Il s’agit de la deuxième plus grande masse de glace sur la planète après celle de l’Antarctique. À la différence de la banquise, masse d’eau salée qui couvre une partie de l’océan, la calotte glaciaire est constituée d’eau douce et repose sur la terre ferme. C’est d’ailleurs l’origine de son nom scientifique, l’inlandsis. En comparaison avec celui de l’Antarctique, l’inlandsis groenlandais est bien plus petit. Alors que la calotte glaciaire du pôle Sud s’étend sur une superficie de 14 millions de km2 et possède une épaisseur allant jusqu’à près de 4,8 km, celle du Groenland possède une superficie de 1,7 million de km2 et une épaisseur d’environ 3 km.

    Du sommet de l’inlandsis, l’eau s’écoule doucement pour se déverser dans l’océan par la voie de ses nombreux glaciers. Parmi les principaux, le Jakobshavn Isbrae (ou glacier d’Ilulissat), le Petermann et le glacier d’Helheim, font partie des plus gros producteurs d’icebergs qui cheminent vers l’Atlantique Nord.

    Formation et évolution de l’inlandsis du Groenland

    Au Groenland comme ailleurs, la formation d’un gigantesque glacier polaire résulte d’une accumulation importante de neige sur des périodes longues de plusieurs millions d’années. Si la neige a pu s’accumuler au pôle Nord, c’est d’après certains en raison des eaux chaudes du Golfe de Gascogne qui transitent à proximité du littoral groenlandais. Bien que paradoxale, la situation s’explique assez aisément à partir du fait que les chutes de neige ont besoin d’humidité pour se former. En effet, il y a 80 000 à 70 000 ans, les températures élevées des eaux du golfe de Gascogne ont coïncidé avec une baisse régulière de celles du continent européen. Ce contraste thermique a contribué à créer un important taux d’humidité. Transportée vers le nord par les vents, celle-ci aurait alors provoqué les chutes de neige à l’origine de la calotte glaciaire du Groenland.

    Du point de vue de sa datation, la glace était déjà présente au Groenland il y a environ 15 à 18 millions d’années, et les forages effectués au cours des dernières décennies ont permis d’obtenir des carottes d’une glace vieille de 970 000 ans. Même au cours de l’optimum climatique de l’Holocène, soit entre 8 000 et 5 000 ans, la glace n’a jamais totalement disparu de la zone. La calotte polaire en tant que telle serait née au début de la dernière période glaciaire, soit il y a environ 110 000 ans.

    Vue sur l’inlandsis du Groenland
    Vue sur l’inlandsis du Groenland, expédition A.Carré 2009. Crédit photo : Halorache, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

    Un phénomène inquiétant : l’accélération de la fonte du glacier

    Le constat sans appel de l’amincissement de l’inlandsis

    Depuis plus de 10 ans, les études s’accumulent et parviennent toutes au même constat : la fonte de la calotte glaciaire s’est accélérée au cours des vingt dernières années et rien ne semble plus pouvoir l’arrêter.

    Non seulement la calotte glaciaire fond de façon beaucoup plus rapide que prévue mais elle est aussi plus importante qu’attendue. D’après les résultats d’une étude récente, la fonte se produit aussi à l’intérieur des terres, à près de 200 ou 300 km des côtes. Ce constat a pu être établi à partir de la révision de modèles climatiques existants et de données issues du bilan de masse de la calotte glaciaire. En effet, l’équilibre d’un glacier se maintient grâce à un bilan de masse nul, c’est-à-dire qu’il est censé perdre autant de glace en été qu’il en regagne en hiver avec les chutes de neige. Or, depuis le début du XXIème siècle, la ligne d’équilibre glaciaire s’est décalée de telle façon que sa stabilité est mise en péril. Concrètement, la glace fond plus vite qu’elle ne se renouvelle. Si la zone d’accumulation neigeuse continue de rétrécir à ce rythme, le Groenland pourrait perdre plus de glace au cours de notre siècle que pendant toute la période dite de l’Holocène, démarrée il y a 12 000 ans.

    Finalement, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Avec 3 500 milliards de tonnes perdues pendant la dernière décennie, le rythme d’amincissement de la calotte glaciaire arctique est inédit et inquiétant. Les étés 2012 et 2019, tous deux édifiants en termes de perte de glace, sont à marquer d’une pierre blanche. Pour le seul été 2012, les scientifiques ont calculé que la perte s’élevait à – 527 milliards de tonnes. Quant à l’été 2019, ce sont 12,5 milliards de tonnes de glace qui ont fondu au cours d’une seule journée de juin.

    Des conclusions soutenues par une méthode scientifique améliorée

    Dès lors, comment être certain que ce phénomène inédit de fonte ne deviendra pas, sur le long terme, un épisode isolé ?

    Selon la plupart des chercheurs, la fonte accélérée du Groenland n’appartient pas à un cycle naturel. Il suffit pour cela de comparer son rythme actuel avec d’autres épisodes du passé géologique de notre planète. Certes, la Terre a connu, au cours de son histoire, des épisodes de réchauffement climatique, à l’image de l’optimum climatique de l’Holocène. Pour autant, compte tenu des données disponibles, rien ne permet de relativiser la gravité de la fonte actuelle de la calotte glaciaire. Et si l’inquiétude est grande, c’est parce que la compréhension de la calotte glaciaire arctique s’est grandement améliorée, entre les années 1990 et aujourd’hui. Au moyen de différents outils (données satellites, modélisations numériques, prélèvement de carottes de glace, etc.), les chercheurs d’une étude publiée en 2020 dans la revue Nature ont réussi à produire un schéma d’analyse plus complet. Ils ont en effet combiné modélisation de la calotte polaire et données historiques issues du prélèvement de carottes de glace du Groenland. Grâce à cette méthode, les résultats obtenus relient la réalité du passé arctique à des essais de projection pour son avenir. Et leurs conclusions ne laissent pas de place au doute quant aux effets directs du réchauffement climatique anthropique sur la calotte glaciaire…

    Vue spatiale du Groenland et de sa calotte glaciaire.
    Vue spatiale du Groenland et de sa calotte glaciaire. Crédit photo : NASA, capture d’écran

    Des facteurs multiples à l’origine de la fonte de la calotte glaciaire arctique

    Un ensemble d’éléments est à prendre en compte dans l’analyse de ce phénomène. De façon générale, les régions arctiques sont largement affectées par le réchauffement planétaire. En effet, elles se réchauffent 2 à 4 fois plus vite que partout ailleurs sur la planète. Ainsi, au cours de la première décennie de notre siècle, la calotte glaciaire aurait fondu 6 fois plus vite que durant la décennie précédente. Comment se traduit donc le réchauffement climatique au Groenland ? Parmi les causes diverses à l’origine de l’amincissement accéléré de son inlandsis, on distingue notamment :

    • L’augmentation des températures due à l’action humaine, principalement aux émissions de gaz à effet de serre. Associées à des vagues de chaleur de plus en plus fréquentes, ces températures élevées contribuent à l’accélération de la fonte de la glace.
    • Le phénomène de vêlage, qui désigne plus simplement la production d’icebergs. Ceux-ci proviennent de la rupture de la glace au niveau du front glaciaire et se déversent ensuite dans l’océan. De nombreux glaciers descendent ainsi des montagnes périphériques et alimentent en icebergs l’océan Atlantique Nord.
    • L’intrusion de courants océaniques chauds qui ont pu accélérer le vêlage d’icebergs dans l’océan. Dans une étude datant de 2019, l’importance des océans dans l’évolution de la calotte glaciaire a été mise en évidence à partir de l’étude du plus grand glacier groenlandais, le Jakobshavn.
    • Les vents jouent aussi un rôle, souvent sous-estimé, dans la fonte de la calotte glaciaire. Récemment, une étude publiée dans Nature a mis en valeur une modification de la circulation atmosphérique ces dernières années. Autrement dit, les vents du sud plus fréquents contribuent à l’apport d’air chaud et humide vers le Groenland.
    • La diminution de l‘effet albédo, qui désigne le pouvoir réfléchissant de la neige immaculée face à l’énergie solaire. Depuis plusieurs années, on constate un assombrissement printanier de la neige, moins pure, moins blanche et plus encline à absorber de la chaleur. Cet effet albédo est également impacté par l’augmentation des températures qui entraînent une diminution des chutes de neige, et donc de la protection neigeuse.

    Le réchauffement planétaire dû à l’action humaine participe donc largement à la dégradation de l’inlandsis du Groenland.

    Territoire lointain, le Groenland constitue pourtant un laboratoire idéal pour observer les effets du réchauffement climatique. La fonte accélérée de sa calotte glaciaire est un phénomène inquiétant qui nous oblige à nous adapter.

    Des risques considérables pour l’humanité

    L’observation de la fonte de la calotte glaciaire arctique pose donc des questions qui concernent bien d’autres régions du globe : les glaciers vont-ils fondre plus vite que prévu ? Comment les masses glaciaires vont s’adapter au changement climatique ? Malgré la position géographique lointaine du Groenland, le changement de masse de sa calotte glaciaire a déjà un impact sur le modèle climatique de notre planète. Et sans action de notre part, il aura des conséquences dramatiques à tous les niveaux. Si les scientifiques tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme, c’est d’abord parce que la fonte de la calotte arctique est l’un des principaux facteurs de l’élévation du niveau des mers.

    La fonte de la calotte glaciaire et le phénomène d’élévation du niveau marin

    Entre 2002 et 2016, la fonte de l’inlandsis du Groenland a provoqué une montée du niveau des mers d’environ 0,8 millimètres. Cette régression de l’inlandsis s’est accélérée au cours des dernières années. Elle participe désormais à la montée des eaux à hauteur de 25 %, contre 5 % il y a 20 ans.

    D’ici 2100, selon les estimations d’un comité d’experts du GIEC, la calotte glaciaire du Groenland pourrait contribuer jusqu’à 18 centimètres à l’élévation du niveau de la mer. D’après d’autres prévisions, c’est plutôt à une élévation d’environ 27 cm qu’il faut s’attendre d’ici la fin du siècle.

    Des inondations aux quatre coins du globe

    Quelle que soit la hausse du niveau marin, de nombreuses régions du monde sont déjà menacées par des inondations à répétition. Ce phénomène est d’autant plus inquiétant que nos infrastructures sont inadaptées à un tel changement. En effet, la disparition progressive des masses glaciaires continentales met en péril la survie des populations côtières à l’échelle planétaire. À titre d’exemple, des régions comme la Floride ou encore la ville de San Francisco seraient inondées. En France, des villes et des zones entières de la façade Atlantique (Bordeaux, Saint-Nazaire etc.) disparaîtraient sous les eaux. À l’échelle européenne, Londres et Venise seraient rayées de la carte, et la liste des villes en danger face à la montée des eaux ne s’arrêterait pas là. Si la calotte glaciaire arctique devait fondre intégralement, le niveau des mers augmenterait de 6 ou 7 mètres !

    Fonte de la calotte glaciaire du Groenland : tous les espoirs sont-ils perdus ?

    Si l’ensemble de ces études ne s’accordent pas sur leurs calculs, toutes relèvent l’urgence de la situation. Sans réduction des émissions de gaz à effet de serre, le pire ne pourra sans doute pas être évité. En revanche, même si le phénomène est devenu irréversible, la fonte de la calotte glaciaire arctique peut être ralentie grâce à des mesures sérieuses et rapides de lutte contre le réchauffement climatique. Il convient aussi d’apporter certaines nuances à l’ensemble de ces conclusions.

    En effet, d’une part, les modèles d’évolution de la calotte glaciaire du Groenland et les prévisions concernant sa fonte doivent encore être améliorés. Par exemple, la constatation récente du gain de masse du glacier Jakobshavn, à l’ouest du Groenland, tend à prouver qu’il y a encore beaucoup de paramètres à comprendre pour interpréter au mieux l’évolution de la calotte glaciaire groenlandaise. D’autre part, la plupart des études récentes sont basées sur une observation du Sud-Ouest du Groenland, en raison de la relative simplicité de ses propriétés physiques et de son accès facile. Avant de pouvoir extrapoler avec certitude les résultats obtenus dans cette partie du pays, nombre d’études sont encore à mener. Elles devraient servir à mieux appréhender le devenir de la calotte glaciaire groenlandaise dans un monde qui se réchauffe.

    Les calottes polaires du Groenland et de l’Antarctique constituent ainsi des postes d’observation privilégiés face au changement climatique. Elles nous offrent, à plus d’un titre, l’opportunité de mieux en comprendre les évolutions du climat actuel et d’adapter nos comportements en conséquence.

     

    RETENEZ


    • La calotte glaciaire du Groenland est la seconde plus grand étendue de glace sur Terre après l’Antarctique.
    • La fonte de la calotte glaciaire groenlandaise s’est accélérée au cours des 20 dernières années en raison du réchauffement climatique.
    • Sa fonte contribue à la hausse du niveau marin au niveau mondial.

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    Le Site Géologique de Siccar Point en Écosse : la Clé de l’Âge Ancien de la Terre

    Juin 1788. Le géologue James Hutton débarque sur la côte est de l’Ecosse, à Siccar Point, avec une ambition : révolutionner les sciences géologiques de son temps. Ce site singulier représente une anomalie géologique pour les scientifiques du XVIIIème siècle. Ce site classé comme « site d’intérêt scientifique spécial » depuis 1961 rendra enfin possible le calcul du véritable âge de la Terre. Mais comment l’étude d’un petit site géologique écossais a-t-elle pu remettre en cause les connaissances des géologues du XVIIIème siècle ? En quoi l’étude du site de Siccar Point a-t-elle permis l’avènement de la géologie moderne ?

    Le site de Siccar Point : un site géologique particulier

    En juin 1788, James Hutton (1726-1797), géologue et philosophe écossais, accoste avec deux de ses collègues à Siccar Point, dans le comté du Berwickshire. Son objectif est clair : trouver un site prouvant sa théorie sur le fonctionnement géologique terrestre. Pour lui, les processus géologiques sont à l’origine des paysages de notre planète : ils sculptent et transforment les reliefs de la Terre au fil du temps. Étudier un site tel que Siccar Point, c’était pour lui l’occasion de mettre en lumière le rôle de chacun de ces éléments, et leur très lent fonctionnement. C’est sur la côte est de son pays natal qu’il trouvera une partie de la réponse.

    La particularité de Siccar Point : il s’agit d’une discordance géologique. C’est-à-dire que ce site écossais est constitué de couches rocheuses qui se sont formées à des périodes différentes et très éloignées les unes des autres.

    En effet, sur place, Hutton observa des couches sédimentaires verticales recouvertes d’autres couches de couleur rouge, positionnées quant à elles à l’horizontal. D’après l’expertise d’Hutton, ces roches verticales de grès gris semblent bien plus anciennes que les grès rouges. Et pour cause : 65 millions d’années séparent les deux formations géologiques. Cet abyssal écart de datation fait tourner la tête des trois géologues dont « l’esprit est pris de vertiges » face à une telle découverte (par Randy Moore dans sa publication : « Siccar Point », Reports National Center for Science Education, 2009).

    Une très longue histoire géologique

    Pour Hutton, ce site est l’élément révélateur de connaissances inédites en géologie. L’étude plus approfondie de Siccar Point met en avant la lenteur du temps de formation des reliefs terrestres. De ses travaux va naître ainsi le concept de « deep time ». Celui-ci reconnaît que les processus géologiques s’opèrent sur une très longue période, dans un lointain passé mais aussi de nos jours et se poursuivront dans le futur.

    Mais comment expliquer un tel écart de formation des différentes couches rocheuses à Siccar Point ? Formées il y a près de 425 millions d’années au cours de la période du Silurien (- 443 à 419 millions d’années), des grès gris forment la base géologique du site écossais. A l’époque, ils se sont déposés dans un ancien océan qui recouvrait le site actuel, le Iapetus Ocean. Suite au retrait de l’océan, il y a environ 425 millions d’années, les sols ont été surélevés, basculés et plissés en milieu aérien par différents processus géologiques. Ainsi, ils se sont ainsi retrouvés à la verticale. Au fil du temps, ces couches de roches grises ont subi une lente érosion.

    Ces mêmes couches rocheuses ont à nouveau été englouties par les eaux vers 345 millions d’années puis recouvertes de nouveaux sédiments de couleur rouge. Datées de la période du Dévonien (- 419 à 359 millions d’années), ces roches de grès rouges se superposent aux formations grises sous-jacentes, en position horizontale. L’ensemble de la formation géologique de Siccar Point a progressivement quitté de nouveau le milieu marin et a subi depuis les effets de l’érosion, pour aboutir au site tel que nous le connaissons aujourd’hui.

    L’observation du site de Siccar Point en Ecosse par James Hutton révèle que l’âge de la Terre est très ancien. Le scientifique a ainsi mis un terme à plusieurs siècles de récits religieux qui supposaient que la Terre était relativement jeune.

    Le site géologique de Siccar Point en Ecosse.
    La compréhension du site de Siccar Point en Ecosse a révolutionné les sciences géologiques. La Terre est bien plus ancienne que ce que les récits religieux le prédisaient. Crédit photo : Adobe Stock

    James Hutton : un père fondateur de la géologie moderne

    Découvrir et étudier le site écossais était pour Hutton l’occasion de valider sa théorie. En 1785, il exposait déjà devant la Société Royale d’Edimbourg, ses questionnements sur la formation des sols grâce aux sédiments accumulés en milieu marin.

    A la suite de sa découverte, James Hutton développe une nouvelle vision de la géologie : l’orogénèse (processus de formation des montagnes et reliefs terrestres), l’érosion et la sédimentation seraient les étapes géologiques clés dans la formation de la croûte terrestre et des reliefs de notre planète au cours des temps géologiques. Cette nouvelle vision donna naissance à la théorie dite plutoniste.

    Son ouvrage « La Théorie de la Terre » est publié en 1795 et participe directement à la naissance de la géologie moderne, en tant que domaine scientifique à part entière. Cependant, les concepts d’Hutton affrontèrent directement ceux d’Abraham Gottlob Werner. Naturaliste allemand, il est le père fondateur du neptunisme, théorie défendant l’idée d’une origine marine de toutes les roches présentent à la surface de la Terre. Pour lui, ces dernières seraient nées au sein d’un océan primordial dont le niveau aurait progressivement diminué. De plus, les travaux d’Hutton contredisaient ouvertement ceux de l’archevêque James Ussher. Religieux irlandais du XVIIème siècle, ce dernier s’était proposé de calculer l’âge de la Terre grâce aux écritures bibliques. Dans son traité de 1650, il affirma que la Terre avait été créée en 4004 avant J.C. Grâce à sa découverte et ses explications scientifiques du site de Siccar Point, James Hutton dément l’ensemble des récits religieux accumulés au fil des siècles.

    Grâce aux collègues et successeurs de James Hutton, tels que les géologues britanniques John Playfair ou Charles Lyell, ses travaux ont eu un écho bien après sa mort en 1797. Charles Darwin s’en inspirera pour concevoir sa célèbre théorie de l’évolution des espèces, à la suite de son voyage sur les îles Galápagos.

    Malgré l’apport de ses travaux pour le développement des Sciences de la Terre, c’est seulement 30 ans après la publication de son ouvrage que la théorie de James Hutton trouvera sa place au sein de la communauté scientifique. Il faudra attendre le milieu du XXème siècle pour que l’âge réel de notre planète soit enfin révélé, fixé à 4,56 milliards d’années.

    RETENEZ


    • Le site de Siccar Point en Ecosse est une discordance géologique : des couches rocheuses qui se sont formées à des périodes différentes.
    • Ces formations se sont formées en milieu marin et ont été exondées par de longs processus géologiques.
    • La compréhension du site de Siccar Point par James Hutton indique que la Terre est très ancienne.

    1.
    Savaton P. Le temps fondateur de la géologie. Géologie [En ligne]. 1 janv 2016;174:29. Disponible: https://www.researchgate.net/publication/312426276_Le_temps_fondateur_de_la_geologie#pf5
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    NCSE National Center for Science Education [En ligne]. Siccar Point | National Center for Science Education; [cité le 25 mai 2023]. Disponible: https://ncse.ngo/siccar-point
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    Le Phénomène d’Invasion des Algues Sargasses aux Antilles

    Depuis 2011, les plages antillaises sont régulièrement envahies par des algues sargasses. En Guadeloupe, en Martinique et à Saint-Martin, ces algues brunes prolifèrent et rendent impossibles la nage, les promenades sur la plage ou la sortie des canots de pêche, et ce, durant plusieurs jours dans l’année. Des études tentent de comprendre d’où vient ce phénomène et quels en sont les risques pour l’homme. Découvrez comment les algues sargasses arrivent sur les côtes atlantiques de la Caraïbe, les dangers qu’elles représentent et si l’on peut les transformer dans une démarche de développement durable.

    Comprendre le phénomène des sargasses aux Antilles

    Il y a environ 9000 espèces de grandes algues (macroalgue). Celles qui se retrouvent aux Antilles appartiennent à la famille des Sargassum fluitans et Sargassum natans. Il s’agit d’algues pélagiques, c’est-à-dire qu’elles flottent à la surface de l’eau.

    D’où viennent-elles ?

    Longtemps, les scientifiques pensaient qu’elles trouvaient leur origine de la mer des Sargasses, zone située à l’est des Bahamas dans l’océan Atlantique Nord. Il existe une forte accumulation d’algues sargasses à la surface de l’eau dans ce secteur, d’où l’appellation de cette mer. Mais les dernières études démontrent qu’elles se forment à proximité des côtes brésiliennes. Elles sont portées par un courant marin circulaire qui se forme au niveau de la région de recirculation nord équatoriale. Cette zone se trouve entre les côtes du Brésil et le golfe de Guinée.

    Quelles sont les causes de cette invasion ?

    Selon l’évolution des algues et des mouvements maritimes dans la région de recirculation nord équatorial, les Antilles subissent l’arrivée d’un très grand nombre de sargasses dans leurs domaines maritimes de manière aléatoire. En 2017, l’Institut de Recherche et de Développement (IRD) a coordonné une analyse scientifique. Les premiers résultats démontrent que la déforestation, l’augmentation des températures des eaux océaniques dues au réchauffement climatique favorisent la croissance et la circulation des algues sargasses.

    Les algues sargasses aux Antilles : des impacts inquiétants

    Quand ils sont en pleine mer, les bancs de sargasses ne représentent aucun danger. Au contraire, ils forment une nurserie pour de nombreuses espèces marines et contribuent à leurs sauvegardes. Des poissons, des tortues, des invertébrés viennent s’abriter sous des radeaux de sargasses provisoirement ou définitivement. Le risque pour la faune, la flore ou pour l’homme apparaît lorsqu’ils échouent sur les plages et restent au sec.

    Les impacts pour l’homme

    Plage envahie d'algues sargasses.
    Les algues sargasses représentent un fléau pour le tourisme et la santé humaine. Crédit photo : Dominique Glili

    Une fois échouées sur les littoraux, les matières organiques se décomposent au bout de quarante-huit heures. Les algues produisent alors de multiples quantités de gaz toxiques comme le sulfure d’hydrogène et de l’ammoniaque. Selon le Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, inhaler le sulfure d’hydrogène durant plusieurs heures représente un risque pour la santé humaine. En Martinique, en Guadeloupe et même en Guyane, les habitants des villes situées au plus près des côtes se plaignent de maux de tête, de malaises et de troubles respiratoires à chaque épisode d’échouage. En 2017, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) publiait un avis relatif aux expositions et aux émanations gazeuses d’algues sargasses recommandant la mise en place de mesures de prévention.

    De plus, les marins-pêcheurs de ces îles voient leurs bateaux immobilisés pendant plusieurs jours lors de ces évènements, perdant ainsi des milliers d’euros. Le tourisme aussi est fortement impacté. En effet, l’odeur d’œufs pourris qui proviennent de ces algues en décomposition fait fuir les visiteurs.

    Les impacts pour l’environnement

    Les algues présentes en grande quantité sur les plages nuisent à certaines espèces. Les petits animaux de sables ne peuvent plus circuler correctement. La faune au bord de la mer, accrochée aux sargasses, peut se retirer en même temps que les algues qui repartent avec la houle. Les tapis formés par l’amoncellement des sargassums sur le rivage empêchent la lumière du soleil d’atteindre les fonds marins. Ce manque de luminosité peut avoir des conséquences sur le développement des coraux et d’autres espèces.

    Un autre effet est reconnu officiellement depuis peu par la communauté scientifique après plusieurs signalements de la population : la perte de biens électroniques. En effet, à chaque nouvel épisode d’échouage massif, les habitants à proximité des plages se plaignent de voir leurs équipements détériorés voire hors d’usage, les obligeant à jeter leur matériel et à en racheter de nouveau. L’enquête CORSAIR menée par des universitaires et financée par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) a prouvé en 2022 que les gaz dégagés par les algues en décomposition ont un lien avec la corrosion des appareils électroménagers, des métaux et même du plastique.

    Différentes études sont encore en cours afin de mieux connaître l’impact environnemental et sanitaire que génèrent ces arrivées massives d’algues sargasses.

    En se décomposant sur les plages, les algues sargasses deviennent néfastes pour l’homme.

    Algues sargasses sur les plages antillaises.
    Les algues sargasses se forment en mer au large des côtes brésiliennes. Crédit photo : Adobe Stock

    Les algues sargasses : fléau ou opportunités ?

    Les algues sargasses représentent un fléau pour les êtres humains qui résident près des côtes, mais apportent également sécurité et abri pour des espèces sous-marines. Il existe des solutions afin que l’homme et l’environnement en tirent un bénéfice.

    Des solutions pour s’en débarrasser

    Suite à différents appels à projets lancés par les collectivités des îles antillaises, des innovations technologiques sont apparues ces dernières années. En 2014, l’entreprise Soudure Tuyauterie Maintenance Industrielle (STMI) a créé le Sargator, un bateau équipé d’un tapis qui peut collecter jusqu’à douze tonnes d’algues en mer, au bord des quais, des marinas et des rivages. Un modèle plus performant arrivera cinq ans plus tard.

    La Scarbat, un autre exemple de machine, ramasse les algues sur la plage tout en retournant le sable. Un système lui permet de faire le tri entre les différentes espèces d’algues non nocives et les sargasses.

    Diverses machines existent pour enlever les algues ou empêcher leur échouage, mais tous ces appareils ont un coût très élevé et nécessitent des frais d’entretien que les collectivités locales ne peuvent assumer.

    Algues sargasses échouées sur les plages.
    De nombreuses machines en mer et sur les plages permettent de récolter les algues sargasses. Crédit photo : Adobe Stock

    Des solutions pour les recycler

    En Martinique, une entreprise expérimente la transformation des sargasses en fertilisant. Par un procédé tenu secret, elle se débarrasse des métaux lourds naturellement présents dans les algues avant de les recycler. 30 000 tonnes d’algues seraient ainsi récupérées chaque année.

    Des habitants du Mexique prennent des initiatives en matière de recyclage des algues brunes. Certains les utilisent comme engrais, d’autres comme briques pour construire des maisons ou encore les convertissent en semelles pour chaussures.

    Une société bretonne renouvelle les sargasses propres et non salées (après traitement) en plastique végétal pour la fabrication de gobelets, mugs, etc. Balai-brosse pour toilettes, compost, engrais, transformation en charbon actif qui supprime le chlordécone (pesticide utilisé durant des décennies aux Antilles qui a pollué les sols et les eaux), sont autant de projets en cours d’étude. Faute de financement, certains abandonnent leurs idées.

    Si les algues sargasses représentent un fléau pour certains, ils peuvent se révéler comme une opportunité pour des investisseurs. Les risques pour la santé humaine sont reconnus ainsi que les dégâts provoqués par l’émanation des gaz des algues en état de décomposition. Aujourd’hui, les algues brunes représentent un véritable enjeu économique et sanitaire pour les régions des Antilles. Les différents appels à projets et la recherche contribuent à la connaissance de plus en plus poussée de ce phénomène de prolifération des algues qui a encore des secrets à dévoiler.

    RETENEZ


    • Les algues sargasses dans la mer ne représentent aucun danger pour l’homme.
    • Elles dégagent des composés nocifs lorsqu’elles échouent sur les plages, au sec.
    • Les activités humaines ont un impact sur la prolifération et la circulation des algues.
    • Des entreprises ont entrepris des recherches et le recyclage des algues sargasses.

    1.
    Agence nationale de la recherche [En ligne]. Corrosions atmosphérique et marine. Impact des composés chimiques issus de la décomposition des sargasses et rôle des microorganismes sur la corrosion de matériaux métalliques. Considérations phénoménologique et juridique; [cité le 5 mai 2023]. Disponible: https://anr.fr/Projet-ANR-19-SARG-0006
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    Dossier de Presse - Sargasses [En ligne]. Ministère de l’Ecologie; Mai 2018. Disponible: https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2018.05.04_dossier_de_presse_sargasses.pdf
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    Ministères français. Le phénomène d’échouage des Sargasses dans les Antilles et en Guyane. [En ligne]. Ministères des Outre-Mer, de l’Environnement et de l’Agriculture; Juillet 2016. Disponible: https://igedd.documentation.developpement-durable.gouv.fr/documents/Affaires-0009246/010345-01%20rapport-final.pdf

    Comment se Forme un Arc-en-Ciel ?

    Depuis l’Antiquité, l’arc-en-ciel fait l’objet de différentes légendes et mythologies. Les rayons du soleil et la pluie sont responsables de ce phénomène naturel. Est-ce la seule explication ? Au cours des siècles, plusieurs théories ont été exposées, mais concrètement, comment se forme un arc-en-ciel ? Symbole de paix et de prospérité, découvrons ensemble la formation de cet arc coloré.

    La formation d’un arc-en-ciel

    Un arc-en-ciel est un phénomène atmosphérique lumineux composé d’une combinaison de sept couleurs : le rouge, l’orange, le jaune, le vert, le bleu, l’indigo et le violet. Ce dégradé s’étend de l’extérieur vers l’intérieur. Pour observer cet arc de cercle coloré, certaines conditions météorologiques doivent être réunies, c’est-à-dire la pluie et le soleil. Mais alors, comment se forme un arc-en-ciel ?

    D’après la chercheuse Kristin Calhoun du National Oceanic & Atmospheric Administration, les arcs-en-ciel apparaissent lorsque la lumière des rayons du soleil pénètre dans les gouttes d’eau. Elle se réfléchit côté opposé de celles-ci avant de ressortir à l’air libre. En réalité, ce phénomène est une illusion d’optique. En effet, selon la position de l’observateur, il disparaît. Pour admirer un arc-en-ciel dans le ciel, la personne doit se trouver entre le soleil et le rideau de pluie, le regard en direction de la masse nuageuse pluvieuse et le dos tourné au soleil.

    Vue d’un arc-en-ciel au-dessus d’une mer calme.
    La réfraction de la lumière émise par les rayons du soleil à l’intérieur des gouttes d’eau est responsable de la formation des arcs-en-ciel. Crédit photo : Pexels, Ben Mack

    Comment expliquer ce phénomène naturel ?

    Vue du sol, la lumière du soleil semble jaune, mais en réalité elle est blanche. Elle est composée de faisceaux colorés qui se déplacent sous forme d’ondes. Lorsqu’un rayon du soleil traverse une goutte d’eau, sa trajectoire est déviée. Ce changement d’orientation s’appelle la réfraction. La lumière blanche se décompose dans l’atmosphère en rayons de couleurs différentes. Ensuite, la lumière repart vers l’arrière de la goutte selon un angle d’environ 40 à 42° puis se réfléchit de nouveau vers l’œil de l’observateur. Le savant anglais Isaac Newton a été le premier à expliquer ce processus dans sa totalité en 1660. Il a réalisé une expérience en public qui consistait à faire passer la lumière à travers un prisme démontrant ainsi le phénomène de réfraction de la lumière.

    La dominance des couleurs du spectre lumineux

    Lorsqu’un arc-en-ciel se forme, on remarque que les couleurs sont toujours positionnées dans le même ordre. Cela s’explique selon l’angle de vue de la personne qui regarde, mais aussi de la longueur d’onde de chaque couleur. Le spectre visible, c’est-à-dire la partie du spectre lumineux que l’être humain est capable de percevoir, s’étend des couleurs rouge au violet de façon décroissante. En réalité, il existe une infinité de couleurs dans l’arc-en-ciel, mais certaines d’entre elles ne sont pas perceptibles par l’œil humain. Deux personnes ne verront jamais tout à fait le même dégradé de couleurs. Les gouttelettes d’eau qui traversent le spectre lumineux sont constamment en mouvement.

    Un arc-en-ciel peut également se former lorsque nous sommes en présence d’une source lumineuse à proximité d’un jet d’eau ou d’une cascade. De plus, il arrive que ce phénomène apparaisse le soir à la lueur de la lune, mais il est moins prononcé qu’à la lumière du jour.

    La réfraction de la lumière émise par les rayons du soleil à l’intérieur des gouttes d’eau est responsable de la formation des arcs-en-ciel

    Les arcs secondaires et les arcs surnuméraires

    Parfois, un arc-en-ciel peut s’accompagner d’un arc secondaire. Néanmoins, ce dernier est beaucoup moins lumineux que le premier. Ce phénomène se produit par une double réflexion de la lumière à l’intérieur des gouttes d’eau. Cette fois, un angle entre 50 et 53° apparaît à l’opposé du soleil. De plus, les couleurs de cet arc sont inversées par rapport à l’arc primaire. Entre les deux ponts colorés, on peut apercevoir une bande sombre. Elle se caractérise par la délimitation de la fin de l’angle à 42° du premier arc et du début de l’angle à 50° du second arc. Cette bande de séparation a été décrite en premier par Alexandre Aphrodisias d’où le nom « bande sombre d’Alexandre ».

    Quelques fois, on peut observer des arcs supplémentaires. On les appelle des arcs surnuméraires. Ils sont beaucoup plus rares et apparaissent, soit en dessous de l’arc primaire ou soit au-dessus de l’arc secondaire. Ils se manifestent suite à des interférences engendrées par la lumière à cause des différentes réflexions successives dans les gouttes d’eau. Pour former un arc surnuméraire, d’autres facteurs entrent en compte comme le diamètre des gouttes d’eau. À noter que ce phénomène s’observe toujours à côté de la bande violette du premier ou second arc de cercle.

    Vue d’un arc primaire et d’un arc secondaire dans une prairie
    Vue d’un arc primaire et d’un arc secondaire dans une prairie. Crédit photo : Pexels James Wheeler

    La symbolique des couleurs de l’arc-en-ciel

    Un arc-en-ciel est composé de 7 couleurs. L’indigo a été rajouté bien plus tard entre le violet et le bleu par Isaac Newton. Après son expérience sur la lumière blanche, il a créé un disque de couleur qui porte aujourd’hui son nom pour confirmer sa théorie : le disque de Newton. De plus, le chiffre 7 dans la religion chrétienne est un symbole fort : les 7 jours de la semaine, les 7 péchés capitaux, les 7 notes de musique, etc.

    Depuis des milliers d’années, l’arc-en-ciel suscite l’intérêt des savants et a été associé à de nombreuses légendes culturelles et religieuses :

    • le chaudron d’or du leprechaun irlandais à l’extrémité de l’arc ;
    • le pont vers le paradis ;
    • l’entente entre Dieu et Noé après le déluge ;
    • le serpent géant qui apporte la malchance dans la mythologie africaine ;
    • la divinité grecque Iris, messagère des dieux ;
    • la réconciliation entre Dieu et l’humanité pour les Chrétiens ;
    • etc.

    Les premières traces écrites concernant ce phénomène naturel remontent à l’Antiquité. Les différentes observations et hypothèses ont permis d’expliquer comment se forme un arc-en-ciel. Une combinaison entre de l’eau et de la lumière n’est autre qu’une illusion d’optique qui émerveillera toujours nos yeux.

    RETENEZ


    • Un arc-en-ciel est un phénomène atmosphérique composé de sept couleurs.
    • La réfraction de la lumière émise par les rayons du soleil à l’intérieur des gouttes d’eau est responsable de la formation des arcs-en-ciel.
    • Un arc-en-ciel reste une illusion d’optique pour son observateur.

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