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    Climat du Quaternaire : Comprendre les Glaciations et les Périodes Interglaciaires

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    Le climat du quaternaire, l’époque géologique dans laquelle on vit, est marqué par des évolutions cycliques qui s’expliquent par différents mécanismes naturels. Ces cycles climatiques peuvent être décomposés en deux périodes distinctes : les périodes glaciaires, où dominent les glaces, et les périodes interglaciaires, plus chaudes. La transition de la période du Pléistocène à l’Holocène, il y a environ 12 000 ans, représente un des moments clés de l’histoire climatique de la Terre. Elle marque la fin d’une longue période glaciaire et l’entrée dans une période de réchauffement et de stabilité climatique qui a permis à la civilisation humaine de se développer. Comment la Terre a-t-elle évolué de vastes calottes glaciaires à des paysages plus tempérés ? Quelles sont les raisons qui déclenchent ces cycles ? Quels ont été les impacts sur les écosystèmes et les sociétés humaines ?
    Les fluctuations du climat, l’avancée ou la fonte des glaces, les variations du niveau des mers, la disparition de certaines espèces comme les mammouths sont autant de phénomènes à décrypter pour mieux appréhender les impacts de ces variations climatiques. Cet article détaille les raisons de ces phénomènes climatiques et comment ils façonnent les paysages et la vie terrestre depuis des millions d’années. Le sujet de l’impact des activités humaines sur ces cycles naturels est aussi abordé.

    Concepts clés de l’évolution climatique

    Une période glaciaire, ou glaciation, se réfère à une phase où de vastes masses de glace s’étendent sur les continents. Durant ces périodes, on retrouve des calottes glaciaires (ou inlandsis lorsqu’elles dépassent 50 000 km²), des glaciers d’eau douce qui recouvrent certaines zones continentales, principalement aux pôles.

    A contrario, une période interglaciaire correspond à une phase de réchauffement, caractérisée par un retrait des glaciers et des conditions climatiques plus tempérées.

    Le climat du Quaternaire : une planète sous la glace

    La période géologique et climatique actuelle est appelée le Quaternaire. C’est au cours de cette ère que notre espèce est apparue : Homo Sapiens. Cette période a débuté il y a 2,58 millions d’années et compte différentes époques. Le Pléistocène, qui s’étend du début du Quaternaire jusqu’à 11 700 ans avant le présent, a marqué une période clé de l’histoire climatique durant laquelle la Terre a traversé plusieurs épisodes glaciaires.

    Le climat à l’ère du Pléistocène, ça donne quoi ?

    Au Pléistocène, la Terre était recouverte de vastes calottes glaciaires et de glaciers de montagne. Au cours de cette période, la planète a connu son Dernier Maximum Glaciaire (DGM), il y a environ 21 000 ans. Ce pic de froid se caractérise par une extension extrême des calottes glaciaires, dont un inlandsis allant de la Scandinavie jusqu’à la Grande-Bretagne en passant par l’Allemagne. En Amérique du nord, une calotte glaciaire comme celle du Groenland atteignait la latitude de New York. Au total, environ 25 % de la surface terrestre était sous la glace. Le niveau des mers était alors inférieur de 120 mètres par rapport à aujourd’hui, créant des ponts terrestres entre les continents, comme celui reliant la France à l’Angleterre. De tels bouleversements climatiques ont permis aux néandertaliens d’effectuer des migrations vers des climats plus cléments et ainsi d’évoluer.

    Pour ce qui est des températures, les hivers étaient extrêmement froids, avec des températures en Europe allant jusqu’à -30°C. En comparaison, la température moyenne mondiale était d’environ 8°C, contre 14°C actuellement. Ces conditions climatiques ont bouleversé la répartition de la faune et de la flore. Par exemple, les déserts s’étaient considérablement étendus, couvrant près de la moitié de l’Australie, tandis que l’Europe subissait des tempêtes de poussière d’une rare intensité. La quantité de poussière dans l’atmosphère était 20 à 25 fois plus élevée qu’actuellement.

    Par exemple, les déserts s’étaient considérablement étendus, couvrant près de la moitié de l’Australie, tandis que l’Europe subissait des tempêtes de poussière d’une intensité jamais observée aujourd’hui, avec des niveaux de poussière dans l’atmosphère niveaux de poussière dans l’atmosphère 20 à 25 fois plus élevés qu’à l’époque actuelle.

    Le Pléistocène s’est achevé il y a environ 12 000 ans, avec le début de la fonte des glaciers et une élévation des températures, marquant la transition vers une période interglaciaire : l’Holocène.

    Calotte glaciaire dans l'hémisphère nord au Pléistocène.
    Minimum (interglaciaire, en noir) et maximum (glaciaire, en gris) de la glaciation de l’hémisphère Nord. Crédit photo : Wikimedia

    La transition vers l’Holocène : une période climatique stable

    La transition finale du Pléistocène à l’Holocène s’est produite il y a environ 11 700 ans, marquant le début de notre époque actuelle. L’Holocène est considérée comme une période connue pour sa stabilité climatique, avec des températures plus chaudes et des fluctuations climatiques moins extrêmes.

    Cette stabilité climatique a joué un rôle crucial dans le développement de l’agriculture et des premières civilisations humaines. Elles ont profité de cette transition pour évoluer vers un mode de vie plus sédentaire. Le réchauffement climatique a permis la colonisation de nouvelles terres et le développement de cultures agricoles, notamment au Proche-Orient, dans ce que l’on appelle le Croissant fertile. Les premiers villages ont émergé, marquant le début de la Révolution néolithique.

    Les impacts écologiques de cette transition ont été profonds. La fonte des glaciers a libéré d’immenses territoires, créant de nouveaux habitats pour les plantes et les animaux. Les forêts de feuillus ont colonisé les latitudes moyennes, et de nombreux grands mammifères de la période glaciaire ont disparu, comme les mammouths, les mastodontes ou encore les tigres à dents de sabre.

    Holocène : causes et manifestations climatiques

    Le climat du Quaternaire fonctionne par cycles, alternant entre des périodes glaciaires et interglaciaires. Mais comment se produit la transition d’un cycle à un autre ? Plusieurs mécanismes naturels peuvent expliquer le passage d’une période à une autre.

    Les cycles de Milankovitch : facteurs clés du climat du Quaternaire

    Au XXème siècle, l’astronome Serbe Milutin Milankovitch a développé une théorie selon laquelle les changements de l’orbite de la Terre autour du soleil a des conséquences sur le climat terrestre. Selon l’inclinaison (aussi appelé obliquité de l’écliptique) de la Terre, son mouvement giratoire (précession des équinoxes) et sa distance variable (excentricité de l’orbite) avec le Soleil, l’énergie solaire reçue va différer. Bien que ces changements soient subtils, ils exercent un effet significatif sur le climat du quaternaire, contribuant ainsi à l’alternance entre les périodes glaciaires et interglaciaires.

    Lorsque les cycles de Milankovitch provoquent des étés relativement frais et des hivers assez rigoureux, les glaciers ont tendance à se former et persister, ce qui favorise l’entrée dans une période glaciaire. À l’inverse, lorsque les étés deviennent plus chauds, comme cela s’est produit il y a environ 11 700 ans, les glaciers fondent rapidement, initiant ainsi une transition vers une période interglaciaire comme l’Holocène.

    En plus de permettre d’étudier les périodes géo-climatiques passées, cette théorie, confirmée en 1976, permet également de prédire les futures périodes glaciaires.

    Cette découverte fut une réelle révolution scientifique. En plus de servir de base pour l’étude des périodes géo-climatiques passées, la théorie de Milankovitch, confirmée en 1976 par l’analyse des carottes glaciaires et des sédiments marins, permet également de prévoir les futures périodes glaciaires. Ces cycles orbitaux, qui influencent la distribution de l’énergie solaire sur Terre, suivent des rythmes réguliers, ce qui aide les scientifiques à anticiper les changements climatiques à long terme.

    Schématisation des cycles de Milankovitch
    Schématisation des cycles de Milankovitch : obliquité de l’axe de rotation de la Terre, précession des équinoxes et excentricité de l’orbite terrestre. Crédit photo : Hannes Grobe, Institut Alfred Wegener pour la recherche polaire et marine, Creative Commons CC-BY-SA-2.5.

    Toutefois, les cycles de Milankovitch ne sont pas les seuls facteurs qui permettent d’expliquer complètement les variations glaciaires et interglaciaires. En réalité, ces cycles ont initié un réchauffement climatique en cascade, mettant en lumière d’autres mécanismes naturels qui ont amplifié ce réchauffement.

    Circulation thermohaline et albédo : moteurs du changement climatique en chaîne

    La circulation thermohaline (“thermo” de température et “haline” de salinité) joue un rôle crucial dans l’alternance des périodes glaciaires et interglaciaires. Elle influence la distribution de la chaleur et du CO2 dans les océans, donc à l’échelle planétaire.

    • Lors des périodes glaciaires, les eaux froides et denses des régions polaires plongent vers les profondeurs, emprisonnant ainsi de grandes quantités de CO₂. Ce stockage en profondeur contribue à maintenir des niveaux de CO₂ plus bas dans l’atmosphère, ce qui renforce le refroidissement global.
    • Pendant les périodes interglaciaires, le réchauffement climatique libère le CO₂ piégé dans les océans. À mesure que les températures augmentent, les eaux de surface se réchauffent et perturbent les courants océaniques. Le CO₂ remonte des profondeurs et s’échappe dans l’atmosphère, renforçant l’effet de serre et accélérant le réchauffement global dans un processus en chaîne appelé « effet boule de neige ».

    Un autre phénomène intervient lors de la fonte des masses glaciaires : l’apport massif d’eau douce dans les océans. Lorsque les glaciers et les banquises fondent, leur eau douce va se mélanger à l’eau salée des océans, modifiant leur salinité.

    L’eau douce provenant de la fonte des glaces est moins dense que l’eau salée, ce qui l’empêche de plonger en profondeur. Cela modifie la salinité des océans et perturbe la circulation thermohaline. En conséquence, la répartition de la chaleur dans les océans change, et des courants marins majeurs comme le Gulf Stream peuvent ralentir ou dévier. Cette perturbation impacte le climat mondial en modifiant la distribution de la chaleur entre les régions tropicales et polaires, ce qui peut intensifier les changements climatiques.

    Schéma de la circulation thermohaline à l'échelle planétaire.
    Schéma simplifié de la circulation océanique globale. Crédit photo : Plateforme Océan et Climat

    De plus, l’albédo, qui désigne le pourcentage de lumière réfléchie par une surface, joue un rôle essentiel dans la régulation de l’énergie solaire sur Terre. Lors des épisodes interglaciaires et la fonte des calottes glaciaires, les surfaces réfléchissantes comme la glace et la neige disparaissent au profit de surfaces plus sombres (donc avec un faible albédo) comme l’eau et la terre. Ces surfaces vont donc absorber plus de chaleur et se réchauffer, ce qui entraine un réchauffement supplémentaire, selon un cercle vicieux.

    Le rôle des sols et de la végétation

    Pendant les périodes interglaciaires, les températures augmentent. Le pergélisol, un sol gelé en permanence, commence à fondre. Cette fonte libère des gaz à effet de serre, comme le dioxyde de carbone (CO₂) et le méthane (CH₄). Cela renforce l’effet de serre et accélère le réchauffement global.

    Les sols stockent une grande quantité de carbone sous forme de matière organique. Grâce à la photosynthèse, les plantes absorbent le CO₂ et le transforment en matière organique. Lorsqu’elles se décomposent, cette matière s’infiltre dans les sols, contribuant à leur richesse en carbone. Lorsque les sols stockent plus de carbone qu’ils n’en rejettent, on parle de puits de carbone.

    L’augmentation des températures accélère la décomposition de la matière organique. Cela libère plus de CO₂ dans l’atmosphère que ce que les sols peuvent absorber, car leur capacité d’absorption est limitée. Lorsque cette capacité est dépassée, l’excès de CO₂ renforce l’effet de serre, ce qui intensifie le réchauffement climatique global.

    De plus, avec le réchauffement du climat, certaines plantes ne peuvent pas survivre et le phénomène de photosynthèse ne s’opère plus.

    Bien que ces processus soient d’origine naturelle, ils sont aujourd’hui amplifiés par les activités humaines, qui émettent davantage de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, accélérant ainsi le réchauffement planétaire.

    Les cycles naturels de glaciation et de réchauffement façonnent notre planète depuis des millénaires, mais aujourd’hui, l’empreinte humaine modifie profondément l’équilibre climatique.

    L’Anthropocène : l’impact de l’Homme sur le climat

    Les scientifiques ont démocratisé un nouveau terme pour définir la période « géo-climatique » actuelle : l’Anthropocène. Elle met en avant l’impact de l’Homme sur les bouleversements environnementaux actuels. Une transformation qui s’est accélérée depuis le depuis le milieu du XIXe siècle, avec la révolution industrielle.

    Selon les résultats d’une étude publiée en 2020 dans la revue Nature, des chercheurs de l’université de l’Arizona du Nord, démontrent qu’en seulement 150 ans, les activités humaines ont effacé environ 6 500 ans de refroidissement naturel. Pour en arriver à ces conclusions, ils ont analysé des données écologiques et géochimiques pour reconstruire les variations de températures moyennes pendant l’Holocène. Les chercheurs révèlent que les températures actuelles sont comparables à celles d’il y a 125 000 ans et que la période 2010-2019 a été la plus chaude des 10 000 dernières années.

    Le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) met également en évidence cette accélération dans ses rapports. Dans son dernier rapport paru en 2023, l’accent a été mis sur cette accélération anthropique du réchauffement climatique. « Les hausses observées de la concentration de gaz à effets de serre (GES) depuis 1750 environ sont causées par l’activité humaine, sans équivoque » (GIEC).

    Les effets visibles de la pollution au CO2 dans l'air.
    Les rejets de CO2 liés aux activités humaines sont à l’origine du réchauffement climatique. Crédit photo : Adobe Stock

    Les prévisions sont alarmantes : la température mondiale pourrait augmenter de 2°C à 6,4°C d’ici la fin du siècle si des actions majeures ne sont pas entreprises. Cette hausse n’affectera pas seulement le climat actuel, mais pourrait également retarder la prochaine ère glaciaire de 50 000 à 100 000 ans.

    À court terme, les conséquences pour l’humanité sont tout aussi préoccupantes. Les risques liés à la sécurité alimentaire, la santé publique et la survie des populations vulnérables augmentent rapidement. Le GIEC tire la sonnette d’alarme : sans une réduction rapide des émissions, l’impact sur nos sociétés sera irréversible.

    En résumé, le climat du Quaternaire a toujours connu des alternances de cycles naturels de périodes glaciaires froides et interglaciaires plus chaudes. Cependant, les activités humaines ont accéléré le réchauffement de l’Holocène, la dernière période interglaciaire, perturbant ce cycle naturel. Il est essentiel que les pays suivent les recommandations du GIEC pour limiter la hausse des températures à 1,5°C d’ici 2030, par rapport à l’ère préindustrielle.

    RETENEZ


    • Le climat du Quaternaire alterne entre des périodes glaciaires et interglaciaires sous l’influence de mécanismes naturels : les cycles de Milankovitch.
    • La transition entre la Pléistocène et l’Holocène, il y a 12 000 ans, a marqué la fin d’une longue période glaciaire et le début d’une ère climatique stable, propice à l’émergence de l’agriculture et des premières civilisations humaines.
    • Depuis l’Anthropocène, les activités humaines perturbent ces cycles naturels en accélérant le réchauffement climatique, provoquant des conséquences graves pour les écosystèmes et les sociétés.

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