Situé au cœur de la Sibérie, le lac Baïkal est le plus grand réservoir d’eau douce du monde. Au milieu de la taïga, une fracture de l’écorce terrestre s’est ouverte il y a 27 millions d’années. Le lac a émergé et ne cesse de s’étendre depuis ce jour. Le lac est si vaste qu’il est souvent désigné comme une mer intérieure. Son eau est considérée comme l’une des plus pures au monde. Ses particularités géologiques et son isolement en font un repère unique pour la biodiversité. Découvrez le Baïkal et les propriétés rares de ce bassin des superlatifs.
Comment s’est formé le lac Baïkal ?
La situation géographique du lac
Le lac Baïkal se situe au sud-est de la Sibérie, une zone régie par la Fédération de Russie. Il est au cœur de trois régions administratives : la République de Bouratie, le district d’Irkoutsk et celui de Chita.
Entouré de montagnes, de paysages de steppes et de taïga (ou forêt boréale), le lac occupe 3,15 millions d’hectares. Il est bordé par cinq parcs nationaux et des réserves naturelles. La superficie totale du territoire sur lequel il s’étend atteint 8,8 millions d’hectares.
L’immensité de cet espace est protégée par le Ministère de la Protection de l’environnement et des ressources naturelles, ainsi que par le service fédéral des forêts. En 1994, un programme du gouvernement fédéral est établi pour assurer la protection du lac et l’utilisation rationnelle des ressources naturelles du bassin.
Le lac Baïkal en quelques chiffres :
- 636 km de longueur ;
- 79 km de large ;
- 6ème lac le plus grand du monde ;
- le lac le plus profond du monde avec une profondeur inégalée de 1 642 mètres ;
- des eaux claires, recouvertes par une glace épaisse plusieurs mois par an, qui peut atteindre 2 mètres en certains endroits ;
- la plus grande réserve d’eau douce : le lac contient à lui seul 20% de toute l’eau douce de la planète. Plus de 300 rivières s’y jettent.
Un lac né au cœur d’une zone de rift
Les origines du lac remontent à environ 27 millions d’années, ce qui fait de lui le plus ancien lac du monde. Il est né au sein d’un « rift continental » ou fossé d’effondrement. Il y a 30 millions d’années, la tectonique des plaques se met en mouvement dans la région : la plaque océanique du Pacifique s’enfonce sous la plaque continentale de la chaîne himalayenne. Ce que les géologues nomment la subduction.
Le plateau tibétain s’éleva, ce qui provoqua un amincissement et une fracturation de la croûte terrestre au niveau de la Sibérie centrale. Une dépression s’est formée, dans laquelle le lac Baïkal s’est ensuite installé. En géologie, ce processus d’extension et de subsidence de la croûte terrestre est appelé « rifting continental ».
Il s’est produit ensuite une importante sédimentation, c’est-à-dire que des débris liés à l’érosion des montagnes environnantes se sont déposés au fond de la dépression sous forme de couches ou strates sédimentaires (accumulation de sables, argiles, limons, etc.). En certains endroits, les couches sédimentaires accumulées dans le fond du bassin peuvent atteindre 9 000 mètres d’épaisseur, sous une colonne d’eau de plus de 1 000 mètres.
Quelle évolution le lac suit-il depuis la formation de ce rift ? Cette dépression naturelle continue de s’agrandir, à raison de quelques millimètres par an. Ainsi, des séismes secouent régulièrement la région. Dans cette zone tectoniquement active de la Sibérie, les scientifiques précisent qu’un nouvel océan est train de se former.
Si le lac a connu des épisodes volcaniques, ceux-ci ont cessé depuis environ 600 000 ans. En profondeur, le magma sous-jacent est à l’origine de sources hydrothermales qui peuvent atteindre 50 °C.
La région du Baïkal : un écosystème à part entière
Un écrin pour le vivant
Surnommé le « Galápagos de la Russie », le lac Baïkal héberge une faune d’eau douce singulière. Grâce à sa son isolement géographique, son âge et son climat, une grande biodiversité a pu se développer.
À l’inverse d’un grand nombre de bassins, le Baïkal est éloigné des océans. Il est donc soumis à un climat plus continental qu’océanique, ce qui a une influence sur les organismes vivants qui s’y développent. En une année, son amplitude thermique peut varier de 100 °C, c’est-à-dire que l’écart entre les températures les plus basses et les températures les plus hautes peut atteindre 100 °C. Sa grande taille crée un microclimat et pondère les températures dans un rayon de 25 km à partir de ses berges, bénéfique aux espèces qui peuplent la région.
Le lac Baïkal recense un nombre considérable d’espèces animales et végétales. Ces dernières sont typiques de la forêt boréale ou taïga. La majorité de ces espèces sont endémiques, c’est-à-dire qu’elles se sont développées de manière naturelle, sans l’intervention de l’homme. Cette faune vit exclusivement dans la zone géographique du lac.
Le site naturel du Baïkal recense, entre autres :
- 1 500 espèces d’organismes aquatiques, dont 80 % sont endémiques, comme le phoque de Sibérie, seul mammifère d’eau douce au monde ;
- 40 spécimens de poissons, comme le saumon, des esturgeons ou encore des perches ;
- un grand nombre d’amphipodes, dont 255 espèces de crevettes, soit un tiers de la totalité mondiale de la faune de crevettes d’eau douce ;
- 80 types de planaires : des vers plats aquatiques, non parasitaires, ayant la capacité de régénérer les parties endommagées de leur corps.
- Une variété de plantes avec des forêts de conifères typiques de la taïga (pins notamment), de la végétation de steppes, ou encore des forêts décidues.
Surnommé le « Galápagos de la Russie », le lac Baïkal renferme une biodiversité remarquable grâce à sa son isolement géographique, son âge et son microclimat. La plupart des espèces sont endémiques.
La pureté du lac Baïkal
Le lac a des propriétés remarquables qui rendent son eau très pure. On y trouve une espèce de zooplancton, l’écrevisse Epishura baicalensis, qui nettoie les eaux et maintient la pureté de l’eau. De plus, le dépôt minéral y est 25 à 50 % plus faible que dans les autres lacs d’eau douce dans le monde.
De plus, les roches qui tapissent la dépression du Baïkal réduisent les interactions chimiques ou minérales avec l’eau. Ainsi, à la saison estivale, la colonne d’eau peut-être transparente jusqu’à 40 mètres de profondeur.
Les eaux du lac sont constamment brassées. Des colonnes d’eau froide descendent dans les profondeurs du lac et se mélangent avec les vapeurs chaudes des résurgences hydrothermales. Ce mélange régulier des eaux est propice au développement de petits organismes vivants, à la base de la chaîne alimentaire.
Le lac Baïkal : une zone préservée mais en péril
Bien que le bassin soit préservé au sein de réserves naturelles et de parcs nationaux, le lac doit faire face à de nombreuses menaces qui mettent en péril son intégrité et sa biodiversité.
En effet, autour du lac se sont installées de nombreuses villes et des zones industrielles. Aujourd’hui, environ 2,5 millions d’habitants occupent ses rives. Le ruissellement des eaux usées d’origine agricole ainsi que le déversement de déchets industriels affectent déjà la composition de l’eau. Avec pour conséquence de modifier les apports sédimentaires, les flux hydrauliques et créer une pollution des eaux du lac. L’expansion du tourisme, la surpêche ou encore les activités forestières viennent compléter le tableau des menaces. Toutefois, le lac conserve son bon état, grâce à deux facteurs : ses facultés d’assimilation et de régénération ainsi que son environnement naturel protégé.
Le lac Baïkal est le bassin des superlatifs : à la fois le plus ancien, le plus profond, et le plus pur, ainsi que la plus grande réserve d’eau douce de la planète. La variété de sa biodiversité et son histoire géologique lui ont valu d’être inscrit, dès 1996, au Patrimoine Mondial de l’UNESCO, ce qui assure sa protection. Pour l’ensemble de ces raisons, le lac Baïkal présente un intérêt scientifique pour les sciences géologiques et du vivant.