Un nouveau champ des possibles pour l’astronomie s’est ouvert le 12 juillet 2022. La NASA a dévoilé la première image réalisée par le télescope James-Webb, un bijou de technologie spatiale. Il s’agit du cliché le plus profond de l’espace où nous pouvons observer un amas d’étoiles et de galaxies qui datent de plusieurs milliards d’années. De quoi donner le vertige. Quelles sont les caractéristiques de ce nouvel observatoire cosmique ? En quoi va-t-il révolutionner la science des astres ? Décollage immédiat pour un voyage intergalactique !
Le projet spatial du télescope James-Webb
La genèse du plus grand télescope spatial du monde
Le télescope James-Webb, aussi abrégé en JWST pour James-Webb Space Telescope, a été baptisé en hommage à James Edwin Webb (1906 – 1992), le deuxième administrateur de la NASA. Ses faits d’armes sont multiples et comportent, entre autres, la direction des missions lunaires Apollo.
JWST est le fruit d’une trentaine d’années de recherches. Plusieurs pays et agences ont participé à son élaboration, dont les mastodontes de l’exploration spatiale que sont la NASA (National Aeronautics and Space Administration), l’ESA (European Space Agency) et l’ASC (Agence Spatiale Canadienne). Après avoir déboursé environ 10 milliards de dollars, le télescope, d’une taille et d’une puissance inégalables, est né. Il a ensuite été intégré à la fusée européenne Ariane 5 qui l’a propulsé dans l’espace. Le lancement de ce télescope spatial de 6 200 kg a eu lieu le 25 décembre 2021 depuis le CSG (Centre spatial guyanais).
Les défis astronomiques à relever pour James-Webb
Dès sa mise en orbite, le télescope s’est attelé à ses 4 missions principales qui sont de :
- découvrir les toutes premières galaxies ou objets lumineux qui se sont formés après le Big Bang ;
- appréhender la naissance, l’évolution et la mort des galaxies ;
- analyser la formation des étoiles jusqu’à l’élaboration des systèmes planétaires ;
- mesurer les propriétés physiques et chimiques de ces systèmes et étudier les formes de vie qui pourraient s’y trouver.
L’opération de stabilisation s’étant bien réalisée, JWST s’est attelé à ses premières missions d’observation des astres. Il peut compter sur le soutien du télescope spatial Hubble, qui poursuit ses propres collectes et analyses de données.
James-Webb est-il plus performant qu’Hubble ?
Le télescope spatial Hubble est le prédécesseur de James-Webb. Lancé en 1990 Hubble est toujours en activité, mais est-ce vraiment bien nécessaire depuis que JWST a pris le relais ?
Pour étudier l’espace et les corps célestes, James-Webb dispose d’un miroir primaire 2.7 fois plus large qu’Hubble en terme de diamètre, lui conférant un meilleur pouvoir de récupération de la lumière. Il est également doté d’instruments infrarouges, ce que ne possède pas Hubble. Enfin, JWST pourra, à l’inverse de son confrère :
- agir à une plus grande distance de la Terre ;
- maintenir une température négative pour assurer un fonctionnement idéal ;
- garantir une précision de pointage ;
- offrir une capacité d’observation supérieure.
Cependant, Hubble demeure un outil capital, car il est en mesure d’observer le spectre de la lumière visible, ce que ne peut faire les instruments du JWST. C’est pourquoi les données récoltées de ces deux télescopes se compléteront à merveille.
Comment fonctionne le télescope spatial JWST ?
La spécificité de James-Webb : l’infrarouge
Le télescope a été pensé pour analyser l’infrarouge, qui est un rayonnement électromagnétique divisé en plusieurs sous-domaines que sont l’infrarouge proche, moyen et lointain. JWST est très performant en ce qui concerne le premier et le deuxième palier. Ses instruments analysent les longueurs d’ondes voisines de la lumière visible et qui sont émises par des éléments générant de la chaleur. Or, dans l’Univers, il existe des corps si froids qu’ils ne produisent que peu d’énergie, mais ils déploient une très forte lumière, ce qui les rend observables dans l’infrarouge.
Par exemple, les naines brunes et les jeunes étoiles formées au cœur des nébuleuses font partie des objets célestes les plus difficiles à observer. Mais JWST est en mesure de les étudier plus en détails.
La lumière, dans l’espace, s’étire au fur et à mesure que l’Univers grandit. En effet, et en premier lieu, la lumière des étoiles est émise dans les longueurs d’ondes ultraviolettes (UV) et le spectre visible (courtes longueurs d’ondes). En second lieu, avec le temps, la lumière des astres se diffuse vers les plus grandes longueurs d’ondes, tout particulièrement dans le domaine de l’infrarouge. Ce phénomène est appelé « cosmological redshift » ou le décalage cosmologique vers le rouge. C’est pourquoi les plus anciens corps célestes sont désormais visibles grâce à James-Webb. Le télescope agit comme une sorte de machine à remonter dans le temps.
Il est à noter que les équipements de JWST produisent, eux aussi, un rayonnement infrarouge. Pour éviter de fausser les résultats qu’il génère, il doit maintenir une température négative d’environ – 233 °C. Cette capacité lui permet de se concentrer sur l’observation d’une multitude de corps célestes, qu’ils soient de plus ou moins grande taille et/ou qu’ils soient plus ou moins éloignés.
Les scientifiques ont pensé à tout. Même le positionnement de James-Webb dans l’espace n’a pas été choisi par hasard. Il gravite à un emplacement idéal qui lui permet d’être très performant.
L’intérêt du point cosmique de Lagrange L2
James-Webb orbite autour du Soleil, à 1,5 million de kilomètres de la Terre. Il est situé à une localisation qui s’appelle le point de Lagrange L2. C’est un point spatial imaginaire où les forces gravitationnelles du Soleil et de la Terre sont équilibrées, ce qui présente de nombreux avantages pour le télescope :
- La stabilité acquise permet à ses pare-soleils une protection optimale contre la lumière du Soleil, de la Terre et de la Lune.
- Le point L2, la Terre et le Soleil sont alignés tous les trois en même temps, combinant ainsi leurs forces gravitationnelles. De ce fait, le télescope peut se stabiliser et limiter sa consommation de carburant.
- L’environnement du point de L2 offre les meilleures performances en matière d’invariabilité de température. JWST est ainsi idéalement placé pour faire des observations dans le domaine de l’infrarouge.
Face à la précision du lancement de la fusée Ariane 5, James-Webb a économisé beaucoup d’énergie, ce qui a rallongé sa durée d’existence. Les scientifiques pensaient au départ qu’il pouvait être opérationnel pendant environ 5 ans. Désormais, ils parlent plutôt d’une longévité pouvant atteindre 15 à 20 ans. Un temps précieux, où les instruments du télescope vont pouvoir déployer toute leur puissance afin de récolter un maximum d’informations sur l’Univers.
« Le télescope spatial James-Webb sera le prochain grand télescope spatial, conçu pour répondre aux questions existentielles sur l’Univers et réaliser des découvertes révolutionnaires dans tous les domaines de l’astronomie. C’est une mission comme il ne s’en présente qu’une par génération. » (ESA)
Les instruments de mesure de l’observatoire spatial et ses miroirs
Fort d’une coopération mondiale, le projet a pu bénéficier des dernières technologies qui ont été intégrées dans 4 instruments de mesure :
- Le spectrographe infrarouge proche (NIRSpec) : découvre les objets célestes, définit leur nature et leur composition ;
- L’instrument infrarouge moyen (MIRI) : étudie notre Système solaire et les systèmes planétaires et bloque, quand cela s’avère nécessaire, la lumière des étoiles pour se concentrer sur d’autres astres ;
- Le dispositif d’imagerie infrarouge proche (NIRCam) : pousse au maximum la qualité du miroir primaire de Webb pour obtenir des images nettes et profondes ;
- Lfcomp’imageur proche infrarouge et le spectrographe sans fente (NIRISS) : est un outil analysant les exoplanètes et leur composition moléculaire (eau, oxygène, CO2, etc.).
L’élément central de James-Webb est son immense miroir, aussi appelé miroir primaire. Il est fait à partir d’un oxyde de béryllium, un métal léger et résistant aux variations de température. Une couche d’or recouvre ses 18 segments hexagonaux qui mesurent en tout 1 315 m de côté. Son bouclier thermique, situé en dessous, fait quant à lui la taille d’un court de tennis.
Face au dilemme du transport, les ingénieurs ont développé une technologie qui s’apparente à l’origami. Le dispositif peut se plier et se déplier et a pu ainsi intégrer la coiffe de la fusée Ariane. Cela représente une prouesse technique, car le miroir peut se déployer dans l’espace sans altérer son fonctionnement, ni celui de ses instruments de mesure.
James-Webb, star de la révolution astrale et scientifique
L’étude des exoplanètes
Une exoplanète est une planète qui tourne autour d’une étoile en-dehors de notre Système solaire. Depuis 1995, plus de 5 000 exoplanètes ont été détectées. Certaines détiennent des propriétés physico-chimiques intéressantes, c’est pourquoi James-Webb s’est penché sur la composition de l’exoplanète WASP-96b, évoluant dans la constellation du Phénix.
Elle a été découverte en 2014 et est située à 1 150 années-lumière de la Terre. Composée en majeure partie de gaz, sa température dépasse les 500 °C, car elle orbite très près de son étoile hôte. Cependant, JWST a su révéler la structure moléculaire de l’atmosphère de l’exoplanète. Elle détient des traces d’eau et l’équivalent de nuages et de brume.
Même si le télescope Hubble a été capable, lui aussi, de découvrir une signature d’H2O en 2013 pour une autre exoplanète, JWST se démarque par l’analyse très précise de WASP-96b. Les chercheurs confirment qu’il est capable de décomposer la lumière d’une exoplanète et de fournir un rapport détaillé des différents gaz présents dans son atmosphère. Il sera donc en mesure de détecter un environnement similaire à celui de notre planète bleue, même situé à des milliers d’années-lumière.
Trappist-1 : un système exoplanétaire très prometteur
Dans la constellation du Verseau, un système exoplanétaire, nommé Trappist-1, retient toute l’attention des astronomes. Situé à environ 40 années-lumière de la Terre, il est composé d’une naine rouge, une étoile très commune dans le paysage stellaire. Elle abrite 7 exoplanètes de taille et de masse comparables à la Terre. Trois d’entre elles gravitent dans la zone d’habitabilité de leur étoile, c’est-à-dire une zone théorique, où, selon les modèles astrophysiques, la température peut permettre à l’eau de rester à l’état liquide à leur surface. En effet, les recherches ont montré qu’elles étaient telluriques, autrement dit rocheuses et qu’elles pourraient disposer d’éléments chimiques nécessaires à l’émergence du vivant.
Découvert en 2015 par le télescope belge TRAPPIST (the TRAnsiting Planets and Planetesimals Small Telescope), il s’agit à ce jour du seul système exoplanétaire rocheux découvert dans le cosmos. Cependant, il n’existe encore aucune information concrète concernant la composition atmosphérique de ces astres. James-Webb va alors tenter d’apporter des réponses. Il a été prévu que le système Trappist-1 fasse l’objet de 11 % des observations du télescope spatial. Il sera notamment à la recherche de bio-signatures, c’est-à-dire des molécules chimiques comme le méthane et l’oxygène, deux éléments chimiques nécessaires pour que se développe le vivant, comme sur Terre.
De nouvelles pistes pour comprendre les trous noirs supermassifs ?
JWST a fourni des photos spectaculaires dont un cliché aux détails inédits du Quintette de Stephan. Il s’agit d’un groupement de 5 galaxies évoluant dans la constellation Pégase :
- NGC 7320 est située à 40 millions d’années-lumière de la Terre.
- NGC 7317, NGC 7318A, NGC 7318B et NGC 7319 sont éloignées d’environ 290 millions d’années-lumière de la Terre.
Ces 4 dernières sont particulièrement actives du fait de leurs interactions gravitationnelles, engendrant des sillons d’étoiles, de gaz et de poussière. En outre, Webb est parvenu à capturer une image de la collision des galaxies NGC 7318B et NGC 7318A. À terme, elles sont vouées à n’en former plus qu’une seule.
Par ailleurs, la galaxie NGC 7319 abrite un noyau actif de galaxie, c’est-à-dire un trou noir supermassif qui capte activement de la matière. Sa masse est estimée à 24 millions de fois celle du Soleil.
Les chercheurs s’intéressent beaucoup aux quasars, de jeunes galaxies comptant de nombreuses étoiles et de grandes quantités de poussières. Ils sont caractérisés par leur distance très lointaine de la Terre et l’énergie phénoménale qui émane de leur trou noir situé au centre de la galaxie. La puissance du quasar absorbe la matière proche qui aurait pu constituer de nouvelles étoiles. Or, l’observation de ce phénomène et l’impact des quasars sur leur galaxie hôte reste un mystère non élucidé à ce jour dans l’histoire de l’astronomie moderne. Les prouesses du télescope James-Webb pourraient bien, là encore, changer la donne.
HELLO, Un Grand Merci pour votre Partage!!! Énorme Richesse D’informations! Superbes images de notre UNIVERS ……. Bravo et Félicitations
David P.
Bonjour David ! Merci pour ton commentaire, ça fait vraiment plaisir ! Bonne navigation sur l’Odyssée de la Terre 🙂 !
Félicitations et Merci, Bravo